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04/03/2015 | FRANCE | N°13-23610

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mars 2015, 13-23610


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 12 février 2007 par la société Atsi en qualité de responsable qualité pour occuper en dernier lieu les fonctions de responsable achats et logistique, M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 16 juin 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'une demande en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateur ;
Sur le moyen unique du pourvoi inciden

t du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 12 février 2007 par la société Atsi en qualité de responsable qualité pour occuper en dernier lieu les fonctions de responsable achats et logistique, M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 16 juin 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'une demande en paiement d'heures supplémentaires et repos compensateur ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement au titre d'heures supplémentaires, congés payés afférents et contrepartie obligatoire au repos, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies par le salarié, il appartient seulement à ce dernier d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'est suffisamment précis le tableau récapitulatif produit par le salarié, détaillant pour chaque jour travaillé, la durée du travail journalier ; qu'en relevant que tel n'était pas le cas, sans même examiner les éléments fournis par l'employeur de nature à justifier les horaires réellement effectués par le salarié, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas et, à défaut d'être expresse, elle doit résulter d'actes manifestement une volonté non équivoque de renoncer ; qu'en ajoutant que le salarié n'avait jamais contesté les mentions ses bulletins de paie relatives aux heures supplémentaires cependant que le seul silence du salarié ne pouvait valoir acceptation et renonciation à son droit de demander le paiement des heures réellement accomplies, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 3171-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la seconde branche du moyen, la cour d'appel qui a constaté que le salarié ne produisait pas d'éléments suffisamment précis permettant à l'employeur d'y répondre, n'encourt pas les griefs du moyen ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il résulte des termes mêmes de la lettre de licenciement et de l'absence de justification de toute démarche ou proposition en vue d'assurer un éventuel reclassement interne du salarié, y compris dans un emploi de catégorie inférieure, que ce manquement à l'obligation de reclassement préalable affecte la validité du licenciement ;
Attendu cependant qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher si, comme il le soutenait, l'employeur ne justifiait pas de l'absence de poste disponible, dans l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement économique du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 25 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Atsi, demanderesse au pourvoi principal.
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement économique de Monsieur X... était sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société ATSI à payer à Monsieur X... la somme de 20. 280 € à titre de dommages et intérêts ainsi qu'à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à ce dernier dans la limite de six mois, outre à 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « La lettre de licenciement est ainsi rédigée : nous vous rappelons brièvement les motifs à l'origine de cette mesure : suite à la crise économique actuelle, le carnet de commandes de la société ATSI a été considérablement réduit, notamment concernant les travaux neufs. Les clients qui sont eux-mêmes touchés de plein fouet par la crise ont ralenti, voire stoppé leur investissement et concentrent leurs dépenses sur l'essentiel (réparation, entretien). Ainsi, le total des commandes entre le 1er octobre 2008 et le 30 avril 2009 enregistre une baisse fort inquiétante de 55 % par rapport à la même période de l'exercice précédent.

Etat des commandes entre le 1er octobre et le 30 avril en euros EXERCICE 2008 EXERCICE 2009

