LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 2 avril 2014), que Mme Y..., épouse X... a été reconnue atteinte d'une maladie professionnelle, le 2 septembre 2005 ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Pyrénées (la caisse) ayant fixé, après consolidation, le taux d'incapacité permanente partielle à 40 %, Mme Y... a saisi d'un recours un tribunal du contentieux de l'incapacité ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ce dernier, alors, selon le moyen :
1°/ que toute personne a droit à un recours effectif ; que le recours formé afin de déterminer le taux d'incapacité permanente d'une personne atteinte d'une maladie professionnelle n'est pas effectif lorsqu'une expertise ou un avis sapiteur est confié à un technicien non spécialisé dans le domaine de la pathologie présentée par la victime dès lors que le litige porte sur des données techniques que le juge n'a pas la compétence nécessaire pour appréhender et que l'avis dudit technicien s'avère prépondérant pour la solution du litige ; qu'en jugeant cependant que la caisse primaire d'assurance maladie, qui entendait recourir à un avis sapiteur pour déterminer le taux d'incapacité permanente, n'avait aucune obligation de désigner un médecin spécialisé dans le domaine de la pathologie présentée par la victime, la Cour nationale a privé Mme X... de son droit à un recours effectif et a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°/ qu'en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que Mme X... faisait valoir que le docteur Z..., neuropsychiatre, n'était pas compétent en matière de rhumatologie et de dermatologie, qu'il avait presque 80 ans et que l'avis du docteur A... étant fondé sur celui du docteur Z... du 23 novembre 2010, il devait être écarté ; qu'en se bornant à adopter les conclusions du docteur A..., sans répondre à ce moyen déterminant, la Cour nationale a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que Mme X... faisait valoir que le docteur A... avait retenu les tranches basses des taux fixés par le barème indicatif d'invalidité sans expliquer les raisons pour lesquelles ces taux étaient retenus ; qu'en se bornant à adopter les conclusions du médecin consultant, sans répondre à ce moyen précis et opérant, la Cour nationale a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ; que la rente versée à la victime indemnise notamment l'incidence professionnelle de l'incapacité ; que la Cour nationale a adopté les conclusions du docteur A... selon lesquelles l'inaptitude concernait essentiellement le travail au contact d'agents infectieux ; qu'elle a relevé que Mme X... a été déclarée inapte à la profession d'infirmière ; qu'en limitant à 40 % le taux d'incapacité permanente, tandis qu'il résultait de ses constatations que la reconversion de Mme X..., initialement aide-soignante, serait difficile et entraînerait nécessairement une répercussion importante sur sa carrière professionnelle, la Cour nationale a violé l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
5°/ que la rente versée à la victime indemnise notamment les pertes de gains professionnels ; que Mme X... faisait valoir qu'elle percevait désormais une rente trimestrielle de 859, 60 euros et que la perte de 80 % de son salaire était imputable à sa maladie professionnelle ; qu'en limitant à 40 % le taux d'incapacité permanente de Mme X..., sans prendre en compte la perte de ses gains professionnels, la CNITAAT a violé l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé les conclusions du médecin consultant désigné, l'arrêt retient qu'ont été reconnus imputables à la maladie professionnelle développée par la victime, à la date de consolidation, un état anxio-dépressif et un psoriasis à forme palmo-plantaire avec syndrome articulaire associé ; qu'aucun texte ne fait obligation à la caisse de désigner un médecin spécialisé dans le domaine dont relève la pathologie présentée par la victime, pathologie qui ne fait pas partie de celles énumérées à l'article D. 461-5 du code de la sécurité sociale ; qu'à la date de la consolidation du 15 février 2011, la victime présentait une raideur modérée de l'épaule gauche, une raideur de la hanche gauche, une atteinte sterno-claviculaire, des douleurs cervicales et lombaires et un état dépressif avec asthénie persistante ; que la dermatose ne laissait subsister que des cicatrices, lesquelles ne justifient aucune incapacité permanente ; que l'inaptitude déclarée est limitée à l'exercice de la profession antérieure ; qu'au vu des éléments contradictoirement débattus, et adoptant les conclusions du médecin consultant, le taux d'incapacité permanente doit être fixée à 40 % ;
