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27/01/2015 | FRANCE | N°13-20088

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 janvier 2015, 13-20088


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Gérard X..., né en 1925 et titulaire de divers comptes ouverts à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et Ile-de-France (la caisse), a été hospitalisé à la fin de l'année 2005 puis placé sous tutelle par jugement du 21 mars 2006, Mme X..., sa fille unique, étant désignée en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire ; que, par jugement du 24 septembre 2008, Mme Y..., qui aidait Gérard X... dans les actes de la vie courante, a ét

é déclarée coupable d'abus de faiblesse d'une personne vulnérable commis au...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Gérard X..., né en 1925 et titulaire de divers comptes ouverts à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et Ile-de-France (la caisse), a été hospitalisé à la fin de l'année 2005 puis placé sous tutelle par jugement du 21 mars 2006, Mme X..., sa fille unique, étant désignée en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire ; que, par jugement du 24 septembre 2008, Mme Y..., qui aidait Gérard X... dans les actes de la vie courante, a été déclarée coupable d'abus de faiblesse d'une personne vulnérable commis au préjudice de ce dernier ; que Mme X..., devenue tutrice de Gérard X..., a assigné la caisse pour manquements à son devoir de vigilance puis, au cours de l'instance d'appel, est intervenue volontairement en qualité d'ayant-droit de son père, décédé le 10 mai 2012 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre des retraits d'espèces sur le compte de Gérard X... alors, selon le moyen, que selon les constatations de l'arrêt attaqué, propres et réputées adoptées, Gérard X... était âgé de 80 ans et accompagné de deux femmes quand il a effectué les trois retraits de 24 000 euros, 30 000 euros et 42 000 euros en mars, avril et mai 2005 lors même qu'habituellement il pratiquait peu d'opérations sur son compte bancaire, l'employée de la banque ayant exécuté les retraits a suspecté l'influence que pouvait exercer l'une des accompagnatrices et l'a signalé à sa direction, le formulaire relatif au deuxième retrait n'était même pas signé par Gérard X..., il a été hospitalisé à la fin de la même année que celle des retraits puis a fait l'objet une mesure de protection judiciaire cependant qu'il était aidé dans les actes de la vie courante depuis plusieurs mois par Mme Y..., et celle-ci a été condamnée pénalement pour avoir abusé de la faiblesse de Gérard X... en se faisant remettre 117 000 euros et en se faisant désigner bénéficiaire de quatre contrats d'assurance-vie ; qu'il s'évinçait de ces constatations qu'en vertu de son devoir de vigilance la Caisse aurait dû s'opposer aux trois retraits susmentionnés, manifestement anormaux et inhabituels ; qu'en jugeant au contraire qu'elle n'avait pas commis de faute au regard du principe de non-immixtion du banquier dans les affaires de son client, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les retraits en espèces litigieux ont été effectués les 16 mars, 6 avril et 11 mai 2005 pour des montants respectifs de 24 000 euros, 30 000 euros et 42 000 euros, l'arrêt relève qu'il ressort de l'audition de Mme Z..., employée de la caisse, qu'informée par l'une des deux femmes accompagnant Gérard X... que ce dernier voulait clôturer tous ses produits financiers détenus à la caisse, elle lui a demandé si telle était sa volonté, ce qu'il a confirmé ; qu'il relève encore que cette employée a précisé que Gérard X... était sain de corps et d'esprit, qu'il faisait peu d'opérations bancaires et que dans le 15e arrondissement de Paris, ce genre de retrait était assez courant ; qu'il retient ensuite qu'aucun élément contemporain des retraits ne vient contredire que la caisse ignorait l'état de santé de Gérard X..., que les retraits effectués ne présentaient ni un caractère suspect au regard de la législation, ni des anomalies apparentes et que les habitudes antérieures de Gérard X... quant aux opérations pratiquées sur son compte ne permettaient pas à la caisse de s'interroger sur la cause ou l'opportunité des retraits ordonnés et de s'immiscer dans les