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01/07/2015 | FRANCE | N°14-18709

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 01 juillet 2015, 14-18709


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1888 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 29 juin 1996, la société civile immobilière de la Colombe (la SCI), constituée par Jean-Pierre Y... et Mme Florence Y..., sa fille, a acquis un appartement à Paris appartenant à Mme X..., vivant maritalement avec Jean-Pierre Y... ; que par décision du 15 décembre 1998, les associés de la SCI ont voté à l'unanimité la mise à disposition gratuite de cet appartement au pro

fit de Mme X..., à charge pour elle d'en régler tous les frais ; que, depu...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1888 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 29 juin 1996, la société civile immobilière de la Colombe (la SCI), constituée par Jean-Pierre Y... et Mme Florence Y..., sa fille, a acquis un appartement à Paris appartenant à Mme X..., vivant maritalement avec Jean-Pierre Y... ; que par décision du 15 décembre 1998, les associés de la SCI ont voté à l'unanimité la mise à disposition gratuite de cet appartement au profit de Mme X..., à charge pour elle d'en régler tous les frais ; que, depuis le décès de Jean-Pierre Y..., survenu le 4 novembre 2007, les parts de la SCI sont détenues par Mme Florence Y... et M. Bruno Y... et par Mme Sylvie X..., disposant de la majorité de ces parts, et les cogérants en sont Mme Y... et Mme X...; que les consorts Y... et la SCI, représentée par Mme Y..., souhaitant qu'il soit mis fin à cette mise à disposition à titre gratuit, malgré l'opposition de Mme X..., ont sollicité l'expulsion de celle-ci ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, après avoir relevé que la mise à disposition de l'appartement à titre gratuit constituait un prêt à usage, l'arrêt retient que lorsqu'aucun terme n'a été convenu, sans qu'aucun terme naturel soit prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable et que la SCI a manifesté sans équivoque sa volonté d'y mettre fin par son assignation et ses écritures subséquentes ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme il lui était demandé, la SCI n'avait pas entendu, le 15 décembre 1998, convenir d'une mise à disposition de l'appartement jusqu'au décès de Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme Florence Y..., M. Bruno Y... et la SCI de la Colombe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Florence Y..., M. Bruno Y... et la SCI de la Colombe à payer à Mme X...la somme globale de 3 500 euros ; rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Mme X...a bénéficié d'un délai de préavis raisonnable pour quitter les lieux, d'avoir ordonné son expulsion de l'appartement situé 20 rue de Verneuil dans le 7e arrondissement de Paris dans les six mois de la signification de l'arrêt, de l'avoir condamnée à payer à la S. C. I. de la Colombe une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 3 150 ¿, charges comprises, à compter de l'arrêt et jusqu'à libération effective des lieux et de l'avoir encore condamnée à payer aux consorts Y... et à la S. C. I. de la Colombe la somme de 3 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'« à l'unanimité de ses associés, la SCI, lors de l'assemblée générale du 15 décembre 1998, a décidé de mettre gratuitement à la disposition de Mme Sylvie X..., l'appartement du (20) rue de Verneuil ; que cette décision votée à l'initiative de Jean Pierre Y..., avait pour but d'assurer l'hébergement du couple qu'il formait avec Mme Sylvie X...dans l'appartement qui avait été la propriété de celle ci ; que cette mise à disposition doit juridiquement s'analyser en un prêt à usage, l'obligation pour Mme Sylvie X...de « faire son affaire des frais engendrés par cet appartement soit : l'impôt foncier, les charges locatives, les charges de copropriété et tout autres dépenses qui pourraient apparaître par la suite en fonction des changements qui pourraient se produire dans la législation » n'étant pas de nature à remettre en cause son caractère essentiel de gratuité ; (¿) qu'il est de l'essence même du prêt à usage que le preneur rende la chose prêtée après s'en être servie ; que lorsqu'aucun terme n'a été convenu, sans qu'aucun terme naturel soit prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable ; qu'en l'espèce il n'existe aucune délibération prise en assemblée générale décidant de mettre fin à la mise à disposition dont bénéficie l'intimée, peu important dès lors les conditions de vote auxquelles elle aurait dû obéir, alors qu'il vient d'être constaté que les appelants ont renoncé à demander à cette cour qu'elle se prononce sur la nullité de la résolution n° 1 de l'assemblée générale du 16 mars 2010 portant sur la reconduction de la mise à disposition de l'appartement litigieux ; que cependant par son assignation et ses écritures subséquentes, tant devant le tribunal que devant cette cour, la SCI a manifesté sans équivoque sa volonté d'y mettre fin ; que dès lors que l'assignation a été délivrée à Mme Sylvie X...par acte du 20 juin 2011, il doit être retenu que celle ci a ainsi bénéficié d'un délai raisonnable pour quitter les lieux ; que son expulsion sera en conséquence ordonnée ; qu'elle devra en conséquence quitter l'appartement dont s'agit dans les 6 mois de la signification de la présente décision et régler jusqu'à son départ effectif une indemnité d'occupation qu'il convient de fixer, eu égard à l'attestation du 19 novembre 2009 fournie par la société Century 21 sur la valeur locative de ce bien, à la somme mensuelle de 3 150 euros, charges comprises » ;
