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14/01/2015 | FRANCE | N°13-27138

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 janvier 2015, 13-27138


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 novembre 2012), que M. X... a souscrit en 2001 une déclaration d'acquisition de la nationalité française en raison de son mariage avec Mme Y...dont il a ensuite divorcé en 2006 ; qu'il a sollicité le bénéfice de l'effet collectif de sa déclaration au profit des enfants nés pendant son mariage de ses relations avec Mme Aïssatou Z... ; que le ministère public a assigné M. X... en annulation de l'enregistrement de sa déclaration de

nationalité française et avec Mme Aïssatou Z... en tant que représenta...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 novembre 2012), que M. X... a souscrit en 2001 une déclaration d'acquisition de la nationalité française en raison de son mariage avec Mme Y...dont il a ensuite divorcé en 2006 ; qu'il a sollicité le bénéfice de l'effet collectif de sa déclaration au profit des enfants nés pendant son mariage de ses relations avec Mme Aïssatou Z... ; que le ministère public a assigné M. X... en annulation de l'enregistrement de sa déclaration de nationalité française et avec Mme Aïssatou Z... en tant que représentants légaux de leur fils mineur Dieyi X...pour dire qu'il n'est pas français ;
Attendu que M. X... et Mme Aïssatou Z... font grief à l'arrêt d'annuler l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite par M. X... le 14 décembre 2001 devant le juge d'instance du tribunal de Paris (13e arrondissement), de constater son extranéité, de dire que Dieydi X..., né le 25 décembre 2006 à Pikine (Sénégal) n'est pas français et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'un adultère pendant le mariage n'est pas nécessairement exclusif d'une communauté de vie affective du déclarant avec son épouse française ; qu'en jugeant en l'espèce que l'existence d'une communauté de vie affective à la date de la souscription de la déclaration de nationalité française, le 14 décembre 2001, n'était pas établie, au motif que la violation du devoir de fidélité est exclusive de toute communauté de vie affective avec son épouse, sans préciser en quoi l'existence d'une relation adultère était, au cas particulier, de nature à caractériser la cessation de la communauté de vie des époux, tandis qu'elle avait relevé que deux enfants étaient nés de l'union des époux, le 15 novembre 2001 et le 2 septembre 2003, ce dont il résulte qu'une communauté de vie affective entre les époux s'était poursuivie postérieurement à la souscription de la déclaration de nationalité française, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 21-2 et 26-4 du code civil ;
2°/ que M. X...avait fait valoir qu'il rapportait la preuve de la réalité de la communauté de vie tant matérielle qu'affective par la production de nombreuses pièces, dont des attestations de proches, versées aux débats ; qu'en énonçant que « si les pièces produites aux débats par l'appelant établissent que X... et Fatoumata Y...avaient un domicile commun, elles ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une communauté de vie affective avec celle-ci, au sens de l'article 215 du code civil, lorsqu'il a souscrit sa déclaration de nationalité » (arrêt, p. 4, in fine), sans procéder à une analyse de ces pièces régulièrement versées aux débats, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a estimé qu'il n'existait pas de communauté de vie réelle et affective avec Mme Y...dès lors que M. X... avait eu, au cours de son mariage avec celle-ci, trois enfants nés de ses relations avec Mme Aïssatou Z... ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et Mme Aïssatou Z..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leur fils mineur Dieyi X..., aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. X... et Mme Aïssatou Z..., agissant en leur nom personnel et en qualité de représentant de leur fils mineur Dieyi X...,
