LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. et Mme X... et Mme Camelia X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. A... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 octobre 2012), que M. X... est propriétaire d'une parcelle située à Herblay ; que se fondant sur l'infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme tenant à l'installation sur la parcelle de plusieurs caravanes et d'un camping-car, la commune d'Herblay a assigné M. et Mme X..., leur fille Camélia et M. A..., en référé pour obtenir leur condamnation à évacuer ces caravanes et ce camping-car ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'il n'incombe pas à un huissier mandaté par une partie aux fins de constat d'informer spécialement l'autre partie des droits que celle-ci peut avoir de s'opposer à une mission extra-judiciaire, qu'ayant relevé que l'huissier avait décliné son nom, sa qualité et l'objet de sa mission à M. X..., la cour d'appel devant laquelle les demandeurs se bornaient à reprocher à l'huissier de ne pas les avoir informés de la faculté qu'ils avaient de lui refuser l'accès à la propriété, a pu en déduire que M. X... avait consenti à ce que l'huissier opère ses constatations sur la parcelle lui appartenant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu d'une part qu'il résulte de la décision attaquée et des productions que les demandeurs au pourvoi n'invoquaient pas une violation des droits au respect de leur vie privée et familiale et de leur domicile, protégés par les dispositions de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et déniaient que les caravanes et le camping-car constituaient leur résidence principale ;
Attendu d'autre part, que n'étant pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et ayant constaté que la parcelle appartenant à M. X... était située dans une zone du plan d'occupation des sols qualifiée de « zone à urbaniser à vocation résidentielle dominante » où « le stationnement des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation » était interdit, la cour d'appel n'avait pas à se prononcer sur la non appartenance de cette parcelle au sous-secteur délimité au plan dans lequel étaient admis « les terrains de camping ou de caravanage ainsi que ceux affectés à l'implantation d'habitations légères de loisirs » ;
D'où il suit que le moyen est pour partie, mélangé de fait et de droit comme tel, nouveau et, non fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... et Mme Camilia X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour les consorts X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Jacques X..., Madame Sylviane X..., Mademoiselle Camélia X... à procéder à l'évacuation des caravanes et camping-car présents sur la parcelle cadastrée ZE 78, Sente de la Pommeraie, à HERBLAY ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« à l'appui de leur recours et pour s'opposer à la demande d'évacuation de leurs caravanes formée par la COMMUNE D'HERBLAY, les consorts X...
A... font valoir que celle-ci se heurte à des contestations sérieuses ; ils invoquent à titre principal l'irrégularité du procès-verbal de constat de Me B..., du février 2011, aux motifs que cet huissier de justice n'a, selon eux, pas avisé M. Jacques X..., propriétaire de la parcelle, qu'il avait la faculté de lui en refuser l'accès et ne l'a pas non plus informé de l'identité de son mandant et de l'objet de sa mission, alors, en outre, que cet huissier a faussement constaté que « la deuxième caravane était non immatriculée » ; ils soutiennent ensuite que l'interdiction des caravanes en zone I AU édictée par le PLU est contraire aux dispositions de l'article R 111-40 du Code de l'urbanisme qui autorisent d'entreposer des caravanes sur le terrain où est implantée la construction constituant la résidence de leur utilisateur, en vue de leur prochaine utilisation ; ils se prévalent aussi de l'article R 421-23 du même Code qui autorise le stationnement d'une caravane d'une durée inférieure à trois mois, en indiquant que les caravanes litigieuses ne constituent pas la résidence principale de leurs utilisateurs ; ils ajoutent, enfin, qu'aucune preuve n'est apportée par la commune d'HERBLAY de l'appartenance de la parcelle litigieuse à la zone I AU du PLU ; cependant, il ressort des énonciations du procès-verbal dressé le 11 février 2011 par Me Marc B..., huissier de justice, que celui-ci a, sur les lieux et après avoir précisé sa qualité, « décliné » à M. Jacques X... l'objet de la mission lui ayant été donnée par son requérant, le Maire de la COMMUNE D'HERBLAY, et que M. Jacques X... « ne s'y est pas opposé », ce qui implique qu'il a au moins implicitement mais en tout cas nécessairement consenti à ce que l'huissier opère ses constatations sur la parcelle lui appartenant ; les opérations ainsi menées par Me B... n'encourent donc pas la critique alors que l'inexactitude alléguée de la mention de son constat relative à l'absence d'immatriculation d'une « deuxième caravane », qui n'a trait qu'à sa valeur probante, soumise à la libre discussion des parties, est indifférente quant à la régularité de ces opérations, et qu'au surplus, il n'entre pas dans les pouvoirs de la juridiction des référés d'annuler un tel constat » ;
ALORS QUE, tenu de mener loyalement ses investigations et de respecter le droit à la vie et à la propriété privées, l'huissier de justice dépêché par une commune afin de constater la présence de caravanes habitées sur le terrain d'un administrable doit informer ce dernier de son droit le plus absolu de lui refuser l'accès à sa propriété et à son domicile ; qu'il incombe à l'auxiliaire de justice de prouver l'exécution de cette obligation professionnelle et essentielle ; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutenait que Maître B..., mandaté par la commune d'HERBLAY, ne l'avait aucunement informé de ce droit au refus d'accès ; qu'afin de rejeter ce moyen, la Cour d'appel a retenu qu'il ressortait des énonciations du procès-verbal dressé le 11 février 2011 par Maître B... que celui-ci avait, sur les lieux et après avoir précisé sa qualité, « décliné » à Monsieur X... l'objet de la mission lui ayant été donnée par son requérant, le Maire de la COMMUNE D'HERBLAY, et que Monsieur X... « ne s'y est pas opposé », ce qui aurait impliqué qu'il avait au moins implicitement mais en tout cas nécessairement consenti à ce que l'huissier opère ses constatations sur la parcelle lui appartenant ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel n'a pas établi si le consentement de Monsieur X... était éclairé comme ayant été donné en pleine connaissance du droit au refus d'accès et a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 et 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Jacques X..., Madame Sylviane X..., Mademoiselle Camélia X... à procéder à l'évacuation des caravanes et camping-car présents sur la parcelle cadastrée ZE 78, Sente de la Pommeraie, à HERBLAY et à verser une indemnité à la commune d'Herblay au titre de l'article 700 du CPC.
