LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 mars 2014),rendu en matière de référé, que la société Campenon Bernard construction (la société CBC), à qui l'association Groupe hospitalier Diaconesses Croix Saint-Simon a confié des travaux d'extension et de restructuration d'un immeuble, a sous-traité la réalisation des travaux de façade et menuiseries extérieures à la Société honfleuraise de menuiserie métallique (SHMM) ; que le contrat de sous-traitance prévoyait une retenue de garantie de 5 % du montant des travaux, libérable conformément aux dispositions de la loi du 16 juillet 1971 et une retenue de bonne fin de 5 % du marché, pouvant être remplacée sur accord de l'entreprise générale par une garantie bancaire à première demande, libérable un mois après la réception de l'ouvrage ; que la société Banque du bâtiment et des travaux publics (banque BTP) s'est portée caution vis-à-vis de l'entreprise générale pour le montant de la retenue de garantie, puis, aux termes d'un acte unilatéral intitulé « garantie à première demande de bonne fin », s'est portée garante au profit de l'entreprise principale du respect par le sous-traitant de ses obligations ; que la SHMM ayant été mise en liquidation judiciaire, la société CBC a assigné en référé la banque BTP en paiement d'une provision au titre de la garantie de bonne fin ;
Attendu que la banque BTP fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, qu'il résulte des dispositions d'ordre public de la loi du 16 juillet 1971 que les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil ne peuvent être amputés que d'une retenue égale au plus à 5 % de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, la convention de sous-traitance litigieuse prévoyait à la fois une retenue de garantie de 5 % du montant des travaux ayant pour objet de garantir l'exécution des travaux pour satisfaire aux réserves faites à la réception, à laquelle pouvait se substituer un cautionnement, et une retenue de bonne fin d'un même montant, à laquelle pouvait se substituer une garantie à première demande ; que la retenue de bonne fin qui s'ajoutait à la retenue légale de garantie et avait, de surcroît, un objet prohibé par la loi devait ainsi être déclarée illicite ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1 et 3 de la loi du 16 juillet 1971, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que la garantie à première demande de bonne fin visait l'exécution par le sous-traitant des travaux jusqu'à la réception et que la loi du 16 juillet 1971 définit la retenue légale de 5 % comme garantissant l'exécution des travaux pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage, la cour d'appel en a exactement déduit que, ces deux engagements ayant des objets distincts, la nullité invoquée par la banque n'était pas démontrée et ne pouvait constituer une contestation sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Banque du bâtiment et des travaux publics aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Banque du bâtiment et des travaux publics à payer à la société Campenon Bernard construction la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Banque du bâtiment et des travaux publics ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Banque du bâtiment et des travaux publics
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société BTP Banque à payer à la société Campenon Bernard Construction la somme provisionnelle de 121.095 € outre les intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2013 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' en 2008, la société Campenon Bernard Construction s'est vu confier par l'Association Groupe Hospitalier Diaconesses Croix Saint Simon, en qualité d'entreprise générale, des travaux d'extension et de restructuration d'un site situé à Paris rue d'Avron ; qu'elle a sous traité la réalisation des travaux de façade et menuiseries extérieures à la Société Honfleuraise de Menuiserie Métallique (SHMM) suivant un contrat de sous-traitance du 3 mars 2010 pour un montant de plus de 2.000.000 euros HT ; que les conditions spécifiques du contrat de sous-traitance prévoyaient l'existence d'une retenue de garantie de 5 % du montant ttc des travaux sous-traités, libérable conformément aux dispositions de la loi 71-584 du 16 juillet 1971 (article 9.1 des conditions) et une retenue de bonne fin d'une somme équivalente à 5 % du montant ttc sous-traité, pouvant être remplacée sur accord de l'entreprise générale par une garantie bancaire à première demande, libérable un mois après la réception de l'ouvrage (article 9.2 des conditions) ; qu'en exécution de ces stipulations, le 10 septembre 2010, la banque BTP s'est portée caution vis-à-vis de l'entreprise générale pour le montant de la retenue de garantie, dans les conditions de la loi du 16 juillet 1971, puis le 9 décembre 2010, aux termes d'un acte unilatéral intitulé Garantie à Première Demande de Bonne Fin, elle s'est portée garante, de manière irrévocable et inconditionnelle, au profit de l'entreprise principale du respect par le sous-traitant de ses obligations au titre du contrat de soustraitance ; qu'en septembre 2012, la société SHMM a informé l'entreprise générale de ce qu'elle n'était plus en mesure d'assurer la réalisation des prestations ; qu'elle a été mise en liquidation judiciaire en décembre 2012 ; que c'est dans ces conditions que, la société SHMM étant défaillante dans l'exécution de ses obligations, la société Campenon Bernard Construction a réclamé à la banque