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10/03/2015 | FRANCE | N°13-27222

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 mars 2015, 13-27222


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 2 octobre 2013), qu'invoquant une prescription acquisitive trentenaire, Mme X... a introduit à l'encontre du syndicat intercommunal du domaine d'Alzitone, une action en revendication de propriété sur diverses parcelles à laquelle il a été fait droit par arrêt du 7 décembre 2011 de la cour d'appel de Bastia ; que MM. Y... ont formé tierce opposition contre cet arrêt et appelé dans la procédure Mme Z..., le syndicat intercommunal et les communes de Ghisonacci

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 2 octobre 2013), qu'invoquant une prescription acquisitive trentenaire, Mme X... a introduit à l'encontre du syndicat intercommunal du domaine d'Alzitone, une action en revendication de propriété sur diverses parcelles à laquelle il a été fait droit par arrêt du 7 décembre 2011 de la cour d'appel de Bastia ; que MM. Y... ont formé tierce opposition contre cet arrêt et appelé dans la procédure Mme Z..., le syndicat intercommunal et les communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Poggio di Nazza et Lugo di Nazza ; qu'ils ont été reçus en leur tierce opposition par arrêt de la cour d'appel de Bastia du 2 octobre 2013 ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de Mme X... que les pouvoirs des représentant des personnes morales présentes à l'instance aient été contestés ; que le seul défaut de justification du pouvoir d'une personne figurant au procès comme représentant d'une personne morale, susceptible de régularisation en cours de procédure, ne constitue pas une irrégularité de fond qui devrait être relevée d'office si elle présentait un caractère d'ordre public ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé qu'eu égard aux dispositions de l'article 584 du code de procédure civile, les consorts Y..., tiers opposants, avaient appelé à la procédure la commission syndicale du domaine d'Altizone et les quatre communes concernées, la cour d'appel en a exactement déduit que leur intervention forcée était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt rétracte le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui avait déclaré Mme X... propriétaire par voie d'usucapion des parcelles cadastrées AH 11, 13, 15, 16 et 71 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les consorts Y... n'avaient pas demandé la rétractation du jugement à l'égard de la parcelle cadastrée AH 11, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rétracté l'arrêt du 7 décembre 2011 infirmant le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui avait déclaré Mme X... propriétaire par voie d'usucapion de la parcelle cadastrée AH11 à Ghisonaccia, l'arrêt rendu le 2 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bastia, autrement composée ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour Mme Marie X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable la tierceopposition formée par le syndicat du domaine d'Alzitone et les communes de Lugo di Nazza et de Ghisonaccia ;
Aux motifs que, « Attendu qu'il résulte des articles 54 et 587 du code de procédure civile que la tierce opposition formée à titre principal est portée devant la juridiction dont émane la décision attaquée par voie d'assignation ou de remise d'une requête conjointe au secrétariat de la juridiction ;
Qu'en outre l'article 585 de ce même code dispose que tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n'en dispose autrement et son article 584 précise qu'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties au jugement attaqué, la tierce opposition n'est recevable que si toutes ces parties sont appelées à l'audience ;
Que par ailleurs, en application des dispositions de l'article 583 du code de procédure civile est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt à condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ;
Qu'en l'espèce, Dominique et Pierre-Jean Y... ont intérêt à former tierce opposition à l'arrêt du 7 décembre 2011, lequel leur porte un préjudice certain en ce qu'il a déclaré Mme Z... propriétaire par usucapion de parcelles dont ils soutiennent avoir la possession et assurer l'exploitation ;
Que n'ayant été ni parties ni représentés à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt précité, ils sont recevables en leur tierce opposition formée par assignation des 2 et 14 mai 2012 ;
Qu'ils ont, eu égard aux dispositions de l'article 584 précité, à juste raison appelé à la procédure sur tierce opposition les quatre communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Lugo di Nazza et Poggio di Nazza, propriétaires indivises du Domaine d'Alzitone dont font partie les parcelles dont la propriété a été reconnue à Mme Z... et qui à tort n'avaient pas été mises en cause lors de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 7 décembre 2011 ;
Attendu que la procédure est ainsi régulière et les communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza ont elles-mêmes intérêt à faire observer que l'action en revendication immobilière initiée par Mme Z... qui n'avait pas été engagée contradictoirement à leur égard, avait été mal dirigée à l'encontre de la commission syndicale qui n'avait pas vocation à défendre seule dans le cadre d'une telle instance ;
