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25/03/2015 | FRANCE | N°13-26315

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 mars 2015, 13-26315


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mmes X... et Aude Y... et à M. Bruno Y... de ce qu'ils se désistent de leur pourvoi, en ce qu'il est formé contre le chef de dispositif de l'arrêt du 17 septembre 2013 par lequel la cour d'appel de Nancy a déclaré recevable l'opposition formée par Mme Bénédicte Y... ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Nancy, 22 novembre 2011 et 17 septembre 2013), que Pierre Y... est décédé le 21 mai 2006, laissant pour lui succéder ses six enfants Aude, X..., Vincent, Antoine, Claude et Bruno Y

... ; que M. Claude Y... a sollicité l'ouverture des opérations de comptes...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mmes X... et Aude Y... et à M. Bruno Y... de ce qu'ils se désistent de leur pourvoi, en ce qu'il est formé contre le chef de dispositif de l'arrêt du 17 septembre 2013 par lequel la cour d'appel de Nancy a déclaré recevable l'opposition formée par Mme Bénédicte Y... ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Nancy, 22 novembre 2011 et 17 septembre 2013), que Pierre Y... est décédé le 21 mai 2006, laissant pour lui succéder ses six enfants Aude, X..., Vincent, Antoine, Claude et Bruno Y... ; que M. Claude Y... a sollicité l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession ; que le premier arrêt a dit qu'était rapportable à la succession par M. Bruno Y... et Mme Aude Y..., comme acquis par eux avec des fonds donnés par leur auteur, un bien immobilier sis à Bormes-les-Mimosas ; que le second arrêt a déclaré recevable l'opposition formée par Mme Bénédicte Y... contre cet arrêt et dit n'y avoir lieu de le rétracter ;
Sur le moyen unique du pourvoi, en ce qu'il est formé par Mmes X... et Aude Y..., et les trois premiers moyens du pourvoi, en ce qu'il est formé par M. Bruno Y..., réunis et ci-après annexés :
Attendu qu'il est fait grief au second arrêt de rejeter la demande de rétractation du premier arrêt en ce qu'il a dit que le bien donné pour moitié à Mme Aude Y..., situé à La Bèque à Bormes-les-Mimosas, est rapportable à la succession et s'imputera sur sa part réservataire, et de dire irrecevable la demande de M. Bruno Y... tendant à voir juger qu'il n'y avait pas lieu à rapport de cet immeuble, dont il est copropriétaire avec sa soeur Mme Aude Y... ;
Attendu que, saisie de l'opposition formée par Mme Bénédicte Y..., la cour d'appel a constaté que cette dernière se bornait à demander la rétractation du chef de l'arrêt ayant décidé que Mme Aude Y... devait rapporter à la succession de Pierre Y... la donation qu'il lui avait consentie ; que l'opposante était dépourvue de qualité à demander la rétractation d'une disposition de l'arrêt ne lui faisant pas grief ; que, dès lors, les demandes de Mmes Y... et de M. Bruno Y... ne pouvaient qu'être écartées ; que, par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;
Mais sur le quatrième moyen du pourvoi, en ce qu'il est formé par M. Bruno Y..., pris en sa première branche, ci-après annexé :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour décider que M. Bruno Y... doit rapporter à la succession la moitié de l'immeuble situé à La Bèque à Bormes-les- Mimosas, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. Bruno Y... l'a reçu de Pierre Y... à titre de donation ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. Bruno Y... faisant valoir qu'il avait acquis cet immeuble en indivision avec sa soeur, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé par Mmes X... et Aude Y... ;
REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé par M. Bruno Y... contre l'arrêt rendu le 17 septembre 2013 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. Bruno Y... devra rapporter à la succession de Pierre Y... la moitié de l'immeuble situé à La Bèque à Bormes-les-Mimosas et s'imputera sur sa part de réserve, l'arrêt rendu le 22 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. Bruno Y...,
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 17 septembre 2013, statuant sur l'opposition, d'AVOIR rejeté la demande de rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 en ce qu'elle tendait à ce qu'il soit jugé que Mme Aude Y... avait été dispensée du rapport à succession de la partie indivise du bien immobilier situé à Bormes-les-Mimosas dont il lui avait été fait donation ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande de dispense de rapport à la succession, l'article 843 du code civil précise que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donation entre vifs, directement ou indirectement, et qu'il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ; qu'il s'en déduit que les dons doivent faire l'objet