BTP les 13 décembre 2012 et 29 janvier 2013 l'exécution de la garantie de bonne fin qu'elle avait consentie, puis l'a assignée en paiement ; qu'en appel, la banque BTP ne fait que réitérer les moyens invoqués devant le premier juge auxquels celui-ci a justement répondu en les écartant ; que l'ordonnance sera donc confirmée en toutes ses dispositions, pour les justes motifs y énoncés que la cour adopte expressément, tenant notamment à l'absence de superposition de l'objet et de la durée des garanties données et, par suite, à l'absence de violation des dispositions d'ordre public de la loi du 16 juillet 1971 ; qu'en l'absence de tout préjudice établi autre que celui résultant du retard dans l'exécution par la banque BTP de son engagement, réparé par l'octroi des intérêts moratoires, la demande de dommages et intérêts formée par l'entreprise générale sera rejetée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la « garantie à première demande de bonne fin n° 21002395 » signée par BTP Banque le 09/12/2010, stipule que cette dernière « déclare se porter, de manière irrévocable et inconditionnelle, garant au profit de l'entreprise principale du respect par le sous-traitant de ses obligations au titre du contrat susvisé » ; « elle sera libérée, à défaut d'opposition notifiée par l'entreprise principale par lettre RAR, un mois après la réception des travaux » ; que précédemment, le 10 septembre 2010, BTP Banque et SMABTP se sont constituées caution personnelle et solidaire de SHMM vis-à-vis de CBC pour le montant de la retenue de garantie à laquelle le sous-traitant est assujetti dans les conditions prévues par les articles 1 et 2 de la loi du 16 juillet 1971, à hauteur de 121.095 ¿, étant prévu que cet engagement de caution prendra fin, dans les conditions de l'article 2 de la loi susvisée, au plus tard à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception des travaux, faite avec ou sans réserve ; que ces deux engagements portent manifestement sur des situations différentes, la garantie à première demande garantissant l'exécution de ses obligations par le sous-traitant jusqu'à un mois après la réception des travaux, et la caution garantissant le montant de la retenue de garantie à laquelle le sous-traitant est assujetti à compter de la réception des travaux ; que la loi du 16 juillet 1971 « tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3° du code civil », définit la retenue de garantie comme « garantissant contractuellement l'exécution des travaux pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage » ; que la caution donnée le 10 septembre 2010 par BTP Banque et SMABTP est soumise à la loi précitée ; que la garantie à première demande signée le 9 décembre 2010 ne concerne pas la retenue de garantie soumise à la loi du 16 juillet 1971 mais la garantie de l'exécution des travaux avant le procès-verbal de réception ; que la loi du 16 juillet 1971 est muette sur une telle garantie et ne peut donc trouver à s'appliquer en l'espèce ; qu'une garantie à première demande est indépendante du contrat de sous-traitance et doit être payée sur simple demande de l'entreprise principale sans que le garant ne puisse faire valoir aucune objection ou exception de quelque nature que ce soit ; que seuls l'abus ou une fraude manifeste sont de nature à faire obstacle à l'exécution de la garantie à première demande, la preuve en incombant au débiteur ; que la nullité invoquée par BTP Banque n'est pas démontrée et ne peut donc constituer une contestation sérieuse ;
1°) ALORS QUE s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; qu'en statuant au visa de conclusions d'appel de la société BTP Banque en date du 31 mars 2013, quand les dernières conclusions de celles-ci avaient été déposées le 24 décembre puis le 31 décembre 2013 en réponse à l'argumentation développée dans les conclusions d'appel de la société Campenon Bernard Construction du 7 novembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; qu'en statuant au visa de conclusions d'appel de la société BTP Banque en date du 31 mars 2013, qui ne correspondent à aucune date de dépôt de conclusions de la société BTP Banque, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le respect de l'obligation de statuer sur les dernières conclusions des parties, et a privé sa décision de base légale au regard des articles 455 et 954 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société BTP Banque à payer à la société Campenon Bernard Construction la somme provisionnelle de 121.095 € outre les intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2013 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' en 2008, la société Campenon Bernard Construction s'est vu confier par l'Association Groupe Hospitalier Diaconesses Croix Saint Simon, en qualité d'entreprise générale, des travaux d'extension et de restructuration d'un site situé à Paris rue d'Avron ; qu'elle a sous traité la réalisation des travaux de façade et menuiseries extérieures à la Société Honfleuraise de Menuiserie Métallique (SHMM) suivant un contrat de sous-traitance du 3 mars 2010 pour un montant de plus de 2.000.000 euros HT ; que les conditions spécifiques du contrat de sous-traitance prévoyaient l'existence d'une retenue de garantie de 5 % du montant ttc des travaux sous-traités, libérable conformément aux dispositions de la loi 71-584 du juillet 1971 (article 9.1 des conditions) et une retenue de bonne fin d'une somme équivalente à 5 % du montant ttc sous-traité, pouvant être remplacée