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16/06/2015 | FRANCE | N°14-14036

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 juin 2015, 14-14036


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 décembre 2013), que la société Rea Sylva, assurée suivant polices dommages-ouvrage et constructeur non-réalisateur auprès de la société Albingia, a fait procéder à l'édification d'un immeuble qu'elle a vendu en l'état futur d'achèvement ; que le maître d'ouvrage s'est plaint, après réception, de l'apparition de désordres affectant les façades ; qu'après expertise, ordonnée en référé, la société Albingia a été condamnée par jugement du 16 oc

tobre 2008, in solidum avec la société Rea Sylva, à payer diverses sommes au syndicat...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 décembre 2013), que la société Rea Sylva, assurée suivant polices dommages-ouvrage et constructeur non-réalisateur auprès de la société Albingia, a fait procéder à l'édification d'un immeuble qu'elle a vendu en l'état futur d'achèvement ; que le maître d'ouvrage s'est plaint, après réception, de l'apparition de désordres affectant les façades ; qu'après expertise, ordonnée en référé, la société Albingia a été condamnée par jugement du 16 octobre 2008, in solidum avec la société Rea Sylva, à payer diverses sommes au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Gémeaux (le syndicat) et à garantir la société venderesse ; que la société Albingia, qui a réglé les sommes mises à sa charge, a assigné en paiement les différents intervenants à la construction et leurs assureurs ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que le jugement mentionnait que la société Rea Sylva avait sollicité la mise en ¿ uvre de la garantie décennale constructeur non-réalisateur, que si la société Albingia avait été assignée en référé en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur constructeur non-réalisateur, cela ne signifiait pas que le tribunal ait entendu la condamner en cette double qualité et que la lettre par laquelle elle a transmis le paiement au syndicat en exécution du jugement ne comportait aucune mention établissant que ce paiement aurait été fait sur le fondement d'un autre contrat que celui retenu par la juridiction, la cour d'appel a pu en déduire, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'imprécision du jugement du 16 octobre 2008 rendait nécessaire, que la société Albingia avait été condamnée en sa qualité d'assureur suivant police constructeur non-réalisateur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que, si l'assignation délivrée le 23 novembre 1998 aux sociétés Rea Sylva et Albingia par le syndicat indiquait que celle-ci était assureur dommages-ouvrage et assureur décennal constructeur non-réalisateur, les assignations délivrées aux constructeurs et à leurs assureurs en référé les 25 janvier 1999 et 29 juin 2001 et au fond les 15 mars 1999 et 25 mars 2002 par la société Albingia ne mentionnaient pas que celle-ci aurait agi en qualité d'assureur constructeur non-réalisateur mais visaient seulement celle d'assureur dommages-ouvrage, la cour d'appel a pu en déduire, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des assignations rendait nécessaire, que la société Albingia avait agi en qualité d'assureur dommages-ouvrage et que les assignations qu'elle avait délivrées n'avaient pas interrompu la prescription de l'action au titre du contrat constructeur non-réalisateur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Albingia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour la société Albingia
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré l'action de la société Albingia irrecevable ;
AUX MOTIFS QU'« il résulte du jugement du tribunal de grande instance de Toulouse que la société Albingia a été condamnée à garantir son assurée, la SNC Rea Sylva, sur le fondement du contrat constructeur non réalisateur puisque dans la partie " sur l'action de la SNC Rea Sylva contre la SA Albingia ", en page 8, le tribunal précise : " la SNC Rea Sylva a sollicité la mise en oeuvre de la garantie décennale CNR par conclusions du 16 novembre 2007 " puis répond à des moyens tirés de la prescription biennale avant de conclure " la SA Albingia sera condamnée à relever et garantir la SNC Rea Sylva de toutes les conditions mises à sa charge " ; que si le tribunal évoque en page 4 de sa décision le fait que la société Albingia avait été assignée en référé en sa double qualité d'assureur dommages ouvrages et d'assureur constructeur non réalisateur, c'est pour répondre à l'argumentation d'Albingia qui invoquait l'acquisition de la prescription de l'action concernant les désordres objets de l'extension démission, listés dans l'assignation du 22 mars 2002 pour ne pas avoir été assignée en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur dans le délai de dix ans pour ces désordres et cela ne signifie pas que le tribunal ait entendu condamner l'assureur en sa double qualité ; que c'est en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur que la société Albingia a été condamnée à garantir la SNC Rea Sylva et la lettre du 11 décembre 2008 transmettant le paiement fait en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Toulouse du 16 octobre 2008 au conseil du syndicat des copropriétaires ne comporte aucune mention établissant que le paiement aurait été fait sur le fondement d'un autre contrat que celui retenu par la juridiction ; que la société Albingia n'a pas qualité à agir en tant qu'assureur dommages-ouvrage » ;
