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21/01/2015 | FRANCE | N°13-23018

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 janvier 2015, 13-23018


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-21 du code du travail et l'article 7 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseil ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, « La période d'essai peut-être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit. Cet accord fixe les conditions et les durées du renouvellement » et qu'aux termes du second, sauf accord entre les parties précisé dans la lettre d'engagement ou

le contrat de travail, tout ingénieur ou cadre est soumis à une période...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-21 du code du travail et l'article 7 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseil ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, « La période d'essai peut-être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit. Cet accord fixe les conditions et les durées du renouvellement » et qu'aux termes du second, sauf accord entre les parties précisé dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail, tout ingénieur ou cadre est soumis à une période d'essai de trois mois qui pourra être prolongée exceptionnellement d'une période de même durée après accord écrit du salarié ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée en qualité d'ingénieur à compter du 31 mai 2010 par la société Ausy dont l'activité relève de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, société de conseil, dite Syntec, le contrat de travail prévoyant une période d'essai de trois mois éventuellement renouvelable selon les règles en vigueur et par accord écrit entre les parties ; que par lettre du 14 septembre 2010, l'employeur a informé la salariée de la prolongation de sa période d'essai pour une durée de trois mois, la salariée portant sur ce courrier, à côté de sa signature, la mention « lu et approuvé » ; que par lettre du 27 octobre 2010, la société Ausy a notifié à la salariée la rupture de la relation de travail ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 octobre 2010, la salariée a informé l'employeur de son état de grossesse médicalement constaté ; que la rupture de la relation de travail a été maintenue à la date du 27 octobre 2010 ; qu'invoquant l'irrégularité de la prolongation de sa période d'essai, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour condamner l'employeur à diverses indemnités pour licenciement illicite et violation du statut protecteur lié à l'état de grossesse, l'arrêt retient que la lettre du 14 septembre 2010 prolongeant la période d'essai à compter du 30 septembre 2010 ne comporte aucun motif tiré de circonstances exceptionnelles alors que la salariée ayant été envoyée en mission auprès d'un client, il appartenait à la société Ausy d'interroger ce client sur la nécessité de prolonger la période d'essai s'il estimait ne pas avoir disposé de temps suffisant pour apprécier après quatre mois de présence dans cette entreprise les compétences professionnelles de cette salariée dont la fin de la mission était prévue au 26 novembre 2010 et que par ailleurs, la simple mention « lu et approuvé » portée par la salariée au côté de sa signature sur la lettre établie par la société Ausy fixant, sans aucun motif, à trois mois le renouvellement de la période d'essai ne peut constituer l'accord exprès de cette salariée sur le renouvellement de sa période d'essai pour cette durée de trois mois, ce dont il déduit que faute pour l'employeur d'avoir respecté les conditions fixées par la convention collective et d'avoir préalablement recueilli l'accord exprès de la salariée, le renouvellement n'a pu produire effet et l'embauche est devenue définitive à l'expiration de l'essai initial, soit à compter du 30 septembre 2010, de sorte que la rupture intervenue le 27 octobre 2010 constituait un licenciement que l'employeur avait maintenu bien que la salarié lui ait fait connaître son état de grossesse dans le délai de quinze jours requis ;
Qu'en statuant ainsi, en ajoutant à la convention collective une condition qu'elle ne prévoit pas, et alors que l'apposition par la salariée de sa signature et de la mention « lu et approuvé » sur la lettre notifiant le renouvellement de sa période d'essai vaut accord exprès de sa part à ce renouvellement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Ausy à verser à Mme X... la somme de 1 112 euros nets à titre de rappel de salaire, l'arrêt rendu le 20 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Ausy.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... était nul, d'AVOIR condamné la société AUSY à verser à Madame X... Les sommes de 10. 000, 05 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1. 000 € de congés payés afférents, 20. 000, 10 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement illicite, 37. 889, 07 € au titre de la violation du statut protecteur lié à l'état de grossesse et 3. 788, 90 € de congés payés afférents, 1. 112 € à titre de rappel de salaires ;
AUX MOTIFS QUE « le contrat de travail conclu entre la société Ausy et Mme Florence X... a prévu la possibilité d'une prolongation de la période d'essai, une fois, selon les règles en vigueur par accord entre les parties ; que l'article L. 1221-21 du code du travail précise que la période d'essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit, cet accord fixant alors les conditions et les durées de renouvellement ; enfin que la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseil (dite Syntec), étendue, applicable au présent litige, a prévu en son article 7 que sauf accord entre les parties précisé dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail, " tout ingénieur ou cadre est soumis à une période d'essai de trois mois qui pourra être prolongée exceptionnellement d'une période de même durée, après accord écrit du salarié " ; qu'il résulte donc de l'ensemble de ces dispositions, tant conventionnelle que contractuelle, que la société Ausy ne pouvait renouveler la période d'essai qu'une fois, en la motivant par des circonstances exceptionnelles et après avoir recueilli l'accord exprès de Mme Florence X... ; au cas présent que la lettre du 14 septembre 2010 prolongeant la période d'essai de trois