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17/02/2015 | FRANCE | N°13-87948

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 février 2015, 13-87948


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Joseph X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 24 octobre 2013, qui, pour complicité de travail dissimulé et complicité d'abus de biens sociaux, l'a condamné à dix-huit mois avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 janvier 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Gué

rin, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Beauvais, conseiller de la chambre ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Joseph X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 24 octobre 2013, qui, pour complicité de travail dissimulé et complicité d'abus de biens sociaux, l'a condamné à dix-huit mois avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 janvier 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Beauvais, conseiller de la chambre ;
Avocat général : Mme Le Dimna ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BARBIER, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-1, L. 320, L. 343-3, L. 362-4, L. 362-5 du code du travail, devenus les articles L. 8224-1, L. 8263-1, L. 8221-3, L. 8221-5, L. 1221-10, L. 1221-11, L. 1221-12, L. 1221-13, L. 8224-3, L. 8224-4, des articles 121-6 et 121-7 du code pénal, de l'article préliminaire, des articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, et de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que M. X... a été déclaré coupable du délit de complicité de travail clandestin de 2003 au 27 juin 2005 et condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement assortie du sursis simple et à payer solidairement avec MM. Kemal et Adnan Y... la somme de 9 191,12 euros à la partie civile ;
"aux motifs propres que les faits concernant M. Joseph X... se situent dans un contexte beaucoup plus vaste que celui concernant le seul prévenu et ont été rappelés de façon particulièrement détaillée par le juge d'instruction dans son ordonnance de renvoi puis par le tribunal correctionnel de Rouen dans son jugement du 16 avril 2012 auquel la cour se réfère expressément pour leur exposé et dont il résulte pour l'essentiel les éléments suivants : d'importantes investigations ont été menées à partir de 2004 par les services de police autour d'un bar de Saint-Etienne-du-Rouvray géré par un certain M. Kemal Y..., bar servant de rendez-vous à des ouvriers turcs venant s'y faire embaucher par des entreprises, turques elles-mêmes, et notamment par une société « Kema » dont le gérant avait été M. Kemal Y... lui-même puis son fils Adnan ou un gérant de paille, M. Erol Z... ; que cette société s'est avérée être le cadre de très nombreuses infractions pour lesquelles les gérants susnommés et d'autres encore ont été poursuivis, jugés et condamnés par le tribunal correctionnel de Rouen dans son jugement soumis aujourd'hui partiellement à la cour ; qu'il a été mis en évidence que la comptabilité de la société Kema était assurée depuis l'origine et notamment depuis 2003, par M. M. X..., d'abord salarié en qualité de comptable d'une société d'expertise comptable, la société Bouvier, dont le siège social était à Paris, puis à Orange ; que M. X... n'ayant pas souhaité suivre la société Bouvier lors de son déménagement à Orange, a accepté d'être embauché en qualité de comptable salarié par la société Kema pour s'occuper de sa comptabilité mais toujours sous le contrôle de la société Bouvier en qualité d'expert comptable ; que parmi d'autres, deux séries d'infractions ont été mises en évidence puis poursuivies à l'encontre des dirigeants de la société Kema : des faits de travail dissimulé d'une part et d'autre part des abus de biens sociaux ; qu'il a été établi et définitivement jugé que les dirigeants de Kema avaient recours de façon systématique et sur une grande échelle à une pratique consistant à ne déclarer aux organisme sociaux qu'une partie du personnel employé ou souvent aussi qu'une partie seulement des heures effectuées par ce personnel, notamment en transmettant tardivement les déclarations