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16/04/2015 | FRANCE | N°13-27690

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 avril 2015, 13-27690


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Charleville-Mézières, 10 juin 2013), rendu en dernier ressort, que M. X..., vétérinaire, a formé opposition à l'ordonnance lui enjoignant de payer une certaine somme à l'Ordre national des vétérinaires, au titre de sa cotisation pour l'année 2010 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il est constant que M. X... possède un cabinet en Fra

nce et y exerce une partie de son activité professionnelle, l'autre activité per...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Charleville-Mézières, 10 juin 2013), rendu en dernier ressort, que M. X..., vétérinaire, a formé opposition à l'ordonnance lui enjoignant de payer une certaine somme à l'Ordre national des vétérinaires, au titre de sa cotisation pour l'année 2010 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il est constant que M. X... possède un cabinet en France et y exerce une partie de son activité professionnelle, l'autre activité permanente, toujours en qualité de vétérinaire étant exercée en Belgique là où il a son domicile privé ; que se posait la question de savoir si M. X... devait cotiser pour une même année civile simultanément à l'Ordre des vétérinaires de Belgique et à l'Ordre national des vétérinaires en France ; qu'à cet égard, M. X... insistait sur la circonstance qu'aux termes de la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, il importe d'avoir conscience de la circonstance que le marché intérieur de l'Union européenne comporte un espace sans frontière intérieure dans lequel la circulation des personnes et des services est assurée et qu'il convient d'éliminer toute forme d'obstacles à la liberté d'établissement des prestataires dans les Etats membres et à la circulation des services entre Etats membres ; qu'il ressort aussi de l'article 16 de la directive précitée que les Etats membres ne peuvent pas restreindre la libre prestation de services et l'égalité des situations, pour un prestataire établi dans un autre Etat membre en imposant notamment l'obligation pour ledit prestataire d'obtenir une autorisation de leur autorité compétente, y compris une inscription auprès d'un ordre ; qu'en imposant non seulement une double inscription aux ordres respectifs de vétérinaires, mais une double cotisation annuelle, le juge de proximité méconnaît la lettre et l'esprit de la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 qui s'impose, violant ce faisant les articles 49 et 56 du TFUE, ensemble l'article 55 de la Constitution et l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il est acquis que pour favoriser les échanges transfrontaliers, le droit communautaire interdit toute mesure qui placerait un professionnel qui exerce dans deux Etats membres dans une situation moins intéressante que celui qui n'exerce son activité que sur le territoire d'un seul Etat membre ; que l'article 65 de la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 rappelant la liberté d'établissement pose le principe de l'égalité de traitement laquelle ne doit déboucher sur aucune discrimination, en l'occurrence exiger le paiement d'une double cotisation annuelle, l'une pour l'Ordre des vétérinaires belge, l'autre pour l'Ordre des vétérinaires français ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la juridiction de proximité ne justifie pas légalement son arrêt au regard de la lettre et de l'esprit de la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006, et spécialement de son article 65, ensemble au regard des textes cités au précédent élément de moyen ;
3°/ que M. X... faisait valoir dans ses écritures saisissant valablement la juridiction de proximité que « conformément aux considérants des directives précitées, qui ne sont pas spécifiques à l'une ou l'autre de ces libertés, l'installation et la prestation de service d'un professionnel sur le territoire d'un autre Etat ne doit pas le placer dans une situation moins favorable que s'il s'était abstenu de franchir la frontière ; que c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la directive n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles impose aux autorités compétentes de l'Etat membre d'accueil et de l'Etat membre d'origine à collaborer pour mettre en oeuvre ces principes » et c'est ce qui ressort de l'article 56 de ladite directive selon lequel « les autorités compétentes de l'Etat membre d'accueil et de l'Etat membre d'origine collaborent étroitement et se prêtent une assistance mutuelle afin de faciliter l'application de la présente directive » ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer par rapport à cette articulation des écritures de nature à avoir une incidence sur la solution du litige au regard de l'exigence posée d'une double cotisation, le juge de proximité ne justifie pas légalement sa décision par rapport aux directives n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, et spécialement l'article 56 de celle-là, d'où une méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêts du 30 novembre 1995, Gebhard, C-55/94 et du 11 décembre 2003, Schnitzer, C-215/01) que le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui, de façon stable et continue, exerce une activité dans un autre Etat membre où, à partir d'un domicile professionnel, il s'adresse, entre autres, aux ressortissants de cet Etat, relève des dispositions du chapitre relatif au droit d'établissement et non de celui relatif aux services ; qu'en l'espèce, le jugement ayant constaté que M. X... possédait un cabinet en France et y exerçait une partie de son activité de vétérinaire, exerçant l'autre partie en Belgique, à son domicile privé, le litige qui l'oppose à l'Ordre national des vétérinaires est soumis au régime de la liberté d'établissement et non à celui de la libre prestation des services ;