ALORS QUE dans le jugement du 16 octobre 2008, le tribunal de grande instance de Toulouse rappelait que la société Albingia avait été assignée dans le cadre de l'instance principale en désignation d'expert en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; que l'action au fond engagée le 21 septembre 2005 par le syndicat des copropriétaires, qui s'inscrivait dans le prolongement de l'instance en désignation d'un expert, visait à obtenir le condamnation de la société Albingia en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; que pour condamner la société Albingia in solidum avec la société Rea Sylva, le jugement du 16 octobre 2008, précité, s'est borné à constater l'existence de désordres « rendant l'immeuble impropre à sa destination », susceptibles de mettre en jeu tant la garantie dommages-ouvrage que la garantie décennale ; que le jugement n'a pas indiqué que la compagnie Albingia était condamnée en sa seule qualité d'assureur responsabilité décennale, n'a pas mentionné de police d'assurance particulière, et n'a pas mis la société Albingia hors de cause en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage ; qu'il résultait ainsi du jugement précité que la société Albingia était condamnée en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; que dès lors, en jugeant que la société Albingia avait été condamnée en sa seule qualité d'assureur constructeur non réalisateur par le jugement du 16 octobre 2008 du tribunal de grande instance de Toulouse, la cour d'appel a dénaturé ledit jugement et a violé l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré l'action de la société Albingia irrecevable comme étant prescrite ;
AUX MOTIFS QUE « la société Albingia qui a payé les causes du jugement du tribunal de grande instance de Toulouse en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur bénéficie de la subrogation légale de l'article L. 121-12 du code des assurances et de l'article 1251 du code civil ; qu'elle agisse en qualité de subrogée de la victime ou de son assurée, son action ne peut être recevable que si elle a interrompu la prescription décennale, qui a commencé à courir le 27 mars 1992, à l'encontre des intervenants à l'acte de construire, intimés dans le cadre de la présente instance ; que si l'assignation délivrée le 23 novembre 1998 à la SNC Rea Sylva et à la compagnie Albingia par le syndicat des copropriétaires de la Résidence Les Gémeaux fait état de ce que la compagnie Albingia est assureur " dommages ouvrages " suivant contrat n° 319018027 ainsi qu'assureur décennal " CNR " suivant contrat n° 319018005 souscrits par la SNC Rea Sylva, force est de constater que l'assignation délivrée le 25 janvier 1999 par la compagnie Albingia aux constructeurs ne contient aucune mention permettant d'établir que la compagnie d'assurance agirait en qualité d'assureur constructeur non réalisateur, alors qu'il est au contraire précisé dans l'exposé du litige de cet acte " qu'une police dommages ouvrages a été souscrite auprès de la requérante pour cette opération de construction " ce qui établit que c'est en sa qualité d'assureur dommages-ouvrages que la société Albingia assignait les constructeurs ; qu'alors qu'il existe deux contrats parfaitement distincts, les actes interruptifs de prescription faits par la compagnie Albingia en qualité d'assureur dommages ouvrages n'ont aucun effet interruptif concernant son action en qualité d'assureur constructeur non réalisateur, que l'assignation en référé du 25 janvier 1999 ne peut en conséquence avoir interrompu la prescription en faveur de la compagnie Albingia, au titre du contrat CNR, pas plus que l'assignation en référé du 29 juin 2001 dans laquelle, de la même manière, la compagnie Albingia n'invoque que l'existence du contrat " dommages-ouvrage " dans les mêmes termes ; que dans son assignation au fond devant le tribunal de grande instance de Paris du 15 mars 1999, la compagnie Albingia ne vise que la police dommages-ouvrage, fondant par ailleurs son action sur les dispositions de l'article A 243. 1 Annexe II du code des assurances qui concerne spécifiquement l'assurance dommages-ouvrage, que dans l'assignation au fond du 25 mars 2002, outre les mentions similaires à celles figurant dans l'assignation du 15 mars 1999, la compagnie Albingia précise également en page 5 de l'acte : " la concluante, en sa qualité d'assureur dommages ouvrages est recevable et bien fondée à interrompre la prescription en ce qui concerne ces nouveaux désordres à l'encontre de l'ensemble des constructeurs susceptibles d'être concernés ", que ces actes ne peuvent en conséquence avoir interrompu la prescription courant à l'encontre de la société Albingia en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur ; qu'alors qu'il n'est par ailleurs justifié d'aucun acte interruptif de prescription tant de la part du syndicat des copropriétaires que la SNC Rea Sylva à l'égard des intimés et que la compagnie Albingia ne justifie d'aucun acte interruptif de prescription en sa qualité d'assureur CNR, l'action de celle-ci est irrecevable comme étant prescrite depuis le 28 mars 2002 ; que le jugement sera en conséquence infirmé » ;