Qu'en l'état de ces constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis à son examen, la Cour nationale, qui n'était tenue ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s'expliquer sur les éléments de preuve non retenus, a pu, sans encourir les griefs du moyen, déterminer le taux d'incapacité permanente de Mme Y... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les séquelles de la maladie professionnelle dont a été reconnue atteinte Mme X... le 2 septembre 2005 justifiaient l'attribution d'une incapacité permanente au taux de 40 % à la date de consolidation du 15 février 2011 ;
AUX MOTIFS QUE le docteur A..., médecin consultant, commis conformément aux dispositions de l'article R 143-27 du code de la sécurité sociale, expert près la cour d'appel de Douai, expose que le taux d'IPP doit ici être évalué à la date impartie et non à la date de l'examen du médecin consultant du TCI ; que le rapport du professeur Z... est celui qui a servi à l'évaluation et qui est le plus proche de la date impartie (il semble en effet y avoir eu une aggravation de l'état de l'intéressée postérieurement à la date impartie) ; que dans ce rapport qui est imprécis en ce qui concerne les limitations articulaires (de même d'ailleurs que celui du médecin consultant du TCI), il est retenu une raideur modérée de l'épaule gauche, une raideur de la hanche gauche, une atteinte sterno-claviculaire et des douleurs cervicales et lombaires ; que le guide barème indique que les séquelles mécaniques des maladies professionnelles doivent être appréciées de la même façon que les séquelles des traumatismes, qu'il faut donc établir un taux de base qui sera majoré dans le cas de poussées ou d'évolutivité rhumatismale ou encore de crises douloureuses ou de l'atteinte de l'état général ; que la raideur modérée de l'épaule est indemnisée du côté non dominant par un taux d'IPP de 15 %, la limitation des mouvements de la hanche, les mouvements étant favorables est indemnisée par un taux de 10 à 20 % ; que pour les autres articulations touchées il s'agit essentiellement de douleurs ; qu'il est mentionné également dans le guide barème qu'au terme de l'analyse en tenant compte du taux de base et éventuellement des majorations spécifiques, le médecin portera un jugement global sur le retentissement des séquelles de la maladie sur la capacité de travail du patient et fixera le taux d'IPP en fonction de son importance ; qu'un taux de 30 à 60 % indemnise un retentissement important ; qu'ici on peut retenir un taux de 30 % puisque l'inaptitude retenue est essentiellement une inaptitude au travail au contact d'agents infectieux ; qu'en ce qui concerne l'état cutané, à la date impartie il n'est décrit que des cicatrices qui, selon leur localisation et leur description, ne justifient pas l'attribution d'un taux d'IPP ; que l'état dépressif avec asthénie persistante est indemnisé par un taux d'IPP de 10 à 20 % ; que la description qui est faite de cet état dépressif justifie un taux d'IPP de 10 % ; que les séquelles décrites justifient donc à la date impartie un taux d'IPP de 40 % TEC ; qu'à la date du 15 février 2011, les séquelles décrites justifient l'attribution d'un taux d'IPP de 40 % TEC ; qu'il appartient à la Cour de déterminer le taux d'incapacité permanente dont restait atteinte Laurence Y... épouse X... à la date de consolidation du 15 février 2011, consécutivement à la maladie professionnelle dont elle a été reconnue atteinte le 2 septembre 2005 ; que pour évaluer ce taux, seules les séquelles propres à la maladie professionnelle en cause, présentées à ladite date appréciation, doivent être prises en compte ; qu'en application des dispositions visées à l'article R 143-2 du code de la sécurité sociale, les difficultés relatives au caractère professionnel d'une lésion relèvent de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, de sorte que l'imputabilité à la maladie professionnelle des séquelles retenues par la caisse primaire ou par lesdites juridictions ne peut être remise en cause devant la Cour ; qu'en l'espèce, ont été reconnues imputables à la maladie professionnelle un état anxio-dépressif par le médecin conseil de la caisse suite à une expertise et un psoriasis à forme palmo-plantaire avec syndrome articulaire associé, par jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Hautes-Pyrénées du 26 février 2009 ; qu'en vertu des dispositions de l'article L 142-1 et suivants du code de la sécurité sociale, les contestations relatives à la mise en oeuvre d'une expertise dans le cadre de l'article L 141-1 dudit code relèvent elles aussi de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en conséquence, les critiques formulées par Mme X... quant aux expertises réalisés à la demande du médecin conseil de la caisse