Que leurs droits de propriété indivis étant en cause, elles sont ellesmêmes recevables à se joindre avec la commission syndicale des biens indivis du Domaine d'Alzitone à la tierce opposition des consorts Y... et à solliciter dans leurs écritures la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 ;
Que les conclusions de Mme Z... tendant à l'irrecevabilité de la présente tierce opposition seront rejetées et cette dernière déclarée recevable comme les demandes des communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza ainsi que de la commission syndicale du Domaine d'Alzitone ; »
Alors que, d'une part, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte de procédure le défaut de pouvoir d'une partie figurant au procès comme représentant d'une personne morale ; qu'une telle irrégularité de fond doit être relevé d'office par le juge comme ayant un caractère d'ordre public ; qu'en l'espèce, les représentants de la commission syndicale intercommunale du domaine d'Alzitone comme des communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza ne justifiaient d'aucun pouvoir pour représenter ces personnes morales à l'instance ; qu'en ayant néanmoins déclarés leur tierce-opposition recevable, sans avoir vérifié d'office que les représentants la commission syndicale intercommunale du domaine d'Alzitone comme des communes de Ghisonaccia et de Lugo di Nazza disposaient des pouvoirs leur permettant de représenter ces personnes morales, la Cour d'appel, qui aurait dû relever d'office un tel moyen, a violé les articles 117 et 120 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont un intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité ; qu'en l'espèce, en déclarant recevable l'intervention de la commission syndicale intercommunale du domaine d'Alzitone, qui avait pourtant été assignée en 2010 devant le Tribunal de grande instance de Bastia, quoique défaillante, puis intimée en 2011 devant la Cour d'appel de Bastia, quoiqu'encore défaillante, la Cour d'appel a violé l'article 554 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement de première instance en ce qu'il avait débouté Madame Z... de son action en revendication immobilière des parcelles AH 11, AH 13, AH 15, AH 16 et AH 71 ;
Aux motifs que, « Attendu qu'il importe de faire observer que le tiers opposant est dans une situation semblable à celle où il se serait trouvé s'il était intervenu à l'instance pour résister à l'action et que le juge doit se déterminer d'après les circonstances particulières du procès et non par voie de référence au jugement dont il est fait tierce opposition auquel les tiers opposants n'étaient pas parties ;
Qu'il s'ensuit que comme dans toute action en revendication, la charge de la preuve incombe au demandant soit en l'espèce Mme Z... qui se prévaut d'une usucapion et qui est tenue de rapporter la preuve de la possession trentenaire qu'elle invoque ;
Qu'en effet, en application des articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, donation entre vifs ou testamentaire, par l'effet des obligations de même que par accession, incorporation ou prescription ;
Attendu qu'aux termes de l'article 2261 du code civil pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ;
Attendu que si l'on peut joindre sa possession à celle de son auteur pour compléter la prescription conformément à l'article 2265 du code civil, l'article 2266 dispose toutefois que ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais par quelques laps de temps que ce soit ;
Qu'ainsi le locataire, le dépositaire, l'usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent le prescrire ;
Attendu que les modes de preuve de la propriété immobilière étant libres, il appartient au juge de rechercher le droit applicable au regard des faits et des éléments produits et d'apprécier la portée des preuves qui lui sont soumises lorsqu'elles peuvent entrer en contradiction ;
Attendu que si les terrains du Domaine d'Alzitone propriétés indivises des communes de. Ghisonaccia, Ghisoni, Lugo di Nazza et Poggio di Nazza peuvent faire l'objet de prescription acquisitive, encore faut-il que la possession du revendiquant réponde aux critères cumulatifs mentionnés à l'article 2261 sus-indiqué ;
Attendu qu'il n'est en l'espèce nullement contesté que les parcelles dont Mme Z... a revendiqué la propriété par usucapion sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia et cadastrées AH 11, 13, 15, 16 et 71 font partie du Domaine d'Alzitone dont les communes susmentionnées sont propriétaires indivises et qui sont gérées par application de l'article L 5222-1 du code général des collectivités territoriales par une commission syndicale ;
Que si celle-ci a qualité pour agir et défendre en justice, il n'en demeure pas moins que l'action de Mme Z... qui mettait en cause les droits de propriété indivis de ces quatre communes devait être dirigée contre ces dernières et que l'intéressée a à tort choisi de ne pas les assigner et de n'intenter sa procédure qu'à l'encontre du syndicat intercommunal du Domaine d'Alzitone ;