préalables à l'embauche des salariés ou en ne faisant pas figurer les heures effectivement travaillées par les salariés, la masse salariale de l'entreprise ne correspondant en rien au chiffre d'affaire réalisé, masse salarie considérablement minorée par rapport au travail nécessaire pour réaliser le chiffre d'affaire effectif ; que M. X... était alors le comptable chargé au sein de l'entreprise de l'établissement et de la transmission aux organismes sociaux de l'ensemble des documents de déclaration des salariés et ne pouvait que percevoir l'existence d'une fraude importante du fait de ces pratiques qui ont cependant continué sur plusieurs années ; (¿) qu'il est enfin tout à fait établi que M. X... s'est rendu coupable de complicité d'exécution de travail dissimulé par non déclaration ou déclaration incomplète de salariés, dans la mesure où il maîtrisait parfaitement la réglementation sociale qu'il était en charge d'appliquer au sein de l'entreprise en sa qualité de comptable, qu'il avait parfaitement pris la mesure de la fraude du fait de son ampleur et qu'il a accepté de jouer ce jeu sur plusieurs années sans jamais essayer de faire modifier les pratiques, qu'il pouvait là encore faire du fait de sa place, très proche de la direction, au sein de l'entreprise ; qu'il y a donc lieu de confirmer sa déclaration de culpabilité pour cette dernière infraction ;
"et aux motifs adoptés que sur la complicité de travail dissimulé reproché à M. M. X..., qu'il était embauché en 2002 par le cabinet d'expertise-comptable Bouvier sis à Paris ; qu'il y était en charge du suivi du dossier Kema ; que début 2004, il quittait le cabinet Bouvier ¿ lequel déménageait à Orange ¿ et devenait salarié comptable de Kema, le bilan étant toujours supervisé par le cabinet Bouvier ; que M. X... était notamment en charge de la transmission des DPAE à l'Urssaf ; qu'en outre, il centralisait la comptabilité, laquelle révélait des distorsions entre le chiffre d'affaire et une faible masse salariale, alors que le montant des retraits en espèces était anormalement élevé ¿ 81 000 euros de mai 2003 à mai 2005 ; que le prévenu se retranchait derrière son statut de salarié pour contester sa responsabilité ; que de par le suivi comptable qu'il assurait depuis l'origine, vu le retard systématique des DPAE ¿ dont la sienne propre ¿ M. X... savait nécessairement que la société Kema recourait au travail dissimulé ; qu'or, il continuait à apporter son concours à la société, et notamment à M. Kemal Y... dont il avait parfaitement perçu le rôle dirigeant ; qu'il contribuait par son action à camoufler les infractions derrière un semble de légalité ; que sans son aide éclairée, les délits auraient rapidement été découverts ; qu'il sera donc déclaré coupable de cette infraction de 2003 au 27 janvier 2005 ;
"1°) alors que la complicité suppose que le prévenu a sciemment apporté son aide ou son assistance à la commission de l'infraction principale ; que pour déclarer M. X... coupable de complicité de travail dissimulé, la cour d'appel a énoncé qu'il ne pouvait que percevoir l'existence d'une fraude importante, M. X... étant chargé au sein de l'entreprise de l'établissement et de la transmission aux organismes sociaux de l'ensemble des documents de déclaration des salariés, qu'il maîtrisait parfaitement la réglementation sociale qu'il était en charge d'appliquer au sein de l'entreprise en sa qualité de comptable et qu'il avait parfaitement pris la mesure de la fraude du fait de son ampleur ; que la seule qualité de comptable salarié ne peut cependant suffire à établir la conscience de participer à un fait de complicité de travail dissimulé ; qu'en se prononçant ainsi pour établir l'intention délictueuse de M. X..., la cour d'appel, qui s'est fondée sur une simple présomption, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2°) alors que pour déclarer M. X... coupable de complicité de travail dissimulé, la cour d'appel a énoncé, par motifs adoptés, que compte tenu du suivi comptable qu'il assurait depuis l'origine et du retard systématique des déclarations préalables à l'embauche, dont la sienne propre, M. X... savait nécessairement que la société