affaires de son client, dès lors que ce dernier, qui s'était présenté en personne, avait confirmé sa volonté ; qu'il relève enfin que Mme X... n'explique pas en quoi le fait que l'avis d'opéré du 6 avril 2005 relatif au retrait de la somme de 30 000 euros en espèces, remis à Gérard X..., ne soit pas signé par ce dernier serait fautif, dès lors qu'il n'est pas contesté que ce retrait a été demandé et obtenu par lui ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que la caisse n'avait pas commis de manquement à son obligation de vigilance ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur ce moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour limiter à 10 000 euros les dommages-intérêts alloués en réparation du préjudice subi au titre du retrait des effets de Gérard X... déposés dans le coffre-fort loué par la caisse, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté que le contrat de location n'était pas signé par Gérard X... et avoir imputé à la caisse un défaut de surveillance de l'accès au coffre entre le 11 octobre 2005, date de l'hospitalisation de Gérard X..., et le 25 janvier 2006, date de l'inventaire du coffre, relève que M. A..., neveu de Gérard X..., a indiqué au juge d'instruction qu'il avait vu la clé du coffre dans les mains de Mme Y... et que cette dernière lui avait révélé en décembre 2005 qu'une somme de 37 500 euros y subsistait puis retient que, dans ses conditions, Gérard X... a subi une perte de chance de conserver les sommes déposées dans le coffre ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la perte des espèces déposées dans le coffre constituait un préjudice certain, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et Ile-de-France à payer la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi au titre du retrait des effets déposés dans le coffre-fort, l'arrêt rendu le 8 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et Ile-de-France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par Madame B... ès qualités au titre des retraits d'espèces sur le compte bancaire de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « il ressort de l'attestation notariée versée aux débats que Monsieur X... est décédé le 10 mai 2012, laissant pour seule héritière sa fille Françoise X..., épouse B...; qu'il convient donc de donner acte à Madame B... de son intervention volontaire, en sa qualité d'ayant droit de Monsieur X... ; que Madame B... invoque en premier lieu un manquement à l'obligation de vigilance de la banque lors des retraits en espèces effectués les 16 mars, 6 avril et 11 mai 2005 pour un montant respectif de 24.000 euros, 30.000 euros et 42.000 euros ; qu'il ressort de l'audition de Madame Z..., employée au CREDIT AGRICOLE, qu'on novembre 2005, Monsieur X... accompagné de deux femmes s'est rendu à l'agence Saint Charles, que la femme la plus jeune l'ayant informée que Monsieur X... voulait clôturer tous les produits financiers qu'il possédait au CREDIT AGRICOLE, elle a demandé à Monsieur X... s'il voulait effectivement clôturer tous ses comptes, ce qui a été confirmé par ce dernier; que Madame Z... a précisé que Monsieur X... était sain de corps et d'esprit, qu'elle a également indiqué que Monsieur X... faisait peu d'opérations bancaires et que dans le 15ème arrondissement, ce genre de retrait était assez courant ; que Monsieur X... a été hospitalisé le 11 octobre 2005, qu'il a été examiné le 10 novembre 2005 par un psychiatre et qu'il a été placé sous sauvegarde de justice le 30 novembre 2005; que les faits relatés par Madame Z... se sont à l'évidence déroulés entre les mois de mars et de juin 2005 et non en novembre 2005 ; qu'au vu de l'audition de Madame Z..., qu'aucun élément contemporain des retraits ne vient contredire, le CREDIT AGRICOLE ne pouvait avoir connaissance de l'état de santé de Monsieur X... et qu'il ne pouvait refuser de procéder aux opérations concernant les comptes de ce dernier alors que rien ne n'opposait à ce que la banque accède à ses demandes ; que la banque est tenue à l'égard de ses clients d'un devoir de non-ingérence et qu'elle n'a pas à se faire juge de l'opportunité des retraits, quelle qu'en soit leur importance, dès lors que le client dispose des avoirs nécessaires ; que les retraits effectués ne présentaient