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22/01/2015 | FRANCE | N°13-28368

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 janvier 2015, 13-28368


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme Monique X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 octobre 2013), que victime d'un accident de trajet le 17 mars 1997, Christian X..., salarié de la société Etablissements Deplanche-Laubeyre, s'est suicidé le 17 décembre 2007 ; que sa veuve, Mme Monique X..., a demandé à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis (la caisse) l

a prise en charge du suicide de son époux au titre de la législation profession...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme Monique X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 octobre 2013), que victime d'un accident de trajet le 17 mars 1997, Christian X..., salarié de la société Etablissements Deplanche-Laubeyre, s'est suicidé le 17 décembre 2007 ; que sa veuve, Mme Monique X..., a demandé à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis (la caisse) la prise en charge du suicide de son époux au titre de la législation professionnelle ; que la caisse ayant rejeté sa demande, elle a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter ce dernier, alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel ne pouvait considérer comme elle l'a fait que les pièces émanant du médecin traitant de M. X..., postérieures aux années 1998 et 1999, se bornent à souligner la prise régulière d'antidépresseurs et d'anxiolytiques depuis 2000 jusqu'au décès sans démontrer le lien de causalité entre l'accident d'origine et le décès, sans dénaturer le certificat établi par le docteur Y..., médecin traitant, le 18 janvier 2008, certifiant précisément que le suicide de M. X... est en rapport avec un état dépressif remontant à 1997, suite à l'accident de travail survenu le 17 mars 1997 ; qu'elle méconnaissait ainsi le sens clair et précis dudit certificat, régulièrement produit et sur lequel le premier juge s'était fondé pour accueillir la demande de Mme X..., dénaturant ainsi cette pièce de la procédure, qui est de nature à établir le rapport de causalité certain entre le décès de M. X... et l'accident ayant entraîné un état dépressif permanent, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ que le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny, dans sa décision infirmée par l'arrêt attaqué, avait déduit de l'ensemble des éléments produits aux débats, et notamment de la pièce émanant du médecin traitant de M. X..., certifiant que son suicide est en rapport avec un état dépressif qui remonte à son accident du 17 mars 1997, qu'il existe une relation directe et certaine entre le suicide de M. X... qui n'avait, auparavant, aucun antécédent psychiatrique et l'état dépressif, résultant dudit accident ; que dans ses conclusions devant la cour d'appel, Mme X... qui demandait la confirmation du jugement avait rappelé que dans son certificat établi le 18 janvier 2008, le docteur Y... a indiqué que le suicide de son patient est en rapport avec son état dépressif, remontant à 1997, suite à l'accident du travail du 17 mars 1997 ; qu'en s'abstenant de réfuter ce motif du jugement retenant qu'il résulte, notamment, du certificat du médecin traitant que le suicide de M. X... est en rapport de causalité direct et certain avec l'état dépressif dû à l'accident de travail subi par M. X..., le 17 mars 1997, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, eu égard aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève que le suicide est intervenu plus de dix ans après l'accident pris en charge ; qu'il retient que si les attestations versées par Mme X..., émanant des membres de sa famille et de son environnement amical, font état des passages à vide de Christian X..., déjà victime d'un premier accident en 1991, de ses humeurs instables, de ses moments de solitude, de ses découragements, de ses douleurs qui l'avaient rendu triste, force est de constater que ces attestations ne suffisent pas à rapporter la preuve du lien exigé ; que les pièces médicales circonstanciées qui évoquent les idées suicidaires de Christian X... et relatent l'existence d'un état anxio-dépressif sont contemporaines de l'accident ; que les pièces postérieures émanant de son médecin traitant soulignent, certes, la prise régulière d'antidépresseurs et d'anxiolytiques depuis 2000 jusqu'au décès mais sans pour autant constituer la démonstration du lien entre l'accident d'origine et le décès ; que Christian X... a été déclaré apte à la reprise de son travail sous forme de mi-temps thérapeutique en octobre 2006, que lui-même avait souhaité reprendre une activité à temps plein qu'il a commencé en novembre 2006 ; qu'aucun élément n'établit que cette reprise ait été un échec professionnel ; que Mme X... ne rapporte pas la preuve que le décès de son époux survenu le 17 décembre 2007 était en relation directe et certaine avec l'accident de trajet survenu le 17 mars 1997 ;
Que de ces constatations et énonciations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu, sans dénaturation et par des motifs suffisants, retenir qu'il n'était pas démontré que le décès de la victime était la conséquence directe et certaine de l'accident de trajet survenu en 1997, de sorte qu'il n'avait pas à être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quinze et signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour Mme Monique X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de prise en charge du décès de son époux, à titre de la législation professionnelle ;
