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28/01/2015 | FRANCE | N°13-23602

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 janvier 2015, 13-23602


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 26 juin 2013), qu'engagée le 14 décembre 1998 par la société Cerep en qualité de technicienne qualité pour exercer en dernier lieu les fonctions d'assistante qualité, Mme X... a été licenciée pour motif économique par lettre du 30 mars 2011 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer à la salariée des dommages-intérêts, alors, selon l

e moyen :
1°/ que seuls les postes disponibles à la date du licenciement doivent...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 26 juin 2013), qu'engagée le 14 décembre 1998 par la société Cerep en qualité de technicienne qualité pour exercer en dernier lieu les fonctions d'assistante qualité, Mme X... a été licenciée pour motif économique par lettre du 30 mars 2011 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer à la salariée des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que seuls les postes disponibles à la date du licenciement doivent être proposés à titre de reclassement ; que ne sont plus disponibles les postes de reclassement qui ont été pourvus par les salariés auxquels ils ont été proposés par l'employeur en raison de leur profil professionnel dans le cadre de son obligation de reclassement ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que les deux seuls postes disponibles au reclassement de data manager et d'approvisionneur avaient été pourvus par Mmes Y... et Z... à qui ils avaient été proposés à raison de leur profil professionnel ; qu'en reprochant néanmoins à la société de n'avoir pas proposé ces postes à la salariée lorsque ces postes n'étaient plus disponibles, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
2°/ que seuls les postes compatibles avec le profil professionnel du salarié dont le licenciement est envisagé doivent lui être proposés à titre de reclassement ; que la société faisait valoir que les deux seuls postes disponibles de data manager et d'approvisionneur avaient pour pré requis une expérience de deux ans en tant que technicien de laboratoire, ce que la salariée n'avait pas, contrairement aux deux salariées à qui elle les avait proposés et qui les avaient acceptés ; qu'en se bornant d'une part à constater que l'employeur admettait ne pas avoir proposé ces deux postes à la salariée en raison de son expérience dans le seul domaine de la « qualité », et d'autre part à relever que la salariée avait suivi en 2008-2009 une formation sur le management de la sécurité et de l'environnement des systèmes industriels dépassant le strict domaine de la « qualité », pour en déduire que la société qui avait limité à tort les compétences professionnelles de la salariée avait manqué à son obligation de reclassement en ne lui proposant pas les deux postes susvisés, sans cependant rechercher comme elle y était invitée, si la salariée disposait de l'expérience professionnelle de technicien de laboratoire requise pour les pourvoir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
3°/ que seuls les postes disponibles à la date du licenciement doivent être proposés à titre de reclassement ; que l'employeur ne peut être tenu d'imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail à l'effet de libérer son poste pour le proposer en reclassement à un salarié ; qu'en retenant que la société ne démontrait pas avoir envisagé une permutation ou un aménagement de poste, permettant de reclasser la salariée sur un poste « qualité » de catégorie inférieure parmi les postes qui avaient été maintenus d'animateurs qualité et d'agents de qualité, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
4°/ que l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences ; qu'en retenant que la société ne justifiait pas avoir interrogé la salariée sur ses attentes de reclassement, ni lui avoir remis un imprimé signé par elle aux termes duquel elle aurait refusé des offres, pour en déduire que l'employeur avait failli à son obligation de reclassement, lorsque l'absence de tout poste disponible compatible avec le profil de l'intéressée dispensait la société de lui faire des propositions, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la salariée avait suivi courant 2008/2009 une formation sur le management de la sécurité et de l'environnement des systèmes industriels et occupait depuis 2012 un poste de travail dépassant l'exécution d'une mission « qualité », la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a fait ressortir que les deux postes disponibles de data manager et d'approvisionneur qui n'avaient pas été proposés, étaient compatibles avec les qualifications et les compétences de la salariée qui avaient été à tort et unilatéralement limitées par l'employeur ; qu'elle a pu en déduire que ce dernier avait manqué à son obligation de reclassement, privant ainsi le licenciement de cause réelle et sérieuse ; que le moyen, qui critique en sa troisième branche un motif surabondant et est inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Cerep aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Cerep.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement économique de Madame X... dépourvu de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR en conséquence condamné la société CEREP à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef, outre une indemnité de 1500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE « L'article L 1233-4 du code du travail énonce que le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. L'employeur doit exécuter avec loyauté cette obligation et présenter des offres de reclassement écrites, précises et personnalisées, concernant un emploi relevant de la même catégorie que celui occupé par le salarié, ou un emploi équivalent, et à défaut un emploi d'une catégorie inférieure, sous réserve de l'accord exprès du salarié. Il s'évince des pièces communiquées que, par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 mars 2011, la société Cerep a adressé à Mme X... un questionnaire destiné à identifier des postes de reclassement répondant à ses attentes, conformément à l'article précité du code du travail. Plus particulièrement il a été précisé dans ce courrier que faute de répondre dans le délai de 6 jours ouvrables, Mme X... serait réputée refuser toute offre de reclassement à l'étranger, et que, dans cette hypothèse, seuls des postes de reclassement sur le territoire national seraient alors proposés à l'intéressée. Mme X... ne conteste pas ne pas avoir répondu à ce courrier, et il s'en déduit qu'elle a, en parfaite connaissance de cause, refusé toute offre de reclassement dans une autre société du groupe Cerep, installée