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02/07/2015 | FRANCE | N°13-28893

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 juillet 2015, 13-28893


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 18 novembre 2013), que M. X..., salarié protégé, notamment en tant que membre du comité d'entreprise de la caisse régionale du Crédit agricole mutuel de Guadeloupe (CRCAM), a été licencié pour faute le 15 mai 2012 ; que par un jugement du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a prononcé l'annulation des décisions du 20 avril 2012 par lesquelles le ministre du travail avait autorisé son licenciement ; que par une lettre du 26 juin 2013, il a sollicitÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 18 novembre 2013), que M. X..., salarié protégé, notamment en tant que membre du comité d'entreprise de la caisse régionale du Crédit agricole mutuel de Guadeloupe (CRCAM), a été licencié pour faute le 15 mai 2012 ; que par un jugement du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a prononcé l'annulation des décisions du 20 avril 2012 par lesquelles le ministre du travail avait autorisé son licenciement ; que par une lettre du 26 juin 2013, il a sollicité sa réintégration ; que par une lettre du 3 juillet 2013, l'employeur lui a répondu que sa réintégration était de plein droit effective à compter du jour même et qu'il devait se présenter à son poste dès le lendemain ; que le 4 juillet 2013, le salarié a reçu la notification d'une convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute ainsi qu'une mise à pied conservatoire ; qu'il a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins notamment d'obtenir sa réintégration ;
Attendu que la CRCAM fait grief à l'arrêt d'ordonner la réintégration du salarié, alors, selon le moyen :
1°/ que si le salarié protégé, dont la décision d'autorisation de licenciement prise par le ministre compétent est annulée par le juge administratif, a droit à être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent, l'employeur exécute son obligation de réintégration en lui demandant de reprendre son poste, peu important que le jour de sa réintégration, il fasse usage de son pouvoir disciplinaire en le convoquant à un entretien préalable à un licenciement et en le mettant à pied à titre conservatoire ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt qu'après que le salarié protégé a sollicité sa réintégration, l'employeur lui a répondu le 3 juillet 2013 que sa réintégration de plein droit était effective à compter du jour même et qu'il devait se présenter à son poste dès le lendemain, que le salarié qui s'était présenté dans l'entreprise le lendemain s'était vu signifier par acte d'huissier du 4 juillet 2013 sa convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute assortie d'une mise à pied conservatoire, et qu'ayant regagné son poste de travail, il lui avait été demandé de quitter les lieux ; qu'en déduisant de ces circonstances que l'employeur n'avait pas réintégré le salarié dans son emploi, ce qui constituait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les articles L. 1332-3, L. 2422-1 et R. 1455-6 du code du travail ;
2°/ que le juge des référés, qui est incompétent pour se prononcer sur l'annulation d'une sanction disciplinaire irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée, ne peut davantage se prononcer sur le bien-fondé d'une simple mise à pied conservatoire qui ne constitue pas une sanction ; qu'en se prononçant sur le bien-fondé de la mise à pied conservatoire prononcée à l'encontre du salarié pour considérer que son absence de réintégration immédiate constitue un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du code du travail ;
3°/ qu'en tout état de cause les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions claires et précises des parties ; que dans ses conclusions d'appel du 7 octobre 2013 reprises à l'audience, l'employeur justifiait la mise à pied conservatoire signifiée au salarié le 4 juillet 2013 par les récents faits de harcèlement moral dénoncés par M. Y...par lettre du 1er juillet 2013, à savoir les menaces de mort dont il avait été récemment victime de la part de M. X...et pour lesquelles deux plaintes avaient été déposées ; qu'en jugeant en substance qu'à l'appui de cette mise à pied conservatoire, l'employeur imputait au salarié des violences qui avaient déjà fait l'objet de poursuites à caractère disciplinaire, la dernière en date étant le licenciement du 15 mai 2012, de sorte qu'il était mal fondé à invoquer cette violence à l'appui d'une nouvelle sanction, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur qui n'invoquaient nullement ces faits anciens à l'appui de la mise à pied conservatoire, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; que dans sa lettre du 1er juillet 2013 adressée à l'employeur, M. Y...dénonçait le harcèlement moral dont il faisait l'objet de la part de M. X...en faisant principalement état des menaces de mort qu'il avait « récemment » proférées à son encontre et à l'encontre de sa famille ; qu'en jugeant que l'essentiel des griefs invoqués par M. Y...dans cette lettre étaient anciens, antérieurs au licenciement de M. X...et remontaient à plus d'une année avant sa demande de réintégration, de sorte qu'ils ne pouvaient valablement être invoqués pour s'opposer à sa réintégration effective au sein de l'entreprise, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette lettre qui invoquait essentiellement des griefs récents, en violation de l'article 1134 du code civil ;
