La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2015 | FRANCE | N°14-11349

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 mars 2015, 14-11349


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 4 décembre 2013), qu'après notification par la caisse régionale d'assurance maladie du Nord Pas-de-Calais devenue la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Nord-Picardie (la CARSAT), des taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les années 2011 et 2012 pr

enant en compte les dépenses pour la maladie professionnelle décla...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 4 décembre 2013), qu'après notification par la caisse régionale d'assurance maladie du Nord Pas-de-Calais devenue la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Nord-Picardie (la CARSAT), des taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les années 2011 et 2012 prenant en compte les dépenses pour la maladie professionnelle déclarée en 2009 par un de ses salariés, la société Manpower France (la société) a saisi d'un recours la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours ;
Mais attendu que l'arrêt énonce qu'en application des articles D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale et 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 sont inscrites au compte spécial les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées notamment lorsque la victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ; qu'il relève que le salarié a été employé par plusieurs entreprises du 7 janvier 1987 au 30 mars 2007 ; qu'il n'a jamais déclaré avant son embauche par la société Manpower une maladie professionnelle du tableau n° 57 ; qu'il a travaillé pour cette société en qualité de tulliste du 10 avril 2006 au 18 septembre 2006, du 24 septembre 2007 au 31 octobre 2007 et du 27 février 2008 au 20 mars 2008 ; qu'il a déclaré le 27 janvier 2009 une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 57 qui a été prise en charge à compter de cette date ; qu'aucune pièce ne démontre que chez les précédents employeurs, les conditions de travail auxquelles il état soumis, étaient susceptibles de l'exposer au risque de la maladie en cause ; qu'il est établi que le salarié a été exposé au risque au sein de la société Manpower dès lors qu'il y a travaillé trois ans avant de déclarer la maladie et que le caractère professionnel de la maladie n'est pas contestée par cette société ; qu'en conséquence les travaux effectués par le salarié au sein de la société Manpower seront considérés comme seuls à l'origine de la maladie professionnelle ;
Que de ces énonciations et constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la Cour nationale a pu, hors de toute dénaturation des pièces produites et par une motivation suffisante, déduire que le salarié n'avait pas été exposé au risque chez les précédents employeurs de sorte que les dépenses afférentes à la maladie professionnelle dont il était atteint devaient être inscrites au compte de la seule société Manpower ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Manpower aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Manpower et la condamne à payer à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail de Nord-Picardie la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Manpower France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré mal fondé le recours de la société MANPOWER contre la décision de la CARSAT NORD PICARDIE fixant ses taux de cotisations 2011 et 2012 et dit n'y avoir lieu d'inscrire au compte spécial les frais relatifs à la maladie professionnelle de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le fond : L'article D.242-6-7 du code de la sécurité sociale dispose que les maladies professionnelles constatées ou contractées dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ne sont pas imputées au compte de l'employeur mais inscrites à un compte spécial ; qu'au regard des dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995, dans son 4ème alinéa, sont inscrites au compte spécial les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées dans les conditions suivantes : 4° La victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie" ; que dès lors que l'employeur n'a pas contesté la prise en charge de la maladie au titre des accidents du travail/maladies professionnelles devant le contentieux général, le salarié est considéré avoir été exposé au risque de la maladie professionnelle au sein de l'entreprise et la maladie est considérée avoir été contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque avant sa constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire ; qu'en l'espèce, il apparaît au vu des pièces versées aux débats : - que M. Frédéric X... a été employé par les entreprises suivantes : - la société BRUNET du 7 janvier 1987 au 7 février 1987, - la société DLR LEAVERS du 12 février 1987 au 21 mars 1987, - la société HOUILLE DENTELLES du 15 octobre 1987 au 14 novembre 1987, - la société NOYON DENTELLES du 16 juin 1987 au 29 novembre 2005, - la société SOPHIE HALLETTE du 18 septembre 2006 au 30 mars 2007, avant d'entrer au service de la société MANPOWER, -qu'il n'a jamais déclaré avant son embauche par la société MANPOWER, une maladie professionnelle du tableau n° 57, - qu'il a travaillé en qualité de tulliste du 10 avril 2006 au 18 septembre 2006, du 24 septembre 2007 au 31 octobre 2007 et du 27 février 2008 au 20 mars 2008 pour la société MANPOWER, - qu'il a déclaré le 27 janvier 2009 une maladie professionnelle, inscrite au tableau n° 57, qui a été prise en charge à compter de cette date ; que la Cour estime qu'à lui seul le moyen tiré de l'exercice d'une activité similaire chez de précédents employeurs ne saurait suffire. En l'espèce, aucune pièce n'a été versée de nature à démontrer que chez les précédents employeurs de M. Frédéric X..., les conditions de travail auxquelles il était soumis étaient susceptibles de l'exposer au risque de la maladie en cause ; qu'en effet, le rapport de l'enquête administrative de la caisse primaire d'assurance maladie auquel se réfère la société MANPOWER ne fait que reprendre les explications fournies par M. Frédéric X... mais ne donne aucune précision sur les conditions réelles d'exercice de ses activités précédentes ; que par ailleurs, si l'avis du CRRMP du 19 août 2009 fait état d'une exposition professionnelle au risque, la Cour observe cependant que la maladie professionnelle s'est déclarée 3 ans après l'entrée de