LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 18 juin 2013), que, par acte du 25 avril 2007, M. X... a, en vue de la cession de la totalité des titres de la société SVL à la société CF financière (le cessionnaire), consenti une garantie d'actif et de passif, valable jusqu'au 31 janvier 2011 ; que, la cession ayant eu lieu le 20 juillet 2007, le cessionnaire a assigné M. X... en exécution de cette garantie ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société CF financière fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas d'obligation d'information mise à la charge du cessionnaire de parts sociales par une clause de garantie de passif, l'appréciation du délai dans lequel l'information doit être donnée dépend de la nature de la circonstance portée à la connaissance du cédant ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que les faits dénoncés par la société CF financière consistaient, notamment, en une moins-value de 3 929,71 euros sur le rachat par M. X... d'un véhicule de la société cédée, en l'attribution irrégulière d'une prime de 8 000 euros à M. X... peu de temps avant la cession, et en une marge négative de 47 964 euros liée à l'établissement par M. X... de devis sous-évalués ; que ces trois faits ne portaient pas sur des dettes acquittées à l'insu du cédant ; que l'arrêt relève qu'ils avaient été portés à la connaissance de M. X... le 11 février 2010, c'est-à-dire plus de onze mois avant la mise en demeure du 23 janvier 2011, et quatorze mois avant l'assignation introductive d'instance du 13 avril 2011 ; qu'en retenant néanmoins que le cédant n'en avait pas été informé en temps utile, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en cas d'obligation d'information mise à la charge du cessionnaire de parts sociales par une clause de garantie de passif, le cédant ne saurait se prévaloir d'un manquement à cette obligation lorsque le fait ayant provoqué la mise en oeuvre de la garantie était déjà connu de lui avant la cession ; que, dans l'énumération des faits dénoncés au cédant par lettre du 11 février 2010, l'arrêt attaqué fait état d'opérations qui étaient nécessairement connues de M. X... avant la cession de la société SVL, à savoir le rachat par l'intéressé d'un véhicule de société à un prix inférieur à sa valeur comptable, et une prime de 8 000 euros lui ayant été attribuée au mois de juillet 2007 ; qu'en retenant malgré tout que la société CF financière encourait une déchéance de garantie sur ces deux postes, pour défaut d'information en temps utile du cédant, la cour d'appel a, de plus fort, violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que, recherchant la commune intention des parties, la cour d'appel a retenu que le défaut d'information entraînait la déchéance de la garantie et constaté, par des motifs non critiqués, qu'aucune information n'avait été délivrée ; que la cour d'appel a pu en déduire que la garantie n'était pas due ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société CF financière aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société CF financière, M. Y... et la société Bauland-Gladel et Martinez.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, débouté la société CF Financière de sa demande de paiement au titre de la garantie de passif ;
Aux motifs propres que « le tribunal a relevé que la convention du 25 avril 2007 contenait un article 12.4 qui prévoyait une information du cédant ainsi qu'un délai raisonnable pour lui permettre de se prononcer sur le caractère fondé ou non de la dette et jugé que, faute pour la société CF Financière d'avoir respecté cette procédure, elle était déchue de son droit indemnisation, conformément au même article ; que l'appelante soutient que les premiers juges se sont livrés à une interprétation erronée de l'article quant au délai imparti au cessionnaire pour engager la responsabilité du cédant au titre de la garantie de passif, à celui laissé au cédant pour contester sa mise en cause et à la sanction applicable en cas de non-respect des délais ; que le premier point ne fait l'objet d'aucune discussion de la part de la partie adverse, la mise en demeure datant du 23 