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16/04/2015 | FRANCE | N°14-13694

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 avril 2015, 14-13694


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'Anne-Marie X... a été admise au sein d'un établissement spécialisé, suivant contrat du 10 novembre 2008 conclu avec la société Solemnes et signé par son fils M. Y..., sous la mention « dûment mandaté à cet effet et se portant en tout état de cause fort de l'exécution des engagements souscrits au titre du présent contrat » ; que la société Solemnes, devenue la société CJPG, a assigné M. Y... en paiement des frais de séjour ;
Sur le moyen unique, pris en s

a première branche :
Attendu que la société CJPG fait grief à l'arrêt de rejet...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'Anne-Marie X... a été admise au sein d'un établissement spécialisé, suivant contrat du 10 novembre 2008 conclu avec la société Solemnes et signé par son fils M. Y..., sous la mention « dûment mandaté à cet effet et se portant en tout état de cause fort de l'exécution des engagements souscrits au titre du présent contrat » ; que la société Solemnes, devenue la société CJPG, a assigné M. Y... en paiement des frais de séjour ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société CJPG fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur un moyen relevé d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en retenant d'office, pour écarter la qualification de promesse de porte-fort d'exécution et rejeter la demande de la société, le fait qu'aucun tiers ne se serait engagé à titre principal, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la société CJPG ayant invoqué l'existence d'une promesse de porte-fort, la cour d'appel n'a introduit aucun élément nouveau dans le débat en vérifiant si les conditions de celle-ci étaient réunies ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1120 du code civil ;
Attendu que la promesse de porte-fort est un engagement personnel autonome d'une personne qui promet à son cocontractant d'obtenir l'engagement d'un tiers à son égard ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la société CJPG, l'arrêt retient que si celui qui se porte fort de l'exécution de l'engagement d'un tiers, s'engage accessoirement à l'engagement principal souscrit par le tiers lorsque ce dernier ne l'exécute pas lui-même, à l'instar du cautionnement, encore faut-il qu'un tiers se soit engagé à titre principal, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, Anne-Marie X... n'étant plus capable de le faire et son fils n'ayant pas été désigné comme tuteur chargé de la représenter ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société CJPG.
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société CJPG (anciennement SOLEMNES) de sa demande tendant à la condamnation de M. Frédéric Y... à lui payer la somme principale de 26 359, 63 €, outre intérêts,
Aux motifs que il est constant que M. Frédéric Y... a signé seul le contrat de séjour « en qualité de fils » de Mme X..., « dûment mandaté à cet effet et se portant en tout état de cause fort de l'exécution des engagements souscrits au titre du présent contrat ». Sous cette mention, il est indiqué que doit être joint au contrat de séjour la copie du jugement et la photocopie de la pièce d'identité du tuteur ou les statuts de l'association tutélaire. Au soutien de sa demande en paiement des frais de séjour de Mme X... par son fils M. Frédéric Y..., la société SOLEMNES fait valoir, pour l'essentiel, que ce dernier s'est porté fort des engagements souscrits aux termes du contrat de séjour, dans l'attente d'une habilitation judiciaire, à savoir un jugement de tutelle, Mme X... n'ayant plus la capacité d'exprimer sa volonté, et que ce faisant il s'est engagé personnellement à régler les frais de séjour s'il n'obtenait pas l'habilitation judiciaire ou si la procédure de mise sous tutelle n'allait pas jusqu'à son terme. Cependant, si celui qui se porte fort de l'exécution de l'engagement d'un tiers, s'engage accessoirement à l'engagement principal souscrit par le tiers si ce dernier ne l'exécute pas lui-même, à l'instar du cautionnement, encore faut-il qu'un tiers se soit engagé à titre principal, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, Mme X... n'étant plus capable de le faire et son fils Frédéric Y... n'ayant pas été désigné comme tuteur chargé de la représenter. Dès lors, le jugement doit être infirmé et la société SOLEMNES doit être déboutée de toutes ses demandes (arrêt p 4 § 1 à 5) ;