Que, s'agissant de l'obligation d'inscription à deux ordres professionnels, l'article 14 de la directive 2006/123, qui énumère les exigences auxquelles ne peuvent être subordonnées les autorisations prévues par les Etats membres en matière de liberté d'établissement, prévoit, en son paragraphe 2, que les Etats membres ne subordonnent pas l'accès à une activité de services ou son exercice à l'interdiction pour le prestataire de services d'être inscrit dans les registres ou dans les ordres ou les associations professionnels de plus d'un Etat membre ; qu'il résulte de cette disposition que n'est pas contraire à la liberté d'établissement l'obligation imposée par l'article L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime à un vétérinaire ressortissant d'un autre Etat membre de l'Union européenne qui désire exercer sa profession en France, d'être inscrit au tableau de l'ordre des vétérinaires, alors que, pour l'exercice simultané de la même activité dans son Etat membre d'origine, il est déjà soumis à une obligation d'inscription à un ordre professionnel ;
Que, s'agissant de l'obligation de cotiser à deux ordres professionnels, l'article 13 de la même directive, qui détermine les conditions auxquelles doivent obéir les procédures et formalités d'autorisation des prestataires de services en matière de liberté d'établissement, prévoit, en son paragraphe 2, que les charges qui peuvent découler de ces procédures et formalités pour les demandeurs doivent être raisonnables et proportionnées aux coûts des procédures d'autorisation et ne pas dépasser le coût des procédures ; qu'il résulte de la combinaison de l'article 13, paragraphe 2, et de l'article 14, paragraphe 2, de la directive, que l'obligation de paiement d'une cotisation à l'ordre des vétérinaires n'est pas, en son principe, contraire à la liberté d'établissement, même si le vétérinaire est soumis à une obligation identique dans son Etat membre d'origine ;
Et attendu, en second lieu, que le principe d'égalité de traitement n'est violé que lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié ; que M. X..., qui exerce son activité de vétérinaire à la fois en France et en Belgique, ne se trouve pas dans une situation comparable à celle d'un vétérinaire exerçant cette activité seulement dans l'un ou dans l'autre de ces Etats membres ; que, par suite, l'existence d'une obligation de paiement de cotisation auprès de deux ordres professionnels n'est pas contraire à ce principe ;
Que par ces motifs de pur droit, substitués, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par les première et deuxième branches, le jugement se trouve légalement justifié ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à l'Ordre national des vétérinaires la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est reproché au jugement attaqué d'avoir condamné le Docteur Marc X... à payer à l'Ordre National des Vétérinaires la somme de 300,60 euros, représentant la cotisation ordinale due en 2010, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2012, date de la mise en demeure et d'avoir condamné le susnommé aux dépens et à payer à l'Ordre National des Vétérinaires une somme de 400 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article R 242-3 du Code rural et de la pêche maritime, le Conseil Supérieur de l'Ordre des Vétérinaires fixe le montant des cotisations qui devront être versées par les membres de l'Ordre et que le défaut de paiement peut donner lieu à l'application de sanctions disciplinaires ; qu'en application des articles L 241-1, L 242-1 et suivant du même Code, l'inscription à l'ordre est une formalité obligatoire pour les vétérinaires exerçant sur le territoire français ; que l'article 2 de la loi du 19 décembre 1950 votée en Belgique dispose que l'Ordre des Vétérinaires belge comprend tous les docteurs en médecine vétérinaire domiciliés en Belgique, autorisés à y pratiquer la médecine vétérinaire et inscrits à l'un des tableaux de l'ordre ;
AUX MOTIFS ENCORE QUE le principe de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services est posé par les articles 49 et 56 de la TFUE ; que le traité pose cependant des limites dès lors que l'activité en question relève de l'exercice de l'autorité publique ou dès lors que des restrictions visent à protéger l'ordre public, la santé publique ou la sécurité publique ; que la directive n° 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur rappelle que les Etats membres ne peuvent restreindre la libre prestation de services par un prestataire dans un autre Etat membre en imposant l'obligation pour le prestataire d'avoir un établissement sur le territoire, l'obligation pour le prestataire d'avoir une autorisation de leurs autorités compétentes y compris une inscription dans un registre ou auprès d'un ordre... ; que ce principe connaît des dérogations d'exigence nationale qui se justifient lorsqu'elles apparaissent nécessaires à la protection de l'ordre public, de la sécurité publique, de la santé publique ou de l'environnement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice, les objectifs de santé publique, de protection des consommateurs, de santé animale (politique vétérinaire) et de protection de l'environnement urbain constituent des raisons impérieuses d'intérêt général ; que des raisons impérieuses d'intérêt général peuvent justifier l'application de régimes d'autorisation et d'autres restrictions ; que toutefois, ces régimes d'autorisation et ces restrictions ne devraient pouvoir opérer aucune discrimination sur la base de la nationalité ; qu'en outre, les principes de nécessité et de proportionnalité devraient toujours être respectés ;