primaire sont inopérantes devant la Cour ; qu'aucun texte ne fait obligation à la caisse, lorsque celle-ci entend recourir à l'avis d'un sapiteur pour déterminer le taux d'incapacité permanente, de désigner un médecin spécialisé dans le domaine dont relève la pathologie présentée par la victime ; que dans le cadre de l'appel, seules les maladies professionnelles mentionnées à l'article D 461-5 du code de la sécurité sociale obligent la Cour à désigner un médecin spécialisé ; que les pathologies présentées par Mme X... ne sont pas visées par ce texte ; qu'aux termes de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale, « le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu du barème indicatif d'invalidité » ; que ces dispositions ne prévoient pas l'indemnisation du préjudice moral ; qu'à la date de consolidation du 15 février 2011, Mme X... présentait une raideur modérée de l'épaule gauche, une raideur de la hanche gauche, une atteinte sterno-claviculaire, des douleurs cervicales et lombaires et un état dépressif avec asthénie persistante ; que la dermatose ne laissait subsister que des cicatrices, lesquelles ne justifient d'aucune incapacité permanente ; qu'il n'est pas contesté que l'intéressée a été déclarée inapte à l'exercice de la profession d'infirmière ; qu'au vu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, contradictoirement débattus, et avec le médecin consultant dont elle adopte les conclusions, que les séquelles décrites ci-dessus justifiant la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 40 % ; qu'en conséquence il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris ;
1°) ALORS QUE toute personne a droit à un recours effectif ; que le recours formé afin de déterminer le taux d'incapacité permanente d'une personne atteinte d'une maladie professionnelle n'est pas effectif lorsqu'une expertise ou un avis sapiteur est confié à un technicien non spécialisé dans le domaine de la pathologie présentée par la victime dès lors que le litige porte sur des données techniques que le juge n'a pas la compétence nécessaire pour appréhender et que l'avis dudit technicien s'avère prépondérant pour la solution du litige ; qu'en jugeant cependant que la CPAM, qui entendait recourir à un avis sapiteur pour déterminer le taux d'incapacité permanente, n'avait aucune obligation de désigner un médecin spécialisé dans le domaine de la pathologie présentée par la victime, la CNITAAT a privé Mme X... de son droit à un recours effectif et a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°) ALORS QUE, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que Mme X... faisait valoir que le docteur Z..., neuropsychiatre, n'était pas compétent en matière de rhumatologie et de dermatologie, qu'il avait presque 80 ans (mémoire, p. 6 § 1 et 4) et que l'avis du docteur A... étant fondé sur celui du docteur Z... du 23 novembre 2010, il devait être écarté (mémoire complémentaire, p. 4 § 1) ; qu'en se bornant à adopter les conclusions du docteur A..., sans répondre à ce moyen déterminant, la CNITAAT a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que Mme X... faisait valoir que le docteur A... avait retenu les tranches basses des taux fixés par le barème indicatif d'invalidité sans expliquer les raisons pour lesquelles ces taux étaient retenus (mémoire complémentaire, p. 4 § 5) ; qu'en se bornant à adopter les conclusions du médecin consultant, sans répondre à ce moyen précis et opérant, la CNITAAT a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ; que la rente versée à la victime indemnise notamment l'incidence professionnelle de l'incapacité ; que la CNITAAT a adopté les conclusions du docteur A... selon lesquelles l'inaptitude concernait essentiellement le travail au contact d'agents infectieux ; qu'elle a relevé que Mme X... a été déclarée inapte à la profession d'infirmière ; qu'en limitant à 40 % le taux d'incapacité permanente, tandis qu'il résultait de ses constatations que la reconversion de Mme X..., initialement aide-soignante, serait difficile et entraînerait nécessairement une répercussion importante sur sa carrière professionnelle, la CNITAAT a violé l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale ;
5°) ALORS QUE la rente versée à la victime indemnise notamment les pertes de gains professionnels ; que Mme X... faisait valoir qu'elle percevait désormais une rente trimestrielle de 859, 60 ¿ et que la perte de 80 % de son salaire était imputable à sa maladie professionnelle (mémoire, p. 7, in fine) ; qu'en limitant à 40 % le taux d'incapacité permanente de Mme X..., sans prendre en compte la perte de ses gains professionnels, la CNITAAT a violé l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale.