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04/03/2015 | FRANCE | N°13-24793

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 mars 2015, 13-24793


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 juin 2013), qu'après le divorce de M. X... et Mme Y..., la résidence de leur fille Tiffany, née le 22 août 2004, a été fixée au domicile de la mère, l'exercice de l'autorité parentale étant conjoint et un droit de visite et d'hébergement étant accordé au père ; que ces dispositions ont été maintenues par un jugement du 10 mai 2011 ; que le 7 octobre suivant, le juge des enfants a confié la mineure à son père pour une durée d'un an, accordé un droit

de visite et d'hébergement à la mère et ordonné une mesure d'assistance éduca...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 juin 2013), qu'après le divorce de M. X... et Mme Y..., la résidence de leur fille Tiffany, née le 22 août 2004, a été fixée au domicile de la mère, l'exercice de l'autorité parentale étant conjoint et un droit de visite et d'hébergement étant accordé au père ; que ces dispositions ont été maintenues par un jugement du 10 mai 2011 ; que le 7 octobre suivant, le juge des enfants a confié la mineure à son père pour une durée d'un an, accordé un droit de visite et d'hébergement à la mère et ordonné une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert ; que par jugement du 10 octobre 2012, il a ordonné le renouvellement de ces mesures, ainsi qu'une expertise psychiatrique des parents et de la mineure ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de renouveler le placement de l'enfant chez son père pour une durée d'un an et d'autoriser ce dernier à l'inscrire dans un établissement scolaire relevant de son domicile ;
Attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que le rapport d'investigation et d'orientation éducative du 30 août 2011, après avoir fait part de l'inquiétude des professionnels quant à la relation mère/enfant en raison de l'attitude de Mme Y..., laquelle avait instauré chez sa fille une thématique sexuelle inappropriée et détériorait continuellement l'image du père, concluait à une répartition inversée de la garde de l'enfant ; qu'elle a encore relevé qu'au jour où elle statuait, la mineure se trouvait toujours au centre du conflit parental, situation génératrice d'un danger constaté par les médecins experts qui relevaient son mal être, même si elle semblait s'être stabilisée chez son père où elle commençait à retrouver une place d'enfant et tirait profit de la mesure d'assistance éducative ; qu'elle a ainsi caractérisé l'existence d'un fait nouveau de nature à entraîner un danger pour la mineure, qui s'est révélé postérieurement au jugement du juge aux affaires familiales du 10 mai 2011 ; qu'en sa seconde branche, le moyen n'est pas fondé ;
Attendu, ensuite, que le grief de la première branche n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait encore grief à l'arrêt d'autoriser M. X... à inscrire sa fille dans un établissement scolaire dépendant de son domicile ;
Attendu, d'abord, qu'ayant relevé qu'il était de l'intérêt de la mineure d'être scolarisée à proximité de son domicile afin d'éviter des temps de transport fatigants, de prendre acte de sa nouvelle situation et de sortir du conflit de loyauté à l'égard de ses parents dans le temps de l'école, la cour d'appel a fait ressortir le caractère injustifié du refus de Mme Y... de la voir inscrire dans un établissement scolaire dépendant du domicile de son père, justifiant ainsi légalement sa décision au regard de l'article 375-7, alinéa 2, du code civil ; qu'en sa deuxième branche, le moyen n'est pas fondé ;