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite le 14 décembre 2001 par M. X... devant le juge d'instance du tribunal de Paris (13ème arrondissement), d'avoir constaté son extranéité, d'avoir dit que Dieydi X..., né le 25 décembre 2006 à Pikine (Sénégal) n'est pas français et d'avoir ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'au soutien de son recours, X... fait valoir qu'il existait, au moment de la souscription de nationalité et plusieurs années après, une communauté de vie affective entre les époux ; qu'il expose, à cet effet, que le premier enfant du couple est né le 15 novembre 2001, soit un mois avant la déclaration de nationalité, et le second enfant, le 2 septembre 2003, soit près de deux ans après cette déclaration et que la réalité de cette communauté de vie ne peut être remise en cause du seul fait de son infidélité ; qu'il ajoute que Fatoumata Y...a souhaité maintenir une communauté de vie affective et matérielle de 2000 à 2006 malgré la naissance d'enfants adultérins ; que l'article 21-2 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 16 mars 1998 applicable en l'espèce, conformément aux dispositions de l'article 17-2 du même code, permet à l'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française d'acquérir la nationalité française par simple déclaration à la condition qu'un délai d'un an se soit écoulé depuis le mariage et que la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage ; que la communauté de vie, obligation découlant du mariage (article 215 du code civil) doit être tant affective que matérielle ; que la communauté de vie affective, définie par l'article 212 du code civil du même code, emporte respect, fidélité, secours et assistance ; que M. X... a contracté mariage avec Fatoumata Y..., de nationalité française, le 26 juillet 1998 ; que par jugement du 5 décembre 2006, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bobigny a prononcé le divorce des époux X.../ Y...; qu'alors qu'il était uni dans les liens du mariage avec Fatoumata Y..., X... a eu trois enfants, de Aïssatou Z..., qui deviendra sa seconde épouse ; que Dieydi X..., né le 25 décembre 2006, de Aïssatou Z..., après le prononcé du divorce, a été reconnu par X..., le 22 mars 2007 ; que quand bien même deux enfants sont nés en 2001 et 2003, de son union avec Fatoumata Y..., la naissance hors mariage de trois enfants constitue une violation du devoir de fidélité et est exclusive de toute communauté de vie affective avec son épouse ; que si les pièces versées aux débats de l'appelant établissent que X... et Fatoumata Y...avaient un domicile commun, elles ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une communauté de vie affective avec celle-ci, au sens de l'article 215 du code civil, lorsqu'il a souscrit sa déclaration de nationalité ; que la fraude est caractérisée ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a annulé l'enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite par X..., constaté son extranéité et dit que Dieydi X...n'est pas français ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article 21-2 du code civil permet à l'étranger ou l'apatride qui épouse un ressortissant français d'acquérir la nationalité française par simple déclaration ; que l'article 21-2 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 98-170 du 16 mars 1998 applicable en la cause conformément aux dispositions de l'article 17-2 du code civil, exige que la déclaration ne puisse être souscrite qu'après un délai d'un an à compter du mariage, délai supprimé en cas de naissance d'un enfant, et que la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux ; que la communauté de vie qui est une obligation du mariage (article 215 du code civil) est une notion de fait dont la preuve peut être apportée par tous moyens ; elle ne se résume pas au seul devoir de cohabitation, élément matériel, mais comporte aussi un élément intentionnel, la volonté de vivre en union ; c'est pourquoi les nouvelles dispositions de l'article 21-2 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 26 novembre 2003, reprenant la jurisprudence constante et ancienne en la matière, précisent qu'est exigée une « communauté de vie tant affective que matérielle » ; que c'est à la date à laquelle le déclarant souhaite devenir français qu'il convient de rechercher si les deux époux avaient une réelle volonté de vivre durablement en union, volonté concrétisée par un ensemble de circonstances matérielles et psychologiques permettant de démontrer que leur mode de vie est celui de personnes unies par les liens du mariage ; que la communauté de vie affective prévue par l'article 21-2 du code civil suppose le respect notamment de l'obligation de fidélité, ainsi que prévu par l'article 212 du même code, à l'égard de l'époux français puisque c'est le lien réel et sérieux avec l'époux français qui permet d'accéder à la nationalité française par déclaration ; qu'en l'espèce, s'il n'est pas