mois à compter du 30 septembre 2010 ne comporte aucun motif tiré de circonstances exceptionnelles alors que Mme Florence X... ayant été envoyée en mission auprès du client CARMAT, il appartenait à la société Ausy d'interroger ce client sur la nécessité de prolonger la période d'essai s'il estimait ne pas avoir disposé d'un temps suffisant pour apprécier, après quatre mois de présence dans cette entreprise, les compétences professionnelles de cette salariée dont la fin de la mission était prévue au 26 novembre 2010 ; que par ailleurs, la simple mention " lu et approuvé " portée par Mme Florence X... au côté de sa signature sur la lettre établie par la société Ausy fixant, sans aucun motif, à trois mois le renouvellement de la période d'essai ne peut constituer l'accord exprès de cette salariée sur le renouvellement de sa période d'essai pour cette durée de trois mois ; en conséquence que faute pour la société Ausy d'avoir respecté les conditions fixées par la convention collective et d'avoir préalablement recueilli l'accord exprès de Mme Florence X..., le renouvellement n'a pu produire effet et l'embauche est devenue définitive à l'expiration de l'essai initial, soit à compter du 30 septembre 2010 ; que la rupture du contrat de travail à la date du 27 octobre 2010 s'analyse donc en un licenciement ; que Mme Florence X... ayant fait connaître à la société Ausy, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 29 octobre 2010, reçue le 8 novembre 2010, dans le délai de 15 jours fixé par l'article L. 1225-5 du code du travail, son état de grossesse accompagné d'un certificat médical en justifiant, la société Ausy avait l'obligation de procéder à l'annulation du licenciement ; qu'en conséquence, la société Ausy ayant maintenu la rupture de la relation de travail, le licenciement est nul et de nul effet conformément aux dispositions prévues par l'article L. 1225-4 du code du travail ; que Mme Florence X... ne sollicitant pas sa réintégration au sein de l'entreprise peut prétendre au paiement d'une indemnité réparant le préjudice subi du fait du caractère illicite du licenciement au moins égale à l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, soit à une indemnité égale aux salaires des six derniers mois ; qu'ayant octroyé à Mme Florence X..., sur sa réclamation, une augmentation de sa rémunération par l'avenant au contrat de travail en date du 20 mai 2010 d'un montant de 278 euros nets par mois, il convient de dire que la rémunération annuelle de Mme Florence X... a été fixée dès l'embauche à la somme de 40. 000, 23 euros (somme prévue au contrat de travail initial après expiration de la période d'essai) ; qu'ainsi la société Ausy doit verser à Mme Florence X... une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement égale à la somme de 3. 333, 35 x 6 = 20. 000, 10 euros ; qu'en application des dispositions prévues par l'article L. 1225-71 du code du travail, Mme Florence X... peut prétendre aux salaires qu'elle aurait perçus pendant la période couverte par la nullité (périodes de suspension du contrat auxquelles elle a droit en application des articles L. 1225-17 et suivants du code du travail et les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes), soit la somme de 3. 333, 35 x 11 + (3. 333, 35/ 30 x11 jours) = 37. 889, 07 euros outre les congés payés afférents ; que la date de fin de la période de protection fixant le point de départ du délai-congé ouvrant droit pour Mme Florence X... à l'indemnité compensatrice de préavis, la société Ausy devra lui verser à ce titre la somme de 3. 333, 35 x 3 = 10. 000, 05 euros outre les congés payés afférents ; qu'ayant accordé dès le 20 mai 2010 à Mme Florence X... un complément de rémunération à hauteur de la somme de 278 euros nets versé sous forme d'acompte mensuel et ayant mis fin au contrat de travail au-delà de la période d'essai, la société Ausy ne pouvait retirer du solde de tout compte la somme de 1. 112 euros nets représentant la totalité des acomptes versés ; qu'ainsi la société Ausy devra rembourser à Mme Florence X... cette somme ; enfin qu'il convient d'accorder à Mme Florence X... la somme de 2. 500 euros au titre des frais de procédure exposés au sens des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de l'article 7 de la convention collective SYNTEC que la période d'essai des ingénieurs et cadres stipulée dans le contrat de travail peut être prolongée exceptionnellement d'une période de trois mois après accord écrit du salarié ; que ce texte ne pose aucune obligation pour l'employeur d'indiquer par écrit les motifs le conduisant à proposer au salarié de renouveler la période d'essai ; qu'en estimant que le renouvellement de la période d'essai stipulée dans le contrat de travail de Madame X... n'avait produit aucun effet, faute pour la société AUSY d'avoir mentionné un « motif tiré de circonstances exceptionnelles » dans le courrier dans lequel elle indiquait souhaiter renouveler la période d'essai, la cour d'appel a violé la disposition conventionnelle susvisée en y ajoutant une condition qu'elle ne prévoyait nullement, ensemble l'article L. 1221-23 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il résulte de l'article 7 de la convention collective SYNTEC que le renouvellement de la période d'essai doit faire l'objet d'un accord écrit du salarié ; que caractérise l'existence d'un tel accord la signature du salarié précédée de la mention manuscrite « lu et approuvé » apposée sur un document écrit remis en main propre et ayant exclusivement pour objet de renouveler la période d'essai ; qu'en énonçant que « la simple mention « lu et approuvé » portée par Madame X... au côté de sa signature fixant, sans aucun motif, à trois mois le renouvellement de sa période d'essai ne peut constituer l'accord exprès de cette salariée sur le renouvellement de sa période d'essai », la cour d'appel a violé les articles 7 de la convention collective nationale SYNTEC, L. 1221-23 du code du travail et 1322 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-23018
Date de la décision : 21/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 20 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jan. 2015, pourvoi n°13-23018


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.23018
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