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13/05/2015 | FRANCE | N°14-10118

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mai 2015, 14-10118


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er mai 1986 par la société Rhône chimie industries, aux droits de laquelle vient la société Rhône chimie services, en qualité de représentant de commerce exclusif ; qu'ayant été licenciée pour insuffisance professionnelle, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu le principe selon lequel les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur ;
Attendu que p

our rejeter la demande de rappel de salaire et de congés payés pour rétention injust...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er mai 1986 par la société Rhône chimie industries, aux droits de laquelle vient la société Rhône chimie services, en qualité de représentant de commerce exclusif ; qu'ayant été licenciée pour insuffisance professionnelle, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu le principe selon lequel les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur ;
Attendu que pour rejeter la demande de rappel de salaire et de congés payés pour rétention injustifiée de commissions, l'arrêt retient que la mise à disposition de la salariée d'un véhicule, qui n'était prévue ni par le contrat de travail ni par un avenant, ne relevait pas de l'intention libérale de l'employeur qui, en prélevant sur les commissions de la salariée des sommes correspondant à des frais de carburant, de péage et d'entretien de ce véhicule, se conformait à la pratique de l'entreprise ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les retenues opérées par l'employeur ne faisaient pas supporter à la salariée des frais pour les besoins de son activité professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu que pour décider que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la salariée a méconnu ses obligations à partir de 2008 et que son chiffre d'affaire de 2009 avait été inférieur de 20 % aux objectifs minimaux ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la salariée était en faute de ne pas avoir atteint les objectifs fixés compte tenu de la modification de son secteur en 2008, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme X... de ses demandes en rappel de salaire et de congés payés sur commissions et en ce qu'il condamne la société Rhône chimie services à lui payer la somme de 6 000 euros à titre de solde d'indemnité de clientèle, l'arrêt rendu le 3 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Rhône chimie services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Rhône chimie services à payer à la société Delvolvé la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille quinze et signé par Mme Vallée, président, et Mme Piquot, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR, infirmant le jugement entrepris, débouté Madame X... de sa demande en remboursement de la somme de 21 653,14 € brut, outre 2 165,31 € brut de congés payés afférents, représentant les prélèvements mensuels pratiqués par la société Rhône Chimie Services sur les décomptes de commissions de la salariée au titre du véhicule mis à sa disposition
AUX MOTIFS QUE Joëlle X... bénéficiait d'un véhicule mis à sa disposition par la S.A.S Rhône Chimie Services pour ses déplacements tant privés que professionnels ; que cette facilité n'était prévue ni au contrat de travail ni dans un avenant ultérieur ; que la soixantaine d'autres représentants n'en disposaient pas et avaient en charge tous leurs frais de voyages ; que cette mise à disposition d'un véhicule ne relevait pas d'une intention libérale de l'employeur qui ne s'explique par aucune pièce versée aux débats ; que la S.A.S Rhône Chimie Services comptait chaque mois la somme de 145 € au titre d'un avantage en nature et prélevait ponctuellement sur les commissions de Joëlle X... une certaine somme au titre des frais de carburant, péage et entretien du véhicule ; que l'employeur mettait de la sorte les frais à la charge de la salariée et se conformait ainsi à la pratique de l'entreprise ; que Joëlle X... est dès lors mal fondée à invoquer une retenue indue sur sa rémunération, ce qui le rend mal fondée en sa demande, dont la cour la déboutera.
ALORS D'UNE PART QU'il résultait tant des constatations des premiers juges que des écritures d'appel de la salariée (p. 11) que la société Rhône Chimie Services avait déduit chaque mois du décompte de commissions de Madame X... un forfait mensuel de 518,33 €, de février 2006 à décembre 2010, au titre de l'utilisation personnelle du véhicule mis à sa disposition constitutif d'un avantage en nature figurant sur son bulletin de paie pour la somme de 145 € ; et qu'en considérant cette retenue justifiée, comme conforme à la pratique de l'entreprise, sans réfuter les motifs des premiers juges considérant que compte tenu de la valeur du véhicule la retenue ne pouvait excéder 258,62 €, et l'argumentation de la salariée estimant que la retenue devait être égale à l'avantage en nature chiffré à 145 €, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile
ALORS D'AUTRE PART QU'il est de principe que les frais professionnels engagés par le salarié doivent être mis à la charge de l'employeur ; et qu'en considérant justifiée la pratique de l'entreprise consistant à prélever chaque mois sur les commissions de la salariée la somme de 518,33 ¿ au titre de l'utilisation du véhicule mis à sa disposition sans vérifier si, ce faisant, la société ne faisait pas supporter à la salariée des frais professionnels dont elle n'avait pas la charge, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du principe susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence débouté de sa demande en paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
AUX MOTIFS QUE l'insuffisance de résultats ne caractérisait une cause de licenciement que si elle était due à la carence du salarié ; que la lettre de licenciement qui circonscrivait le litige, contenait les motifs suivants : prospection insuffisante, résultats inférieurs de moitié aux objectifs contractuels, absence de comptes rendus d'activité, insuffisance de nouveaux clients, nombreuses amendes pour infraction au code de la route ; que Joëlle X... était représentante avec le statut de VRP ; qu'elle devait en vertu de l'article 4 du contrat de travail, prospecter, développer et fidéliser une clientèle, réaliser un chiffre d'affaires minimal de 10 000 ¿ par mois et rendre périodiquement compte de son activité à la S.A.S Rhône Chimie Services ; qu'il ressortait des pièces versées aux débats que la salariée méconnaissait ses obligations à partir de 2008 et que de nombreux rappels à l'ordre et mises en demeure de son employeur restaient sans suite ; qu'ainsi elle réalisait en 2009 un chiffre d'affaires de 95 000 € inférieur de 20% aux objectifs minimaux ; qu'elle était le représentant le plus ancien dans l'entreprise mais se situait au 57ème rang sur 63 ; que ses suivants étaient tous récemment arrivés ; que le meilleur représentant réalisait un chiffre d'affaires dépassant le quadruple du sien ; que dans le même temps elle faisait l'objet de multiples verbalisations pour des infractions routières commises en Ile de France, en dehors et loin de son secteur de travail ; qu'en présence d'une situation insatisfaisante qui perdurait depuis plusieurs années, la S.A.S Rhône Chimie Services se trouvait en octobre 2010 fondée à se séparer de Joëlle X... ; que le licenciement reposait ainsi sur une cause réelle et sérieuse ce qui rendait Joëlle X... mal fondée en sa demande de dommages et intérêts.
ALORS D'UNE PART QUE lorsqu'un licenciement est motivé par l'insuffisance de résultats du salarié, les juges du fond doivent vérifier si les objectifs fixés étaient réalistes et compatibles avec la durée du travail du salarié, son secteur d'activité et le marché ; qu'en l'espèce, il résultait des constatations des premiers juges que le chiffre d'affaires demandé à Madame X... n'avait jamais varié en dépit des diminutions de secteurs et des reprises de client par l'entreprise alors que le contrat de travail prévoyait une révision annuelle du chiffre d'affaires à réaliser, révision qui n'avait jamais été réalisée ; et qu'en se bornant à constater que Madame X..., dont le secteur avait été amputé en 2008 (arrêt attaqué p. 6), avait réalisé en 2009 un objectif inférieur de 20% aux objectifs minimaux sans vérifier si l'object if de 10 000 € par mois, fixé initialement et jamais révisé, était réaliste et compatible avec une durée mensuelle de travail de 70 heures, un secteur d'activité réduit et le marché, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de s articles L.1232-1 et L.1235-1 du Code du travail et 1134 du Code civil
ALORS D'AUTRE PART QUE, la cour d'appel ne pouvait affirmer que « la salariée méconnaissait ses obligations à partir de 2008 et que de nombreux rappels à l'ordre et mise en demeure de l'employeur restaient sans suite » sans répondre aux conclusions de la salariée faisant valoir que « contrairement à ce que soutient l'employeur, elle n'a jamais fait l'objet d'avertissements pour non réalisation de ses objectifs, d'autant plus qu'en 2008 et même en 2009 elle a dû interrompre son activité pour des problèmes de santé » ; et qu'ainsi elle a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS QUE, DE PLUS, dans ses conclusions d'appel laissées sans réponse (p. 8), Madame X... faisait valoir que, s'agissant du palmarès 2009, ses résultats étaient tout à fait raisonnables par rapport à d'autres V.R.P à temps complet et bénéficiant de secteurs beaucoup plus larges, alors que de surcroit, au cours de cet exercice, elle avait été absente pour raison de santé ; qu'en outre, les résultats des vingt derniers commerciaux étaient proches de Mme X... alors qu'elle ne travaillait que 70 heures par mois ; et qu'en s'abstenant de répondre à ces objections la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile
ALORS QU'ENFIN en retenant à l'encontre de la salariée de multiples verbalisations pour des infractions routières commises en Ile de France en dehors et loin de son secteur alors que travaillant à temps partiel (70 heures par mois) et ayant l'autorisation d'utiliser le véhicule mis à sa disposition pour son usage personnel, cette circonstance était inopérante à caractériser une insuffisance de résultats imputable à la salariée ; et qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-10118
Date de la décision : 13/05/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 03 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mai. 2015, pourvoi n°14-10118


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10118
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