AUX MOTIFS QUE sur quoi la cour ; considérant qu'il est constant que monsieur X... a été victime le 17 mars 1997, d'un grave accident de trajet alors qu'il circulait en moto ; que cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle ; que Monsieur X... a subi d'importantes blessures décrites dans l'expertise médicale réalisée le 19 juillet 1999 à savoir une fracture de trois métacarpiens de la main gauche, un traumatisme thoracique, un traumatisme cranio facial, une atteinte du nerf optique gauche et une fracture complexe du massif facial, l'expert décrivant également à cette date l'existence d'un état anxio-dépressif ; qu'une IPP de 65 % lui a été reconnue ; que Monsieur X... a mis fin à ses jours le 17 décembre 2007 ; considérant qu'il appartient à Mme X..., qui sollicite la reconnaissance du caractère professionnel du décès de son époux, de démontrer que le suicide de ce dernier est en relation directe et certaine avec l'accident de trajet survenu le 17 mars 1997, ce décès ne bénéficiant pas de la présomption d'imputabilité ; et considérant que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal des affaires de la sécurité sociale, cette preuve, en l'état des pièces produites, n'est pas rapportée ; considérant, en effet, tout d'abord que le suicide est intervenu plus de 10 ans après l'accident pris en charge ; considérant ensuite que si les attestations versées par Mme X... émanant des membres de sa famille et de son environnement amical font état des passages à vide de Monsieur X..., déjà victime d'un premier accident en 1991, de ses humeurs instables « autant charmantes que désagréables », de ses « moments de solitude », de ses découragements, de ses douleurs qui l'avaient rendu triste, force est de constater que ces attestations ne suffisent pas à rapporter la preuve du lien exigé ; que par ailleurs, les pièces médicales circonstanciées qui évoquent les idées suicidaires de Monsieur X... et relatent l'existence d'un état anxio dépressif sont contemporaines de l'accident, puisqu'elles datent de 1998 et 1999 ; que les pièces postérieures émanant de son médecin traitant, soulignent certes, la prise régulière d'antidépresseurs et d'anxiolytiques depuis 2000 jusqu'au décès mais sans constituer pour autant la démonstration du lien entre l'accident d'origine et le décès ; considérant enfin qu'il n'est pas contesté que Monsieur X... a été déclaré apte à la reprise de son travail sous forme de mi temps thérapeutique en octobre 2006, que lui-même avait souhaité reprendre une activité à temps plein qu'il a débutée en novembre 2006, comme l'a indiqué le médecin du travail ; qu'à cet égard, aucun élément n'est produit de nature à établir que cette reprise ait été un échec professionnel, Monsieur Z... l'un de ses collègues précisant, dans une attestation de novembre 2010, que Monsieur X... avait trouvé la force de se rétablir par le travail auquel il attachait beaucoup d'importance et que l'entreprise comptait beaucoup pour lui ; considérant dans ces conditions que Mme X... ne rapporte pas la preuve que le décès de son époux, survenu le 17 décembre 2007, étai en relation directe et certaine avec l'accident de trajet survenu le 17 mars 1997 ; que dès lors, la caisse primaire d'assurance maladie a, à raison, sur avis de son médecin conseil, refusé de prendre ce décès au titre de la législation professionnelle.
1./ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait considérer comme elle l'a fait que les pièces émanant du médecin traitant de Monsieur X..., postérieures aux années 1998 et 1999, se bornent à souligner la prise régulière d'antidépresseurs et d'anxiolytiques depuis 2000 jusqu'au décès sans démontrer le lien de causalité entre l'accident d'origine et le décès, sans dénaturer le certificat établi par le docteur Y..., médecin traitant, le 18 janvier 2008 (pièce produite n° 20), certifiant précisément que le suicide de Monsieur X... est en rapport avec un état dépressif remontant à 1997, suite à l'accident de travail survenu le 17 mars 1997 ; qu'elle méconnaissait ainsi le sens clair et précis dudit certificat, régulièrement produit et sur lequel le premier juge s'était fondé pour accueillir la demande de Mme X..., dénaturant ainsi cette pièce de la procédure, qui est de nature à établir le rapport de causalité certain entre le décès de Monsieur X... et l'accident ayant entraîné un état dépressif permanent, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2./ALORS QUE le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny, dans sa décision infirmée par l'arrêt attaqué, avait déduit de l'ensemble des éléments produits aux débats, et notamment de la pièce émanant du médecin traitant de Monsieur X..., certifiant que son suicide est en rapport avec un état dépressif qui remonte à son accident du 17 mars 1997, qu'il existe une relation directe et certaine entre le suicide de Monsieur X... qui n'avait, auparavant, aucun antécédent psychiatrique et l'état dépressif, résultant dudit accident ; que dans ses conclusions devant la cour, Mme X... qui demandait la confirmation du jugement avait rappelé que dans son certificat établi le 18 janvier 2008, le docteur Y... a indiqué que le suicide de son patient est en rapport avec son état dépressif, remontant à 1997, suite à l'accident du travail du 17 mars 1997 (pièces 19 et 20) ; qu'en s'abstenant de réfuter ce motif du jugement retenant qu'il résulte, notamment, du certificat du médecin traitant que le suicide de Monsieur X... est en rapport de causalité direct et certain avec l'état dépressif dû à l'accident de travail subi par Monsieur X..., le 17 mars 1997, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, eu égard aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-28368
Date de la décision : 22/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Accident - Définition - Caractère professionnel - Défaut - Applications diverses - Absence de preuve d'une relation directe et certaine entre l'accident et le suicide

Un salarié, victime d'un accident de trajet, s'est suicidé dix ans plus tard. La juridiction de sécurité sociale, saisie par la veuve de ce salarié, a pu rejeter sa demande de prise en charge du suicide au titre de la législation professionnelle en retenant l'absence de preuve d'une relation directe et certaine entre l'accident et le suicide


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 octobre 2013

Sur le défaut de preuve du caractère professionnel de l'accident, à rapprocher : 2e Civ., 18 octobre 2005, pourvoi n° 04-30352, Bull. 2005, II, n° 253 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 jan. 2015, pourvoi n°13-28368, Bull. civ. 2015, II, n° 11
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, II, n° 11

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Rapporteur ?: Mme Burkel
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28368
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