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16/04/2015 | FRANCE | N°13-26365

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 avril 2015, 13-26365


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., médecin gastro-entérologue, exerçant selon les termes d'un contrat conclu avec la SARL Clinique Magdelaine (la clinique), enregistré au conseil départemental de l'ordre des médecins le 29 novembre 2000, puis résilié en décembre 2003, sans que les parties ne mettent fin à leur collaboration ni ne s'accordent sur d'autres modalités, a informé celle-ci, par une première lettre recommandée, en date du 7 avril 2010, de son intention de cesser son activité et,

par une seconde, en date du 27 février 2012, de son départ effectif l...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., médecin gastro-entérologue, exerçant selon les termes d'un contrat conclu avec la SARL Clinique Magdelaine (la clinique), enregistré au conseil départemental de l'ordre des médecins le 29 novembre 2000, puis résilié en décembre 2003, sans que les parties ne mettent fin à leur collaboration ni ne s'accordent sur d'autres modalités, a informé celle-ci, par une première lettre recommandée, en date du 7 avril 2010, de son intention de cesser son activité et, par une seconde, en date du 27 février 2012, de son départ effectif le 6 avril suivant ;
Sur le moyen unique, pris en ses cinq premières branches :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa septième branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que, pour dire que M. X... a manqué à ses obligations et le condamner à payer une certaine somme à la SCP Odile Y..., en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la clinique, l'arrêt retient que son implication au sein de celle-ci pendant plus d'un an après sa lettre de résiliation, ainsi que l'absence d'information sur la date de son départ ou de présentation d'un successeur, ont pu laisser croire, eu égard à l'annonce d'une précédente résiliation non suivie d'effet, qu'il ne donnerait pas suite à cette rupture, de sorte que son départ, résultant d'une décision unilatérale, a eu lieu en méconnaissance du délai de préavis conforme aux usages de la profession ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la simple poursuite de son activité au-delà du délai d'usage n'était pas de nature à caractériser un acte manifestant sans équivoque la volonté de M. X... de renoncer à la résiliation de son contrat annoncée le 7 avril 2010, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la SCP Odile Y..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le docteur X... avait manqué à ses obligations contractuelles nées du « contrat de fait » en ne respectant pas le préavis prévu par les usages, dit que le préjudice de la Sarl Clinique Magdelaine consistait en une perte de chance et condamné le docteur X... à payer à maître Odile Y..., ès qualités, la somme de 139. 500 euros ;
AUX MOTIFS QUE, sur la résiliation du contrat enregistré le 19 septembre 2000, selon le courrier recommandé avec accusé de réception du 2 décembre 2003, le docteur X... résiliait le contrat d'exercice, enregistré à l'ordre des médecins le 29 septembre 2000, qui le liait à la clinique Magdelaine ; qu'aux termes du courrier, le docteur X... indiquait notamment « Je reste à votre disposition pour rediscuter de la signature d'un éventuel contrat avec la clinique », or aucun autre contrat n'a été signé, de sorte que le docteur X..., qui a poursuivi son activité, se trouvait lié à la clinique par un contrat de fait, régi par les usages de la profession, situation qui n'a d'ailleurs pas été contestée par les parties dans les divers échanges (pièces intimé n° 3, 8) ; qu'ainsi, aucune renonciation à la résiliation, comme le soutient la clinique Magdelaine, n'est acquise ; que dans ses propres écrits, la clinique a considéré les relations professionnelles comme découlant d'un contrat de fait ; que le fait que le docteur X... a continué à exercer au-delà du délai de six mois sans contrat écrit, comme l'impose l'article L. 4113-9 du code de la santé publique, ne saurait lui être reproché, cette obligation s'imposant à la seule clinique qui ne s'est pas conformée à cette obligation ; que, sur la résiliation du contrat de fait, par un courrier du 7 avril 2010, le docteur X... a résilié le contrat de fait qui le liait à la clinique, précisant : « je reste à votre disposition pour rediscuter de mon départ et des conditions », courrier dont la clinique a accusé réception dès le 8 avril 2010, en répondant « j'accuse réception de votre lettre recommandée du 7 avril 2010 et prends acte de votre décision... Suite à notre entretien téléphonique, je vous confirme l'organisation d'une