d'une dispense expresse de rapport et qu'à défaut, ils sont présumés rapportables ; qu'en l'occurrence, la partie indivise du bien immobilier dénommé "la Blèque" a été acquis e par Mme Aude Y... à l'aide de deniers provenant, selon cette dernière, de sa grand-mère, de sa tante et de son père, dont il est désormais soutenu que l'intention de ce dernier était de la dispenser du rapport en raison du contexte familial très particulier et plus précisément des viols dont elle a été victime de la part de son père ; que l'attestation rédigée par Mme Odile Z... ne contient aucune information relative à l'existence de dons effectués au profit de Mme Aude Y... et n'est au surplus confortée par aucune pièce ; que le testament daté du 16 juin 1998 (pièce n°4 produite par l'opposante), dont la validité n'a pas été remise en cause, ne permet pas, contrairement à ce que soutient Mme Bénédicte Y..., de dispenser Mme Aude Y... du rapport ; qu'en effet, aucun raisonnement a contrario ne peut être retenu pour la dispenser du rapport et il n'est pas possible de tirer argument de que ce testament ne comporte aucune référence expresse à Mme Aude Y... pour en déduire que M. Pierre Y... a entendu la dispenser du rapport ; que les termes de la loi sont très clairs en ce qu'ils exigent une disposition expresse pour la dispense de rapport ; que les autres courriers rédigés par M. Pierre Y... sont difficilement compréhensibles et ne contiennent pas de mention expresse visant à dispenser Mme Aude Y... du rapport à la succession concernant sa part indivise ; que les pièces évoquées par Mme Bénédicte Y..., à savoir les courriers et courriels échangés entre les héritiers, ne peuvent pas pallier l'absence de mention expresse de M. Pierre Y... exigée par l'article du code civil cité ci-dessus ; que la demande de dispense de rapport est donc rejetée » ;
1°) ALORS QUE la loi n'exige pas que la dispense de rapport soit formulée en termes sacramentels ; qu'il suffit que l'intention d'affranchir de l'obligation du rapport l'héritier donataire venant à la succession résulte de la volonté certaine du disposant ; qu'il appartient aux juges du fond de rechercher en tenant compte des circonstances dans lesquelles la donation est intervenue ; qu'en l'espèce, en rejetant la demande tendant à voir constater que Mme Aude Y... avait été dispensée par son père de rapporter à la succession de celui-ci la donation manuelle de deniers dont elle avait bénéficié pour l'acquisition de la moitié de la Villa de Bormes-les-Mimosas, au seul motif de l'absence de disposition expresse visant à dispenser Mme Aude Y... du rapport à sa succession concernant sa part indivise, la Cour d'appel a violé l'article 843 du Code civil ;
2°) ALORS QU'il appartient au juge, quand la dispense de rapport est invoquée, de rechercher la volonté du donateur en tenant compte de l'ensemble des circonstances dans lesquelles la donation est intervenue ; qu'en se retranchant derrière l'absence de disposition expresse pour s'abstenir de rechercher, comme le lui demandaient Mmes X... et Aude Y... et M. Bruno Y..., si la volonté de Pierre Y... de dispenser sa fille Aude de rapporter à la succession la donation qu'il lui avait faite ne résultait pas de ce que son testament indiquait qu'il serait tenu compte dans le partage des immeubles de ceux déjà reçus par Vincent et Bruno sans aucune référence faite à celui reçu par Aude, des courriers dans lesquels il précisait « n'être plus concerné par cette villa » ainsi que de son souhait ce faisant de réparer les sévices notamment sexuels qu'il lui avait fait subir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 843 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 17 septembre 2013, statuant sur l'opposition, d'AVOIR rejeté la demande de rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 en ce qu'elle tendait, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit jugé que Mme Aude Y... ne devait rapport à succession que de la moitié de la valeur de sa part indivise du bien immobilier situé à Bormes-les-Mimosas dont il lui avait été fait donation ;
AUX MOTIFS QUE « le rapport doit porter sur la moitié du bien dans la mesure où celui-ci faisait partie du patrimoine de la communauté ayant existé entre M. Pierre Y... et sa première épouse. La donation d'un bien commun est en effet rapportable par moitié à la succession de chacun des époux codonateurs ; que par ailleurs, Mme Aude Y... n'avait jusqu'à présent pas justifié de l'origine des fonds ayant servi à l'acquisition de ce bien et les pièces versées aux débats ne sont pas suffisantes pour démontrer les prêts allégués qui sont par ailleurs contredits par les écrits rédigés par M. Pierre Y... (courrier du 23 avril 1997 produit en pièce n°12 par M. Claude Y...) ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de rétracter l'arrêt rendu précédemment par la cour d'appel » ;
1°) ALORS QUE sauf clause particulière, la donation d'un bien commun est rapportable par moitié à la succession de chacun des époux codonateurs ; qu'en rejetant la demande de rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 tendant, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit jugé que le bien donné à Aude Y... serait seulement rapportable par moitié à la succession de Pierre Y... tout en relevant que « le rapport doit porter sur la moitié du bien dans la mesure où celui-ci faisait partie du patrimoine de la communauté ayant existé entre M. Pierre Y... et sa première épouse », la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles 843 et 850 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, la contradiction entre les motifs et le dispositif d'un jugement équivaut à une absence de motifs ; qu'en rejetant la demande de rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 tendant, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit jugé que le bien donné à Aude Y... serait seulement rapportable par moitié à la succession de Pierre Y... tout en relevant que « le rapport doit porter sur la moitié du bien dans la mesure où celui-ci faisait partie du patrimoine de la communauté ayant existé entre M. Pierre Y... et sa première épouse » et que « la donation d'un bien est en effet rapportable par moitié à la succession de chacun des époux codonateurs », la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et le dispositif, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 17 septembre 2013, statuant sur l'opposition, d'AVOIR jugé irrecevable la demande de M. Bruno Y... tendant à voir juger qu'il n'y avait pas lieu à rapport de l'immeuble de Bormes-les-Mimosas dont il est copropriétaire avec sa soeur Aude Y... ;
AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité des autres demandes formées par M. Claude Y..., M. Bruno Y... et Mme Aude Y..., l'article 572 du Code de procédure civile précise que l'opposition remet en question, devant le même juge, les points jugés par défaut pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; que toutefois, le défendeur à l'opposition ne peut pas rependre les prétentions dont il a été débouté par la décision rendue par défaut dès lors qu'elles sont dissociables des points nouveaux soumis à examen ; qu'en dehors de la demande de dispense de rapport du bien situé à Bormes les Mimosas formée au profit de Mme Aude Y..., Mme Bénédicte Y... n'a formulé aucune autre demande, ni aucune observation sur les points déjà jugés par la Cour ; que les prétentions relatives aux autres biens ou concernant les autres héritiers ne peuvent donc pas être reprises dès lors qu'elles sont dissociables du point évoqué ci-dessus qui a seul vocation à être soumis à un nouvel examen ; que, par conséquent, il n'y a pas lieu de procéder à l'examen de la demande formée par M. Claude Y... visant à voir dire que M. Vincent Bastien devra rapporter l'intégralité du bien donné, ni à celles formées par M. Bruno Y... et Mme Aude Y... visant à voir dispenser M. Bruno Y... de rapport pour l'immeuble situé à Bormes les Mimosas et à voir M. Claude Y... condamné à rapporter une valeur de 35.063,27 euros pour l'immeuble sis rue de Saurupt à Nancy, aucune demande n'ayant été formulée à ce sujet par Mme Bénédicte Y... » ;
1°) ALORS QUE l'indissociabilité unissant les deux chefs de dispositif d'un arrêt s'apprécie en l'état de ses motifs ; qu'en jugeant dissociable, et partant irrecevable, la demande de M. Bruno Y... tendant à être dispensé de rapport de l'immeuble situé à Bormes-les-Mimosas de la demande de l'opposante, jugée recevable, en rétractation du chef de dispositif de l'arrêt du 22 novembre 2011 ayant rejeté la prétention tendant à voir Mme Aude Y... dispensée de rapport pour ce même immeuble, tandis que cette décision frappée d'opposition avait jugé « que ce qui est valable pour Aude Y... est nécessairement applicable à Bruno copropriétaire indivis », ce dont il résultait que le chef de dispositif concernant M. Bruno Y... était indissociable de celui concernant Mme Aude Y..., la Cour d'appel a violé l'article 572 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier ou le deuxième moyen entraînera la cassation par voie de conséquence de l'arrêt en ce qu'il a jugé la demande de M. Bruno Y... irrecevable, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 22 novembre 2011, frappé d'opposition, d'AVOIR, par confirmation du jugement, dit que le bien donné par moitié à M. Bruno Y... et Mme Aude Y... sis à « La Blèque » Bormes-les-Mimosas était rapportable à la succession et s'imputerait sur les parts réservataires de M. Bruno Y... et de Mme Aude Y... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « force est de constater au vu des productions que Madame Aude Y... a implicitement reconnu que le bien dit de "La Blèque" devait entrer dans la succession ainsi qu'il résulte d'un e-mail adressé à "Bastien A..." le 4 octobre 2006 et relatif à la valeur du dit bien dans le cadre de la succession du de cujus ; que ce qui est valable pour Aude Y... est nécessairement applicable à Bruno copropriétaire indivis, observation étant faite que ni l'un ni l'autre ne peuvent justifier de l'origine des fonds ayant servi à l'acquisition et démentir le contenu du testament et des autres documents émanant de leur père et établissant l'intention libérale de celui-ci envers ses enfants (cf. le courrier adressé par Pierre Y... à Bruno Y... le 7 septembre 1993) » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « bien qu'aucun document notarié ou cadastral ne soit versé aux débats, il résulte des pièces produites et notamment des échanges de correspondance au sein de la fratrie que cet immeuble a été donné par moitié à Mme Aude Y... et M. Bruno Y... ; que le caractère rapportable de cette donation résulte en ce qui concerne M. Bruno Y... du testament de M. Pierre Y... et en ce qui concerne Mme Aude Y... de la présomption légale qu'elle n'est pas venue contredire » ;
1°) ALORS QUE la donation suppose le transfert de propriété ; qu'en jugeant que M. Bruno Y... avait reçu de M. Pierre Y... la moitié de l'immeuble de Bormes-les-Mimosas, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'immeuble en cause n'était pas étranger à la succession de M. Pierre Y... pour avoir été directement acquis en leur nom en indivision par M. Bruno Y... et sa soeur, Mme Aude Y..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 843 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006 ;
2°) ALORS QUE le rapport n'est dû par l'héritier à la succession que de ce qu'il a reçu du défunt par donation ; qu'en considérant que « ce qui est valable pour Aude Y... est nécessairement applicable à Bruno copropriétaire indivis » pour déduire l'existence d'une dette de rapport de M. Bruno Y... au titre de l'immeuble de Bormes-les-Mimosas de la reconnaissance par Mme Aude Y... de ce que cet immeuble devait entrer dans la succession de leur père, la Cour s'est prononcée par un motif qui n'était pas de nature à caractériser l'existence d'une donation rapportable au profit de M. Bruno Y... et privé sa décision de base légale au regard de l'article 843 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006 ;
3°) ALORS QU'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; qu'en déduisant le caractère rapportable de l'immeuble de Bormes-les-Mimosas appartenant indivisément à M. Bruno Y... et Mme Aude Y... de ce que ni l'un ni l'autre ne pouvaient justifier de l'origine des fonds ayant servi à son acquisition, quand la preuve de ce que l'acquisition du bien litigieux avait été faite au moyen de fonds donnés par le défunt incombait à l'auteur de cette prétention, la Cour d'appel a violé l'article 9 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le rapport n'est dû par l'héritier à la succession que de ce qu'il a reçu du défunt par donation ; qu'en retenant que M. Bruno Y... ne démentait pas le contenu du testament et des autres documents émanant de son père établissant l'intention libérale de celui-ci, la Cour s'est prononcée par un motif impropre à caractériser l'existence d'une donation rapportable de fonds qui auraient seule permis à de M. Bruno Y... d'acquérir sa part indivise de l'immeuble de Bormes-les-Mimosas et privé sa décision de base légale au regard de l'article 843 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006.Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mmes X... et Aude Y...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 en ce qu'il dit que le bien donné pour moitié à Mme Aude Y... sis à ... les mimosas est rapportable à la succession et s'imputera sur sa part réservataire ;
AUX MOTIFS QUE l'article 843 du code civil précise que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donation entre vifs, directement ou indirectement, et qu'il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ; qu'il s'en déduit que les dons doivent faire l'objet d'une dispense expresse de rapport et qu'à défaut, ils sont présumés rapportables ; qu'en l'occurrence, la partie indivise du bien immobilier dénommé « la Blèque » a été acquis par Mme Aude Y... à l'aide de dernier provenant, selon cette dernière, de sa grand-mère, de sa tante et de son père, dont il est désormais soutenu que l'intention de ce dernier était de la dispenser du rapport en raison du contexte familial très particulier et plus précisément des viols dont elle a été victime de la part de son père ; que l'attestation rédigée par Mme Odile Z... ne contient aucune information relative à l'existence de dons effectués au