Qu'elle ne peut se retrancher derrière la mention de la fiche immobilière établie certes en ce qui concerne les parcelles faisant partie du domaine au nom de ce syndicat intercommunal, mais qui précise bien que ce syndicat est le représentant des quatre communes de Ghisonaccia, Ghisoni, Poggio di Nazza et Lugo di Nazza ;
Qu'ayant fait citer le seul syndicat intercommunal du domaine, sans préciser cette qualité, alors que ce dernier n'est pas propriétaire en son nom personnel des parcelles revendiquées, ni appeler à la procédure les quatre communes, Mme Z... a mal dirigé son action en revendication ;
Que les communes de Lugo di Nazza et Ghisonaccia concernées en leur qualité de propriétaires indivis sont fondées à se joindre, avec la commission syndicale qui n'avait pas constitué avoué, à la tierce opposition des consorts Y... et à solliciter avec la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 qui n'a pas pris en compte leurs droits, la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui avait débouté Mme Z..., élargissant ainsi les demandes des tiers opposants qui ne portent que sur les parcelles AH 13, 15, 16 et 71 sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia ;
Attendu que l'action en revendication ayant pour objet d'opposer le revendiquant à celui qui se dit aussi propriétaire du même bien, le manquement procédural commis par Mme Z... qui n'avait pas attrait au procès les quatre communes propriétaires indivises doit avoir de ce seul fait pour conséquence la rétractation de l'arrêt du 7 décembre 2011 qui a fait droit à son action en prenant en compte l'attestation du président de la commission syndicale du Domaine d'Alzitone du 30 août 2006 reconnaissant à Mme Z... la qualité de propriétaire des parcelles revendiquées par celle-ci, attestations corroborées par les témoignages de Mme A... et de Mme B..., attestant de sa possession sur ces mêmes biens ;
Que s'ajoute à cet argument, ceux invoqués par les consorts Y... qui à l'appui de leur tierce opposition, contestent l'usucapion dont se prévaut Mme Z..., et justifient par les documents qu'ils versent aux débats et notamment par une attestation du maire de Ghisonaccia du 2 décembre 1982 que celle-ci avait cédé le 7 janvier 1980 en interrompant ainsi sa possession à cette date, ses droits sur les parcelles AH 15, AH 16, AH 53 et AH 13 M. C..., lequel en avait fait de même au profit de Dominique Y... qui les a exploitées à compter du 22 mars 1982 avant de les céder lui-même à son fils Pierre-Jean ;
Attendu que le président de la commission syndicale du Domaine d'Altizone a d'ailleurs attesté le 17 février 2005 que les parcelles AH 19, 53, 15 et 16 sont exploitées par M. Y... ;
Que Mme Z... ne peut soutenir que ce dernier exploite celles-ci pour son compte ou qu'elle a été lésée par la cession au profit de M. C... qui ne résulte d'aucun document alors qu'est produite aux débats une lettre du maire de Ghisonaccia du 17 novembre 1982 lui indiquant que c'était à sa demande et avec sa signature légalisée qu'il avait porté les terrains au nom de C... ;
Attendu que la possession alléguée par Mme Z... à 1'appui de son action en revendication qui est déniée par les tiers opposants euxmêmes en possession des parcelles, ne répond nullement aux critères cumulatifs imposés par l'article 2261 du code civil ;
Qu'en conséquence l'arrêt infirmatif du 7 décembre 2011 en ce qu'il a dit Mme Z... devenue propriétaire par voie d'usucapion des parcelles sises sur le territoire de la commune de Ghisonaccia recensées au cadastre de cette commune sous les numéros 11, 13, 15, 16 de la section AH au lieudit Ciarlino et sous le numéro 71 de la même section au lieudit Listingone, dit que cet arrêt vaudra titre de propriété et ordonné sa publication au service de la publicité foncière, ne peut qu'être rétracté ;
Que le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 30 mars 2010 qui a débouté Mme Catherine X... épouse Z... de son action en revendication sera dès lors confirmé ;
Attendu que la publicité foncière de l'arrêt rétracté ayant été ordonnée, la même mesure de publicité sera prise en ce qui concerne la présente décision ; »
Alors que, le juge ne peut méconnaitre les termes du litige et l'étendue de sa saisine ; qu'en l'espèce, en confirmant le jugement du 30 mars 2010, qui avait débouté Madame Z... de son action en revendication des parcelles AH 11, AH 13, AH, 15, AH 16 et AH 71, cependant que la Cour d'appel n'était saisie que d'une demande de rétractation portant sur les parcelles AH 13, AH, 15, AH 16 et AH 71, et non sur la parcelle AH 11, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et l'étendue de sa saisine, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-27222
Date de la décision : 10/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Bastia, 2 octobre 2013, 12/00419

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 02 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 mar. 2015, pourvoi n°13-27222


Composition du Tribunal
Président : Mme Fossaert (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27222
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