ALORS, de première part, QUE dans son assignation en référé du 25 janvier 1999 (production n° 5), la société Albingia dénonçait et laissait en copie l'assignation introductive d'instance délivrée par le syndicat des copropriétaires de la Résidence des Gémeaux le 23 novembre 1998, dont il résultait qu'elle avait elle-même été assignée dans l'instance en désignation d'expert en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; que la société Albingia exposait que le tribunal de grande instance de Toulouse avait fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires et désigné un expert judiciaire en la personne de M. X... ; qu'elle demandait au président du tribunal de rendre communes aux constructeurs et aux assureurs requis les opérations d'expertises, sollicitées et ordonnées notamment au regard de sa qualité d'assureur responsabilité décennale ; qu'il s'ensuivait que la société Albingia agissait notamment en qualité d'assureur responsabilité décennale ; que dès lors, en jugeant que la société Albingia avait uniquement agi en sa qualité d'assureur dommage-ouvrages en délivrant l'assignation du 25 janvier 1999, la cour d'appel a dénaturé cette assignation et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, de deuxième part, QUE dans son assignation en référé du 29 juin 2001 (production n° 6), la société Albingia dénonçait et laissait en copie l'assignation introductive d'instance délivrée par le syndicat des copropriétaires le 23 novembre 1998, dont il résultait qu'elle avait elle-même été assignée en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; qu'elle précisait que « cette assignation introductive d'instance du 23 novembre 1998 (¿) fait partie intégrante de la présente assignation » ; qu'après avoir rappelé qu'elle avait obtenu que les opérations d'expertise confiées à M. X... soient rendues communes à certains constructeurs, elle demandait au président du tribunal de rendre communes aux entrepreneurs et l'assureur requis les opérations d'expertises, sollicitées et ordonnées notamment au regard de sa qualité d'assureur responsabilité décennale ; qu'il s'ensuivait que la société Albingia agissait notamment en qualité d'assureur responsabilité décennale ; que dès lors, en jugeant que la société Albingia n'avait agi qu'en sa qualité d'assureur dommage-ouvrages en délivrant l'assignation du 29 juin 2001, la cour d'appel a dénaturé cet acte et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, de troisième part, QUE dans ses assignations au fond des 17 mars 1999 et 25 mars 2002 (productions n° 8 et 9), la société Albingia dénonçait et laissait en copie l'assignation introductive d'instance délivrée par le syndicat des copropriétaires le 23 novembre 1998, dont il résultait que la société Albingia avait elle-même été assignée en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale ; que dans son assignation du 17 mars 1999, elle précisait que « cette assignation introductive d'instance du 23 novembre 1998 (¿) fait partie intégrante de la présente assignation » ; qu'en outre, dans les deux assignations précitées, la société Albingia demandait la condamnation des entrepreneurs et de leurs assureurs à la relever et garantir intégralement de « toutes condamnations qui pourraient intervenir à son encontre (¿) au profit du SDC RES LES GEMEAUX du fait des désordres » allégués ; que la société Albingia agissait ainsi en sa double qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur responsabilité décennale, afin de préserver tous les recours possibles contre les entrepreneurs et d'être garantie par les responsables des désordres au titre des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle sur quelque fondement que ce soit ; que dès lors, en jugeant que la société Albingia n'avait agi qu'en sa qualité d'assureur dommage-ouvrages en délivrant les deux assignations précitées, la cour d'appel a dénaturé ces mêmes actes et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, de quatrième part, QU'une citation en justice, même en référé, interrompt la prescription ; que les assignations en référé des 25 janvier 1999 et le 29 juin 2001, de même que les assignations au fond des 17 mars 1999 et le 25 mars 2002, délivrées par la société Albingia en sa qualité d'assureur responsabilité décennale, ont interrompu la prescription de son action en cette qualité ; que dès lors, en jugeant que ces actes n'avaient pas interrompu la prescription de la société Albingia au titre du contrat d'assurance décennale, et que la société Albingia ne justifiait d'aucun acte interruptif de prescription en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 241-2 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-14036
Date de la décision : 16/06/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 jui. 2015, pourvoi n°14-14036


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Boulloche, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14036
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