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05/03/2015 | FRANCE | N°14-13780

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 mars 2015, 14-13780


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Chambéry, 21 janvier 2014), rendue sur renvoi après cassation (2e Civ., 28 juin 2012, pourvoi n° 11-24. 120), que M. X...a confié la défense de ses intérêts à M. Y..., avocat (l'avocat), à l'occasion d'un litige l'opposant à un artisan ; que le 1er juin 2010, M. X...a refusé le mandat d'intervention proposé par l'avocat le 28 mai 2010 ; qu'à la suite d'un désaccord, l'avocat a saisi le b

âtonnier de son ordre d'une demande de fixation de ses honoraires ; que...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Chambéry, 21 janvier 2014), rendue sur renvoi après cassation (2e Civ., 28 juin 2012, pourvoi n° 11-24. 120), que M. X...a confié la défense de ses intérêts à M. Y..., avocat (l'avocat), à l'occasion d'un litige l'opposant à un artisan ; que le 1er juin 2010, M. X...a refusé le mandat d'intervention proposé par l'avocat le 28 mai 2010 ; qu'à la suite d'un désaccord, l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre d'une demande de fixation de ses honoraires ; que M. X...a formé un recours contre la décision du bâtonnier ;
Attendu que M. X...fait grief à l'ordonnance de confirmer la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grenoble ayant fixé à 1 076, 40 euros TTC les honoraires dus à l'avocat et de le condamner à payer à ce dernier la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen :
1°/ que l'avocat qui agit sans mandat n'a pas droit à rémunération, quelles que soient les diligences effectuées ; que si l'avocat qui représente ou assiste une personne en justice est présumé disposer d'un mandat émanant de cette personne, cette présomption peut être combattue par la preuve contraire ; qu'en n'ayant pas recherché, comme il y était invité par M. X...et l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 28 juin 2012, si M. X..., qui produisait le « mandat d'intervention » envoyé par l'avocat le 28 mai 2010, qu'il n'avait, ni signé, ni retourné, n'avait pas refusé, dès le 1er juin 2010, le mandat que lui proposait l'avocat pour engager la procédure au fond, ce dont il résultait que l'avocat ne pouvait obtenir le paiement de la facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1315 du code civil et 416 du code de procédure civile ;
2°/ que l'avocat qui, après être intervenu dans une instance en référé pour un client, lui adresse, pour engager une procédure au fond, un mandat d'intervention avec convention d'honoraires à lui retourner signé et une facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », ne peut obtenir le paiement de cette facture sans signature de ce mandat par le client ; qu'en retenant que le mandat, qui avait été donné à l'avocat pour engager une instance en référé, lui permettait de poursuivre ses diligences en rédigeant le projet d'assignation au fond, le premier président a violé les articles 1134 et 1984 du code civil et 416 du code de procédure civile ;
3°/ que l'envoi par l'avocat à son client d'un mandat d'intervention pour engager une procédure au fond, dont il demandait la signature, comportant une convention d'honoraires et une facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », établit sans ambiguïté que le mandat avait pour objet de confier à l'avocat le pouvoir d'engager cette procédure et que le précédent mandat confié pour agir en référé avait pris fin ; qu'en ayant énoncé que le mandat d'intervention avec convention d'honoraires adressé par l'avocat à son client le 28 mai 2010 avait seulement pour objet de clarifier la situation future de sa relation avec son client, sans mettre à néant le mandat initial résultant de sa demande formulée le 7 juillet 2009 et confirmée tout au long de la procédure jusqu'à ce qu'il décharge son avocat le 1er juin 2010, le premier président a dénaturé la portée du mandat d'intervention avec convention d'honoraires du 28 mai 2010 et a ainsi méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