1°) ALORS QUE, si, lorsqu'aucun terme n'a été convenu pour le prêt d'une chose d'un usage permanent, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable, il en va autrement lorsque la convention prévoit un terme naturel prévisible ; qu'en retenant, pour dire que Mme X...avait bénéficié d'un délai de préavis raisonnable pour quitter le bien immobilier appartenant à la S. C. I. de la Colombe, ordonner son expulsion et la condamner à payer une indemnité d'occupation mensuelle à hauteur de 3 150 euros à compter de la décision jusqu'à libération effective des lieux, que la mise à disposition gratuite, au profit de Mme X..., du bien immobilier situé au 20 rue de Verneuil dans le 7e arrondissement de Paris, n'était affectée d'aucun terme exprès ou tacite, sans rechercher si, en l'état d'une mise à disposition de l'appartement réservée à Mme X..., son décès ne constituait pas un terme naturel prévisible affectant ladite mise à disposition, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1888 du code civil ;
2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé et que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant d'une part, que la mise à disposition gratuite de cet appartement au profit de Mme X...par la délibération unanime du 15 décembre 1998 n'était affectée d'aucun terme exprès ou tacite et, d'autre part, que cette délibération avait pour but d'assurer l'hébergement du couple formé par Jean-Pierre Y... et Mme X..., ce dont il résultait que ladite mise à disposition aurait été affectée d'un terme qui serait survenu lors du décès de Jean-Pierre Y..., la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en retenant que Mme X...avait rejeté, lors de l'assemblée générale du 16 mars 2010 de la S. C. I. de la Colombe, une résolution portant sur la reconduction à compter du 1er janvier 2010 de la mise à disposition gratuite du bien immobilier situé 20 rue de Verneuil à son profit, s'y opposant pour défaut d'objet en raison de l'absence de terme fixé, quand Mme X...avait au contraire voté en faveur d'une telle résolution selon les mêmes conditions et charges que celles prévues dans le procès verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 1998, tout en observant néanmoins qu'une telle résolution lui paraissait sans objet alors que cette résolution initiale du 15 décembre 1998 ne comportait aucun terme extinctif au 31 décembre 2009, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du procès verbal de l'assemblée générale du 16 mars 2010 (prod. 2), en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°) ALORS QUE s'il y a plusieurs gérants au sein d'une société civile, ils exercent séparément leurs pouvoirs, sauf le droit qui appartient à chacun de s'opposer à une opération avant qu'elle ne soit conclue ; que s'agissant d'une action en justice intentée par un co-gérant, l'opposition d'un autre co-gérant doit, pour produire effet, intervenir antérieurement à la délivrance de l'assignation ; qu'en retenant que, par son assignation et ses écritures subséquentes, en première instance et en appel, la S. C. I. de la Colombe, représentée par Mme Y... ès qualités de cogérante, a manifesté sans équivoque sa volonté de mettre fin à la mise à disposition gratuite au profit de Mme X...du bien immobilier lui appartenant, quand le vote de cette dernière, co-gérante de la S. C. I. de la Colombe, lors de l'assemblée générale du 16 mars 2010 en faveur de la délibération portant sur la reconduction de cette mise à disposition, emportait opposition à ce que ladite S. C. I., représentée par l'autre co-gérante, l'assigne en cessation de cette mise à disposition, la cour d'appel a violé l'article 1848 du code civil ;
5°) ALORS QUE s'il y a plusieurs gérants au sein d'une société civile, ils exercent séparément leurs pouvoirs ; que dans le cadre d'un litige opposant notamment les co-gérants d'une société civile, aucune intention ne peut être prêtée à la société représentée par l'un de ses co-gérants ; qu'en l'espèce, en retenant que par son assignation et ses écritures subséquentes, en première instance et en appel, la S. C. I. de la Colombe, représentée par Mme Y... ès qualités de co-gérante, a manifesté sans équivoque sa volonté de mettre fin à la mise à disposition gratuite au profit de Mme X...du bien immobilier lui appartenant, la cour d'appel a violé l'article 1848 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-18709
Date de la décision : 01/07/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 01 jui. 2015, pourvoi n°14-18709


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Foussard, Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.18709
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