rencontre rapide afin de pouvoir évoquer le principe de votre démission. Je reste à votre disposition pour en fixer la date et les modalités pratiques... » ; qu'à défaut d'autres modalités librement déterminables entre les parties, les usages de la profession fixent à 12 mois le préavis d'un contrat : d'exercice s'agissant d'un exercice de moins de 10 ans et à 18 mois celui relatif à un exercice de plus de 10 ans ; qu'en l'espèce, par référence au contrat de fait du 2 décembre 2003, le docteur X... devait un préavis de 12 mois (même préavis que celui du contrat initial pour une durée inférieure à 10 ans), le contrat prenant ainsi fin le 7 avril 2011 ; que cependant, le docteur X... n'a cessé son activité au sein de la clinique que le 6 avril 2012, après l'avoir informée, par courrier du 27 février 2012, de l'effectivité de son départ. Si le principe d'une rupture était acquis, restait à en déterminer les modalités pratiques ; que l'implication du docteur X... dans la clinique où il continuait à occuper les fonctions de président de la CME, l'absence d'information sur la date de son départ ou de présentation d'un successeur, a pu laisser croire une fois encore, eu égard au précédent, qu'il n'y aurait pas de suite à cette rupture ; qu'or, le délai de préavis, délai de prévenance, permet aux deux parties de connaître avec certitude la date à laquelle elles sont réciproquement dégagées de leurs obligations, délai qui permet au praticien de se dédier de ses engagements mais aussi, qui permet à la clinique d'organiser son remplacement, afin de pallier toute rupture d'activité ; qu'à cet égard, le docteur X..., parti de la clinique à une date unilatéralement décidée, sans, qui plus est, présenter de successeur, a manqué à ses obligations nées du contrat de fait en ne respectant pas le délai de préavis prévu aux usages de la profession, de sorte qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré ; que sur le préjudice, la clinique Magdelaine soutient que la défection brutale du docteur X... lui a causé un préjudice considérable ; que le docteur X..., quant à lui, invoque l'article L. 162-2 du code de la sécurité sociale relatif à la liberté d'installation ; qu'or, il n'a jamais été question au cas d'espèce d'entraver le docteur X... dans la liberté qui est la sienne de s'installer comme il l'entend, mais d'organiser les ruptures conventionnelles qui bénéficient tant à la clinique qu'au praticien ; que selon l'attestation comptable en date du 19 juin 2012, l'activité du docteur X... représentait au titre de l'année 2011 une somme de 379. 648 euros, soit 36 % du chiffre d'affaire ; que le préjudice de la clinique ne saurait être constitué que de la perte en termes de résultats et non de la perte de chiffre d'affaire ; qu'à cet égard, la clinique chiffre la perte nette à la somme de 310. 000 euros annuels ; que, pour autant, le préjudice ne saurait s'analyser qu'au titre d'une perte de chance de réaliser le chiffre attendu ; qu'en effet, si la patientèle est liée à la clinique, elle tient aussi pour partie à la relation qui lie le praticien au patient ; qu'or, rien ne permet de considérer que le nouveau praticien aurait réalisé le même chiffre que son prédécesseur, de sorte que l'indemnisation dans le cadre de la perte d'une chance ne saurait dépasser 50 % de la perte nette, soit 139. 500 euros, somme à laquelle le docteur X... est condamné ;
1°) ALORS QU'en retenant la faute de monsieur X... sans rechercher si, comme ce dernier le soutenait (conclusions, p. 9), la durée du préavis qu'il avait effectivement accomplie, soit deux années, était raisonnable ou, à tout le moins, si celui-ci pouvait légitimement penser qu'elle l'était, eu égard au fait, d'une part, que la clinique ne l'avait pas informé qu'elle entendait appliquer un préavis d'un an, d'autre part, que le délai de deux ans était le délai maximal prévu par les usages de la profession, enfin, que le remplacement de monsieur X... serait difficile en raison du faible nombre de médecins exerçant, comme lui, la gastro-entérologie, la clinique comptant d'ailleurs un seul autre gastro-entérologue (conclusions, p. 9 et 10), la cour d'appel, qui ne pouvait se contenter de relever que le préavis d'usage était d'un an, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, de l'article 1147 du même code ;
2°) ALORS QU'en énonçant que monsieur X... avait commis une faute en s'imposant un préavis plus long que celui applicable, laissant croire à la clinique qu'il avait renoncé à la résiliation du 7 avril 2010, sans rechercher si, comme le soutenait monsieur X... (conclusions, p. 9), la clinique ne s'étant jamais étonnée ou inquiétée du fait que ce dernier poursuivait son activité au-delà de l'expiration du délai de préavis, et ne lui ayant adressé aucun courrier pour l'inviter au départ ou, à tout le moins, pour lui demander de la fixer sur ses intentions, il pouvait légitimement penser que cette situation était acceptée par la clinique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, de l'article 1147 du même code ;
