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04/02/2015 | FRANCE | N°13-26600

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 février 2015, 13-26600


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail interprétés à la lumière des clauses 1 et 5 de l'accord- cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Languazur à compter du 9 septembre 2006 en qualité de formatrice en espagnol dans le cadre de deux contrats à durée déterminée ; que l'intéressé

e a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de ces contrats...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail interprétés à la lumière des clauses 1 et 5 de l'accord- cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Languazur à compter du 9 septembre 2006 en qualité de formatrice en espagnol dans le cadre de deux contrats à durée déterminée ; que l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de ces contrats en contrat à durée indéterminée et en paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en requalification de ses contrats à durée déterminée, et après avoir constaté que le motif figurant sur le contrat visait « la formation en espagnol des stagiaires et /ou les salariés sur le site de Nice », l'arrêt énonce que l'intéressée a été employée pour l'exécution d'une tâche précise, la formation en langue espagnole des stagiaires et des salariés du site de Nice, et ce dans le secteur d'activités de l'enseignement, par l'intermédiaire d'organismes de formations tels que la société Languazur, dans le secteur d'activités duquel il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité la formation et le caractère par nature temporaire de ce type d'emploi compte tenu du public visé et de l'enseignement donné ;
Attendu cependant que s'il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans vérifier que le recours aux contrats à durée déterminée litigieux était justifié par des raisons objectives qui s'entendaient de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Languazur aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour Mme X....
En ce que l'arrêt attaqué dit que les contrats de travail à durée déterminée de Mme X... sont conformes à la législation et la déboute de ses demandes.
Aux motifs que Sur la requalification du contrat de formateur occasionnel en contrat de travail à durée indéterminée. Un formateur occasionnel est une personne salariée dispensant des cours dans des organismes ou des entreprises, au titre de la formation professionnelle ou dans des établissements d'enseignement, de façon irrégulière. Les formateurs occasionnels sont affiliés au régime général de la sécurité sociale. En l'espèce c'est auprès de différents stagiaires que Mme X... a, en exécution de ses deux contrats de formateur occasionnel avec l'organisme de formation LINGUAZUR, dispensé ses cours d'espagnol, à savoir Lou Ginestre, à raison de 24 heures de formation, la Civette de l'Empereur, à raison de 22 heures de formation. L'Auberge des Templiers, à raison de 27 heures et l'Atelier Interentreprises, à raison de 30 heures. Il est incontestable que les cours ont été dispensés de manière irrégulière, les heures de formation étant réparties sur différentes journées disséminées dans une période de quelques mois au maximum. La société LANGUAZUR indique que ce contrat de travail de Mme X..., formateur occasionnel, est un contrat à durée déterminée d'usage, prévu par l'article L 1242-2 du code du travail. Mme X... soutient : - que le contrat ne respecte pas les dispositions de l'article L 1242-12 aux termes desquels le contrat à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée ; - que le motif figurant sur les contrats de travail, à savoir « la formation en espagnol des stagiaires et /ou les salariés sur le site de Nice » ne correspond ni à une tâche précise et temporaire ni à un des cas de recours prévus à l'article L 1242-2 du code du travail. Cet article, ciaprès partiellement reproduit, stipule qu'un contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise, et seulement dans le cas d'emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. L'article D 1242-1 du Code du Travail énonce, en application de l'article L 1242-2, les secteurs d'activité dans lesquels les contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. L'énumération des secteurs d'activité mentionne celui de l'enseignement (art D 1242-1 7°). En l'espèce, Mme X... a été employée pour l'exécution d'une tâche précise, la formation en langue espagnole des stagiaires et des salariés du site de NICE et ce dans le secteur d'activité de l'enseignement, par l'intermédiaire d'organismes de formations tels que LANGUAZUR, dans le secteur d'activité duquel il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité la formation et le caractère par nature temporaire de ce type d'emploi compte tenu notamment du public visé et de l'enseignement donné. Mme X... invoque cependant : le non respect de l'article 5.7 de la convention collective des organismes de formation qui prévoit qu'avant toute conclusion d'un contrat à durée déterminée, l'employeur fera appel de préférence aux salariés à temps partiel de l'établissement volontaires et possédant les qualités requises. Or, à la date de la conclusion du contrat à durée déterminée de Mme Z... , soit le 4 juillet, Mme X... n'était pas salariée à temps partiel de l'établissement. Elle ne peut donc invoquer le non respect de ce texte qui n'est pas applicable au cas d'espèce. Le non respect par l'employeur du délai de carence prévu par le code du