1°) Alors que, d'une part, le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur un moyen relevé d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en retenant d'office, pour écarter la qualification de promesse de porte fort d'exécution et rejeter la demande de l'exposante, le fait qu'aucun tiers ne se serait engagé à titre principal, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme et 16 du code de procédure civile ;
2°) Alors que, d'autre part, la promesse de porte fort est valable quand bien même le promettant se serait porté fort de l'engagement d'un incapable ; que par ailleurs, celui qui se porte fort de l'exécution d'un contrat par un tiers s'engage accessoirement à exécuter ce contrat en cas de défaillance du tiers quelle qu'en soit la raison ; que M. Frédéric Y... s'est porté fort de l'exécution du contrat souscrit par sa mère ; qu'en refusant de donner effet à la promesse de porte fort au motif qu'aucun tiers ne se serait engagé à titre principal, Mme X... n'étant plus capable de le faire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 1120 du code civil ;
3°) Alors qu'en toute hypothèse, la promesse de porte-fort peut concerner un tiers non encore identifié mais simplement identifiable ; qu'en retenant, pour écarter la qualification de promesse de porte fort d'exécution, qu'aucun tiers ne se serait engagé à titre principal, sans rechercher si M. Y... n'avait pas entendu se porter fort de l'exécution du contrat par le représentant légal de sa mère, sans qu'il importe que cette personne soit identifiée, dès lors qu'elle était identifiable et qu'elle était défaillante, ce qui obligeait M. Frédéric Y..., qui s'était porté fort, à exécuter l'engagement en ses lieux et place, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1120 du code civil ;
4°) Alors qu'en outre et en tout état de cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que M. Y... s'était expressément engagé à assurer l'exécution du contrat de séjour concernant sa mère ; que d'ailleurs il avait exécuté pour partie le contrat en honorant quelques mensualités ; qu'en déboutant la société CJPG de sa demande à son encontre sans rechercher si, en tout état de cause, M. Y... ne s'était pas engagé personnellement à prendre en charge les frais d'entretien de sa mère dans l'établissement de la société CJPG, ce qu'il avait fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
5°) Alors qu'enfin, le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution ; qu'en l'espèce, M. Frédéric Y... ne s'est pas seulement porté fort de l'exécution du contrat passé avec la société CJPG, il est également intervenu « dûment mandaté » pour la souscription de ce contrat ; qu'à ce titre, il était tenu d'accomplir son mandat et devait répondre de toute inexécution ; qu'en déboutant la société CJPG de sa demande à son encontre sans rechercher si, en qualité de mandataire, M. Y... ne devait pas répondre de l'inexécution du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1991 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-13694
Date de la décision : 16/04/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PORTE-FORT - Engagement du porte-fort - Caractère personnel et autonome - Portée

PORTE-FORT - Engagement du porte-fort - Obligation de résultat autonome - Effets - Inexécution de la promesse - Responsabilité - Etendue

La promesse de porte-fort est un engagement personnel autonome, d'une personne qui promet à son cocontractant d'obtenir l'engagement d'un tiers à son égard. Dès lors, viole l'article 1120 du code civil, la cour d'appel qui retient que si celui qui se porte fort de l'exécution de l'engagement d'un tiers s'engage accessoirement à l'engagement principal souscrit par le tiers lorsque ce dernier ne l'exécute pas lui-même, à l'instar du cautionnement, encore faut-il qu'un tiers se soit engagé à titre principal


Références :

article 1120 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 19 novembre 2013

Sur la nature de l'engagement pris par le porte-fort, à rapprocher :1re Civ., 25 janvier 2005, pourvoi n° 01-15926, Bull. 2005, I, n° 43 (rejet) ;Com., 1er avril 2014, pourvoi n° 13-10629, Bull. 2014, IV, n° 67 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 avr. 2015, pourvoi n°14-13694, Bull. civ. 2015, I, n° 99
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, I, n° 99

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Drouet
Rapporteur ?: Mme Le Gall
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13694
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