Kema recourait au travail dissimulé ; que la seule qualité de comptable salarié ne peut cependant suffire à établir la conscience de participer à un fait de complicité de travail dissimulé ; qu'en se prononçant ainsi pour établir l'intention délictueuse de M. X..., la cour d'appel, qui s'est fondée sur une simple présomption, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"3°) alors que la complicité suppose l'accomplissement d'un acte positif d'aide ou d'assistance antérieur ou concomitant à l'infraction principale ; que pour déclarer M. X... coupable de complicité de travail dissimulé, la cour d'appel a énoncé, par motifs propres, qu'il avait « accepté de jouer ce jeu sur plusieurs années sans jamais essayer de faire modifier les pratiques, ce qu'il pouvait là encore faire du fait de sa place, très proche de la direction, au sein de l'entreprise », et, par motifs adoptés, qu'il accomplissait son travail de comptable salarié ; qu'en s'abstenant de caractériser des actes positifs antérieurs ou concomitants à l'infraction de travail dissimulé et ayant facilité la préparation ou la consommation de cette dernière; la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 et L. 241-9 du code de commerce, des articles 121-6 et 121-7 du code pénal, de l'article préliminaire, des articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale et de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que M. X... a été déclaré coupable du délit de complicité d'abus de biens sociaux en 2005 et jusqu'au 27 juin 2005 et condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement assortie du sursis simple et à payer solidairement avec MM. Kemal et Adnan Y... la somme de 9 191,12 euros à la partie civile;
"aux motifs propres que les faits concernant M. X... se situent dans un contexte beaucoup plus vaste que celui concernant le seul prévenu et ont été rappelés de façon particulièrement détaillée par le juge d'instruction dans son ordonnance de renvoi puis par le tribunal correctionnel de Rouen dans son jugement du 16 avril 2012 auquel la cour se réfère expressément pour leur exposé et dont il résulte pour l'essentiel les éléments suivants : d'importantes investigations ont été menées à partir de 2004 par les services de police autour d'un bar de Saint-Etienne-du-Rouvray géré par un certain M. Kemal Y..., bar servant de rendez-vous à des ouvriers turcs venant s'y faire embaucher par des entreprises, turques elles-mêmes, et notamment par un société « Kema » dont le gérant avait été Kemal Y... lui-même puis son fils Adnan ou un gérant de paille, M. Erol Z... ; que cette société s'est avérée être le cadre de très nombreuses infractions pour lesquelles les gérants susnommés et d'autres encore ont été poursuivis, jugés et condamnés par le tribunal correctionnel de Rouen dans son jugement soumis aujourd'hui partiellement à la cour ; qu'il a été mis en évidence que la comptabilité de la société Kema était assurée depuis l'origine et notamment depuis 2003, par M. X..., d'abord salarié en qualité de comptable d'une société d'expertise comptable, la société Bouvier, dont le siège social était à Paris, puis à Orange ; que M. X... n'ayant pas souhaité suivre la société Bouvier lors de son déménagement à Orange, a accepté d'être embauché en qualité de comptable salarié par la société Kema pour s'occuper de sa comptabilité mais toujours sous le contrôle de la société Bouvier en qualité d'expert comptable ; que parmi d'autres, deux séries d'infractions ont été mises en évidence puis poursuivies à l'encontre des dirigeants de la société Kema : des faits de travail dissimulé d'une part et d'autre part des abus de biens sociaux ; (¿) ; que par ailleurs, il a également été établi et définitivement jugé que la société Kema a été le cadre jusqu'en 2005 de pratiques d'abus de bien sociaux par ses dirigeants et plus particulièrement par M. Kemal Y..., par soustraction d'importantes sommes d'argent des comptes de la société en paiement de dépenses personnelles somptuaires, soustractions justifiées et dissimulées au plan comptable par de fausses factures grossières fournies par un ami complaisant des dirigeants, lui-même gérant d'une entreprise de bâtiment censée avoir fourni à la société Kema de la main-d'oeuvre, alors qu'il n'en était rien ; que ces factures, manifestement fausses, ont été entrées en comptabilité par M. X..., en sa qualité de comptable, à la demande notamment de M. Kemal Y..., alors gérant de fait ; que le total de ces factures litigieuses s'est élevé à 163 400,05 euros ; que l'une d'elles a permis de couvrir le remboursement d'un chèque de plus de 11 000 euros ayant servi à M. X... pour payer un acompte sur le prix d'une Mercedes qu'il s'était achetée, même s'il a tout de même remboursé cette somme à M. Kemal Y... qui la lui avait avancée sur le compte de la société ; que M. X..., tout au long de l'information, puis au tribunal, comme devant la cour, n'a pas contesté la matérialité de l'ensemble de ces faits mais s'est retranché derrière sa qualité de salarié pour ne pas admettre sa responsabilité pénale, soutenant qu'il ne disposait pas de tous les éléments, notamment comptables, pour prendre la mesure des fraudes opérées ; que son avocat met notamment en avant le fait que le cabinet Bouvier a bien mis en garde M. Y... sur l'existence d'un compte courant débiteur d'un montant de 45 000 euros en 2005, démontrant par là la bonne foi de M. X... qui n'avait pas dissimulé cette information et donc cet abus de bien social ; (¿) que pour l'infraction de complicité d'abus des biens ou du crédit d'une société par un gérant à des fins personnelles, il a été parfaitement démontré le processus comptable qui permettait de dissimuler grossièrement, à l'aide de fausses factures, les détournements d'argent opérés par le dirigeant de la société Kema ; qu'il est en effet établi que M. X... avait parfaitement perçu la fausseté des factures qu'on lui demandait de passer en comptabilité et savait également tout à fait que ces factures couvraient des retraits d'argent infondés ; qu'il avait parfaitement la possibilité, tout salarié qu'il était, de refuser de participer à ce stratagème, ce qu'il s'est parfaitement gardé de faire malgré les liens très privilégiés qu'il avait établis avec les dirigeants de Kema qui lui auraient permis de le faire ; que dans ces conditions, il devra être retenu dans les liens de la prévention de ce chef et le jugement sera confirmé sur ce point, mais également sur la relaxe partielle intervenue pour les années 2003 et 2004, dans la mesure où la pratique des fausses factures n'est bien intervenue qu'en 2005 ;
"et aux motifs adoptés que sur les fausses factures, la comptabilité de la société Kema, remise par M. X... à la fille de M. Kemal Y... début juillet 2005, était finalement livrée aux enquêteurs le 6 octobre 2005 durant la garde à vue du comptable décembre 2004 pour un montant total de 163 400,05 euros par une société TD Génie, créée le 20 mai 200 par M. Davut A... ; que selon M. X..., ces factures lui étaient toutes amenées début 2005 par M. Davut A..., lequel venait de la part de M. Kemal Y... ; qu'elles étaient censées expliquer les importants retraits en espèces effectués sur le compte de la société ; que le comptable avait en effet indiqué à M. Kemal Y... que, faute de justificatifs, il devrait enregistrer lesdits retraits au débit du compte courant ; que M. X... avouait que les factures lui semblaient « bizarres », ne serai-ce que parce que la société Kema, travaillant elle-même en sous-traitance, ne pouvait avoir recours à ce procédé ; qu'il concluait que « de toute évidence », il s'agissait de fausses factures ; qu'il ne les entrait pas moins dans la comptabilité, vérifiant seulement qu'elles correspondaient à des sorties de fonds (d99, d103) ; qu'il y a lieu de noter qu'une des factures litigieuses, en date du 20 février 2004, correspondait non à un retrait en liquide mais à un chèque de 14 950 euros remis le 15 février 2004 par M. Kemal Y... à M. X... pour lui permettre de régler l'acompte d'un achat personnel ¿ un véhicule Mercedes ; que le 1er mars 2004, sur instructions de M. Kemal Y..., M. X... remboursait partiellement sa dette en faisant un virement de 11 200 euros sur le compte particulier de M. Kemal Y... à la BNP (d5) ; que ces faits, qui caractérisent un recel d'abus de biens sociaux, ne sont certes pas reprochés au comptable, mais ils confirment que M. X... savait que les factures étaient fausses, fabriquées pour justifier des sorties de fonds infondées ; que dès lors les charges sont suffisantes pour le déclarer coupable de complicité des abus de biens sociaux commis par MM. Kemal et Adnan Y... ; que ce délit reproché à M. X... date de 2005 ; que le prévenu sera donc relaxé de l'infraction pour les années 2003 et 2004 ;