Service après-vente 770352 1020

261, 29 + 32 %

Travaux neufs 2 351

439, 16 700 837, 54-70 %

Total commandes 3 121

791, 28 1 721

098, 83-55 %

Par conséquent, faute de commandes, nous ne produisons presque plus et l'atelier fonctionne a minima. Leurs prévisions nous font craindre en l'absence de mesures correctrices, une perte de près de 200. 000 €. La société ATSI a mis en place dès le début de l'année, différentes mesures pour sauvegarder la compétitivité économique. Outre une réduction de ses frais généraux, la société a procédé à l'embauche d'un commercial dès janvier 2009 afin de dynamiser l'activité des travaux neufs. Malgré ces mesures nous n'avons pas enregistré un nombre de commandes suffisant, nous obligeant à réorganiser notre activité. C'est pourquoi, ainsi que nous l'avons indiqué au délégué du personnel, la société ATSI a décidé de se recentrer sur l'activité service après-vente. La direction a décidé de remplacer les services des achats, de la comptabilité fournisseur et de la production atelier par un seul et nouveau service méthode/ approvisionnement/ production/ livraison. Ce service serait dirigé par le directeur général en collaboration avec le bureau d'études qui serait conservé. De même, il est décidé, pour dynamiser l'action commerciale de fusionner les activités travaux neufs et de service après-vente. Cette organisation nous contraint de supprimer le poste achat logistique que vous occupez : malgré nos démarches, nos recherches de reclassement n'ont donné aucun résultat. Nous sommes donc contraints de prononcer votre licenciement pour motif économique. La loi vous donne la possibilité de conclure une convention de reclassement personnalisée que nous vous avons proposée lors de notre entretien du 29 mai 2009, il vous appartient de nous faire connaître votre décision avant le 19 mai 2009 au soir délai de réflexion qui vous est imparti par les textes. Au cours de ce délai, vous devrez prendre contact par téléphone au
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afin d'avoir un entretien d'information avec l'Assedic pour éclairer votre choix. Si vous voulez adhérer à la convention de reclassement personnalisé, nos relations contractuelles seront rompues d'un commun accord à l'expiration de ce délai, aux conditions qui vous ont été exposées et qui figurent sur le document qui vous a été remis. En revanche, si à cette date du 19 juin 2009 au soir, vous n'avez pas fait connaître votre réponse ou si vous avez expressément refusé la convention de reclassement personnalisé, la présente lettre constituera la notification de votre licenciement pour motif économique. Il résulte des termes mêmes de la lettre de licenciement et de l'absence de justification de toute démarche ou proposition en vue d'assurer un éventuel reclassement interne de Monsieur X..., y compris dans un emploi de catégorie inférieure, que ce manquement à l'obligation de reclassement préalable au licenciement affecte la validité du licenciement et le constitue sans cause réelle et sérieuse, sans qu'il y ait lieu de répondre aux autres moyens invoqués ; Monsieur X... possède une ancienneté de 3 ans et 3, 9 mois, disposait d'un salaire moyen de 3. 380 € brut, et ne fournit aucune information sur sa situation postérieurement à son licenciement ; il doit lui être alloué la somme de 20. 280 € à titre de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;
1) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement énonçait que « malgré nos démarches, nos recherches de reclassement n'ont donné aucun résultat » ; qu'il résultait de ces termes que l'employeur, affirmant avoir procédé à des démarches et à des recherches en vue de reclasser son salarié sans qu'aucune solution de reclassement n'ait pu être trouvée, avait satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en affirmant qu'il résultait « des termes mêmes de la lettre de licenciement » un manquement à l'obligation de reclassement, la Cour d'appel a méconnu le principe interdisant aux juges de dénaturer les documents de la cause ;
2) ALORS subsidiairement QUE l'obligation de reclassement étant une obligation de moyens et non de résultat, l'employeur n'est nullement tenu d'adresser au salarié une proposition de reclassement, mais doit seulement fournir tous ses efforts pour tenter de reclasser le salarié qu'il envisage de licencier ; qu'en l'espèce, dans sa lettre de licenciement, l'employeur énonçait que : « malgré nos démarches, nos recherches de reclassement n'ont donné aucun résultat » (cf. arrêt attaqué p. 7 § 4) ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de reclassement au vu des termes mêmes de la lettre de licenciement, la Cour d'appel, qui a imposé à l'employeur d'adresser au salarié une proposition de reclassement, a violé l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
