LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 15 octobre 2013), qu'à la suite de la suppression d'une haie vive et d'une clôture, M. X... a, après l'échec d'un bornage amiable, assigné en bornage M. Y..., propriétaire de la parcelle contiguë ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'ordonner le bornage des fonds selon la limite matérialisée en couleur rouge sur le plan figurant à l'annexe n° 7 du rapport d'expertise, alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... invoquait de façon précise, dans ses conclusions d'appel qui démontraient la nécessité de tenir compte de tous les indices propres à la fixation d'une ligne divisoire conforme, le caractère inapproprié du tracé proposé par l'expert Z..., faute pour lui de prendre en considération, comme l'avait fait en revanche le géomètre A..., l'état des lieux en 1908, lors de l'acquisition initiale du fonds par la famille X... ; qu'il faisait notamment valoir, en en justifiant, qu'il y avait lieu de valider les « limites de propriété telles que définies par le géomètre-expert A...sur la base des éléments matériels existant de tout temps et conformément aux mentions figurant au cadastre telles que résultant de l'acte d'acquisition du grand-père de M. X... en date du 25 décembre 1908 » ; que saisie de telles écritures, il incombait à la cour d'appel d'y apporter une réponse circonstanciée ; qu'à défaut, elle a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions, le privant par là même de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'occurrence, aucun des litigants ne soutenait que les souches restant sur le terrain auraient été antérieurement déplacées ; que dès lors en énonçant, pour refuser d'ordonner le bornage conformément au tracé préconisé par M. X... sur le fondement du relevé dressé par le cabinet B...-C...-A...-D..., que « de nombreux rejets ont pu se développer au fil des années de part et d'autre de son axe médian, de telle sorte que rien n'établit que les souches encore existantes se soient effectivement trouvées sur cet axe », sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'aucun des actes de propriété ne permettait de déterminer la limite des deux fonds et que rien n'établissait que les souches encore existantes de la haie se soient trouvées sur son axe médian, la cour d'appel, répondant aux conclusions, sans violer le principe de la contradiction, en a souverainement déduit que la limite séparative des parcelles devait être fixée selon la limite matérialisée en couleur rouge sur le plan figurant en annexe n° 7 du rapport d'expertise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer la somme de 3 000 euros à M. Y...; rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par Mme Feydeau, conseiller, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller référendaire empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné le bornage des fonds appartenant respectivement à Monsieur Raymond X... et à Monsieur David Y...selon la limite matérialisée en couleur rouge sur le plan figurant à l'annexe n° 7 du rapport d'expertise établi par Monsieur Claude Z...;
Aux motifs propres que l'article 646 du code civil dispose que tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës, et que le bornage se fait à frais communs ; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutient depuis l'origine de la procédure que la limite séparant son fonds, cadastré section D n° 574, de celui de Monsieur Y..., cadastré section D n° 793, était matérialisé par l'axe d'une haie vive mitoyenne, dont il affirme qu'elle a été supprimée dans sa plus grande partie par Monsieur Y...peu de temps après que celui-ci ait acquis la propriété de sa parcelle ; que Monsieur Y...conteste quant à lui que l'emprise de cette haie se soit étendue sur la propriété de Monsieur X..., et estime en conséquence que la limite séparative doit être fixée, côté X..., en retrait de l'ancienne emprise de la haie ; qu'il est constant qu'aucun des actes de propriété ne permet de déterminer la limite des deux fonds, étant rappelé qu'aucun bornage n'a été réalisé à l'occasion de l'acquisition, par Monsieur Y..., de sa parcelle le 30 mars 2004, en dépit de son projet d'édification sur cette parcelle d'un immeuble d'habitation ; que l'appelant verse aux débats des attestations de témoins rapportant que la famille X... procédait à l'entretien et à la taille de la moitié de la haie jouxtant son héritage, ces témoignages portant sur les années 1957 à 2002 ; ¿ qu'il doit ainsi être considéré que Monsieur X... rapporte la preuve de la réalisation, pendant plus de trente années, et à titre de propriétaire, d'actes caractérisant une possession continue, non