4°/ que le juge ne peut rejeter une demande sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont soumis au soutien de cette prétention ; qu'en ayant énoncé que l'avocat avait établi un projet d'assignation devant le tribunal de grande instance de Grenoble « dont il ne saurait être soutenu sérieusement qu'il s'agit d'un document inconsistant et vide », sans avoir examiné le « projet d'assignation » vierge, invoqué et produit par M. X..., le premier président de la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'ordonnance retient qu'il résulte clairement des éléments de la cause que M. X...a sollicité l'intervention de l'avocat dès le 7 juillet 2009 ; que celui-ci a assuré la défense des intérêts de son client activement et interprété sa mission loyalement au cours de la procédure de référé restant en lien suivi avec son client ; qu'il a poursuivi ses diligences pour le compte de son client notamment en rédigeant le projet d'assignation au fond dans le cadre de ce mandat initial ; que si l'avocat a adressé le 28 mai 2010 un mandat d'intervention avec convention d'honoraires à son client, cet acte avait pour objet de clarifier la situation future de sa relation avec son client mais ne saurait être analysé, comme le soutient à tort M. X..., comme mettant à néant le mandat initial résultant de sa demande formulée le 7 juillet 2009 et confirmée tout au long de la procédure jusqu'à ce que M. X...décide de décharger son avocat le 1er juin 2010 ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, le premier président, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante et sans dénaturer le mandat d'intervention du 28 mai 2010, a pu décider, par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que la demande d'honoraires portait sur des diligences effectuées en vertu du mandat initial confié à l'avocat ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa dernière branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé l'ordonnance du bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Grenoble ayant taxé à 1 076, 40 ¿ TTC les honoraires dus à Me Y... et d'avoir condamné M. X...à payer à Me Y... la somme de 1 500 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que selon l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991, « à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci » ; qu'à la suite d'un litige avec un paysagiste au sujet de la réalisation d'une terrasse, M. X...a sollicité les services de Me Y... par courrier du 7 juillet 2009 ; que par télécopie du 4 septembre 2009, l'assureur protection juridique de M. X..., la MAIF, a saisi en urgence Me Y... aux fins de délivrer une assignation en référé devant le tribunal de grande instance de Grenoble ; que Me Y... a accepté de le défendre le 8 septembre 2009 et a, le 14, fait parvenir à son client un courrier indiquant avoir rédigé l'assignation en référé jointe en copie pour l'audience du 30 septembre 2009 et une note d'honoraires ; que par décision du 14 octobre 2009, le tribunal a ordonné une expertise, au cours de laquelle Me Y... a assisté aux opérations comme demandé par son client par courriel du 16 février 2010 et a transmis des pièces communiquées par son client à l'expert et la partie adverse (lettre du 18 février 2010) ; qu'il a adressé une facture du 18 février 2010 pour assistance à expertise de 426 ¿ HT ; qu'il a rédigé un dire le 6 avril 2010 ; que par courrier du 18 février 2010, il a informé son client qu'il avait transmis ses pièces à l'expert judiciaire et joint une facture de 509, 50 ¿ TTC ; que le 28 avril 2010, l'expert a remis son rapport ; que par courrier du 28 mai 2010, Me Y... a fait parvenir à M. X...un mandat d'intervention contenant une convention d'honoraires, une facture provisionnelle de 1 076, 40 ¿ TTC et un projet d'assignation ; qu'en réponse M. X...l'a informé qu'il n'entendait pas poursuivre avec lui et le 8 juillet suivant, qu'il refusait de payer la facture ; qu'il prétend qu'ayant refusé le mandat d'intervention et la convention d'honoraires adressés le 28 mai 2010, Me Y... a agi sans mandat et qu'aucune rémunération ne lui est due ; que cependant, il résulte clairement des éléments de la cause qu'il a sollicité son intervention dès le 7 juillet 2009 ; que celui-ci a assuré la défense de ses intérêts activement et interprété sa mission loyalement au cours de la procédure de référé restant en lien suivi avec lui ; qu'il a poursuivi ses diligences pour son compte notamment en rédigeant le projet d'assignation au fond dans le cadre de ce mandat initial ; que si Me Y... a adressé le 28 mai 2010 un mandat d'intervention avec convention d'honoraires à son client, cet acte avait pour objet de clarifier la situation future de sa relation avec son client mais ne saurait être analysé, comme le soutient à tort M. X..., comme mettant à néant le mandat initial résultant de sa demande formulée le 7 juillet 2009 et confirmée tout au long de la procédure jusqu'à ce qu'il décide de décharger son avocat le 1er juin 2010 ; que dès lors Me