travail. L'article L 1244-3 du code du travail prévoit que pour pourvoir le poste du salarié dont le ¿/¿ temporaire avant l'expiration d'un délai de carence égal au tiers de la durée du contrat venue à expiration. Il ressort du registre du personnel que Mme Z... a été engagée après un délai de carence de 3 jours. Rien ne permet d'affirmer que Mme Z..., certes formatrice en espagnol, a été engagée au poste qu'occupait Mme X.... Mais surtout, l'article L 1244-4 du Code du Travail stipule que le délai de carence n'est pas applicable lorsque le contrat à durée déterminée est conclu pour pourvoir un emploi pour lequel dans les secteurs d'activité déterminés par décret il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de cet emploi. Or, tel est bien le cas en l'espèce. Enfin, Mme X... indique que lors de la signature de l'avenant l'employeur lui a indiqué qu'elle serait remplacée par un autre formateur dès qu'elle aurait travaillé 30 jours dans l'année civile. Elle analyse le registre du personnel et considère qu'il en résulte que l'organisme de formation LANGUAZUR impose systématiquement des contrats de «formateur occasionnel » restreints à 30 jours de travail dans l'année civile. Cependant si le registre du personnel renseigne sur les dates d'entrée et de sortie des salariés il ne donne aucune indication sur le nombre de journées travaillées par ces personnes. En ce qui concerne Mme X..., force est de constater que les deux contrats de travail qui la lient à la société LANGUAZUR ont donné lieu pour le premier à 23 jours travaillés dans l'année civile 2006 et pour le second 27 jours travaillés dans l'année civile 2007. Il en résulte que lorsque Madame Z..., dont Madame X... prétend qu'elle a été embauchée pour poursuivre la formation qu'elle avait commencé à dispenser et pour éviter qu'elle ne dépasse 30 jours de formation, a été engagée en Juillet 2007, Mme X... disposait encore de trois journées de formation avant d'atteindre le plafond des 30 jours en question. Au surplus, Mme Z... a été engagée pour 7 heures de formation seulement, que Mme X... aurait pu dispenser en trois jours. La salariée allègue enfin que l'employeur lui aurait demandé de signer, avant la fin de la formation ou au début de celle-ci, des attestations de fin de formation qui font état de données mensongères et ce dans le but de remplacer les formateurs dès qu'ils auraient effectué 30 jours de travail dans l'année civile. L'unique pièce qu'elle produit, un courriel de Mme A..., non identifiable et dépourvu de force probante, ne permet pas de fonder cette accusation qui ne soutient aucune demande particulière. Ainsi n'est-il pas démontré que l'employeur aurait, pour Mme X... comme pour les autres salariés, fait en sorte de ne jamais dépasser le quota de 30 journées d'activité dans l'année civile. En outre, l'avantage qu'en aurait retiré l'employeur n'est pas clairement défini par la salariée. Enfin il n'est pas démontré qu'il existerait un lien de causalité entre le nombre de journées d'activité du formateur occasionnel et la forme du contrat de travail qui le lie à l'organisme de formation. La requalification d'un contrat de formateur occasionnel en contrat de travail à durée indéterminée ne dépend donc pas du nombre de journées d'activité du formateur. L'incidence du nombre de journées d'activités affecte le domaine du calcul des cotisations sociales et non la qualification du contrat de travail. Il résulte de cette analyse qu'aucun des éléments invoqués par Mme X... ne peut conduire la Cour à requalifier le contrat à durée déterminée de formateur occasionnel en contrat de travail à durée indéterminée. Et aux motifs adoptés qu'au vu du registre du personnel et du tableau récapitulatif des heures d'enseignement des années 2006 à 2010, le caractère très ponctuel et le très faible volume de l'activité de formation en langue espagnole sont établis ; que l'article L.1242-2 alinéa 3 du code du travail prévoit la possibilité d'avoir recours au contrat à durée déterminée d'usage pour le champ de la formation ; que la convention collective applicable prévoit également le recours à toutes les formes de contrat prévu par le code du travail.
Alors, d'une part, qu'un établissement d'enseignement ne peut recourir à des contrats à durée déterminée pour des disciplines permanentes et proposées toute l'année ; qu'en l'espèce, le motif précis devant obligatoirement figurer dans le contrat de travail à durée déterminée établi par écrit devait faire apparaître que l'enseignement d'espagnol ne relevait pas de l'activité normale et permanente de l'établissement d'enseignement LANGUAZUR ; que tel n'étant pas le cas, la Cour d'appel a violé l'article L.1242-12 du code du travail.
Alors, d'autre part et au surplus, que l'employeur doit démontrer que l'emploi considéré est de ceux pour lesquels il est d'usage de conclure un contrat à durée déterminée ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que l'enseignement est l'un des secteurs d'activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, sans constater qu'il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'enseignement de langues prodigué et du caractère par nature temporaire de ces emplois, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.1242-2 et D.1242-1-7° du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-26600
Date de la décision : 04/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 fév. 2015, pourvoi n°13-26600


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.26600
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