interrompue, paisible, publique et non équivoque ; que cette possession plus que trentenaire, que viennent confirmer des indices matériels résultant de la présence, sur l'ancienne emprise de la haie, de vestiges d'une clôture en fils de fer barbelés, dont certains éléments restent solidaires de souches restées en place, établit le bien-fondé de la position de Monsieur X... ; que toutefois, cette seule constatation ne suffit pas à permettre d'établir le tracé exact de la ligne séparative, dès lors que l'emprise de la haie, qui a matériellement disparu, est difficile à appréhender au vu des vestiges encore apparents ; que s'il est en effet constant que certaines souches d'arbres ou d'arbustes ayant fait partie de la haie subsistent, il n'en demeure pas moins qu'elles ne sauraient permettre à elles-seules de restituer le tracé de la limite, comme le soutient Monsieur X..., ne serait-ce que parce qu'elles ne sont pas alignées de manière rectiligne les unes par rapport aux autres ; qu'en tout état de cause, compte tenu de l'ancienneté de la haie, dont la présence est attestée au moins depuis 1950, puisque sa représentation figure sur le croquis de mesurage du 14 février 1950, il est indubitable que de nombreux rejets ont pu se développer au fil des années de part et d'autre de son axe médian, de telle sorte que rien n'établit que les souches encore existantes se soient effectivement trouvées sur cet axe ; qu'au surplus, compte tenu de l'importance des travaux mis en oeuvre pour supprimer la haie, il ne peut aucunement être exclu que les souches aient bougé, de telle sorte que leur position actuelle peut différer de leur position initiale ; que la proposition de délimitation faite par Monsieur Z...prend en compte la possession trentenaire de Monsieur X..., mais aussi les contenances telles que résultant des titres respectifs et du cadastre, ainsi que la répartition proportionnelle des excédents ; qu'elle aboutit à un tracé entièrement rectiligne sur toute la longueur de la parcelle n° 574 limitrophe avec la parcelle n° 793 propriété de Monsieur Y..., et la parcelle n° 573 appartenant à la commune de Méry-sur-Seine, ce qui correspond à l'aspect présenté par cette limite telle qu'apparaissant sur le croquis de mesurage du 14 février 1950 et le plan de 1950, ainsi d'ailleurs que sur le croquis sans valeur juridique établi le 16 janvier 2007 par le cabinet B...
C...
A...
D..., qui est pris comme référence par Monsieur X... ; qu'en outre, cette limite passe par la seule borne ancienne en place entre la parcelle de Monsieur X... et celle de la commune de Méry-sur-Seine (borne désignée par la lettre « C » sur les documents établis par l'expert), ce qui renforce sa pertinence ; qu'il y a donc lieu d'ordonner le bornage selon la limite proposée par Monsieur Z..., les frais de l'opération étant supportés par moitié par chacune des parties ;
Alors, de première part, que Monsieur X... invoquait de façon précise, dans ses conclusions d'appel (p. 15, in limine) qui démontraient la nécessité de tenir compte de tous les indices propres à la fixation d'une ligne divisoire conforme, le caractère inapproprié du tracé proposé par l'expert Z..., faute pour lui de prendre en considération, comme l'avait fait en revanche le géomètre A..., l'état des lieux en 1908, lors de l'acquisition initiale du fonds par la famille X... ; qu'il faisait notamment valoir, en en justifiant, qu'il y avait lieu de valider les « limites de propriété telles que définies par le géomètre-expert A...sur la base des éléments matériels existant de tout temps et conformément aux mentions figurant au cadastre telles que résultant de l'acte d'acquisition du grand-père de monsieur X... en date du 25 décembre 1908 » (conclusions, p. 11, § 4) ; que saisie de telles écritures, il incombait à la Cour d'appel d'y apporter une réponse circonstanciée ; qu'à défaut, elle a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions, le privant par là même de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, de seconde part, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'occurrence, aucun des litigants ne soutenait que les souches restant sur le terrain auraient été antérieurement déplacées ; que dès lors en énonçant, pour refuser d'ordonner le bornage conformément au tracé préconisé par Monsieur X... sur le fondement du relevé dressé par le cabinet B...-C...-A...-D..., que « de nombreux rejets ont pu se développer au fil des années de part et d'autre de son axe médian, de telle sorte que rien n'établit que les souches encore existantes se soient effectivement trouvées sur cet axe » (arrêt, p. 4, in limine), sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.