Attendu, ensuite, que les griefs des première, troisième et quatrième branches ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné le renouvellement du placement de Tiffany X... auprès de son père, Monsieur Christophe X..., pour une durée d'un an à compter du 7 octobre 2012 et jusqu'au 7 octobre 2013 et, en conséquence, autorisé Monsieur X... à inscrire l'enfant dans un établissement scolaire relevant de son domicile et dit que les prestations familiales lui seraient désormais versées ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'au vu des pièces du dossier telles que rapportées ci-dessus et débattues contradictoirement devant la Cour, c'est à juste titra et pour des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a pris la décision entreprise, rappelant que le maintien de Tiffany au domicile paternel était conditionnel à la mise en place d'un suivi psychologique et à une collaboration réelle des deux parents à la mesure éducative et qu'à défaut la mineure pourrait faite l'objet d'un placement auprès des services de l'aide sociale à l'enfance afin dc la protéger du comportement anxiogène et insécurisant de ses parents ; qu'il sera rappelé que la saisine du Juge des enfants n'était pas intervenue à l'initiative des parents ou de l'un deux mais sur requête du Procureur de la République en suite de l'enquête pénale diligentée après un appel au 119 ; qu'alors que le conflit parental demeurait très actif, la mineure continuait à manifester un mal-être important, voire des comportements sexualisés inadaptés, et souffrait d'un conflit de loyauté alimenté par les dissensions parentales et l'emprise maternelle qui envahissait son espace de pensée et l'empêchait de s'acclimater sereinement au domicile de son père ; que la situation créait un contexte préoccupant pour son bien-être, sa santé et sa sécurité et les conditions de son éducation et de son développement physique, affectif, intellectuel et social étaient gravement compromises ; qu'à ce jour, le conflit parental, dont la persistance et l'acuité sont soulignées par les médecins experts, demeure ; que si les deux parents, dont la souffrance et l'attachement à leur fille ne sauraient être remis en cause, semblent chacun conscient de la nécessité de protéger leur fille de leurs conflits, force est de constater que la mineure se trouve toujours au centre du conflit et que cette situation est génératrice d'un danger ; que les médecins experts relèvent un mal-être s'exprimant par la volonté de maîtrise sur les autres, sa conscience du poids de ses paroles et sa tendance à tenir des propos de type manipulatoire ce que confirme son conseil qui l'a sentie investie d'une grande responsabilité, persuadée de l'importance de son discours et se faisant l'avocat de sa mère ; que cependant, elle semble s'être stabilisée chez son père où elle commence à retrouver une place d'enfant ; qu'elle s'est saisie de la mesure éducative dont elle tire profit, paraît plus détendue et parle spontanément des sujets qui l'intéressent et n'exprime plus son désir d'habiter chez l'un ou l'autre de ses parents comme elle pouvait le faire ; que pour ces raisons, et pour la protection de la mineure, la décision sera confirmée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte des éléments de la procédure et des débats à l'audience que le conflit parental continue d'être très prégnant et que les parents sont toujours dans l'incapacité de s'en départir afin d'élaborer un cadre éducatif rassurant et sécurisant à Tiffany ; que l'intérêt de Tiffany, contrairement aux affirmations des parents, passe après le conflit parental ; que les parents sont centrés sur eux peu importe l'équilibre psychoaffectif de l'enfant ; que Tiffany a su exprimer qu'elle était « fatiguée » du climat dans lequel elle évoluait entre ses deux parents ; qu'aucun des parents ne veut prendre conscience que l'anxiété générée par leur conflit est anxiogène pour Tiffany, ce qui insécurise et rend vulnérable la mineure ; que les parents reconnaissaient qu'ils peinent à contenir les débordements de Tiffany qui ne sont que l'expression de son mal-être ; que le père répond aux sollicitations de l'équipe éducative et il semble avoir entamé un réel travail qui devrait, à terme, lui permettre de se départir du conflit qui l'oppose à la mère ; que pour autant, un travail important reste à mener afin de déterminer les besoins et l'intérêt exclusif de Tiffany ; que la mère a affirmé qu'elle avait conscience de la souffrance de Tiffany ; que pour autant, aucun travail de fond n'a été mené avec l'équipe éducative qu'elle désigne comme le mauvais objet puisqu'elle estime que ladite équipe éducative est à l'origine du placement de la mineure auprès du père et qu'elle sollicite, aujourd'hui, la restriction de ses droits de visite et d'hébergement ; qu'il