5°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que dans ses écritures d'appel, l'employeur justifiait la mise à pied conservatoire de M. X...par les menaces de mort qu'il avait proférées à l'encontre de M. Y..., lequel avait déposé deux plaintes à la suite de ces agissements, qu'il avait versé aux débats et invoqué dans ses conclusions ces deux plaintes pénales déposées le 13 avril 2013 et le 18 juin 2013 ; qu'en jugeant que l'employeur n'avait nullement versé aux débats ces deux plaintes, ce qui l'empêchait d'examiner le caractère réel et sérieux des faits reprochés à M. X...postérieurs à son licenciement, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces deux plaintes invoquées dans les écritures de l'employeur, qui figuraient sur le bordereau de communication de pièces annexé à ses conclusions d'appel, et dont la production n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
6°/ que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, doit prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral et assurer la sécurité de ses salariés ; qu'il doit prendre ces mesures dès qu'il a connaissance de l'exposition de son salarié à un risque pour sa santé ou sa sécurité ou de l'existence éventuelle de faits de harcèlement moral sans attendre que ces faits soient établis ou que ce risque se réalise ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que l'employeur a mis à pied à titre conservatoire M. X..., le 4 juillet 2013, après avoir reçu une lettre du 1er juillet 2013 de son directeur général adjoint, M. Y..., dénonçant le harcèlement moral et les menaces de mort dont il avait récemment été victime de sa part et pour lesquelles il avait déposé plainte ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une telle mesure de mise à pied conservatoire sans avoir démontré la réalité des faits reprochés lorsque l'employeur devait mettre à l'écart M. X...dès qu'il avait eu connaissance de l'existence éventuelle des faits de harcèlement moral et des menaces de morts qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du code du travail ;
7°/ que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, doit prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral et assurer la sécurité de ses salariés ; que dès lors qu'il est informé qu'un de ses salariés fait l'objet de menaces de mort de la part d'un autre salarié, il doit prendre les mesures qui s'imposent pour le protéger, peu important que ces menaces aient été proférées en dehors du cadre du travail ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que l'employeur a mis à pied à titre conservatoire M. X..., le 4 juillet 2013, après avoir reçu une lettre du 1er juillet 2013 de son directeur général adjoint, M. Y..., expliquant le caractère insupportable de sa réintégration compte tenu du harcèlement moral et des menaces de mort dont il avait récemment été victime de sa part ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une telle mesure de mise à pied conservatoire aux prétextes inopérants que cette " animosité " ne s'était exprimée que lors de la pratique de loisir, en dehors de tout cadre de travail et alors que la relation de travail était rompue depuis de nombreux mois, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du code du travail ;
8°/ que le fait pour un salarié de proférer à plusieurs reprises des menaces de mort à l'encontre d'un autre salarié constitue des actes de harcèlement moral devant être réprimés par l'employeur, même si ces agissements ont eu lieu en dehors du temps et du lieu de travail ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une mesure de mise à pied conservatoire à l'encontre de M. X...au prétexte que les menaces de mort qu'il avait proférées à l'encontre d'un autre salarié s'étaient produites lors de la pratique de loisir, en dehors de tout cadre de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du code du travail ;