ET AUX MOTIFS QU'en l'espèce, Monsieur Marc X... possède son cabinet en France et y exerce une partie de son activité professionnelle, l'autre activité permanente étant exercée en Belgique à son domicile privé ; que les exigences de santé publique imposent à un vétérinaire travaillant dans le pays concerné d'adhérer à l'ordre de ce pays ; que le Conseil de l'Ordre est garant du bon exercice de la médecine vétérinaire sur le territoire et du respect de l'application des dispositions législatives et réglementaires régissant la profession ; que le fait d'adhérer à l'ordre dans chaque pays d'exercice n'est pas discriminatoire et ne remet pas en cause les principes de liberté d'établissement et de libre prestation de services ; que Monsieur Marc X... a toute liberté pour exercer des deux côtés de la frontière ; que le principe d'égalité de traitement implique un traitement identique pour des situations identiques ; qu'il est donc parfaitement normal que Monsieur Marc X... cotise à l'Ordre des Vétérinaires français à l'instar de ses confrères français puisqu'il y exerce sa profession ; que la situation doit être identique du côté belge ; que sa situation n'est pas, ni plus complexe, ni moins favorable que celui qui exerce son activité sur un seul territoire ; si bien que Monsieur Marc X... sera condamné à payer la somme de 300,60 euros au profit du Conseil supérieur de l'Ordre National des Vétérinaires au titre de la cotisation ordinale 2010 ; que l'Ordre National des Vétérinaires justifiant de l'envoi à Monsieur Marc X... d'une lettre de mise en demeure de payer, la somme que ce dernier lui doit, portera de plein droit intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2012, date de réception de l'accusé de réception, en application de l'article 1153 du Code civil ;
ALORS QU'il est constant que Monsieur Marc X... possède un Cabinet en France et y exerce une partie de son activité professionnelle, l'autre activité permanente, toujours en qualité de vétérinaire étant exercée en Belgique là où il a son domicile privé ; que se posait la question de savoir si Marc X... devait cotiser pour une même année civile simultanément à l'Ordre des Vétérinaires de Belgique et à l'Ordre National des Vétérinaires en France ; qu'à cet égard, Monsieur X... insistait sur la circonstance qu'aux termes de la Directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, il importe d'avoir conscience de la circonstance que le marché intérieur de l'Union européenne comporte un espace sans frontière intérieure dans lequel la circulation des personnes et des services est assurée et qu'il convient d'éliminer toute forme d'obstacles à la liberté d'établissement des prestataires dans les Etats membres et à la circulation des services entre Etats membres ; qu'il ressort aussi de l'article 16 de la Directive précitée que les Etats membres ne peuvent pas restreindre la libre prestation de services et l'égalité des situations, pour un prestataire établi dans un autre Etat membre en imposant notamment l'obligation pour ledit prestataire d'obtenir une autorisation de leur autorité compétente, y compris une inscription auprès d'un ordre ; qu'en imposant non seulement une double inscription aux Ordres respectifs de Vétérinaires, mais une double cotisation annuelle, le juge de proximité méconnaît la lettre et l'esprit de la Directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 qui s'impose, violant ce faisant les articles 49 et 56 du TFUE, ensemble l'article 55 de la Constitution et l'article 12 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, par ailleurs et en tout état de cause, il est acquis que pour favoriser les échanges transfrontaliers, le droit communautaire interdit toute mesure qui placerait un professionnel qui exerce dans deux Etats membres dans une situation moins intéressante que celui qui n'exerce son activité que sur le territoire d'un seul Etat membre ; que l'article 65 de la Directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 rappelant la liberté d'établissement pose le principe de l'égalité de traitement laquelle ne doit déboucher sur aucune discrimination, en l'occurrence exiger le paiement d'une double cotisation annuelle, l'une pour l'Ordre des Vétérinaires belge, l'autre pour l'Ordre des Vétérinaires français ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la juridiction de proximité ne justifie pas légalement son arrêt au regard de la lettre et de l'esprit de la Directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006, et spécialement de son article 65, ensemble au regard des textes cités au précédent élément de moyen ;
ET ALORS ENFIN QUE l'exposant faisait valoir dans ses écritures (cf. p. 4 et 5) saisissant valablement la juridiction de proximité que « conformément aux considérants des Directives précitées, qui ne sont pas spécifiques à l'une ou l'autre de ces libertés, l'installation et la prestation de service d'un professionnel sur le territoire d'un autre Etat ne doit pas le placer dans une situation moins favorable que s'il s'était abstenu de franchir la frontière ; que c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la Directive n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles impose aux autorités compétentes de l'Etat membre d'accueil et de l'Etat membre d'origine à collaborer pour mettre en oeuvre ces principes » et c'est ce qui ressort de l'article 56 de ladite Directive selon lequel « les autorités compétentes de l'Etat membre d'accueil et de l'Etat membre d'origine collaborent étroitement et se prêtent une assistance mutuelle afin de faciliter l'application de la présente Directive » ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer par rapport à cette articulation des écritures de nature à avoir une incidence sur la solution du litige au regard de l'exigence posée d'une double cotisation, le juge de proximité ne justifie pas légalement sa décision par rapport aux Directives n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, et spécialement l'article 56 de celle-là, d'où une méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-27690
Date de la décision : 16/04/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