sur accord de l'entreprise générale par une garantie bancaire à première demande, libérable un mois après la réception de l'ouvrage (article 9.2 des conditions) ; qu'en exécution de ces stipulations, le 10 septembre 2010, la banque BTP s'est portée caution vis-à-vis de l'entreprise générale pour le montant de la retenue de garantie, dans les conditions de la loi du 16 juillet 1971, puis le 9 décembre 2010, aux termes d'un acte unilatéral intitulé Garantie à Première Demande de Bonne Fin, elle s'est portée garante, de manière irrévocable et inconditionnelle, au profit de l'entreprise principale du respect par le sous-traitant de ses obligations au titre du contrat de sous-traitance ; qu'en septembre 2012, la société SHMM a informé l'entreprise générale de ce qu'elle n'était plus en mesure d'assurer la réalisation des prestations ; qu'elle a été mise en liquidation judiciaire en décembre 2012 ; que c'est dans ces conditions que, la société SHMM étant défaillante dans l'exécution de ses obligations, la société Campenon Bernard Construction a réclamé à la banque BTP les 13 décembre 2012 et 29 janvier 2013 l'exécution de la garantie de bonne fin qu'elle avait consentie, puis l'a assignée en paiement ; qu'en appel, la banque BTP ne fait que réitérer les moyens invoqués devant le premier juge auxquels celui-ci a justement répondu en les écartant ; que l'ordonnance sera donc confirmée en toutes ses dispositions, pour les justes motifs y énoncés que la cour adopte expressément, tenant notamment à l'absence de superposition de l'objet et de la durée des garanties données et, par suite, à l'absence de violation des dispositions d'ordre public de la loi du 16 juillet 1971 ; qu'en l'absence de tout préjudice établi autre que celui résultant du retard dans l'exécution par la banque BTP de son engagement, réparé par l'octroi des intérêts moratoires, la demande de dommages et intérêts formée par l'entreprise générale sera rejetée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la « garantie à première demande de bonne fin n° 21002395 » signée par BTP Banque le 09/12/2010, stipule que cette dernière « déclare se porter, de manière irrévocable et inconditionnelle, garant au profit de l'entreprise principale du respect par le sous-traitant de ses obligations au titre du contrat susvisé » ; « elle sera libérée, à défaut d'opposition notifiée par l'entreprise principale par lettre RAR, un mois après la réception des travaux » ; que précédemment, le 10 septembre 2010, BTP Banque et SMABTP se sont constituées caution personnelle et solidaire de SHMM vis-à-vis de CBC pour le montant de la retenue de garantie à laquelle le sous-traitant est assujetti dans les conditions prévues par les articles 1 et 2 de la loi du 16 juillet 1971, à hauteur de 121.095 €, étant prévu que cet engagement de caution prendra fin, dans les conditions de l'article 2 de la loi susvisée, au plus tard à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception des travaux, faite avec ou sans réserve ; que ces deux engagements portent manifestement sur des situations différentes, la garantie à première demande garantissant l'exécution de ses obligations par le sous-traitant jusqu'à un mois après la réception des travaux, et la caution garantissant le montant de la retenue de garantie à laquelle le sous-traitant est assujetti à compter de la réception des travaux ; que la loi du 16 juillet 1971 « tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3° du code civil », définit la retenue de garantie comme « garantissant contractuellement l'exécution des travaux pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage » ; que la caution donnée le 10 septembre 2010 par BTP Banque et SMABTP est soumise à la loi précitée ; que la garantie à première demande signée le 9 décembre 2010 ne concerne pas la retenue de garantie soumise à la loi du 16 juillet 1971 mais la garantie de l'exécution des travaux avant le procès-verbal de réception ; que la loi du 16 juillet 1971 est muette sur une telle garantie et ne peut donc trouver à s'appliquer en l'espèce ; qu'une garantie à première demande est indépendante du contrat de sous-traitance et doit être payée sur simple demande de l'entreprise principale sans que le garant ne puisse faire valoir aucune objection ou exception de quelque nature que ce soit ; que seuls l'abus ou une fraude manifeste sont de nature à faire obstacle à l'exécution de la garantie à première demande, la preuve en incombant au débiteur ; que la nullité invoquée par BTP Banque n'est pas démontrée et ne peut donc constituer une contestation sérieuse ;
ALORS QU'il résulte des dispositions d'ordre public de la la loi du 16 juillet 1971 que les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil ne peuvent être amputés que d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, la convention de sous-traitance litigieuse prévoyait à la fois une retenue de garantie de 5% du montant des travaux ayant pour objet de garantir l'exécution des travaux pour satisfaire aux réserves faites à la réception, à laquelle pouvait se substituer un cautionnement, et une retenue de bonne fin d'un même montant, à laquelle pouvait se substituer une garantie à première demande ; que la retenue de bonne fin qui s'ajoutait à la retenue légale de garantie et avait, de surcroît, un objet prohibé par la loi devait ainsi être déclarée illicite ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1 et 3 de la loi du 16 juillet 1971, ensemble l'article 873 du code de procédure civile.