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Me B... a constaté, le 16 février 2011, le stationnement sur la parcelle appartenant à M. Jacques X... de deux caravanes que celui-ci a indiqué être occupées, pour l'une, par lui et son épouse, et pour l'autre, par leur fille Camélia et son compagnon, M. Peter A..., outre celui d'un camping-car appartenant à M. Philippe A... ; il résulte des documents versés aux débats par la COMMUNE D'HERBLAY et, en particulier, de ses pièces 2 et 5, que la parcelle cadastrée ZE n° 78 se trouve dans la zone I AU du PLU de cette commune ; les dispositions du PLU applicables à cette zone interdisent notamment « le stationnement des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation » ; en ayant stationné sur cette parcelle des caravanes et camping-car constituant, sinon leur résidence principale, ce qu'ils dénient, du moins une annexe à leur habitation puisqu'ils admettent résider « dans la construction d'habitation » existant sur la dite parcelle à l'adresse de laquelle ils se domicilient, les consorts X...
A... ont effectivement contrevenu aux prescriptions précitées du PLU et sont, de la sorte, à l'origine d'un trouble manifestement illicite, alors que les dispositions de l'article R 111-40 du code de l'urbanisme, dont ils se prévalent, mais qui n'ont trait qu'à la possibilité « d'entreposer » des caravanes « en vue de leur prochaine utilisation », ne sont pas de nature à « entacher d'illégalité » ces prescriptions, contrairement à ce qu'ils prétendent ; de même, leur moyen fondé sur l'article R 421-23 du code de l'urbanisme est inopérant, étant en cause la violation non pas de cet article mais des règles d'urbanisme applicables au terrain litigieux découlant du PLU ; c'est ainsi par une juste appréciation des faits qui lui étaient soumis que le premier juge a, par application de l'article 809 alinéa 1 et pour mettre fin à ce trouble, ordonné aux consorts X...
A... de procéder à l'évacuation de leurs caravanes et camping-car » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QU'« il résulte des documents d'urbanisme versés par la COMMUNE D'HERBLAY, que le terrain appartenant à Monsieur Jacques X... est en zone 1 AU, en sous-secteur « a », et qu'il y est donc interdit : « le stationnement des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à habitation ». La durée du stationnement n'a aucune incidence sur l'application de ce règlement d'urbanisme. Il suffit que la caravane soit la résidence principale. Or, en l'espèce, Monsieur Jacques X... a déclaré à l'huissier vivre dans sa caravane (« me déclare occuper cette parcelle dans la caravane immatriculée ..., avec son épouse ») et l'huissier a constaté que, dans la deuxième caravane « sont installés ses enfants ». Monsieur Philippe A... est, quant à lui, en camping-car, de passage sur cette parcelle. On en déduit logiquement que ce véhicule lui sert de résidence. Ainsi, les caravanes et le camping-car ne sont manifestement pas des véhicules de stationnement en attente d'usage occasionnel et futur, mais sont bien occupés à titre de résidence. La violation de la règle d'urbanisme susvisée n'est donc pas contestable. L'évacuation peut donc être ordonnée. Le juge apprécie les mesures propres à faire cesser le trouble. Il paraît nécessaire de permettre à la commune d'HERBLAY de procéder elle-même à l'évacuation des véhicules en cas de carence de leurs propriétaires, et ce, avec l'assistance de la force publique, passé un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision » ;
1°) ALORS principalement QUE la seule méconnaissance d'une réglementation d'urbanisme est insuffisante à établir le trouble manifestement illicite ; que, plus précisément, nul trouble de cette nature n'est caractérisé lorsqu'un sujet de droit campe sur le terrain dont il est propriétaire fut-ce au mépris des prescriptions d'un plan local d'urbanisme ; qu'il s'ensuit que, le domicile n'étant pas réductible à une construction classique et pouvant être constitué d'une simple caravane et la perte d'un logement étant une des atteintes les plus graves au droit au respect du domicile, une commune n'est pas légitime à obtenir du juge des référés l'obligation de quitter les lieux sous astreinte sauf à établir que cette mesure d'ingérence est proportionnée au but légitime poursuivi ; qu'en se bornant en l'espèce à déduire l'existence d'un trouble manifestement illicite du stationnement de caravanes et d'un camping-car sur la parcelle appartenant aux consorts X... et de la contravention subséquente aux prescriptions du PLU de la commune d'HERBLAY, sans autrement caractériser l'illicéité manifeste et la nécessité de procéder à une évacuation sous astreinte, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et du citoyen et 809 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS subsidiairement QUE la zone 1 AU, selon le PLU de la commune d'HERBLAY, était constituée d'une sous-zone « k » dans laquelle il était possible de stationner des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation ; qu'en affirmant que les dispositions du PLU applicables à l'ensemble de cette zone interdisent notamment le stationnement des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation et donc en méconnaissant la nécessité de faire le départ entre les sous-zones, la Cour d'appel qui s'est interdit de rechercher si les caravanes litigieuses n'étaient pas installées dans la sous zone « k » a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809 du CPC.