3°) ALORS QU'en ne recherchant pas si, comme le soutenait monsieur X... (conclusions, p. 9), dès lors que la clinique ne s'était jamais étonnée ou inquiétée du fait que monsieur X... poursuivait son activité au-delà de l'expiration du délai de préavis, ne lui avait adressé aucun courrier pour l'inviter au départ ou, à tout le moins, pour lui demander de la fixer sur ses intentions, et n'avait pas fait de démarches pour préparer son départ, notamment en recherchant un successeur, elle avait commis une faute ayant contribué à son dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, de l'article 1147 du même code ;
4°) ALORS QUE la responsabilité civile a pour objet de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si le fait générateur n'était pas intervenu, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'en fixant le préjudice de la clinique né du comportement de monsieur X... à la perte de chance pour le successeur de celui-ci de réaliser un certain résultat sur une année d'exercice, sans expliquer en quoi la faute imputée à monsieur X..., consistant pour l'essentiel en un dépassement d'une année du délai de préavis, qui aurait laissé croire à la clinique que monsieur X... avait renoncé à son départ, avait fait perdre à la clinique le résultat d'une année d'exercice par un éventuel successeur, en d'autres termes, en quoi si monsieur X... avait accompli un préavis plus court d'un an, la clinique aurait obtenu le résultat d'une année d'exercice supplémentaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, de l'article 1147 du même code ;
5°) ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le successeur de monsieur X... n'aurait peut-être pas réalisé un résultat aussi important que son prédécesseur, ce dont il résultait que le fait que monsieur X... avait effectué une année supplémentaire par rapport au préavis applicable avait aussi été utile à la clinique ; qu'en ne tenant pas aussi compte, pour évaluer le montant des dommages-intérêts dus à la clinique, du bénéfice que celle-ci avait pu retirer de la faute imputée à monsieur X..., la cour d'appel privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, de l'article 1147 du même code ;
6°) ALORS QU'à supposer que la cour d'appel ait considéré que monsieur X... avait renoncé à la résiliation qu'il avait initiée par un courrier du 7 avril 2010 et était en conséquence fautif d'avoir arrêté son activité au sein de la clinique le 6 avril 2012 sans accomplir un nouveau préavis d'un an, cependant qu'elle avait uniquement relevé que monsieur X... avait « laissé croire » qu'il ne donnerait pas suite à sa rupture annoncée le 7 avril 2010, ce dont il résultait que monsieur X... n'avait eu aucune intention de renoncer à cette rupture, de sorte qu'il n'était pas tenu d'effectuer un nouveau préavis, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, l'article 1147 du même code ;
7°) ALORS, subsidiairement, QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'à supposer qu'elle ait considéré que monsieur X... avait renoncé à la résiliation qu'il avait initiée par un courrier du 7 avril 2010, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé d'actes non équivoques de renonciation, a violé l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, l'article 1147 du même code ;
8°) ALORS QUE la responsabilité civile a pour objet de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si le fait générateur n'était pas intervenu, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu'à supposer que la cour d'appel ait considéré que monsieur X... était fautif d'avoir arrêté son activité au sein de la clinique le 6 avril 2012 sans accomplir un préavis supplémentaire d'un an, en jugeant que cette faute avait fait perdre à la clinique le résultat d'une année d'exercice par un éventuel successeur, cependant que c'est, tout au plus, de la perte d'une année de préavis effectuée par monsieur X... dont pouvait se plaindre l'établissement de santé, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ou, subsidiairement, l'article 1147 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-26365
Date de la décision : 16/04/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 16 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 avr. 2015, pourvoi n°13-26365


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.26365
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