9°/ que la seule absence de concordance entre la date de la lettre de dénonciation des faits de harcèlement moral et la date du certificat médical joint à cette lettre ne permet pas de déduire que les faits dénoncés ne sont pas établis ; qu'en déduisant de ce que la date de la lettre du 1er juillet 2013 de M. Y...dénonçant des faits de harcèlement moral ne concordait pas avec la date du 3 juillet 2013 du certificat médical qui y était joint la conclusion que les agissements dénoncés n'étaient pas établis et ne pouvaient justifier la mise à pied conservatoire prononcée ultérieurement par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en application de l'article L. 2422-1 du code du travail et en conséquence de la décision du tribunal administratif du 20 juin 2013 annulant l'autorisation ministérielle de licenciement du salarié, celui-ci pouvait se prévaloir d'une réintégration de plein droit dans son emploi et retenu, par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que la mise à pied conservatoire mise en oeuvre par l'employeur ne reposait que sur des faits très anciens, les faits de harcèlement moral dénoncés par la lettre du directeur général adjoint du 1er juillet 2013 n'étant pas établis et leur utilisation par l'employeur relevant d'une manoeuvre ayant pour but de s'opposer abusivement à la réintégration effective du salarié, la cour d'appel en a exactement déduit, dans les limites de ses pouvoirs et sans dénaturation ni violation du principe de la contradiction, que l'impossibilité pour le salarié d'obtenir sa réintégration constituait un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CRCAM de Guadeloupe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la CRCAM de Guadeloupe et condamne celle-ci à payer à M. X...la somme de 2 200 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Guadeloupe
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR ordonné la réintégration de M. X...dans son emploi au sein de la CRCAM sous astreinte de 500 euros par jour, passé le délai de 2 jours ouvrables à compter de la notification de la présente décision, de s'être réservé le droit de liquider l'astreinte, et de l'AVOIR condamnée à lui verser la somme de 2. 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'article R. 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite ; que l'article L. 2422- l du code du travail dispose que lorsque le juge administratif annule la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent ; que cette disposition s'applique notamment au salarié membre élu du comité d'entreprise, tel est le cas de M. X...; qu'en application de ce texte, et en conséquence de la décision du 20 juin 2013 du tribunal administratif annulant l'autorisation ministérielle de licenciement de M. X..., celui-ci pouvait se prévaloir d'une réintégration de plein droit dans son emploi ou dans un emploi équivalent au sein de la CRCAM ; qu'il convient de constater que la réintégration de M. X...au sein de la CRCAM n'a pu être effective, puisque le 4 juillet 2013, jour où le salarié s'est présenté, comme le lui permettait le courrier de la veille de son employeur, à l'agence où il devait reprendre ses fonctions, il lui a été signifié par voie d'huissier non seulement qu'une procédure de licenciement pour faute était envisagée à son égard mais qu'il faisait également l'objet d'une mesure de mise à pied conservatoire, l'intéressé ayant même fait l'objet d'une injonction de quitter les lieux ; qu'en effet l'employeur apprenant que M. X...avait regagné son poste de travail, faisait dresser par Me Z..., huissier de justice, un procès-verbal de constat dans lequel il est mentionné que cet huissier a demandé au salarié « pourquoi il n'a pas obtempéré à l'injonction qui lui a été faite de quitter les lieux ce matin », le salarie répondant qu'il n'avait pas bien lu le courrier et n'avait pas fait attention à cette mention, laquelle ne figure d'ailleurs pas dans le courrier de l'employeur signifié par huissier ; qu'ainsi compte tenu des dispositions prises par l'employeur, il n'y a pas eu de réintégration effective de M. X...dans son emploi ; que la mise à pied conservatoire signifiée à M. X..., est justifiée, selon l'employeur, par le comportement violent de M. X..., et par la dénonciation de faits de harcèlement moral par le directeur général adjoint, M. Y...; qu'il y a lieu de rappeler que M. X...a quitté l'entreprise depuis le 15 mai 2012, date du licenciement annulé, et que les violences imputées au salarié ont déjà fait l'objet de poursuites à caractère disciplinaire, la dernière en date étant le licenciement du 15 mai 2012 qui a été annulé ; que l'employeur est mal fondé à invoquer cette violence à l'appui d'une nouvelle sanction ; que par ailleurs le salarié ayant été absent de l'entreprise pendant plus d'un an, l'employeur est mal fondé à invoquer un harcèlement moral à l'encontre de son directeur général adjoint ; que dans son courrier de dénonciation datée du 1er juillet 2013, M. Y..., directeur général adjoint explique que la situation qui résulterait de la demande de réintégration de M. X..., serait insupportable psychologiquement, en tant que directeur adjoint salarié, compte tenu du harcèlement dont il serait l'objet et des menaces de mort dont il aurait été victime récemment ; qu'il fait état de deux plaintes qu'il aurait déposées, et qu'il aurait jointes à son courrier ; qu'il évoque le conflit qui oppose la caisse régionale à M.
X...
