LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Wanbaba Y...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de METZ, en date du 12 mars 2015, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de complicité d'abus de confiance et d'escroquerie en bande organisée, complicité de contrefaçon de chèques et usage, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 juin 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller SADOT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général GUEGUEN ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 144, 145, 145-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté la demande de nullité formée par le mis en examen ;
" aux motifs qu'il est constant que l'ordonnance dont appel, rendue à l'encontre de M. Y..., vise expressément les différents faits, commis dans la période du 18 mars 2013 au 18 mars 2014, pour lesquels M. Y... est effectivement mis en examen dans le cadre de la présente procédure ; que cette ordonnance a été rendue à l'issue d'un débat contradictoire dont le procès-verbal, récapitulant les chefs de mise en examen de M. Y..., révèle sans conteste qu'il n'existe pas davantage à ce stade d'inexactitude quant aux faits reprochés à M. Y... et quant à la procédure suivie, mention étant également faite de ce que le conseil de M. Y... a été entendu et que celui-ci a pu s'exprimer personnellement ; que ledit procès-verbal mentionne expressément qu'à l'issue des débats, M. Y... est informé de ce que par ordonnance motivée de ce jour sa détention provisoire est prolongée pour une durée de quatre mois ; que l'ordonnance litigieuse n'est pas exempte de toute motivation comme le soutient l'appelant, mais qu'il est exact que la motivation vise des faits qui ne sont pas ceux objets de la présente prévention ; qu'elle vise cependant également la situation personnelle de l'intéressé, notamment en rappelant ses diverses condamnations, pour en conclure qu'il existe un risque important de réitération des faits, ce qui constitue un élément de motivation objectif, que rien ne permet d'écarter comme ne pouvant se rapporter à la présente procédure ; que pour le surplus et s'il est exact qu'une partie de la motivation de l'ordonnance se réfère à des faits objets d'une autre information, il n'en demeure pas moins que l'effet dévolutif de l'appel a pour conséquence que se substituent aux motifs adoptés par les premiers juges les motifs propres à la chambre de l'instruction ;
" 1°) alors que le débat préalable à la prolongation de la détention provisoire doit se dérouler de manière contradictoire, le mis en examen devant être mis en mesure de discuter de l'ensemble des éléments justifiant la mesure de privation de liberté ; qu'il ressort des motifs de l'arrêt déféré que le débat contradictoire préalable a porté sur des faits distincts de ceux auxquels se réfèrent les motifs de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire ; qu'en se refusant à constater la nullité du débat contradictoire préalable et celle, subséquente, de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences de ses propres constations et a violé l'article 145 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors que l'arrêt attaqué a été rendu le 12 mars 2015 alors que l'ordonnance de placement en détention provisoire du 6 novembre 2014 avait cessé de produire ses effets ; que l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, qui a été prise en violation du principe du contradictoire et sans être suffisamment motivée, n'a pu valablement prolonger la détention du mis en examen à compter du 6 mars 2015, de sorte que son titre de détention a expiré à cette dernière date ; qu'en ne constatant pas l'absence de titre de détention du mis en examen et en n'ordonnant pas sa mise en liberté immédiate, la chambre de l'instruction a violé le droit à la liberté et à la sûreté de M. Y... ; que la cassation interviendra sans renvoi " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a ordonné la prolongation de la détention provisoire du mis en examen ;
" aux motifs que l'état de santé de M. Y..., s'il a pu être pris en considération lorsqu'il a été question de modifier un précédent contrôle judiciaire, lequel n'a jamais été révoqué, ne saurait aujourd'hui être considéré comme un obstacle majeur à sa détention, dès lors que, M. Y... peut avoir accès à tous les soins nécessités par son état ;
" alors que, informée des problèmes de santé de la personne dont la prolongation de la détention provisoire était envisagée, la chambre de l'instruction devait s'assurer de la disponibilité effective des soins médicaux requis par son état ; qu'en se bornant à constater l'accessibilité des soins sans faire état d'aucune vérification concrète de l'accès aux soins dans l'établissement pénitentiaire au sein duquel le mis en examen est détenu, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, la chambre de l'instruction, par des motifs partiellement substitués à ceux du juge des libertés et de la détention et après avoir relevé que le débat contradictoire devant ce magistrat avait bien porté sur les faits reprochés à M. Y..., a, comme elle le devait, examiné le bien fondé de la détention provisoire et statué sur la nécessité de cette mesure, dont elle a souverainement apprécié qu'elle était compatible avec l'état de santé du mis en examen, en se déterminant par des considérations de droit et de fait qui répondent aux exigences des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept juin deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.