M. Frédéric X... au sein de la société MANPOWER, dans un cycle professionnel d'intérim, et alors que le tableau n° 57 des maladies professionnelles ne prévoit aucun délai d'exposition au risque ; qu'il est donc suffisamment établi que M. Frédéric X... a été exposé au risque au sein de l'entreprise requérante dès lors qu'il y a travaillé plus de 3 ans avant de déclarer la maladie et que le caractère professionnel de la maladie n'a pas été contesté par la Société demanderesse ; qu'en conséquence, les travaux effectués par M. Frédéric X... au sein de la société MANPOWER seront considérés comme étant seuls à l'origine de la maladie professionnelle et les dépenses en résultant devront être maintenues au compte de la société » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de l'article 2,4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 que sont inscrites au compte spécial, conformément aux dispositions de l'article D. 242-6-7 du Code de la sécurité sociale, les dépenses afférentes aux maladies professionnelles contractées par un salarié ayant été exposé au risque successivement dans plusieurs établissements sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ; que la présomption selon laquelle la maladie est réputée avoir été contractée chez le dernier employeur ne joue que lorsque la prise en charge résulte de la mise en oeuvre de la présomption d'imputabilité sur le fondement d'un tableau de maladies professionnelles ; qu'aucune présomption ne saurait jouer lorsque le salarié n'a pas été soumis au risque prévu par un tableau et que le caractère professionnel de la maladie est établi sur le fondement d'un lien direct entre la maladie et le travail habituel effectué par le salarié tout au long de sa carrière chez ses différents employeurs ; qu'au cas présent, la société MANPOWER exposait que Monsieur X... n'avait pas accompli des travaux prévus par le tableau n°57 et que le caractère professionnel de la maladie avait été établi sur le fondement de l'avis d'un CRRMP qui se fondait sur les conditions de travail du salarié tout au long de sa carrière chez ses différents employeurs, notamment la société LEAVER ; qu'en jugeant que les travaux effectués par Monsieur X... au sein de la société MANPOWER seront considérés comme étant seuls à l'origine de la maladie professionnelle, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si les travaux effectués par le salarié ne correspondaient pas aux travaux prévus par le tableau professionnel n°57 et sans examiner la manière dont le CRRMP avait établi le lien entre la maladie et le travail habituel du salarié, la CNITAAT n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 461-1 et D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 2,4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se fondant sur le fait que Monsieur X... n'avait jamais déclaré de maladie du tableau n°57 avant son embauche par la société MANPOWER et sur le fait que le tableau n°57 ne prévoit aucun délai d'exposition au risque pour considérer les travaux effectués par Monsieur X... au sein de la société MANPOWER comme étant seuls à l'origine de la maladie professionnelle, cependant qu'il résultait des éléments produits aux débats que le salarié n'avait pas accompli des travaux décrits par le tableau n°57 et que la maladie avait été prise en charge à la suite de l'avis d'un CRRMP sur le fondement des alinéas 3 et 5 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a fondé sa décision sur des motifs inopérants en violation des articles L. 461-1 et D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale et de l'article 2,4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE l'avis favorable du CRRMP fondant la décision de prise en charge de la maladie de Monsieur X... était motivé de la manière suivante : « Monsieur X... Frédéric, né en 1971, travaille depuis 1987 comme tulliste dans différentes entreprises. Il présente une tendinite rotulienne gauche en date du 21.03.08. Le dossier nous est présenté pour un travail hors liste limitative des travaux. Toutefois, après avoir entendu le service prévention de la CRAM, le CRRMP constate, après nouvelle étude du poste de travail de l'intéressé que durant le chargement du métier à tisser, en particulier sur le métier « LEAVERS », la position travail à genoux est relativement fréquente parfois pendant plusieurs heures lors des opérations de réglage, alimentation, chargement des rouleaux. La gestuelle est répétitive consécutive à la configuration du poste de travail et à la chronologie des opérations successives à réaliser. Pour toutes ces raisons, il convient de retenir un lien direct entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle » ; qu'il résulte des termes clairs et précis de ce document que le CRRMP s'est fondé sur les conditions d'exercice du métier de tulliste exercé par Monsieur X... tout au long de sa carrière et notamment de ses conditions de travail au sein de la société LEAVERS et non, sur les conditions de travail pour le compte de la seule société MANPOWER ; qu'en estimant qu'il n'était versé aucune pièce « de nature à démontrer que chez les précédents employeurs de M. Frédéric X..., les conditions de travail auxquelles il était soumis étaient susceptibles de l'exposer au risque de la maladie en cause » (arrêt p. 7 al. 5), la CNITAAT a dénaturé par omission l'avis déterminant du CRRMP en violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents produits aux débats ;
ALORS, ENFIN, QUE toute décision de justice doit être motivée à peine de nullité et que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; que la CNITAAT a constaté que Monsieur X... « a travaillé en qualité de tulliste du 10 avril 2006 au 18 septembre 2006, du 24 septembre 2007 au 31 octobre 2007 et du 27 février 2008 au 20 mars 2008 pour la société MANPOWER », ce dont il résultait que Monsieur X... avait travaillé pendant sept mois sur une période de moins de deux ans ; qu'en affirmant par ailleurs qu'il est « suffisamment établi que M. Frédéric X... a été exposé au risque au sein de l'entreprise requérante dès lors qu'il y a travaillé plus de 3 ans avant de déclarer la maladie », la CNITAAT a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-11349
Date de la décision : 12/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT), 04 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 mar. 2015, pourvoi n°14-11349


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11349
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award