UNION EUROPEENNE - Liberté d'établissement des ressortissants - Domaine d'application - Litige opposant un vétérinaire à l'Ordre national des vétérinaires - Applications diverses - Vétérinaire exerçant simultanément en France et dans un autre Etat membre

UNION EUROPEENNE - Libre prestation des services - Domaine d'application - Exclusion - Cas PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Vétérinaire - Modalités d'exercice de la profession - Exercice simultané en France et dans un autre Etat membre - Obligation d'inscription et de cotisation auprès de deux ordres professionnels - Compatibilité avec le droit d'établissement PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Vétérinaire - Modalités d'exercice de la profession - Exercice simultané en France et dans un autre Etat membre - Obligation d'inscription et de cotisation auprès de deux ordres professionnels - Compatibilité avec le principe d'égalité de traitement

Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne (CJCE, arrêt du 30 novembre 1995, Gebhard, C-55/94, CJCE, arrêt du 11 décembre 2003, Schnitzer, C-215/01) que le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui, de façon stable et continue, exerce une activité dans un autre Etat membre où, à partir d'un domicile professionnel, il s'adresse, entre autres, aux ressortissants de cet Etat, relève des dispositions du chapitre relatif au droit d'établissement et non de celui relatif aux services. En conséquence, le jugement ayant constaté qu'un vétérinaire possédait un cabinet en France et y exerçait une partie de son activité, exerçant l'autre partie en Belgique, à son domicile privé, le litige qui oppose ce dernier à l'Ordre national des vétérinaires est soumis au régime de la liberté d'établissement et non à celui de la libre prestation des services. L'article 14 de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, qui énumère les exigences auxquelles ne peuvent être subordonnées les autorisations prévues par les Etats membres en matière de liberté d'établissement, prévoit, en son § 2, que les Etats membres ne subordonnent pas l'accès à une activité de services ou son exercice à l'interdiction pour le prestataire de services d'être inscrit dans les registres ou dans les ordres ou les associations professionnels de plus d'un Etat membre. Il résulte de cette disposition que n'est pas contraire à la liberté d'établissement l'obligation imposée par l'article L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime à un vétérinaire ressortissant d'un autre Etat membre de l'Union européenne qui désire exercer sa profession en France, d'être inscrit au tableau de l'ordre des vétérinaires, alors que, pour l'exercice simultané de la même activité dans son Etat membre d'origine, il est déjà soumis à une obligation d'inscription à un ordre professionnel. L'article 13 de la même directive, qui détermine les conditions auxquelles doivent obéir les procédures et formalités d'autorisation des prestataires de services en matière de liberté d'établissement, prévoit, en son § 2, que les charges qui peuvent découler de ces procédures et formalités pour les demandeurs doivent être raisonnables et proportionnées aux coûts des procédures d'autorisation et ne pas dépasser le coût des procédures. Il résulte de la combinaison de l'article 13, § 2, et de l'article 14, § 2, de la directive, que l'obligation de paiement d'une cotisation à l'ordre des vétérinaires n'est pas, en son principe, contraire à la liberté d'établissement, même si le vétérinaire est soumis à une obligation identique dans son Etat membre d'origine. Le principe d'égalité de traitement n'est violé que lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié. En conséquence, un vétérinaire qui exerce son activité à la fois en France et en Belgique ne se trouve pas dans une situation comparable à celle d'un vétérinaire exerçant cette activité seulement dans l'un ou dans l'autre de ces Etats membres, de sorte que l'existence d'une obligation de paiement de cotisation auprès de deux ordres professionnels n'est pas contraire à ce principe


Références :

directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur

Décision attaquée : Juridiction de Proximité de Charleville-Mézières, 10 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 avr. 2015, pourvoi n°13-27690, Bull. civ. 2015, I, n° 104
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, I, n° 104

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Drouet
Rapporteur ?: M. Truchot
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27690
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