profit de Mme Aude Y... et n'est au surplus confortée par aucune pièce ; que le testament daté du 16 juin 1998 (pièce n° 4 produite par l'opposante), dont la validité n'est pas remise en cause, ne permet pas, contrairement à ce que soutient Mme Bénédicte Y..., de dispenser Mme Aude Y... du rapport ; qu'en effet, aucun raisonnement a contrario ne peut être retenu pour la dispenser du rapport et il n'est pas possible de tirer argument de ce que ce testament ne comporte aucune référence expresse à Mme Aude Y... pour en déduire que M. Pierre Y... a entendu la dispenser du rapport ; que les termes de la loi sont très clairs en ce qu'ils exigent une disposition expresse pour la dispense de rapport ; que les autres courriers rédigés par M. Pierre Y... sont difficilement compréhensibles et ne contiennent pas de mention expresse visant à dispenser Mme Aude Y... du rapport à la succession concernant sa part indivise ; que les pièces évoquées par Mme Bénédicte Y..., à savoir les courriers et courriels échangés entre les héritiers ne peuvent pas pallier l'absence de mention expresse de M. Pierre Y... exigée par l'article du code civil cité ci-dessus ; que la demande de dispense de rapport est donc rejetée ; que le rapport doit porter sur la moitié du bien dans la mesure où celui-ci faisait partie du patrimoine de la communauté ayant existé entre M. Pierre Y... et sa première épouse ; que la donation d'un bien commun est en effet rapportable par moitié à la succession de chacun des époux co-donateurs ; que par ailleurs, Mme Aude Y... n'avait jusqu'à présent pas justifié de l'origine des fonds ayant servi à l'acquisition de ce bien et les pièces versées aux débats en sont pas suffisantes pour démontrer les prêts allégués qui sont par ailleurs contredits par les écrits rédigés par M. Pierre Y... (courrier du 23 avril 1997 produit en pièce n° 12 par M. Claude Y...) ; qu'en conséquence il n'y a pas lieu de rétracter l'arrêt rendu précédemment par la cour d'appel ;
ALORS D'UNE PART QUE la loi n'exige pas que la dispense de rapport soit formulée en termes sacramentels ; qu'il suffit que l'intention d'affranchir de l'obligation du rapport l'héritier donataire venant à la succession résulte de la volonté certaine du disposant qu'il appartient aux juges du fond de rechercher en tenant compte des circonstances dans lesquelles la donation est intervenue ; qu'en l'espèce, en rejetant la demande tendant à voir constater que Mme Aude Y... a été dispensée par son père de rapporter à la succession de celui-ci la donation manuelle de deniers dont elle a bénéficié pour l'acquisition de la moitié de la Villa de Bormes-les-Mimosas, au seul motif de l'absence de disposition expresse visant à dispenser Mme Aude Y... du rapport à sa succession concernant sa part indivise, la cour d'appel a violé l'article 843 du code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE il appartient au juge, quand la dispense de rapport est invoquée, de rechercher la volonté du donateur en tenant compte de l'ensemble des circonstances dans lesquelles la donation est intervenue ; qu'en se retranchant derrière l'absence de disposition expresse pour s'abstenir de rechercher, comme le lui demandaient Mmes X... et Aude Y..., si la volonté de Pierre Y... de dispenser sa fille Aude de rapporter à la succession la donation qu'il lui avait faite ne résultait pas de ce que son testament indiquait qu'il serait tenu compte dans le partage des immeubles de ceux déjà reçus par Vincent et Bruno sans aucune référence faite à celui reçu par Aude, des courriers dans lesquels il précisait « n'être plus concerné par cette villa » ainsi que de son souhait ce faisant de réparer les sévices notamment sexuels qu'il lui avait fait subir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 843 du code civil ;
ALORS ENFIN, et en toute hypothèse, QUE tout jugement doit être motivé ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'ayant exactement retenu que le rapport doit porter sur la moitié du bien dans la mesure où celui-ci faisait partie du patrimoine de la communauté ayant existé entre M. Pierre Y... et sa première épouse, la cour d'appel qui a cependant rejeté la rétractation de l'arrêt rendu le 22 novembre 1991 lequel, par confirmation du jugement entrepris, avait dit que le bien donné à Mme Aude Y... sis à ... les Mimosas est rapportable à la succession de M. Pierre Y... et s'imputerait sur la part réservataire de Mme Aude Y..., a privé sa décision de motif, a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-26315
Date de la décision : 25/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 17 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 mar. 2015, pourvoi n°13-26315


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.26315
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