ni un caractère suspect au regard de la législation, ni des anomalies apparentes ; que les habitudes antérieures de Monsieur X..., quant aux opérations qu'il pratiquait sur son compte, ne permettaient pas au CREDIT AGRICOLE de s'interroger sur la cause ou l'opportunité des retraits ordonnés et de s'immiscer dans les affaires de son client, dès lors que ce dernier, qui s'était présenté en personne à la banque, avait confirmé sa volonté ; que Madame B... produit la copie d'un avis d'opéré en date du 6 avril 2005 relatif au retrait de la somme de 30.000 euros en espèces ; que Madame B... n'explique pas en quoi le fait que l'avis d'opéré, remis à Monsieur X..., ne soit pas signé par ce dernier serait fautif, alors qu'il n'est pas contesté que ce retrait a été demandé et obtenu par Monsieur X... ; qu'en conséquence le fait que Monsieur X... ait effectué trois retraits importants en espèces ne permet pas de caractériser un manquement du CREDIT AGRICOLE à son obligation de surveillance ; que le jugement doit être confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « la banque est tenue d'un devoir de surveillance quant aux opérations effectuées sur les comptes ouverts dans ses livres ; qu'il convient de souligner que cette obligation concerne essentiellement le caractère suspect des opérations au regard de la législation sur le blanchiment d'argent, l'établissement bancaire étant tenu de faire un signalement aux autorités en cas de suspicion ; qu'au-delà de ce cas spécifique, le banquier doit s'assurer que les demandes de mouvements de fonds émanent effectivement du titulaire du compte ou de son mandataire ; qu'il convient de rappeler que la banque est tenue d'un devoir de non-immixtion dans les affaires de son client ; que la surveillance des opérations effectuées sur les comptes de ses clients doit donc concilier ces deux exigences contradictoires, auxquelles il convient d'ajouter le secret professionnel, qui a pour effet qu'un banquier ne peut en principe délivrer d'information à un tiers, y compris un membre de la famille, sur le fonctionnement d'un compte ouvert dans ses livres ; que la demanderesse reproche au Crédit Agricole un manquement à son devoir de vigilance au motif qu'il aurait autorisé trois retraits d'importantes sommes en espèces, en l'occurrence : 24 000 euros, le 16 mars 2005, 30 000 euros, le 6 avril 2005, 42 000 euros, le 11 mai 2005 ; qu'il ressort du procès-verbal d'audition de Madame Z... en date du 29 novembre 2006 ce qui suit : "En novembre 2005, M X... accompagné de deux femmes s'est rendu à l'agence Saint Charles où je travaillais, il y avait une femme relativement âgée et une autre d'une quarantaine. Là, la femme la plus jeune m'a informé que M X... voulait clôturer tous les produits financiers qu'il possédait au Crédit Agricole. Je me suis alors adressé à M X... pour être sûre de sa décision et je lui ai demandé s'il voulait effectivement clôturer tous ses comptes. Il m'a dit qu'il voulait faire cela pour disposer de l'argent et donner ce dernier à cette personne qui s'occupait de lui. (...) Au vu de cela, j'ai commencé à clôturer les comptes en vendant un plan d'épargne en actions. Je dois vous dire que M X... était sain de corps et d'esprit" ; qu'il n'est pas contestable que dans la suite de ses déclarations, l'intéressée déclare que le client faisait peu d'opérations bancaires et qu'elle a signalé ces mouvements à sa direction, ayant eu un doute sur l'influence que pouvait exercer la plus jeune de ses accompagnatrices ; que si la demanderesse soutient que ces déclarations caractérisent le manque de vigilance de la banque, il convient de souligner qu'elle n'expose pas quelle action cette dernière aurait dû entreprendre en exécution de cette obligation ; qu'en effet, si la défenderesse est tenue légalement à une obligation de signalement aux autorités désignées, il a été rappelé que ce devoir concerne le blanchiment d'argent, ce qui à l'évidence n'était pas le cas en l'espèce ; que Madame B... n'allègue pas s'être rapprochée de l'établissement bancaire avant le 30 novembre 2005, date de l'ordonnance de placement sous sauvegarde de justice de Monsieur X... ; que dès lors, entre les mois de mars et mai 2005, il n'est pas établi que le CREDIT AGRICOLE aurait pu signaler ses inquiétudes éventuelles à qui que ce soit ; qu'un simple doute ne peut justifier un avis aux services de police, ce d'autant plus qu'il y a lieu de rappeler que la chargée de clientèle a déclaré avoir vérifié la volonté de son client en l'interrogeant sur ses intentions ; que de surcroît, le refus d'exécuter une opération demandée par un client caractérise une faute de la part d'un établissement bancaire ; que dès lors, il n'est pas caractérisé de manquement à son devoir de surveillance s'agissant des retraits d'espèces effectués sur son compte par Monsieur Gérard X... entre les mois de mars et mai 2005 » ;