est rappelé à la mère que la décision appartient au magistrat et qu'en l'espèce la décision de confier Tiffany au pire n'a été guidée que par l'intérêt supérieur de la mineure ; que la mère pourra entamer un réel travail sur son positionnement lorsqu'elle acceptera que l'éloignement de Tiffany du domicile maternel n'est pas une sanction de ses capacités maternelles ; que les sentiments de la mère à l'égard de Tiffany ne sont pas contestés pour autant ; qu'il est impératif que la mère réalise que la mineure est devenue l'instrument du conflit qui l'oppose au père et qu'ils (père et mère) ne sont toujours pas devenus des parents responsables ; que force est de constater que les conditions d'évolution et d'épanouissement de Tiffany auprès de ses parents sont mises à mal par leur positionnement ; que Tiffany est en souffrance sans que les parents puissent prendre conscience que leur positionnement est source de maltraitante psychologique pour la mineure ; que par conséquent, le maintien de Tiffany au domicile paternel est subordonné, conformément aux dispositions de l'article 375-2 alinéa 3 du Code civil à la mise en place d'un suivi psychologique en faveur de la mineure et à une collaboration réelle des deux parents à la mesure éducative ; qu'à défaut, un rapport intermédiaire nous sera adressé par le service éducatif et Tiffany pourrait faire l'objet d'un placement auprès des Services de l'Aide Sociale à l'Enfance de Seine-Saint-Denis afin de la protéger du comportement anxiogène et insécurisant des parents ; qu'il apparaît qu'aucun des parents n'est en capacité, à ce jour, de protéger Tiffany de leur conflit ; que pour autant, avant de prendre toute décision prématurée quant au lieu de vie de Tiffany et/ou des droits des parents, ce qui n'aurait pour conséquence que de déstabiliser davantage la mineure, il y a lieu d'ordonner une expertise psychiatrique des parents afin de mieux appréhender leur fonctionnement psychique et les répercussions qu'il peut avoir dans l'exercice de leur rôle parental et par conséquent, sur l'épanouissement de Tiffany mais, également de la mineure afin de déterminer l'impact exact du positionnement parental sur elle et de préconiser les suivis nécessaires et d'adapter la situation de chacun ; qu'il convient, par conséquent, d'ordonner une expertise psychiatrique de Madame Dominique Y..., de Monsieur Christophe X... et une expertise pédopsychiatrique de Tiffany X... ; que le placement au domicile du père de Tiffany X... est renouvelé et les droits de la mère reconduits dans l'attente des résultats de l'expertise ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la compétence du Juge des enfants est limitée, en matière civile, aux mesures d'assistance éducative tandis que le Juge aux affaires familiales est seul compétent pour statuer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et la résidence de l'enfant ; que la Cour, statuant en matière d'assistance éducative, ne pouvait donc, sous le couvert d'une décision de placement, fixer la résidence de l'enfant Tiffany X... au domicile de son père et n'accorder à la mère, Madame Dominique Y..., qu'un simple droit de visite et d'hébergement, cependant que, par son jugement du 10 mai 2011, le Juge aux affaires familiales avait précédemment fixé la résidence de l'enfant chez sa mère et accordé au père un droit de visite et d'hébergement ; que l'arrêt a donc été rendu au prix d'un excès de pouvoirs, en violation des articles 373-2, 373-2-6, 372-2-8 et 375-1 du Code civil, ensemble des articles L 213-3 et L 252-2 du Code de l'organisation judiciaire ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, si lorsque la protection de l'enfant l'exige, le Juge des enfants peut décider de le confier à l'autre parent, il en va autrement lorsque le Juge aux affaires familiales s'est précédemment prononcé, par une décision rendue entre les père et mère, sur la résidence du mineur concerné ; qu'en ce cas, le placement de l'enfant chez l'autre parent ne peut être décidé, à titre très exceptionnel, que si un fait nouveau de nature à entraîner un danger pour le mineur s'est révélé postérieurement à la décision ayant statué sur l'exercice de l'autorité parentale ; qu'en ordonnant le placement de l'enfant chez son père, sans caractériser le fait nouveau, de nature à révéler un danger pour le mineur, qui se serait révélé postérieurement au jugement prononcé le 10 mai 2011 par le Juge aux affaires familiales ayant maintenu la résidence de l'enfant chez sa mère, nonobstant le conflit parental qui déjà s'était fait jour et qui est d'ailleurs pris en compte par cette précédente décision, la Cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article 375-3, alinéa 2, du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé Monsieur X... à inscrire sa fille dans un établissement scolaire dépendant de son domicile ;