3) ALORS QUE satisfait à son obligation de reclassement l'employeur qui établit qu'il n'existait aucun poste disponible et adapté aux compétences du salarié au moment du licenciement ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver, par la production du registre unique du personnel de l'entreprise, qu'aucun poste adapté aux compétences du salarié n'était disponible à l'époque du licenciement de Monsieur X... (conclusions d'appel, p. 15) ; qu'en se bornant à énoncer que l'employeur ne justifiait pas de la moindre démarche ou proposition en vue d'assurer le reclassement interne de Monsieur X..., sans s'expliquer, ainsi qu'elle y était invitée, sur l'absence de poste disponible adapté au salarié rendant impossible son reclassement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-4 et L. 1233-1 du Code du travail ;
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi incident.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et des congés payés y afférents ainsi que celle au titre de la contrepartie obligatoire en repos ;
AUX MOTIFS QUE, s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande ; que M. X... affirme pouvoir revendiquer le paiement de 644, 75 heures supplémentaires et produit plusieurs attestations et des tableaux de décompte des heures qu'il prétend avoir assurées ; qu'il a énoncé les nombreuses tâches qu'il était amené à assurer, mais ne procède que par affirmations, sachant qu'à compter du retour de la personne qu'il a remplacée puis après la préparation du dossier de renouvellement de la norme ISO 9001, il n'apparaît pas qu'il ait eu d'autres fonctions que celle de responsable du service achat, ainsi que cela résulte des notes de services établies par la direction à son attention et des comptes-rendus de réunions ; que l'attestation dactylographiée, en date du 6 avril 2010, et signée de M. Z... ne sera pas retenue ; qu'en effet, elle est établie dans un style qui n'est de toute évidence pas le sien, tandis que les mails communiqués par M. X... permettent d'affirmer que M. Z... a bien signé une attestation manifestement pré-remplie par M. X... qui la lui avait adressée par mail, et ce après son propre licenciement économique, et dont le contenu trop général et imprécis sur le nombre d'heures réalisées ne sera pas retenu, outre le fait qu'il est revenu sur cette attestation à deux reprises, dans des conditions qu'il importe peu à la cour, dans ce contexte, de déterminer ; que l'attestation établie par Mme A..., également licenciée en même temps que l'appelant et M. Z..., contient des affirmations imprécises et trop générales qui sont en outre contredites par les attestations produites par l'employeur, et doit être considérée comme dénuée de pertinence ; que reste donc les trois tableaux récapitulatifs des heures supplémentaires établis par M. X..., certes reparties par semaine, mais cependant sans aucun détail précis ni fourniture d'agenda ou notes manuscrites de nature à donner crédit à ses calculs reconstitués ; qu'il invoque de nombreux appels téléphoniques depuis son téléphone cellulaire personnel, dont la plus grande partie se situent entre midi et 14 11 heures, sans que la durée de l'appel soit indiquée, de sorte que, au-delà du témoignage de son sérieux dans le travail, cette liste d'appels est inutilisable ; que par ailleurs l'employeur fait valoir à juste titre que M. X... n'a jamais contesté les mentions claires et précises relatives aux heures supplémentaires portées sur ses bulletins de paie ; que ces tableaux et les autres indices produits ne peuvent être considérés comme étant des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires ; que pour ces motifs, sa demande en paiement d'heures supplémentaires et au titre de la contrepartie en repos sont donc infondées ;
ALORS, 1°), QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies par le salarié, il appartient seulement à ce dernier d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'est suffisamment précis le tableau récapitulatif produit par le salarié, détaillant pour chaque jour travaillé, la durée du travail journalier ; qu'en relevant que tel n'était pas le cas, sans même examiner les éléments fournis par l'employeur de nature à justifier les horaires réellement effectués par le salarié, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
ALORS, 2°), QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et, à défaut d'être expresse, elle doit résulter d'actes manifestement une volonté non équivoque de renoncer ; qu'en ajoutant que M. X... n'avait jamais contesté les mentions ses bulletins de paie relatives aux heures supplémentaires cependant que le seul silence du salarié ne pouvait valoir acceptation et renonciation à son droit de demander le paiement des heures réellement accomplies, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 3171-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-23610
Date de la décision : 04/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 25 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mar. 2015, pourvoi n°13-23610


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.23610
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