, dans le cadre duquel il serait victime d'un véritable harcèlement moral de la part de celui-ci, et qui a conduit d'ailleurs la direction de la caisse à agir devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre ; qu'il y a lieu de constater que les faits de harcèlement dont se plaint M. Y..., ont été subis dans le cadre du conflit qui a opposé la CRCAM à M. X...; que manifestement, à supposer qu'il y ai eu des faits de harcèlement dans ce cadre-là, il s'agit de faits anciens, antérieurs au licenciement du 15 mai 2012 ; que par ailleurs il est fait état d'une action en référé devant le Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre, laquelle remonte au 8 juin 2012 ; qu'ainsi l'essentiel des griefs invoqués par le directeur général adjoint sont anciens et remontent à plus d'une année antérieurement à la demande de réintégration ; que ces faits ne sauraient être valablement invoqués pour s'opposer à la réintégration effective de M. X...au sein de l'entreprise ; qu'il y a lieu de constater en outre que les deux plaintes que M. Y...aurait formalisées, et qui auraient été jointes à son courrier du 1er juillet 2013, ne sont nullement versées aux débats, si bien qu'il ne peut être examiné le caractère réel et sérieux des faits reprochés à M. X..., postérieurs à son licenciement ; qu'il a été évoqué au cours des débats des insultes et des menaces de mort que M. X...aurait proférées à l'encontre de M. Y...au cours de séances de jogging sur la commune du Gosier ; qu'il a été précisé oralement que ces plaintes remonteraient pour l'une au mois de mai, et la seconde au 19 juin 2013, sans qu'aucun document n'en atteste ; qu'à supposer que ces plaintes aient été réellement déposées, il n'est nullement démontré que la réalité des faits reprochés soit établie ; qu'en tout état de cause, il est bien certain que si de façon fortuite M. Y...a pu rencontrer M. X...au cours de la pratique de ses loisirs, et que celui a pu manifester une certaine animosité à l'égard de celui-là, lequel est à l'origine des poursuites disciplinaires antérieurement diligentées, dont aucune n'a pu aboutir jusqu'à maintenant à un licenciement validé, cette animosité s'est exprimée en dehors de tout cadre de travail et alors que la relation de travail était rompue depuis de nombreux mois : qu'il apparaît ainsi que les griefs invoqués par le directeur général adjoint sont inconsistants, et que leur utilisation par l'employeur relève de manoeuvre ayant pour but de s'opposer abusivement à la réintégration effective du salarié ; qu'au demeurant la dénonciation de M. Y...apparaît relever d'un montage réalisé pour les besoins de la cause, puisque son courrier daté du 1er juillet 2013, mentionne qu'il y est joint un certificat médical et les plaintes déposées à l'encontre de M. X..., alors que le certificat médical produit n'a été délivré à l'intéressé que le 3 juillet 2013 ; qu'au demeurant il est fait état dans ce certificat médical d'une anxiété intense " en rapport avec des faits survenus sur son lieu travail ", l'intéressé présentant « un certain nombre de plaintes somatiques en rapport avec cet état d'ancienneté d'anxiété » ; qu'il y a lieu de constater que l'état d'anxiété est en rapport avec des faits survenus sur le lieu travail, c'est-à-dire nécessairement survenus depuis plus d'un an puisque M. X...a quitté l'entreprise depuis le 15 mai 2012 ; que par ailleurs cc certificat médical mentionne des " plaintes somatiques ", ce qui signifie qu'il s'agit de troubles somatiques allégués par M. Y..., non constatés médicalement ; qu'en outre il y a lieu de tirer les conclusions résultant de la constatation de la non concordance entre la date de la lettre de dénonciation de M. Y...et le certificat médical établi postérieurement, et de l'absence de justification aux débats des plaintes annoncées dans ce courrier ; que de deux choses l'une, ou bien le courrier de dénonciation de M. Y...est réellement du 1er juillet 2013, et anticipe sur l'existence d'un certificat médical qu'il entend se faire délivrer, faisant état en outre de l'envoi de plaintes qu'il n'est pas en mesure de produire, ou bien ce courrier visant un certificat médical qui n'a été établi que le 3 juillet 2013, n'a été rédigé qu'à cette date, jour auquel la direction de la caisse a reçu la demande de réintégration de M. X...; que le caractère précipité et maladroit, car incohérent, des justificatifs que la direction de la caisse a tenté de rassembler pour motiver la mesure de mise à pied conservatoire, ôte tout sérieux et toute crédibilité aux motifs avancés pour justifier cette mesure ; qu'il y a lieu en conséquence de relever qu'il a été fait obstacle à la réintégration effective du salarié protégé au