AUX MOTIFS QU'il est de l'intérêt de la mineure d'être scolarisée à proximité de son domicile afin d'éviter des temps de transport fatigants et de lui permettre de prendre acte de sa nouvelle situation et de sortir de ce conflit de loyauté dans le temps de l'école ; que Monsieur X... sera autorisé à inscrire sa fille dans un établissement scolaire dépendant de son domicile pour la rentrée scolaire prochaine ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la compétence du Juge des enfants est limitée, en matière civile, aux mesures d'assistance éducative, tandis que le Juge aux affaires familiales est seul compétent pour tout ce qui a trait à l'exercice de l'autorité parentale ; que le choix de l'établissement scolaire de l'enfant est une prérogative relevant de l'autorité parentale et non de l'assistance éducative, de sorte que le Juge aux affaires familiales est seul compétent pour trancher quant à ce en cas de désaccord entre les parents, d'où il suit qu'en autorisant Monsieur X... à inscrire sa fille dans un établissement scolaire dépendant de son domicile, la Cour excède de nouveau ses pouvoirs au regard des articles 373-2-10, 373-2-11, 375-1 et 375-7 du Code civil, ensemble au regard des articles L 213-3 et L 252-2 du Code de l'Organisation judiciaire ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, si le Juge des enfants peut exceptionnellement, dans tous les cas où l'intérêt de l'enfant le justifie, autoriser la personne, le service ou l'établissement à qui est confiée l'enfant à exercer un acte relevant de l'autorité parentale, c'est à la condition de constater le refus abusif ou injustifié ou la négligence des détenteurs de l'autorité parentale ; que faute d'avoir précisé en quoi le refus de Madame Y... de voir sa fille changer d'établissement scolaire serait abusif ou injustifié ou en quoi celle-ci se serait montrée négligente, la Cour prive sa décision de toute base légale au regard de l'article 375-7 du Code civil ;
ALORS QUE, DE TROISIEME PART, les mesures d'assistance éducative sont toujours limitées dans le temps ; qu'en l'espèce, il résulte du dispositif du jugement entrepris, tel que confirmé, que l'enfant n'a été placé par ce jugement auprès de son père, Monsieur X..., que jusqu'à la date du 7 octobre 2013 ; que dès lors, en prescrivant une mesure collatérale ¿ l'inscription de l'enfant dans une école relevant du domicile de son père à la rentrée scolaire de septembre 2013 ¿, dont les effets conditionnaient la scolarité de l'enfant durant toute l'année scolaire et donc bien au-delà de la période couverte par la mesure d'assistance éducative, la Cour viole l'article 375 du Code civil ;
ET ALORS QUE, ENFIN et en tout état de cause, en affirmant qu'il était « de l'intérêt de la mineure d'être scolarisée à proximité de son domicile afin d'éviter des temps de transport fatigants et de lui permettre de prendre acte de sa nouvelle situation », sans tenir compte de ce que le placement provisoire de l'enfant chez son père devait prendre fin à la date du 7 octobre 2013, soit un mois après la rentrée scolaire et qu'à l'issue de cette mesure, l'enfant avait vocation à réintégrer le domicile de sa mère, chez laquelle avait été fixée sa résidence habituelle par le Juge aux affaires familiales, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 375-7 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-24793
Date de la décision : 04/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 mar. 2015, pourvoi n°13-24793


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.24793
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