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01/07/2015 | FRANCE | N°14-12191

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 juillet 2015, 14-12191


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé à compter du 11 octobre 1993 par la société Jules Roy, aux droits de laquelle vient la société Schenker, commissionnaire en douane agréé, exerçant en dernier lieu les fonctions de chef d'équipe, a, après mise à pied conservatoire, été licencié par lettre du 26 mars 2010 pour faute grave ;
Attendu que pour dire ce licenciement sans cause réelle et sérieuse et

condamner en conséquence l'employeur à payer au salarié des dommages-intérêts, un ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé à compter du 11 octobre 1993 par la société Jules Roy, aux droits de laquelle vient la société Schenker, commissionnaire en douane agréé, exerçant en dernier lieu les fonctions de chef d'équipe, a, après mise à pied conservatoire, été licencié par lettre du 26 mars 2010 pour faute grave ;
Attendu que pour dire ce licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner en conséquence l'employeur à payer au salarié des dommages-intérêts, un rappel de salaire et les indemnités de rupture, l'arrêt retient que si ce dernier a emporté hors de l'entreprise des sacs et des blousons stockés dans l'entrepôt sous douane, il a agi avec l'autorisation de son supérieur hiérarchique, chef de quai, et sans prendre la précaution de se dissimuler alors qu'il savait que les lieux faisaient l'objet d'une vidéo-surveillance, de sorte qu'il en résulte un doute sur les pratiques en vigueur dans la société et que ce doute doit profiter au salarié ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le fait qu'une infraction a été commise par un salarié avec l'autorisation d'un supérieur hiérarchique ne retire pas à ses agissements leur caractère fautif et alors que l'appréhension de marchandises sous douane, même destinées à la destruction, par un salarié travaillant pour le compte d'un commissionnaire en douane, susceptible de faire perdre son agrément à cet employeur, constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Schenker
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une faute grave ni même sur une cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la société SCHENKER à lui verser les sommes de 36. 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1. 680 ¿ de rappel de salaire pour sa période de mise à pied, 6. 000 ¿ d'indemnité de préavis, 128, 34 ¿ de rappel au prorata de prime de vacances, 428 ¿ de rappel au prorata de prime de 13e mois, 824 ¿ de rappel de congés payés, 16. 285 ¿ d'indemnité conventionnelle de licenciement, 2. 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... admet avoir emporté des marchandises stockées dans l'entreprise, sacs et blousons, mais affirme qu'il avait l'autorisation de sa hiérarchie en la personne de son chef de quai, Monsieur Y... ; que la matérialité des faits n'étant pas contestée, c'est au salarié d'établir qu'il avait l'autorisation de sa hiérarchie ; qu'à cet effet, il communique l'attestation de M. Jean-Dominique Y..., que la circonstance qu'il ait également été licencié pour les mêmes faits ne suffit pas à rendre inopérante dans la relation de son rapport d'autorité avec M. X... ; qu'il atteste qu'alors leur responsable hiérarchique, il a autorisé « Hessen Sinore Gerome et Kardes X... » à emporter un sac de marchandises, ces marchandises appartenant à une société ayant déposé le bilan et étant destinées à la destruction ; qu'il ajoute, sans préciser leur fonction, que « Messieurs Jean-Luc Z... et Abde C... étaient parfaitement au courant et se sont servis auparavant » ; que les captures d'images des enregistrements opérés le 26 février 2010 dans le couloir de sortie de l'entreprise et l'entrée principale, dont la licéité n'est pas contestée, démontre que les trois salariés sont sortis en portant chacun un ou deux très volumineux sacs de voyage contenant des vêtements emballés, sacs que M. X... et M. D... ont apporté à l'audience du bureau de jugement ; que contrairement à ce que soutient l'employeur, le comportement de M. X... ne manifeste pas de manière évidente une volonté de dissimulation ; que notamment la circonstance que M. X... ait regardé par le trou de la serrure du bureau d'entrée alors que M. Jean-Dominique Y... s'y trouvait ne permet pas de déduire qu'il cherchait à échapper à une surveillance alors qu'il prétend que celui-ci se disputait avec son frère, ce qui a aiguisé sa curiosité ; qu'au contraire, il risquait d'être surpris dans cette posture équivoque ; que d'ailleurs il a ensuite franchi, juste avant M. Y..., avec difficulté tant ils étaient chargés, le tourniquet surveillé par des caméras ; qu'étant précisé que M. X... a soutenu que des distributions étaient parfois autorisées de 6 blousons par personne, les faits de l'espèce laissent planer un doute sur les pratiques en vigueur dans la société, doute qui, en application de l'article L. 1235-1 du Code du travail, doit profiter au salarié » ;
1°) ALORS QUE l'appréhension de marchandises « sous douane » par un salarié travaillant pour le compte d'un commissionnaire en douane constitue une faute d'une particulière gravité en ce qu'elle est susceptible de faire perdre son agrément à l'entreprise, peu important que les marchandises aient été destinées à la destruction ; que l'interdiction de s'approprier les marchandises sous douane est intrinsèque à l'activité de commissionnaire en douane et ne peut jamais faire l'objet de dérogation ni de tolérance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré qu'il était établi que Monsieur X... était parti avec un colis placé sous douane qui ne lui appartenait pas ; qu'en considérant qu'il n'avait cependant pas commis de faute au motif qu'il prétendait que son supérieur hiérarchique, Monsieur Jean-Dominique Y..., l'aurait autorisé à s'approprier ces biens, cependant qu'il ne pouvait ignorer qu'une telle « pratique » était nécessairement interdite et sans constater que Monsieur X... pouvait légitimement penser, malgré son ancienneté dans l'entreprise et les nombreuses notes de service en ce sens, que son supérieur, qui était simple chef de quai, avait le pouvoir de s'approprier et de disposer librement de biens « sous douanes », appartenant à un client de la société SCHENKER et entreposés dans ses locaux en sa qualité de commissionnaire en douanes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE le doute ne peut profiter au salarié que s'il est établi et incompressible, c'est-à-dire lorsque les juges du fond sont dans l'incapacité de trancher entre les thèses des deux parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le doute existant « sur les pratiques de l'entreprise » devait profiter à Monsieur X..., à raison de ce qu'il aurait « soutenu » que des distribution étaient parfois autorisées ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser aucun élément permettant de prouver les allégation de Monsieur X... sur l'existence et les modalités de telles distributions et de penser que le vol, expressément prohibé par le règlement intérieur de l'entreprise, et la libre disposition de biens détenus par la société SCHENKER en sa qualité de commissionnaire agréé en douanes, aient pu être considérés, bien qu'illicites et incompatibles avec les exigences de l'exercice de l'activité de commissionnaire en douanes, comme une « pratique » de l'entreprise et, partant, qu'un doute incompressible existait sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du Code du travail, ensemble l'article L. 1234-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-12191
Date de la décision : 01/07/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 jui. 2015, pourvoi n°14-12191


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.12191
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