sein de l'entreprise, par la mise en oeuvre d'une mise à pied conservatoire ne reposant que sur des faits très anciens, les faits de harcèlement moral ne pouvant être sérieusement retenus dans la mesure où M. X...avait quitté l'entreprise depuis plus d'un an ; qu'en l'état de ces constatations, l'impossibilité pour M. X...d'obtenir sa réintégration effective qui lui est due de plein droit, constitue un trouble manifestement illicite, qu'il convient de faire cesser ; qu'en conséquence il y a lieu d'ordonner la réintégration de M. X...dans son emploi au sein de la CRCAM (¿) : que comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X...les frais irrépétibles qu'il a exposés, il lui sera alloué la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
1°- ALORS QUE si le salarié protégé, dont la décision d'autorisation de licenciement prise par le ministre compétent est annulée par le juge administratif, a droit à être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent, l'employeur exécute son obligation de réintégration en lui demandant de reprendre son poste, peu important que le jour de sa réintégration, il fasse usage de son pouvoir disciplinaire en le convoquant à un entretien préalable à un licenciement et en le mettant à pied à titre conservatoire ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt qu'après que le salarié protégé a sollicité sa réintégration, l'employeur lui a répondu le 3 juillet 2013 que sa réintégration de plein droit était effective à compter du jour même et qu'il devait se présenter à son poste dès le lendemain, que le salarié qui s'était présenté dans l'entreprise le lendemain s'était vu signifier par acte d'huissier du 4 juillet 2013 sa convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute assortie d'une mise à pied conservatoire, et qu'ayant regagné son poste de travail, il lui avait été demandé de quitter les lieux ; qu'en déduisant de ces circonstances que l'employeur n'avait pas réintégré le salarié dans son emploi, ce qui constituait un trouble manifestement illicite, la Cour d'appel a violé les articles L. 1332-3, L. 2422-1 et R. 1455-6 du Code du travail.
2°- ALORS QUE le juge des référés, qui est incompétent pour se prononcer sur l'annulation d'une sanction disciplinaire irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée, ne peut pas davantage se prononcer sur le bien-fondé d'une simple mise à pied conservatoire qui ne constitue pas une sanction ; qu'en se prononçant sur le bien-fondé de la mise à pied conservatoire prononcée à l'encontre du salarié pour considérer que son absence de réintégration immédiate constitue un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du Code du travail.
3°- ALORS en tout état de cause QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions claires et précises des parties ; que dans ses conclusions d'appel du 7 octobre 2013 reprises à l'audience, l'employeur justifiait la mise à pied conservatoire signifiée au salarié le 4 juillet 2013 par les récents faits de harcèlement moral dénoncés par Monsieur Y...par lettre du 1er juillet 2013, à savoir les menaces de mort dont il avait été récemment victime de la part de Monsieur X...et pour lesquelles deux plaintes avaient été déposées (cf. ses conclusions d'appel, p. 4, § 10, p. 14, § 5, p. 19 § 6 et s. p. 20, p. 25, § 2) ; qu'en jugeant en substance qu'à l'appui de cette mise à pied conservatoire, l'employeur imputait au salarié des violences qui avaient déjà fait l'objet de poursuites à caractère disciplinaire, la dernière en date étant le licenciement du 15 mai 2012, de sorte qu'il était mal fondé à invoquer cette violence à l'appui d'une nouvelle sanction, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur qui n'invoquaient nullement ces faits anciens à l'appui de la mise à pied conservatoire, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.
4°- ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; que dans sa lettre du 1er juillet 2013 adressé à l'employeur, Monsieur Y...dénonçait le harcèlement moral dont il faisait l'objet de la part de Monsieur X...en faisant principalement état des menaces de mort qu'il avait « récemment » proférées à son encontre et à l'encontre de sa famille ; qu'en jugeant que l'essentiel des griefs invoqués par Monsieur Y...dans cette lettre étaient anciens, antérieurs au licenciement de Monsieur X...et remontaient à plus d'une année avant sa demande de réintégration, de sorte qu'ils ne pouvaient valablement être invoqués pour s'opposer à sa réintégration effective au sein de l'entreprise, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette lettre qui invoquait essentiellement des griefs récents, en violation de l'article 1134 du Code civil.