janvier 2011 alors que la date-butoir était le 31 janvier 2011. Lorsque le tribunal fait référence au 11 février 2010, c'est pour faire observer qu'avant cette date, la société CF Financière n'avait jamais alerté le cédant sur l'apparition d'un quelconque passif non comptabilisé ayant une origine antérieure au 31 décembre 2006 ; qu'avant d'examiner les deux autres moyens, il convient de rappeler les termes du paragraphe 12.4 : "Le cessionnaire préviendra les cédants, dans un délai raisonnable, de toutes vérifications de la société par une administration fiscale ou sociale afin qu'ils puissent, par un mandataire choisi par eux et assistés ou non d'un conseil, intervenir dans la discussion de toutes réclamations qui pourraient être faites à cette occasion. Le non-respect de ce délai aura pour effet d'entraîner la déchéance des droits du cessionnaire à dédommagement pour le fait concerné. En outre, aucun passif supplémentaire, au sens du présent article, ne devra être acquitté sans que les cédants en soient préalablement avisés et sans qu'ils aient disposé d'un délai raisonnable à partir de cette information pour justifier du règlement ou du caractère non fondé de la dette. La décision d'engager un contentieux ou de conclure une transaction reste, en toute hypothèse, une décision de la société" ; que les parties s'accordent sur le fait qu'elles étaient convenues d'une information préalable du cédant de tout événement susceptible d'entraîner un passif supplémentaire ; que selon l'appelante, monsieur X... a disposé d'un délai raisonnable à compter de l'information qui lui a été donnée le 11 février 2010 et l'article 12.4 ne lui imposait pas de répondre avant le 31 janvier 2011 ; que l'intimé réplique qu'il n'avait jamais été avisé de l'existence d'un passif supplémentaire avant le courrier du 11 février 2010 en soulignant que près de trois années s'étaient écoulées depuis le protocole de sorte que, pour lui, la procédure n'a pas été respectée ; que la clause d'information du cédant, lorsqu'elle est insérée dans une convention de garantie d'actif et de passif, vise à permettre à ce dernier d'intervenir ou de fournir ses explications afin d'éviter, dans la mesure du possible, l'apparition d'un passif entrant dans le champ de la garantie ; que l'information doit donc lui être donnée en temps utile par le cessionnaire ; que dans le courrier que l'appelante a fait parvenir à l'intimé par la voie de son conseil le 11 février 2010, elle lui annonçait qu'elle avait détecté "les opérations anormales" suivantes : - le rachat du véhicule de la société par le cédant à un prix inférieur à sa valeur nette comptable, soit une moins-value de 3 929,71 €, - l'octroi à ce dernier d'une prime de 8 000 € en juillet 2007, - l'existence d'un écart significatif entre le nombre d'heures mentionnés dans les devis et celles passées à réaliser les chantiers (858 heures), représentant une marge négative de 47 964 € et expliquant la perte de 498 € enregistrée au terme de 7 mois d'exercice, - 4 salariés n'avaient pas pris tous leurs congés au cours des cinq années précédant la cession, - le non-paiement de taxes CETIM en 2006 et 2007 (2 824,95 €), - la survenance d'un litige consécutif à une défaillance dans l'exécution d'une commande l'ayant conduit à payer à la société Bonne Amie 9 386,70 €, et elle lui demandait s'il acceptait de l'indemniser amiablement ; qu'à supposer que toutes ces opérations entrent dans le champ du passif garanti tel que défini par la convention, il ne s'agissait pas d'un courrier d'information au sens de l'article 12.4 mais de la notification de l'intention du cessionnaire de faire jouer la garantie, comme l'a retenu le premier juge ; que l'appelante soutient encore que la sanction prévue à l'alinéa 2 ne s'applique qu'au premier alinéa, c'est à dire aux cas où la société ferait l'objet d'une vérification sociale ou fiscale tandis que, pour l'intimé, elle visait à sanctionner le non-respect de l'obligation d'information prévue par cet article ; que l'article 1156 du code civil prescrit au juge de rechercher la commune intention des parties plutôt que de s'attacher à la lettre du texte ; qu'en