Y... est en droit d'obtenir la rémunération de ses diligences ; que depuis la dernière facture acquittée du 18 février 2010, il a rédigé deux courriers recommandés, le premier du 18 février correspond à l'envoi de pièces au défendeur à la suite de la réunion d'expertise du 16 février et le second du 17 mars 2010 constituant la demande faite au défendeur de fournir son attestation d'assurance professionnelle ; qu'il a établi un dire et un projet d'assignation devant le tribunal de grande instance de Grenoble dont il ne saurait être soutenu sérieusement qu'il s'agit d'un document inconsistant et vide ; qu'il s'agit de diligences effectives et utiles pour le client, postérieures à la dernière facture réglée du 18 février 2010 ; qu'il convient de retenir la somme réclamée sur la facture du 28 mai 2010 eu égard à la nature du litige et au sérieux des diligences accomplies par Me Y... pour le compte de son client et de confirmer la décision du bâtonnier qui souligne avec pertinence la bonne foi de cet avocat et le caractère justifié et raisonnable de sa facturation ; que le total des diligences restant dues s'élève à 1 076, 40 ¿ TTC ;
Alors 1°) que l'avocat qui agit sans mandat n'a pas droit à rémunération, quelles que soient les diligences effectuées ; que si l'avocat qui représente ou assiste une personne en justice est présumé disposer d'un mandat émanant de cette personne, cette présomption peut être combattue par la preuve contraire ; qu'en n'ayant pas recherché, comme il y était invité par M. X...et l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 28 juin 2012, si M. X..., qui produisait le « mandat d'intervention » envoyé par Me Y... le 28 mai 2010, qu'il n'avait, ni signé, ni retourné, n'avait pas refusé, dès le 1er juin 2010, le mandat que lui proposait Me Y... pour engager la procédure au fond, ce dont il résultait que l'avocat ne pouvait obtenir le paiement de la facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1315 du code civil et 416 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que l'avocat qui, après être intervenu dans une instance en référé pour un client, lui adresse, pour engager une procédure au fond, un mandat d'intervention avec convention d'honoraires à lui retourner signé et une facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », ne peut obtenir le paiement de cette facture sans signature de ce mandat par le client ; qu'en retenant que le mandat qui avait été donné à Me Y... pour engager une instance en référé, lui permettait de poursuivre ses diligences en rédigeant le projet d'assignation au fond, le premier président a violé les articles 1134 et 1984 du code civil et 416 du code de procédure civile ;
Alors 3°) que l'envoi par l'avocat à son client d'un mandat d'intervention pour engager une procédure au fond, dont il demandait la signature, comportant une convention d'honoraires et une facture correspondant à la « provision sur procédure TGI Grenoble selon convention d'honoraires », établit sans ambiguïté que le mandat avait pour objet de confier à l'avocat le pouvoir d'engager cette procédure et que le précédent mandat confié pour agir en référé avait pris fin ; qu'en ayant énoncé que le mandat d'intervention avec convention d'honoraires adressé par Me Y... à son client le 28 mai 2010 avait seulement pour objet de clarifier la situation future de sa relation avec son client, sans mettre à néant le mandat initial résultant de sa demande formulée le 7 juillet 2009 et confirmée tout au long de la procédure jusqu'à ce qu'il décharge son avocat le 1er juin 2010, le premier président a dénaturé la portée du mandat d'intervention avec convention d'honoraires du 28 mai 2010 et a ainsi méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
Alors 4°) que le juge ne peut rejeter une demande sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont soumis au soutien de cette prétention ; qu'en ayant énoncé que Me Y... avait établi un projet d'assignation devant le tribunal de grande instance de Grenoble « dont il ne saurait être soutenu sérieusement qu'il s'agit d'un document inconsistant et vide », sans avoir examiné le « projet d'assignation » vierge, invoqué et produit par M. X..., le premier président de la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-13780
Date de la décision : 05/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 21 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 mar. 2015, pourvoi n°14-13780


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13780
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