5°- ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que dans ses écritures d'appel, l'employeur justifiait la mise à pied conservatoire de Monsieur X...par les menaces de mort qu'il avait proféré à l'encontre de Monsieur Y..., lequel avait déposé deux plaintes à la suite de ces agissements (cf. ses conclusions d'appel, p. 20), qu'il avait versé aux débats et invoqué dans ses conclusions ces deux plaintes pénales déposées le 13 avril 2013 et le 18 juin 2013 ; qu'en jugeant que l'employeur n'avait nullement versé aux débats ces deux plaintes, ce qui l'empêchait d'examiner le caractère réel et sérieux des faits reprochés à Monsieur X...postérieurs à son licenciement, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces deux plaintes invoquées dans les écritures de l'employeur, qui figuraient sur le bordereau de communication de pièces annexé à ses conclusions d'appel, et dont la production n'avait pas été contestée, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
6°- ALORS QUE l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, doit prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral et assurer la sécurité de ses salariés ; qu'il doit prendre ces mesures dès qu'il a connaissance de l'exposition de son salarié à un risque pour sa santé ou sa sécurité ou de l'existence éventuelle de faits de harcèlement moral sans attendre que ces faits soient établis ou que ce risque se réalise ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que l'employeur a mis à pied à titre conservatoire Monsieur X..., le 4 juillet 2013, après avoir reçu une lettre du 1er juillet 2013 de son directeur général adjoint, Monsieur Y..., dénonçant le harcèlement moral et les menaces de mort dont il avait récemment était victime de sa part et pour lesquelles il avait déposé plainte ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une telle mesure de mise à pied conservatoire sans avoir démontré la réalité des faits reprochés lorsque l'employeur devait mettre à l'écart Monsieur X...dès qu'il avait eu connaissance de l'existence éventuelle des faits de harcèlement moral et des menaces de morts qui lui étaient reprochés, la Cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du Code du travail.
7°- ALORS QUE l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, doit prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral et assurer la sécurité de ses salariés ; que dès lors qu'il est informé qu'un de ses salariés fait l'objet de menaces de mort de la part d'un autre salarié, il doit prendre les mesures qui s'imposent pour le protéger, peu important que ces menaces aient été proférés en dehors du cadre du travail ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que l'employeur a mis à pied à titre conservatoire Monsieur X..., le 4 juillet 2013, après avoir reçu une lettre du 1er juillet 2013 de son directeur général adjoint, Monsieur Y...expliquant le caractère insupportable de sa réintégration compte tenu du harcèlement moral et des menaces de mort dont il avait récemment était victime de sa part ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une telle mesure de mise à pied conservatoire aux prétextes inopérants que cette " animosité " ne s'était exprimée que lors de la pratique de loisir, en dehors de tout cadre de travail et alors que la relation de travail était rompue depuis de nombreux mois, la Cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du Code du travail.
8°- ALORS QUE le fait pour un salarié de proférer à plusieurs reprises des menaces de mort à l'encontre d'un autre salarié constitue des actes de harcèlement moral devant être réprimés par l'employeur, même si ces agissements ont eu lieu en dehors du temps et du lieu de travail ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir mis en oeuvre une mesure de mise à pied conservatoire à l'encontre de Monsieur X...au prétexte que les menaces de mort qu'il avait proférées à l'encontre d'un autre salarié s'étaient produites lors de la pratique de loisir, en dehors de tout cadre de travail, la Cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du Code du travail.
9°- ALORS QUE la seule absence de concordance entre la date de la lettre de dénonciation des faits de harcèlement moral et la date du certificat médical joint à cette lettre ne permet pas de déduire que les faits dénoncés ne sont pas établis ; qu'en déduisant de ce que la date de la lettre du 1er juillet 2013 de Monsieur Y...dénonçant des faits de harcèlement moral ne concordait pas avec la date du 3 juillet 2013 du certificat médical qui y était joint la conclusion que les agissements dénoncés n'étaient pas établis et ne pouvaient justifier la mise à pied conservatoire prononcée ultérieurement par l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28893
Date de la décision : 02/07/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 18 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 jui. 2015, pourvoi n°13-28893


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28893
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