l'espèce, celle-ci résulte des courriers échangés entre les parties par la voie de leur conseil lors de la négociation de la convention et elle conforte la thèse de l'intimé puisqu'il a écrit le 16 avril 2007 : "article 12.4 :le non-respect de l'information doit provoquer la déchéance de la garantie, sinon, rien ne sert de créer l'obligation s'il n'y a pas de sanction", et que l'appelante lui a répondu le 17 : "article 12.4: c'est précisément le cas" ; que c'est à bon droit, en conséquence, que le tribunal a jugé que le cessionnaire était déchu de son droit à indemnisation faute pour lui d'avoir respecté la procédure d'information instaurée par l'article 12.4, la disposition du jugement qui a débouté la société CF Financière de sa demande à ce titre étant dès lors confirmée » (arrêt attaqué, p. 4, § 4 à p. 6, § 4) ;
Et aux motifs réputés adoptés des premiers juges, « vu les dispositions de l'article 12.4 "Procédure" de la convention de garantie Actif-Passif passée entre les deux parties et stipulant que : "Aucun passif supplémentaire ne devra être acquitté sans que les cédants en soient avisés et sans qu'ils aient disposé d'un délai raisonnable à compter de cette information pour justifier du règlement ou du caractère non fondé de la dette", que, sur aucun des points évoqués, le cessionnaire n'a alerté le cédant de l'apparition d'un éventuel passif non comptabilisé et ayant une origine antérieure au 31/12/2006 et ce, avant le 11 février 2010 ; que, dès lors, les éventuels passifs ont été acquittés sans que le cédant en ait été avisé et sans qu'il ait, a fortiori, disposé d'un délai raisonnable pour examiner la demande, et le cas échéant justifier du règlement ou du caractère non fonde de la dette ; que "le non-respect de ce délai a pour effet d'entraîner la déchéance des droits du cessionnaire à dédommagement" (art. 12.4 "Procédure") ; que le Tribunal ne pourra que rejeter les demandes de CF FINANCES » (jugement entrepris, p. 4, § 2 à 6) ;
Alors d'une part qu'en cas d'obligation d'information mise à la charge du cessionnaire de parts sociales par une clause de garantie de passif, l'appréciation du délai dans lequel l'information doit être donnée dépend de la nature de la circonstance portée à la connaissance du cédant ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué (p. 5, § 8 à 10) que les faits dénoncés par la société CF Financière consistaient, notamment, en une moins-value de 3 929,71 euros sur le rachat par M. X... d'un véhicule de la société cédée, en l'attribution irrégulière d'une prime de 8 000 euros à M. X... peu de temps avant la cession, et en une marge négative de 47 964 euros liée à l'établissement par M. X... de devis sous-évalués ; que ces trois faits ne portaient pas sur des dettes acquittées à l'insu du cédant ; que l'arrêt (p. 2, dernier §, p. 4, § 6, p. 5, § 8 à 10) relève qu'ils avaient été portés à la connaissance de M. X... le 11 février 2010, c'est-à-dire plus de onze mois avant la mise en demeure du 23 janvier 2011, et quatorze mois avant l'assignation introductive d'instance du 13 avril 2011 ; qu'en retenant néanmoins que le cédant n'en avait pas été informé en temps utile, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors d'autre part qu'en cas d'obligation d'information mise à la charge du cessionnaire de parts sociales par une clause de garantie de passif, le cédant ne saurait se prévaloir d'un manquement à cette obligation lorsque le fait ayant provoqué la mise en oeuvre de la garantie était déjà connu de lui avant la cession ; que, dans l'énumération des faits dénoncés au cédant par lettre du 11 février 2010, l'arrêt attaqué (p. 5, § 8 à 10) fait état d'opérations qui étaient nécessairement connues de M. X... avant la cession de la société SVL, à savoir le rachat par l'intéressé d'un véhicule de société à un prix inférieur à sa valeur comptable, et une prime de 8 000 euros lui ayant été attribuée au mois de juillet 2007 ; qu'en retenant malgré tout que la société CF Financière encourait une déchéance de garantie sur ces deux postes, pour défaut d'information en temps utile du cédant, la cour d'appel a, de plus fort, violé l'article 1134 du code civil.