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24/03/2015 | FRANCE | N°14-50046

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 mars 2015, 14-50046


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 17 avril 2014), que la société 2 CM production (la société) ayant été mise en liquidation judiciaire le 29 novembre 2010, le procureur de la République a, le 28 janvier 2013, déposé une requête aux fins de voir prononcer à l'encontre de MM. X... et Y..., respectivement président et fondé de pouvoir de la société, une mesure d'interdiction de gérer ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le procureur général fait grief à l'arrêt de rejeter la de

mande du ministère public tendant au prononcé, à l'encontre des anciens dirigeants de la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 17 avril 2014), que la société 2 CM production (la société) ayant été mise en liquidation judiciaire le 29 novembre 2010, le procureur de la République a, le 28 janvier 2013, déposé une requête aux fins de voir prononcer à l'encontre de MM. X... et Y..., respectivement président et fondé de pouvoir de la société, une mesure d'interdiction de gérer ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le procureur général fait grief à l'arrêt de rejeter la demande du ministère public tendant au prononcé, à l'encontre des anciens dirigeants de la société, d'une mesure d'interdiction de gérer alors, selon le moyen, que si les dispositions de l'article L. 653-5-5° du code de commerce ne sont applicables qu'aux seuls dirigeants s'abstenant, de manière délibérée, de coopérer avec les organes de la procédure, elles n'imposent pas, à l'inverse, la démonstration préalable que ces derniers aient eu pour finalité de faire obstacle au bon fonctionnement de la procédure, étant suffisant de relever que leur comportement a eu ce résultat pour conséquence ;

Mais attendu que, loin de se borner à constater que la passivité des dirigeants ne manifestait pas leur volonté de faire obstacle au bon déroulement de la procédure collective, l'arrêt relève que la comptabilité de la société était tenue régulièrement, qu'un seul rendez-vous avait été fixé par le mandataire judiciaire et manqué par M. X... et qu'il n'est fait état d'aucun élément spécifique quant à l'incidence de ce comportement sur le bon déroulement de la procédure ; que par ces motifs, dont il résulte qu'il n'était pas établi que l'abstention volontaire des dirigeants sociaux avait fait obstacle à celui-ci, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le procureur général fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, qu'en imposant pour l'application du texte susvisé deux conditions supplémentaires absentes de la loi, d'une part, la nécessité de délivrance d'une mise en demeure préalable faisant suite à une première demande restée sans effet pour constituer le débiteur de mauvaise foi, d'autre part, la nécessité d'apporter la preuve préalable qu'il ait eu l'intention de porter atteinte aux droits des créanciers, la cour a violé l'article L. 653-8, alinéa 2, du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève que, si une négligence des dirigeants est avérée, la société avait cessé son activité depuis deux ans, qu'elle n'employait plus aucun salarié et que M. X... avait souffert de sérieux ennuis de santé ; que par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux critiqués, la cour d'appel a caractérisé l'absence de mauvaise foi du dirigeant dans la rétention des informations qu'il devait transmettre au liquidateur ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par le procureur général près la cour d'appel de Caen

1er MOYEN :

alors que : selon les dispositions combinées des articles L. 653-5 5ème et L. 653-8 1er alinéa du code de commerce, le tribunal peut prononcer l'interdiction de diriger, gérer une personne morale à l'encontre des dirigeants qui se sont abstenus volontairement de coopérer avec les organes de la procédure et ont fait obstacle à son bon fonctionnement

en rejetant : "la demande du ministère public tendant au prononcé à l'encontre de Monsieur Fabien X..., président de la SAS 2 CM Production et Monsieur Y..., fondé de pouvoir de ladite société, d'une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale..."

au motif que : "il n'est pas établi que cette passivité initiale des dirigeants manifeste leur volonté de faire obstacle au bon déroulement de la procédure collective."

alors que : si les dispositions de l'article L. 653-5 5ème du code de commerce ne sont applicables qu'aux seuls dirigeants s'abstenant, de manière délibérée, de coopérer avec les organes de la procédure, elles n'imposent pas, à l'inverse, la démonstration préalable que ces derniers aient eu pour finalité de faire obstacle au bon fonctionnement de la procédure, étant suffisant de relever que leur comportement a eu ce résultat pour conséquence ;

Que ce faisant, la cour a ajouté une condition supplémentaire au texte susvisé et sa décision encourt cassation pour violation des dispositions de l'article L. 653-5 5ème du code de commerce.

2ème MOYEN :

alors que : selon les dispositions de l'article L. 653-8 alinéa 2 du code de commerce, le tribunal peut prononcer l'interdiction de diriger, gérer une personne morale à l'encontre des dirigeants qui, de mauvaise foi, n'auront pas remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur les renseignements qu'il est tenu de lui communiquer en application de l'article L. 622-6 dans le mois,

en rejetant : "la demande du ministère public tendant au prononcé à l'encontre de Monsieur Fabien X..., président de la SAS 2 CM Production et Monsieur Y..., fondé de pouvoir de ladite société , d'une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administre ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale..."

au motif que : si "Monsieur Fabien X... était pour sa part informé de son obligation par le courrier du 30 novembre 2010... si une négligence de sa part est ainsi avérée, il n'est pas allégué, ni en tout état de cause établi que le mandataire liquidateur l'ait, suite à son absence du 9 décembre 2010, mis en vain en demeure de lui fournir les informations déjà réclamées... l'intention de Monsieur X... de porter atteinte aux droits des créanciers de la SAS 2 CM Production n'est pas établie..."

alors que : en imposant pour l'application du texte susvisé deux conditions supplémentaires absentes de la loi, d'une part la nécessité de délivrance d'une mise en demeure préalable faisant suite à une première demande restée sans effet pour constituer le débiteur de mauvaise foi, d'autre part la nécessité d'apporter la preuve préalable qu'il ait eu l'intention de porter atteinte aux droits des créanciers, la cour a violé l'article L. 653-8 alinéa 2 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-50046
Date de la décision : 24/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 17 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 mar. 2015, pourvoi n°14-50046


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.50046
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