aux Etats Unis et en Chine. Elle ne peut donc reprocher à la société Cerep l'absence de recherche de reclassement à l'étranger. La société Cerep considère qu'elle ne pouvait proposer aucun poste en interne à Mme X... dès lors que celle-ci n'avait travaillé que sur des postes de "qualité" depuis son embauche et qu'aucun poste compatible avec ses aptitudes professionnelles n'était disponible. Pour expliquer le reclassement proposé à Mme Y..., qui l'a accepté, sur le poste de data manager, la société Cerep soutient que cette salariée avait une expérience de technicien de laboratoire et qu'en outre elle avait précédemment occupé des fonctions dans le service concerné, ce qui constituait un argument supplémentaire en faveur de son reclassement qualifié dans les écritures de "reclassement naturel". La société Cerep produit un imprimé signé par Mme Y..., acceptant cette offre de reclassement, mais ne justifie pas avoir, lors de l'entretien fixé au 14 mars 2011, interrogé Mme X... sur ses attentes de reclassement, ni avoir entrepris des recherches précises et personnalisées pour reclasser la salariée et ne communique pas le même type d'imprimé, signé par Mme X... et refusant des offres de reclassement.
De même la société Cerep admet ne pas avoir proposé à Mme X... le poste d'approvisionneur, seul poste de catégorie inférieure disponible, qu'elle a uniquement soumis, en vue de son reclassement, à Mme Z..., compte tenu de son expérience professionnelle passée.
Enfin, la société Cerep ne démontre pas avoir envisagé une permutation ou un aménagement de poste, permettant de reclasser Mme X... sur un poste "qualité" de catégorie inférieure, alors qu'étaient maintenus deux postes d'animateurs qualité et deux postes d'agents de qualité. Or, il s'évince du curriculum vitae de Mme X..., d'ailleurs produit par la société Cerep, que l'intéressée, niveau Bac + 5, a suivi à Poitiers en 2008/2009 une formation sur le management de la sécurité et de l'environnement des systèmes industriels et qu'elle occupe d'ailleurs depuis avril 2012 un poste de "responsable Hse et amélioration continue" dans la société Johnson Screens qui dépasse l'exécution d'une mission "qualité". Il s'en déduit que la société Cerep, en limitant unilatéralement et à tort les compétences professionnelles de Mme X..., a privilégié lors des phases de reclassement d'autres salariées et a donc méconnu ses obligations de reclassement ce qui rend le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. En conséquence la cour réformera la décision déférée de ce chef avec toutes conséquences de droit. Sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse Mme X..., née en 1973, qui s'est trouvée licenciée après une ancienneté de plus de 12 ans, dans les conditions déjà discutées, a retrouvé un emploi depuis avril 2012 et la cour s'estime suffisamment informée pour fixer l'indemnisation du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse à la somme de 30 000 euros, la ténacité à se réinsérer professionnellement ne devant pas être pénalisée »
1/ ALORS QUE seuls les postes disponibles à la date du licenciement doivent être proposés à titre de reclassement ; que ne sont plus disponibles les postes de reclassement qui ont été pourvus par les salariés auxquels ils ont été proposés par l'employeur en raison de leurs profil professionnel dans le cadre de son obligation de reclassement ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que les deux seuls postes disponibles au reclassement de data manager et d'approvisionneur avaient été pourvus par Mesdames Y... et Z... à qui ils avaient été proposés à raison de leur profil professionnel ; qu'en reprochant néanmoins à la société CEREP de n'avoir pas proposé ces postes à Madame X... lorsque ces postes n'étaient plus disponibles, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation de l'article L 1233-4 du Code du travail ;
2/ ALORS QUE seuls les postes compatibles avec le profil professionnel du salarié dont le licenciement est envisagé doivent lui être proposés à titre de reclassement ; que la société CEREP faisait valoir que les deux seuls postes disponibles de data manager et d'approvisionneur avaient pour pré requis une expérience de deux ans en tant que technicien de laboratoire, ce que Madame X... n'avait pas, contrairement aux deux salariées à qui elle les avait proposés et qui les avaient acceptés (conclusions d'appel de l'exposante p 17) ; qu'en se bornant d'une part à constater que l'employeur admettait ne pas avoir proposé ces deux postes à Madame X... en raison de son expérience dans le seul domaine de la « qualité », et d'autre part à relever que la salariée avait suivi en 2008-2009 une formation sur le management de la sécurité et de l'environnement des systèmes industriels dépassant le strict domaine de la « qualité », pour en déduire que la société CEREP qui avait limité à tort les compétences professionnelles de Mme X... avait manqué à son obligation de reclassement en ne lui proposant pas les deux postes susvisés, sans cependant rechercher comme elle y était invitée, si Madame X... disposait de l'expérience professionnelle de technicien de laboratoire requise pour les pourvoir, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1233-4 du Code du travail ;
3/ ALORS QUE seuls les postes disponibles à la date du licenciement doivent être proposés à titre de reclassement ; que l'employeur ne peut être tenu d'imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail à l'effet de libérer son poste pour le proposer en reclassement à un salarié ; qu'en retenant que la société CEREP ne démontrait pas avoir envisagé une permutation ou un aménagement de poste, permettant de reclasser Mme X... sur un poste "qualité" de catégorie inférieure parmi les postes qui avaient été maintenus d'animateurs qualité et d'agents de qualité, la Cour d'appel a violé l'article L 1233-4 du Code du travail ;
4/ ALORS QUE l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences ; qu'en retenant que la société ne justifiait pas avoir interrogé Mme X... sur ses attentes de reclassement, ni lui avoir remis un imprimé signé par elle aux termes duquel elle aurait refusé des offres, pour en déduire que l'employeur avait failli à son obligation de reclassement, lorsque l'absence de tout poste disponible compatible avec le profil de l'intéressée dispensait la société CEREP de lui faire des propositions, la Cour d'appel a encore violé l'article L 1233-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-23602
Date de la décision : 28/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 26 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 jan. 2015, pourvoi n°13-23602


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.23602
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