ALORS QUE selon les constatations de l'arrêt attaqué, propres et réputées adoptées, Monsieur X... était âgé de 80 ans et accompagné de deux femmes quand il a effectué les trois retraits de 24 000 €, 30 000 € et 42 000 € en mars, avril et mai 2005 lors même qu'habituellement il pratiquait peu d'opérations sur son compte bancaire, l'employée de la banque ayant exécuté les retraits a suspecté l'influence que pouvait exercer l'une des accompagnatrices et l'a signalé à sa direction, le formulaire relatif au deuxième retrait n'était même pas signé par Monsieur X..., il a été hospitalisé à la fin de la même année que celle des retraits puis a fait l'objet une mesure de protection judiciaire cependant qu'il était aidé dans les actes de la vie courante depuis plusieurs mois par Madame Y..., et celle-ci a été condamnée pénalement pour avoir abusé de la faiblesse de Monsieur X... en se faisant remettre 117 000 ¿ et en se faisant désigner bénéficiaire de quatre contrats d'assurance-vie ; qu'il s'évinçait de ces constatations qu'en vertu de son devoir de vigilance le CREDIT AGRICOLE aurait dû s'opposer aux trois retraits susmentionnés, manifestement anormaux et inhabituels ; qu'en jugeant au contraire qu'il n'avait pas commis de faute au regard du principe de non immixtion du banquier dans les affaires de son client, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a limité à 10 000 ¿ les dommages-intérêts alloués en réparation du préjudice subi au titre du retrait des effets déposés dans le coffre-fort de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Madame B... fait valoir en second lieu que le contrat d'ouverture d'un coffre-fort le 6 avril 2005 n'est pas signé par Monsieur X... et que le CREDIT AGRICOLE n'a pas surveillé l'accès aux coffres ; qu'il est établi que le contrat de location, daté du 6 avril 2005, versé aux débats, n'est pas signé par Monsieur X... ; que le CREDIT AGRICOLE reconnaît qu'il n'y a pas de registre permettant de vérifier l'identité des personnes qui se rendent à la salle des coffres ; que le CREDIT AGRICOLE n'est donc pas en mesure de démontrer que personne n'a eu accès au coffre entre le 11 octobre 2005, date de l'hospitalisation de Monsieur X... et le 25 janvier 2006, date de l'inventaire ; que dans une lettre adressée au juge d'instruction, Monsieur A..., neveu de Monsieur X..., indique que Madame Y..., qui détenait la clé du coffre, lui avait révélé en décembre 2005 qu'il y restait 37.500 euros et qu'il certifie avoir vu la clé du coffre dans les mains de Madame Y... ; que dans ces conditions, en raison du défaut de surveillance de l'accès aux coffres par le CREDIT AGRICOLE, Monsieur X... a subi une perte de chance de conserver les sommes déposées dans son coffre; que cette perte de chance ajustement été évaluée à la somme de 10.000 euros par le tribunal et que le jugement sera confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « le 6 avril 2005, un coffre-fort situé au sein de l'agence Saint Charles a été ouvert au nom de Monsieur Gérard X..., sans que le contrat afférent à ce service soit signé par ce dernier ; qu'il résulte des déclarations sur procès-verbal de Monsieur C..., directeur d'agence, qu'il n'y a pas de vérification des personnes qui se rendent aux coffres loués ; qu'il a à cet égard indiqué : "il n'y a pas de registre. Quand les gens veulent avoir accès à leur coffre, ils se rendent au guichet et ensuite nous les accompagnons" ; que si la banque n'a pas l'obligation de tenir un registre des personnes se rendant aux coffres, elle est tenue d'un devoir de surveillance, qui consiste essentiellement à vérifier que les personnes auxquelles elle permet cet