prétendu que M. X... a épouse Mme Fatoumata Y...pour obtenir la nationalité française, il n'en reste pas moins qu'au moment où M. X... a souscrit sa déclaration de nationalité française, la communauté de vie affective n'était pas réelle ; qu'en effet M. X... avait eu précédemment des enfants adultérins et en a eu un autre, par la suite, avec celle qui est devenue sa seconde épouse, ce qui signifie qu'il entretenait une liaison suivie avec une autre femme alors qu'il demandait à devenir français à raison de son mariage, ce qui constitue une violation de son devoir de fidélité, quand bien même il a conçu dans le même temps des enfants avec son épouse ; que les pièces que M. X... verse aux débats concernent principalement une communauté de vie matérielle avec Mme Fatoumata Y..., laquelle n'est pas contestée et les attestations communiquées ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une communauté de vie affective entre les époux ; qu'au vu de l'ensemble des éléments ci-dessus exposés, il convient de prononcer l'annulation de l'enregistrement de déclaration de nationalité souscrite par M. X... et de constater son extranéité, M. X... étant déclaré étranger, l'enfant Dieydi X...ne plus aucun titre à la nationalité et il convient de dire également qu'il n'est pas
1°) ALORS QUE l'existence d'un adultère pendant le mariage n'est pas nécessairement exclusif d'une communauté de vie affective du déclarant avec son épouse française ; qu'en jugeant en l'espèce que l'existence d'une communauté de vie affective à la date de la souscription de la déclaration de nationalité française, le 14 décembre 2001, n'était pas établie, au motif que la violation du devoir de fidélité est exclusive de toute communauté de vie affective avec son épouse, sans préciser en quoi l'existence d'une relation adultère était, au cas particulier, de nature à caractériser la cessation de la communauté de vie des époux, tandis qu'elle avait relevé que deux enfants étaient nés de l'union des époux, le 15 novembre 2001 et le 2 septembre 2003, ce dont il résulte qu'une communauté de vie affective entre les époux s'était poursuivie postérieurement à la souscription de la déclaration de nationalité française, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 21-2 et 26-4 du code civil ;
2°) ALORS QUE M. X...avait fait valoir (concl., p. 6 § 8) qu'il rapportait la preuve de la réalité de la communauté de vie tant matérielle qu'affective par la production de nombreuses pièces, dont des attestations de proches, versées aux débats (pièces n° 6 et 7) ; qu'en énonçant que « si les pièces produites aux débats par l'appelant établissent que X... et Fatoumata Y...avaient un domicile commun, elles ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une communauté de vie affective avec celle-ci, au sens de l'article 215 du code civil, lorsqu'il a souscrit sa déclaration de nationalité » (arrêt, p. 4, in fine), sans procéder à une analyse de ces pièces régulièrement versées aux débats, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-27138
Date de la décision : 14/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

NATIONALITE - Nationalité française - Acquisition - Modes - Acquisition à raison du mariage - Conditions - Communauté de vie - Caractérisation - Contestation - Eléments de preuve - Appréciation souveraine

POUVOIRS DES JUGES - Appréciation souveraine - Nationalité - Acquisition à raison du mariage - Conditions - Communauté de vie - Caractérisation - Contestation - Eléments de preuve MARIAGE - Devoirs et droits respectifs des époux - Communauté de vie - Caractérisation - Défaut - Cas - Naissances d'enfants issus d'une relation adultère d'un époux au cours du mariage - Portée

L'absence de communauté de vie réelle et affective entre époux, dont la portée des éléments de preuve relève du pouvoir souverain d'appréciation du juge, peut se déduire du constat qu'un des époux a eu, au cours du mariage, trois enfants nés de ses relations avec un tiers


Références :

articles 21-2 et 26-4 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 jan. 2015, pourvoi n°13-27138, Bull. civ. 2015, I, n° 2
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, I, n° 2

Composition du Tribunal
Président : Mme Bignon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Bernard de La Gatinais (premier avocat génénral)
Rapporteur ?: M. Hascher
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27138
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