"1°) alors que la complicité suppose l'accomplissement d'un acte positif d'aide ou d'assistance antérieur ou concomitant à l'infraction principale ; qu'en énonçant, par motifs adoptés, que M. X... savait que les factures étaient fausses, fabriquées pour justifier des sorties de fonds infondées, pour en déduire que « dès lors, les charges sont suffisantes pour le déclarer coupable de complicité des abus de biens sociaux commis par MM. Kemal et Adnan Y... », sans caractériser aucun fait positif d'aide ou d'assistance commis par M. X... antérieur ou concomitant à l'infraction d'abus de biens sociaux, la seule connaissance de l'existence du délit ne suffisant pas à caractériser la complicité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que la complicité suppose l'accomplissement d'un acte positif d'aide ou d'assistance antérieur ou concomitant à l'infraction principale ; qu'elle ne peut s'induire d'une simple inaction ou abstention qu'à la condition que le prévenu soit tenu à une obligation de ne pas laisser se perpétrer l'infraction et ait eu le pouvoir d'y faire obstacle ; que conformément à l'article 2 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 modifiée, l'expert-comptable, et a fortiori le comptable salarié lié par un lien de subordination à son employeur, qui n'a fait que retranscrire fidèlement dans les écritures la réalité d'opérations qui mettaient en évidence des prélèvements opérés par le responsable de l'entreprise ne peut pas être déclaré complice du délit d'abus de biens sociaux ; que par motifs adoptés, la cour d'appel a énoncé, pour déclarer M. X... coupable de complicité d'abus de biens sociaux, que le comptable avait indiqué à M. Kemal Y... que, faute de justificatifs, il devrait enregistrer lesdits retraits au débit du compte courant ; que M. X... avait avoué que les factures lui semblaient « bizarres » et que de toute évidence, il s'agissait de fausses factures, mais qu'il ne les entrait pas moins dans la comptabilité, vérifiant seulement qu'elles correspondaient à des sorties de fonds ; qu'en statuant ainsi, par des motifs démontrant uniquement que M. X... n'a fait que retranscrire fidèlement dans les écritures la réalité d'opérations qui mettaient en évidence des prélèvements opérés par le responsable de l'entreprise, mais qui ne caractérisent pas un acte positif d'aide ou d'assistance commis par M. X..., la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3°) alors que la cour d'appel a relevé que M. X..., lors de l'audience, avait fait valoir que le cabinet Bouvier avait mis en garde M. Y... sur l'existence d'un compte courant débiteur en 2005, ce qui démontrait sa bonne foi puisqu'il n'avait pas dissimulé cette information et donc cet abus de bien social ; que pourtant, la cour d'appel n'a pas répondu à ce moyen déterminant, privant sa décision de motifs ;
"4°) alors que les juges doivent caractériser un des modes de complicité punissable dans leur décision ; que pour déclarer M. X... coupable du délit de complicité d'abus de bien sociaux, la cour d'appel n'a caractérisé aucun mode de complicité punissable, privant ainsi sa décision de base légale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, dès lors qu'un comptable, fût-il salarié, peut être déclaré complice du délit d'abus de biens sociaux ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept février deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-87948
Date de la décision : 17/02/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 24 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 fév. 2015, pourvoi n°13-87948


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.87948
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