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10/02/2015 | FRANCE | N°13-27085

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 février 2015, 13-27085


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 12 septembre 2013) que l'entreprise agricole à responsabilité limitée Bizouarne (l'EARL), désireuse d'irriguer une partie de ses terres au moyen d'un aqueduc apportant sur celles-ci l'eau d'un forage dépendant de son exploitation, a assigné M. X..., propriétaire d'un fonds intermédiaire, afin d'obtenir judiciairement le passage qu'il lui refusait sur son fonds ;
Attendu que pour débouter l'EARL de s

a demande, l'arrêt retient que l'EARL n'a engagé aucune action au fond pour...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 12 septembre 2013) que l'entreprise agricole à responsabilité limitée Bizouarne (l'EARL), désireuse d'irriguer une partie de ses terres au moyen d'un aqueduc apportant sur celles-ci l'eau d'un forage dépendant de son exploitation, a assigné M. X..., propriétaire d'un fonds intermédiaire, afin d'obtenir judiciairement le passage qu'il lui refusait sur son fonds ;
Attendu que pour débouter l'EARL de sa demande, l'arrêt retient que l'EARL n'a engagé aucune action au fond pour faire reconnaître un droit d'aqueduc à son profit avant tout passage des canalisations ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande de l'EARL tendait à se voir reconnaître une servitude d'aqueduc sur la parcelle concernée, et qu'il n'était pas contesté que l'EARL avait le droit de disposer de l'eau issue du forage dépendant de son exploitation et qui était nécessaire à l'exploitation de ses autres terres, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à l'entreprise Bizouarne la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour l'entreprise Bizouarne
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté l'EARL Bizouarne de sa demande de servitude d'aqueduc et d'avoir rejeté toutes demandes autres ou plus amples de l'EARL Bizouarne ;
Aux motifs propres que l'EARL Bizouarne, exploitante agricole à Varennes-lès-Narcy, a assigné son bailleur, Monsieur David X..., devant le Tribunal d'instance de Nevers aux fins de se voir reconnaître une servitude d'aqueduc sur les parcelles AC 390 et AC 391 qu'elle exploite et que, par jugement rendu le 17 janvier 2013, le Tribunal d'instance de Nevers l'a déboutée de sa demande, motif pris de ce qu'elle ne produisait aucune pièce mettant le Tribunal en mesure d'apprécier la situation géographique des parcelles concernées ; que l'EARL Bizouarne, qui conclut à l'infirmation de la décision déférée, se borne à reprendre en cause d'appel ses moyens de première instance et réitère sa demande en reconnaissance d'une servitude d'aqueduc, faisant valoir qu'elle a mis en place un aqueduc enterré dans la parcelle A 390 et en surplomb sur la parcelle AC 391 avec l'accord verbal de Monsieur Roland X... qui était à l'époque propriétaire des parcelles litigieuses et que le tracé qu'elle a choisi s'imposait comme n'étant pas dommageable pour le fonds X... ; que la servitude d'aqueduc prévue par l'article L.152-14 du Code rural permet à toute personne qui veut user, pour les besoins de son exploitation, des eaux dont elle a le droit de disposer, d'obtenir un passage par conduite souterraine de ces eaux sur les fonds intermédiaires dans les conditions les plus rationnelles et les moins dommageables à l'exploitation présente et future de ces fonds ; mais cette servitude ne s'exerce pas de plein droit et elle ne peut être établie que par un accord amiable entre les parties concernées ou, à défaut, par une décision de justice, de manière à ce que le propriétaire du fonds servant puisse être indemnisé préalablement à la mise en oeuvre de la charge grevant sa propriété privée ; qu'en l'espèce, l'EARL Bizouarne n'établit nullement avoir obtenu l'autorisation de Monsieur David X... ou de son auteur pour poser des canalisations sur les parcelles considérées ; que, par ailleurs, elle n'a engagé aucune action au fond pour faire reconnaître un droit d'aqueduc à son profit avant tout passage des canalisations ; que, dès lors, sa demande ne peut prospérer, même si elle bénéficie par ailleurs de décisions judiciaires définissant le tracé à suivre à travers les héritages voisins, ces décisions judiciaires étant dépourvues de tous effets contraignants à l'encontre de tiers propriétaires de fonds également traversés ; que la décision déférée sera donc confirmée mais par substitution de motifs ;
Alors, de première part, que l'action formée par la société Bizouarne avait été introduite en première instance devant le Tribunal d'instance et visait à la constitution d'une servitude d'aqueduc à son bénéfice, suivant un tracé dont elle démontrait qu'il correspondait aux conditions les plus rationnelles et les moins dommageables à l'exploitation présente et future de la parcelle AC 391 grevée appartenant à Monsieur X..., tout ceci dans le respect et au visa des articles L.152-14 et suivants du Code rural et de la pêche maritime, ce dont il résultait que l'action engagée par la société Bizouarne ne pouvait qu'être de nature pétitoire ; qu'en disant que cette société n'avait engagé aucune action au fond pour faire reconnaître un droit d'aqueduc à son profit avant tout passage de canalisations, alors que tel était précisément l'objet de l'action portée devant elle, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors, de deuxième part, que toute personne physique ou morale, qui veut user pour l'alimentation en eau potable, pour l'irrigation ou, plus généralement, pour les besoins de son exploitation, des eaux dont elle a le droit de disposer, peut obtenir le passage par conduite souterraine de ces eaux sur les fonds intermédiaires, dans les conditions les plus rationnelles et les moins dommageables à l'exploitation présente et future de ces fonds, à charge d'une juste et préalable indemnité ; qu'en se fondant sur ce que la société Bizouarne n'aurait engagé « aucune action au fond pour faire reconnaître un droit d'aqueduc à son profit avant tout passage de canalisations », pour débouter cette société de sa demande de servitude d'aqueduc formée en application de l'article L.152-14, la Cour d'appel a ajouté à cette disposition une condition qu'elle ne prévoit pas, et l'a violée ;
Alors, subsidiairement, de troisième part, que la protection possessoire et le fond du droit ne sont jamais cumulés ; qu'en reprochant à la société Bizouarne de n'avoir engagé aucune action au fond pour faire reconnaître un droit d'aqueduc à son profit avant tout passage des canalisations, pour rejeter son action, supposée possessoire, en reconnaissance d'une servitude d'aqueduc, la Cour d'appel a conditionné le bien-fondé de la supposée action possessoire par l'introduction préalable d'une action pétitoire, en violation du principe de non-cumul du pétitoire et du possessoire.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-27085
Date de la décision : 10/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 12 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 fév. 2015, pourvoi n°13-27085


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27085
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