accès sont effectivement habilitées à cet effet ; qu'il ne ressort des conclusions en défense aucun élément qui permette de caractériser que cette obligation ait été effectivement remplie par le Crédit Agricole ; qu'il résulte de l'ordonnance de renvoi de Madame Y... devant le tribunal correctionnel que : "Alors qu'elle "l'aidait" à gérer ses comptes, elle n'a pas pu expliquer la disparition d'une somme de 97000 euros retirée en espèces sur les comptes de M X..., dans le but de placer cette somme dans un coffre" ; que le demandeur a été hospitalisé à compter du 11 octobre 2005 ; que par courrier recommandé en date du 19 décembre 2005, le conseil de Monsieur X... a indiqué à l'agence du CREDIT AGRICOLE que ce dernier n'était plus en possession de la clé et que : "toute personne se présentant aux guichets munie de la clé ne pourrait l'avoir obtenue que par fraude, et pour le cas où elle serait munie d'un mandat ou pouvoir, celui-ci ne pourrait être valide eu égard à l'état de santé mentale de Monsieur X... judiciairement constaté" ; que la partie en demande produit l'attestation de Monsieur Gérard D..., son beau-frère, qui indique que Madame Y... lui a dit en décembre 2005 que la somme de 37500 euros était entreposée dans le coffre ; qu'il résulte du procès-verbal de constat dressé par huissier de justice en date du 25 janvier 2006, que le coffre contenait alors la somme de 3750 euros ; que dès lors que la banque n'établit pas qu'elle a rempli son obligation de surveillance, puisqu'elle n'est pas en mesure de démontrer que personne n'a eu accès au coffre entre le 11 octobre 2005, date de l'hospitalisation de Monsieur Gérard X... et le 25 janvier 2006, date de l'inventaire du contenu dudit coffre, qu'il convient de constater qu'elle a commis une faute dans l'exécution de son obligation contractuelle de surveillance ; que toutefois, dans la mesure où le contenu du coffre avant le procès-verbal ne saurait être établi de façon certaine par les déclarations de Monsieur D..., il convient d'analyser le préjudice subi par Monsieur X... comme une perte de chance de voir ses dépôts préservés d'une appréhension frauduleuse, qui sera justement réparée par l'allocation de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts » ;
ALORS premièrement QUE selon les constatations de l'arrêt attaqué, propres et réputées adoptées, Monsieur X... avait été hospitalisé le 11 octobre 2005, le 19 décembre 2005 son conseil signalait à la banque que son client ne disposait plus de la clé de son coffre-fort et que toute personne se présentant avec cette clé l'aurait obtenue par fraude sans pouvoir justifier d'une procuration valide, et Madame Y... avait déclaré au neveu de Monsieur X... que 37 500 € se trouvaient dans le coffre-fort au mois de décembre 2005 tandis qu'il l'avait vue en possession de la clé dudit coffre-fort, lequel ne contenait plus que 3 750 € le 25 janvier 2006 ; que les juges du fond ont par ailleurs estimé que le CREDIT AGRICOLE avait commis un défaut de surveillance en ce qu'il ne justifiait pas qu'après l'hospitalisation de Monsieur X... personne n'avait eu accès à son coffre-fort ; qu'il en résultait que la faute de la banque avait permis le vol d'une somme correspondant à la différence entre 37 500 € et 3 750 € ; qu'en jugeant que cette faute avait seulement fait perdre à Monsieur X... une chance de conserver les économies entreposées dans son coffre-fort, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et appréciations au regard de l'article 1147 du code civil, qu'elle a ainsi violé ;
ALORS deuxièmement QUE le juge doit évaluer le dommage dont il constate l'existence, quelles que soient les difficultés rencontrées à cet égard et au besoin en ordonnant une mesure d'instruction ; qu'il ne peut, pour éluder ces difficultés et au prétexte qu'il demeure dans l'incertitude de l'étendue exacte du préjudice, n'allouer qu'une indemnité pour perte de chance ; qu'en procédant ainsi, la cour d'appel a commis un déni de justice et violé l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-20088
Date de la décision : 27/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 jan. 2015, pourvoi n°13-20088


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.20088
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