Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Alexis X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la DORDOGNE, en date du 19 septembre 2013, qui, pour viols aggravés et délits connexes, l'a condamné à huit ans d'emprisonnement, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 mars 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Castel, conseiller rapporteur, M. Foulquié, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller CASTEL, les observations de la société civile professionnelle LE BRET-DESACHÉ, de Me HAAS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SASSOUST ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 251 et 591 du code procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'homme, ensemble violation des droits de la défense, 203, 591, 593 du code de procédure ;
" en ce qu'il résulte du procès-verbal de révision de la liste du jury en date du 9 septembre 2013 que la cour d'assise était composée de : Mme Katell Cavellat, épouse Couhe, en qualité de présidente, de M. David Rivet, et de Mme Marina Grelet, et que par ordonnance, en date du 16 septembre 2013, la présidente de la cour d'assises a désigné Mme Nathalie Larsabal en remplacement de Mme Annie Ledrux, et Mme Hélène Virecoulon en remplacement de Mme Patricia Julien Colombet, laquelle venait en remplacement de Mme Marina Grelet aux termes d'une ordonnance de la première présidente de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 4 septembre 2013 ;
" alors qu'aux termes de l'article 251 du code de procédure pénale, « en cas d'empêchement survenu avant l'ouverture de la session, les assesseurs sont remplacés par ordonnance du premier président. Si l'empêchement survient au cours de la session, les assesseurs sont remplacés par ordonnance du président de la cour d'assises et choisis parmi les magistrats du siège de la cour d'appel ou du tribunal, siège de la cour d'assises » ; que ces règles touchant à la composition de la cour, sont d'ordre public ; que la Cour de cassation n'est pas en mesure de vérifier les conditions dans lesquelles M. Rivet a pris part à la composition de la cour d'assises et a été remplacé ultérieurement " ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune pièce de procédure que l'accusé ou son avocat, qui pouvaient obtenir communication des pièces relatives à la composition de la cour, aient soulevé, avant l'ouverture des débats, une exception prise de l'irrégularité de cette composition ;
Attendu qu'en application des articles 305-1 et 599, alinéa 2, du code de procédure pénale, le demandeur n'est, dès lors, pas recevable à contester pour la première fois devant la Cour de cassation la régularité de la composition de la cour d'assises ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du Protocole additionnel n° 7 à ladite Convention, 111-3, 222-22, 222-23, 222-24, 222-27, 222-28, 222-29, 222-30, 222-31, 222-31-1, 222-12-1, 222-44, 222-45, 222-47 et 222-58-1, du code pénal, 206, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du droit à un procès équitable ;
" en ce que la cour d'assises d'appel a déclaré l'accusé coupable de viols et agressions sexuelles sur mineure de quinze ans par personne ayant autorité, et l'a condamné pénalement et civilement ;
" aux motifs que la cour d'assises a été convaincue de la culpabilité de M. X... pour les crimes et les délits indiqués ci-dessus en raison des éléments à charge suivants, qui ont été discutés lors des débats et qui ont constitué les principaux éléments à charge exposés au cours des délibérations menées par la cour d'assises et le jury préalablement aux votes sur les questions : Marion H...a dénoncé de façon constante des actes sexuels commis sur sa personne par M. X... entre le début de l'année 2004 et le mois de juillet 2008, soit au domicile familial situé à Saint-Ciers/ Gironde, soit lors de déplacements sportifs sur le territoire national ; que les premiers actes sexuels, consistant en des caresses sur le sexe et des pénétrations digitales dans son vagin, ont été commis par surprise, Marion H...ayant seulement accepté que son