LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 octobre 2013) et les productions, que Mme X... a fait signifier à M. Y... un jugement rendu dans un litige les opposant par un acte d'huissier de justice du 11 octobre 2011 délivré à l'adresse figurant sur ce jugement ; que M. Y... a relevé appel de cette décision par déclaration du 17 janvier 2013 ; que Mme X... a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant constaté l'irrégularité de l'acte de signification et déclaré l'appel de M. Y... recevable ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de constater la régularité de la signification du jugement du 10 avril 2012 et de déclarer son appel irrecevable, alors, selon le moyen, que, si la signification à personne d'un jugement s'avère impossible, l'acte peut être délivré à domicile ; que, dans ce cas, l'huissier de justice doit impérativement vérifier que le destinataire de l'acte demeure à cette adresse et préciser dans l'acte les diligences concrètes qu'il a accomplies pour procéder à cette vérification ; que la mention « le nom figure sur la boîte aux lettres » ne constitue pas à elle seule une vérification suffisante de ce que le destinataire de l'acte demeure bien à l'adresse de signification, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant rappelé que les mentions dans un acte de signification des diligences accomplies par un huissier de justice valaient jusqu'à inscription de faux, puis relevé que le procès-verbal de signification mentionnait que l'huissier de justice s'était présenté à l'adresse figurant sur le jugement, qu'à cette adresse le nom de M. Y... figurait sur la boîte aux lettres et que la lettre simple prévue par l'article 658 du code de procédure civile avait été adressée le jour même de la signification ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant, qu'il n'était ni contesté que M. Y... n'avait pas notifié son changement de domicile à Mme X... ni démontré que cette dernière en avait connaissance, qu'enfin l'avis de passage déposé et la lettre adressée en application de l'article 658 du code de procédure civile n'avaient pas été retournés à l'huissier de justice, la cour d'appel a, par ces seuls motifs procédant de son appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR constaté la régularité de la signification du jugement du 10 avril 2012 et déclaré M. Y... irrecevable en son appel ;
AUX MOTIFS QU'aux termes des articles 654 et suivants du code de procédure civile, la signification doit en principe être faite à personne et ne peut être effectuée selon les formes de l'article 656 que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il doit être fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée ; que dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile un avis de passage et adresse au destinataire la lettre prévue par l'article 658 ; qu'en l'espèce, il résulte de l'acte de signification du 11 octobre 2012 que l'huissier de justice, s'étant transporté à Charleville 49490 Linières Bouton, a indiqué à l'aide de croix n'avoir pu remettre le jugement du 10 avril 2012 à personne en raison de l'absence de M. Y..., dont le nom figurait sur la boîte aux lettres ; qu'il a donc déposé l'acte à l'étude en laissant un avis de passage et a avisé l'intéressé par lettre simple dans le délai fixé à l'article 258 du code civil ; que pour juger cette signification irrégulière et déclarer recevable l'appel du jugement, le magistrat chargé de la mise en état a relevé qu'alors qu'il n'est pas mentionné d'autres investigations que la vérification de la boîte aux lettres, il est démontré par les attestations et pièces produites par M. Y... que son nom n'y figurait pas et qu'il avait changé d'adresse auprès de la poste dès le début de décembre 2011 pour une durée de six mois et informé également son avocat de son changement d'adresse dès le début de janvier 2012 ; qu'il a déduit qu'il est démontré par un ensemble de preuves contraires que l'acte d'huissier ne fait pas foi d'une signification régulière du jugement ; que concluant à la confirmation de l'ordonnance, M. Y... expose qu'il avait en effet déménagé au mois de novembre 2011 et qu'il n'a jamais été destinataire de la signification du jugement du 10 avril 2012, celle-ci ayant été faite au-delà du délai de six mois pendant lequel il a fait suivre son courrier ; que se prévalant d'une attestation du nouvel occupant du logement disant avoir effacé son nom de la boîte aux lettres pour y mettre le sien dès le jour de son arrivée, il affirme que la vérification prétendument faite par l'huissier, dont la preuve ne peut résulter d'une simple croix, n'a pas eu lieu et n'est pas en toute hypothèse suffisante ; qu'il soutient en outre que Mme X... connaissait parfaitement sa nouvelle adresse, où se rendent les enfants à chaque droit de visite ; qu'il considère dans ces conditions que l'acte de signification est nul et que le délai d'appel du jugement déféré n'a pas couru à son égard ; mais que les mentions dans un acte de signification des diligences accomplies par un huissier de justice valent jusqu'à inscription de faux, même s'il s'agit de mentions pré-imprimées et d'indications par des croix ; qu'il en résulte que l'huissier a bien constaté que le nom de M. Y... figurait sur la boîte aux lettres et a bien envoyé la lettre simple prévue par l'article 658 du code de procédure civile le jour même de la signification ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant ; que si l'acte ne fait pas mention d'autre investigation pour signifier à personne, il est constant que l'adresse était également celle mentionnée sur le jugement du 10 avril 2012 et non contestée par M. Y... qu'il n'a pas notifié son changement de domicile à Mme X..., alors pourtant qu'il était débiteur d'une pension alimentaire et d'une prestation compensatoire (article 227-4 du code pénal) ; que l'huissier de justice était dès lors légitimement fondé, sans autre recherche, à considérer que le domicile de M. Y... était inchangé ; qu'il n'est pas démontré par ailleurs que Mme X... avait connaissance du déménagement de M. Y..., cette preuve ne pouvant résulter du seul exercice par celui-ci de son droit de visite et d'hébergement ; qu'il apparaît dans ces conditions que la signification effectuée est régulière, étant d'autre part précisé par l'huissier de justice dans un courrier du 11 février 2013 que ni l'avis de passage ni la lettre ne lui ont été retournés ; qu'il s'ensuit que l'appel, qui n'a été interjeté que le 17 janvier 2013, soit après l'expiration du délai d'un mois imparti par l'article 538 du code de procédure civile, est irrecevable ;
ALORS QUE si la signification à personne d'un jugement s'avère impossible, l'acte peut être délivré à domicile ; que, dans ce cas, l'huissier de justice doit impérativement vérifier que le destinataire de l'acte demeure à cette adresse et préciser dans l'acte les diligences concrètes qu'il a accomplies pour procéder à cette vérification ; que la mention « le nom figure sur la boîte aux lettres » ne constitue pas à elle seule une vérification suffisante de ce que le destinataire de l'acte demeure bien à l'adresse de signification, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile.