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28/01/2015 | FRANCE | N°13-23442

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 janvier 2015, 13-23442


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 1er septembre 1983 par la société Asiatides import en qualité de chef de service commercial pour occuper en dernier lieu les fonctions de directeur administratif et financier, M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 7 septembre 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à verser au salarié des sommes au titre d'un licen

ciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour préjudice...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 1er septembre 1983 par la société Asiatides import en qualité de chef de service commercial pour occuper en dernier lieu les fonctions de directeur administratif et financier, M. X... a été licencié pour motif économique par lettre du 7 septembre 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à verser au salarié des sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour préjudice moral, alors, selon le moyen, que l'employeur est libéré de l'obligation de reclassement à l'égard du salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique, lorsque l'entreprise ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation ; qu'un poste provisoirement vacant en raison de l'indisponibilité de son titulaire ou d'un surcroît d'activité, n'est pas un emploi disponible pour le reclassement ; que la société Asiatides import a soutenu que son effectif était en réduction constante depuis 2008, que le licenciement de M. X... s'était accompagné de celui de six autres salariés ; qu'elle a versé aux débats un extrait du livre d'entrée et de sortie du personnel de l'entreprise, dont il ressort qu'aucun poste n'était vacant lors du licenciement de M. X..., à l'exception de dix postes d'animateur-vendeur sur le stand du salon « Maison et Objet » à Villepinte, pour une durée de quatre jours, lesquels ne correspondaient pas à un emploi disponible pour le reclassement (livre d'entrée et de sortie du personnel et bordereau des pièces communiquées annexées aux conclusions d'appel) ; qu'en énonçant in abstracto que la société Asiatides import ne justifiait pas de son impossibilité de reclasser M. X... faute de poste disponible, sans s'expliquer sur cette pièce déterminante qui recensait les mouvements de personnel lors du licenciement de celui-ci, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté que l'employeur soutenait sans aucunement le justifier qu'il ne disposait d'aucun poste vacant et qu'il ne justifiait en outre d'aucune recherche effective de reclassement sur un poste équivalent ou un emploi de catégorie inférieure au sein de l'entreprise qui comptait pas moins de soixante dix-sept salariés au moment du licenciement ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer des dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauche, alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en oeuvre de la priorité de réembauche suppose l'existence de postes disponibles et compatibles avec la qualification du salarié ; qu'en raison de son incompatibilité avec la qualification du salarié, l'employeur n'est pas tenu de proposer, au titre de la priorité de réembauche, un poste dont le niveau de rémunération est de 70 % inférieur à celui du salarié avant son licenciement ; que dans ses conclusions soutenues à l'audience dans lesquelles elle a notamment fait siennes les motivations du jugement la société Asiatides import, pour se défendre d'une violation de la priorité de réembauche du chef de l'absence de proposition des postes de commerciaux sédentaires en contrat à durée déterminée, a fait valoir leur niveau de rémunération très inférieur à celui de la rémunération perçue par M. X... avant son licenciement, rémunération que celui-ci avait refusé de réduire dans des proportions bien moindres ; qu'en ne répondant pas à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; qu'un salarié, ancien cadre de l'équipe dirigeante licencié pour motif économique, ne peut valablement reprocher à son ancien employeur une méconnaissance de la priorité de réembauche en se prévalant de la disponibilité de postes dont la rémunération est équivalente à 30 % seulement de son ancienne rémunération, alors qu'il a refusé quelques mois avant son licenciement, de consentir à l'instar des autres membres de l'équipe de direction, une baisse de 25 % son salaire ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société Asiatides import et de réfuter les motifs du jugement sur ce point, que cette société s'était appropriée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de motivation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société s'était abstenue de proposer au salarié des postes disponibles au service commercial dont elle a estimé souverainement qu'ils étaient compatibles avec la qualification acquise par le salarié au sein de l'entreprise, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en condamnant la société à payer au salarié une somme au titre du préjudice moral résultant de la rupture de son contrat de travail, sans motiver sa décision de ce chef, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Asiatides import à payer à M. X... des dommages-intérêts pour préjudice moral résultant de la rupture du contrat de travail, l'arrêt rendu le 25 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Asiatides import.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Asiatides Import à payer à son ancien salarié les sommes de 169.329,63 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 5.000 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L 1233 - 4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts d'adaptation et de formation ont été réalisés et que le reclassement ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans le groupe auquel elle appartient. Le reclassement s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui occupé ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement doivent être écrites et précises. Il est constant qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a loyalement et sérieusement exécuté son obligation de recherche de reclassement. En l'espèce la société Asiatides Import ne verse aux débats aucune pièce justifiant de l'exécution d'une recherche de reclassement de Monsieur X... avant de prononcer son licenciement pour motif économique ; elle se contente de prétendre sans en rapporter la preuve que son reclassement était impossible au motif que la suppression du poste de Monsieur X... s'est inscrite dans un contexte de réduction de l'ensemble du personnel de l'entreprise et qu'aucun poste n'était vacant. Or, contrairement à ce que soutient l'intimée, le fait qu'un licenciement s'inscrive dans un contexte de réduction globale du personnel de l'entreprise n'exonère pas l'employeur de son obligation de recherche de reclassement et la société Asiatides Import qui employait 77 personnes au moment du licenciement, devait effectuer cette recherche, non seulement sur un emploi de catégorie similaire ou équivalent, mais aussi, sous réserve de l'accord du salarié, sur un emploi de catégorie inférieure. Le fait que la société Asiatides Import ait remis à Monsieur X..., lors de son entretien préalable de licenciement, la documentation concernant la convention de préretraite FNE ne suffit pas à constituer une proposition de reclassement telle que prévue par l'article L 1233-4 du code du travail précité. Le défaut de respect par la société Asiatides de son obligation de reclassement prive le licenciement de Monsieur X... de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les motifs économiques invoqués par l'employeur ou la question du respect des critères d'ordre des licenciements. Monsieur X... qui avait une ancienneté de 26 ans au sein de la société Asiatides, laquelle emploie habituellement plus de 10 salariés, est bien fonde à solliciter, en application de l'article L 1235 - 3 du code du travail, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Compte tenu de son ancienneté, du montant moyen de son salaire, à savoir 8.858,42 euros (y compris le 13e mois proratisé), de son âge au moment du licenciement, à savoir 58 ans, il convient d'allouer à Monsieur X... la somme qu'il sollicite, soit 169.329,63 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
ALORS QUE l'employeur est libéré de l'obligation de reclassement à l'égard du salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique, lorsque l'entreprise ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation ; qu'un poste provisoirement vacant en raison de l'indisponibilité de son titulaire ou d'un surcroît d'activité, n'est pas un emploi disponible pour le reclassement ; que la société Asiatides Import a soutenu que son effectif était en réduction constante depuis 2008, que le licenciement de M. X... s'était accompagné de celui de six autres salariés ; qu'elle a versé aux débats un extrait du livre d'entrée et de sortie du personnel de l'entreprise, dont il ressort qu'aucun poste n'était vacant lors du licenciement de M. X..., à l'exception de dix postes d'animateur-vendeur sur le stand du salon « Maison et Objet » à Villepinte, pour une durée de quatre jours, lesquels ne correspondaient pas à un emploi disponible pour le reclassement (livre d'entrée et de sortie du personnel et bordereau des pièces communiquées annexées aux conclusions d'appel : production) ; qu'en énonçant in abstracto que la société Asiatides Import ne justifiait pas de son impossibilité de reclasser M. X... faute de poste disponible, sans s'expliquer sur cette pièce déterminante qui recensait les mouvements de personnel lors du licenciement de celui-ci, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Asiatides Import à payer à son ancien salarié une somme de 5.000 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE le défaut de respect par la société Asiatides de son obligation de reclassement prive le licenciement de Monsieur X... de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les motifs économiques invoqués par l'employeur ou la question du respect des critères d'ordre des licenciements. Monsieur X... qui avait une ancienneté de 26 ans au sein de la société Asiatides, laquelle emploie habituellement plus de 10 salariés, est bien fonde à solliciter, en application de l'article L 1235 - 3 du code du travail, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Compte tenu de son ancienneté, du montant moyen de son salaire, à savoir 8.858,42 euros (y compris le 13e mois proratisé), de son âge au moment du licenciement, à savoir 58 ans, il convient d'allouer à Monsieur X... la somme qu'il sollicite, soit 169.329,63 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
ALORS QUE si le juge peut allouer au salarié licencié des dommages-intérêts pour préjudice moral résultant des conditions de la rupture, c'est à la condition de caractériser un préjudice distinct de la rupture du contrat de travail, résultant d'un comportement fautif de l'employeur ; que ce préjudice ne peut résulter de la seule circonstance que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; qu'en condamnant la société Asiatides Import à payer des dommages et intérêts à M. X... « en réparation de son préjudice moral », sans savoir caractérisé celui-ci, ni aucune faute de l'employeur, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Asiatides Import à payer à son ancien salarié une somme de 17.716,84 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de la priorité de réembauche ;
AUX MOTIFS QU' en vertu de l'article L 1233 - 45 du code du travail, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il en fait la demande au cours du même délai. Il est constant que la priorité de réembauche n'est pas limitée aux seuls contrats de travail à durée indéterminée. En l'espèce, Monsieur X... a sollicité, par lettre du 11 décembre 2009, soit dans le délai d'un an de la rupture de son contrat de travail, le bénéfice de la priorité de réembauche. La société Asiatides Import ne conteste pas ne pas avoir fait de proposition de réembauche à Monsieur X... alors qu'elle a procédé à diverses embauches en contrat de travail à durée déterminée, notamment au service commercial, poste qu'avait occupé Monsieur X... lors de son embauche au sein de la société Asiatides. Ce faisant, elle a violé l'article L 1233 - 45 précité et sera condamnée au paiement d'une indemnité de 17 716,84 euros correspondant à deux mois de salaire ;
1°) ALORS QUE la mise en oeuvre de la priorité de réembauche suppose l'existence de postes disponibles et compatibles avec la qualification du salarié ; qu'en raison de son incompatibilité avec la qualification du salarié, l'employeur n'est pas tenu de proposer, au titre de la priorité de réembauche, un poste dont le niveau de rémunération est de 70 % inférieur à celui du salarié avant son licenciement ; que dans ses conclusions soutenues à l'audience dans lesquelles elle a notamment fait siennes les motivations du jugement (arrêt p. 3 al. 5) la société Asiatides Import, pour se défendre d'une violation de la priorité de réembauche du chef de l'absence de proposition des postes de commerciaux sédentaires en contrat à durée déterminée, a fait valoir leur niveau de rémunération très inférieur à celui de la rémunération perçue par M. X... avant son licenciement, rémunération que celui-ci avait refusé de réduire dans des proportions bien moindres (conclusions p. 27 al. 5 et 6) ; qu'en ne répondant pas à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; qu'un salarié, ancien cadre de l'équipe dirigeante licencié pour motif économique, ne peut valablement reprocher à son ancien employeur une méconnaissance de la priorité de réembauche en se prévalant de la disponibilité de postes dont la rémunération est équivalente à 30 % seulement de son ancienne rémunération, alors qu'il a refusé quelques mois avant son licenciement, de consentir à l'instar des autres membres de l'équipe de direction, une baisse de 25% son salaire ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société Asiatides Import et de réfuter les motifs du jugement sur ce point, que cette société s'était appropriée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de motivation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-23442
Date de la décision : 28/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 jan. 2015, pourvoi n°13-23442


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.23442
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