entraîneur sportif, M. X..., lui masse les adducteurs ; que la réitération de tels actes a pu avoir lieu sans que cette adolescente, âgée de 14 ans à l'époque des premiers faits, ne réagisse, en raison de la crainte des conséquences de la révélation des faits à sa mère qu'elle pensait très éprise de son compagnon ; que l'absence de réaction de Mme X... en avril 2004 à Dunkerque et de Mme I...en décembre 2004 à Saint-Ciers/ Gironde, qui chacune leur tour en entrant dans la chambre aurait pu surprendre le comportement de M. X..., ne signifie pas que les actes sexuels n'ont pas été commis en leur présence, mais seulement qu'elles n'ont rien vu ou rien soupçonné... la première pénétration vagino pénienne, précédée de caresses sur la poitrine et le sexe de Marion H...ainsi que d'une fellation pratiquée par elle, a eu lieu à Vittel entre le 12 et le 13 mars 2005, dans une chambre d'hôtel occupée par M. X... et la mineure ; que le témoignage de M. J..., qui s'étant déplacé à Vittel pour y rencontrer sa petite-nièce a pu vérifier qu'elle ne logeait pas ce week-end là à l'hôtel « La Chaumière », ainsi que l'absence de concordance des dates mentionnées sur l'attestation et sur la facture établies postérieurement aux faits par M. K...permettent d'écarter le témoignage de ce dernier relatif à l'hébergement individuel de Marion H...dans son établissement du 12 au 13 mars 2005 ; que le décès accidentel de Nathalie I..., mère de la mineure, survenu le 26 mars 2005, a mis fin à la cohabitation au quotidien de Marion H...et de M. X... dans la maison familiale à Saint-Ciers/ Gironde ; que les témoignages respectifs de Mmes L...et M...et de MM. N...et O..., qui tous ont fréquenté le club des nageurs de Braud et Saint-Louis créé par M. X..., établissent cependant que lors des déplacements sportifs organisés par M. et Mme X... ainsi que lors de ses fréquents séjours à Saint-Ciers/ Gironde, Marion H...partageait toujours la chambre de l'accusé et ce antérieurement au mois d'avril 2006, date à laquelle celui-ci situe le début de leur liaison ; que le témoignage de Mme M...confirme notamment que cette cohabitation existait déjà en février 2006 dans l'appartement loué à Font-Romeu, où Marion H...situe la fellation demandée par M. X... le jour de son 40e anniversaire ; que le témoignage de Mme L...établit, en outre, qu'en octobre 2005, M. X... déclarait avoir des « pulsions pour Marion » ce qu'elle avait interprété comme un « transfert » sur la fille de la compagne décédée ; que ce dernier témoignage corrobore celui de M. P...rapportant une réflexion de son collègue M. X... sur l'ancienneté de ses relations sexuelles avec Marion H..., ainsi que la première déclaration de MM. Anthony et Cyrille X... sur l'existence de telles relations avant les 16 ans de la jeune fille ; que la cohabitation de M. X... et de Marion H...à Saint-Ciers/ Gironde a repris peu avant la majorité de celle-ci, survenue le 21 septembre 2007, et leur liaison s'est poursuivie jusqu'à la mi-juillet 2008, date de la révélation des faits à Mme Q...; que cette liaison que M. X... prétend avoir été consentie par Marion H..., a été ignorée de leurs proches jusqu'à la majorité de la jeune-fille ; qu'elle est concomitante à la relation sentimentale ayant existé entre Marion H...et M. O..., ce qui rend peu vraisemblable la réciprocité des sentiments alléguée par M. X... ; que les relations sexuelles précédemment décrites, ayant existé entre le début de l'année 2004 et la mi-juillet 2008, ont été imposées par M. X... à Marion H..., laquelle n'a pu résister à l'emprise de cet homme beaucoup plus âgé qu'elle, qui était encore le compagnon de sa mère lorsque les premiers actes sexuels ont eu lieu, qui est resté son entraîneur sportif après le décès de celle-ci et qui la menaçait de mettre fin à sa passion pour la natation ou de se suicider si elle révélait les faits ; que fragilisée par le décès brutal et prématuré de sa mère, isolée de sa famille par un entraîneur possessif en conflit avec son père au sujet de la poursuite de son activité sportive, Marion H...a été contrainte au silence ; que sa parole, que les experts ont estimée fiable, n'a pu se libérer progressivement que grâce à l'intervention de ses proches, les quels pour des motifs professionnels, l'ont forcée à s'éloigner de M. X... à partir du mois de juin 2008 ; que la personnalité narcissique décrite par les experts qui ont examiné l'accusé est confirmée par les témoignages des membres du club des nageurs de Braud et Saint-Louis qui font état du charisme de leur entraîneur mais aussi de son comportement exigeant et séducteur, ainsi que par ceux des proches de la jeune-fille qui ont constaté le harcèlement téléphonique exercé sur elle par M. X... ; cette personnalité, bien que non pathologique, a favorisé l'emprise psychologique exercée par M. X... sur Marion H...; Marion H...étant née le 21 septembre 1989, les abus sexuels ont débuté avant son quinzième anniversaire et se sont poursuivis au delà de sa majorité ; que la circonstance aggravante de la minorité de quinze ans est donc constituée, tant pour les agressions sexuelles que pour les viols commis avant le 21 septembre 2004 ; que ces viols et agressions sexuelles ont été commis alors que M. X... avait autorité de fait sur Marion H...en l'absence de ses parents, comme étant son entraîneur sportif ; qu'il est ainsi établi que M. X... a commis sur la personne de Marion H..., d'une part, entre le 1er janvier 2004 et le 20 septembre 2004, des viols et des agressions sexuelles alors qu'elle était mineure de 15 ans et qu'il avait autorité de fait sur elle, d'autre part, entre le 21 septembre 2004 et le 31 juillet 2008 des viols et des agressions sexuelles alors qu'il avait autorité de fait sur elle ;
" 1°) alors que la cour d'assises d'appel ne pouvait retenir la culpabilité de l'accusé en se fondant essentiellement sur les seules déclarations à charge de la partie civile, et sur des motifs hypothétiques, sans établir de preuve concrète et tangible des actes de viols et d'agressions sexuelles qu'il aurait commis sur la partie civile et sans s'expliquer sur les éléments à décharge ayant justifié son acquittement en première instance pour les mêmes faits, à savoir l'absence de preuve de l'existence de relations intimes consenties ou forcées entre la partie civile et l'accusé avant que celle-ci ait atteint l'âge de quinze ans, ni avant le décès de sa mère en mars 2005, ni même avant le printemps 2006, et sur le fait que la partie civile avait d'elle-même souhaité venir habiter avec l'accusé après avoir réussi son bac à l'été 2007 malgré les réticences de son père, et qu'aucun témoin n'a dépeint une ambiance de contrainte ; que cette motivation dubitative, hypothétique et insuffisante prive l'arrêt attaqué de base légale et des motifs propres à justifier le dispositif ;
" 2°) alors que la situation de sujétion de la victime n'est pas de nature à établir son absence de consentement, élément constitutif du viol et de l'agression sexuelle ; que la qualité de personne ayant autorité de l'auteur, ne constituant qu'une circonstance aggravante l'infraction ; qu'en déduisant l'absence de consentement de la circonstance aggravante de personne ayant autorité, et de la supposée « emprise » d'un homme plus âgé, à la personnalité « narcissique », « séduisant » et « séducteur », la cour d'assises a privé sa décision de base légale et des motifs propres à justifier le dispositif " ;
Attendu que les énonciations de la feuille de questions et celles de la feuille de motivation mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'assises, statuant en appel, a caractérisé les principaux éléments à charge, résultant des débats, qui l'ont convaincue de la culpabilité de l'accusé et justifié sa décision, conformément aux dispositions conventionnelles invoquées et à l'article 365-1 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen, qui tend à remettre en question l'appréciation souveraine, par la cour et le jury, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. X... devra payer à Mme Marion H..., en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize mai deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.