La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/2015 | FRANCE | N°13-26262

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 janvier 2015, 13-26262


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 5 septembre 2013), que la commune de Castelnau-de-Médoc (la commune) a fait pratiquer une saisie-conservatoire au préjudice de la société Le Médoc gourmand (la société) sur le fondement d'un jugement d'un tribunal de grande instance dépourvu de force exécutoire ; que la société a saisi un juge de l'exécution afin de contester cette mesure ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt confirmatif de la débouter de l'ensemble de

ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge de l'exécution a le d...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 5 septembre 2013), que la commune de Castelnau-de-Médoc (la commune) a fait pratiquer une saisie-conservatoire au préjudice de la société Le Médoc gourmand (la société) sur le fondement d'un jugement d'un tribunal de grande instance dépourvu de force exécutoire ; que la société a saisi un juge de l'exécution afin de contester cette mesure ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt confirmatif de la débouter de l'ensemble de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge de l'exécution a le devoir de rechercher lui-même si la créance invoquée paraît fondée en son principe en tranchant la question litigieuse entre les parties, sans pouvoir s'en remettre à ce qu'a décidé le jugement rendu sur le fond dont l'exécution provisoire a été arrêtée et qui est frappé d'un appel en cours, au motif qu'il est revêtu de l'autorité de chose jugée ; qu'en retenant que la créance de la commune apparaissait fondée en son principe au prétexte que les titres exécutoires ont été validés par la juridiction compétente, que le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 2 mars 2006 (qui était précisément la décision de la « juridiction compétente » ayant validé les titres exécutoires) a condamné la société à payer à la commune les sommes dues au titre des loyers et l'indemnité d'occupation, et qu'il n'appartenait pas au juge de l'exécution de remettre en cause l'autorité de chose jugée attachée à cette décision bien qu'elle fût frappée d'appel, la cour d'appel, qui a par ailleurs constaté que l'exécution provisoire attachée audit jugement avait été arrêtée, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que la société rappelait, preuves à l'appui, qu'un jugement du 8 octobre 2002 avait condamné les constructeurs de l'immeuble (objet du crédit-bail qu'elle avait conclu avec la commune) et leurs assureurs à l'indemniser de son préjudice tout en ordonnant une expertise, qu'après le dépôt du pré-rapport d'expertise, et par ordonnance du 4 avril 2007, le juge de la mise en état lui avait alloué une provision de 2 895 000 euros, que l'un des assureurs (la SMABTP) avait spontanément exécuté cette décision pour sa quote-part mais non l'autre (la MAF) à l'encontre duquel elle avait donc fait pratiquer, le 4 mai 2007, une saisie-attribution à hauteur de 2 316000 euros entre les mains de la BNP, et que la contestation soulevée par la société MAF à l'endroit de cette mesure avait été rejetée par arrêt de la cour d'appel de Paris ; que sur cette base, la société soulignait que la somme de 2 895 000 euros qui lui avait été judiciairement allouée le 4 avril 2007 couvrait largement les causes de la saisie conservatoire litigieuse (d'un montant de 752 171, 24 euros), de sorte que la commune ne rapportait pas la preuve, dont elle avait la charge, du péril menaçant le recouvrement de sa créance ; que pour juger remplie la condition qu'il existe une menace sur le recouvrement de la créance, l'arrêt attaqué a retenu que la société aurait reconnu n'être pas en mesure de payer sa dette envers la commune, fondée sur les titres exécutoires et le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 2 mars 2006, lorsque pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire de ce jugement elle avait saisi en mars 2006 le premier président de la cour d'appel de Bordeaux ; qu'en se référant ainsi à des faits judiciairement reconnus antérieurs de plus d'un an à la provision de 2 895000 euros dont se prévalait la société et qui était 3, 84 fois supérieure aux causes de la saisie litigieuse, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions sus rappelées de l'exposante, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les prétentions des parties sans examiner les éléments de preuve que celles-ci leur soumettent ; qu'en estimant remplie la condition qu'il existe une menace sur le recouvrement de la créance en se fondant sur les énonciations de la décision du premier président de la cour d'appel de Bordeaux du 22 juin 2006 ordonnant l'arrêt de l'exécution provisoire, sans rien dire des pièces que la société produisait pour établir qu'après l'arrêt de l'exécution provisoire elle avait encaissé une somme près de 4 fois supérieure aux causes de la saisie conservatoire litigieuse, à savoir l'ordonnance du 4 avril 2007 lui allouant une provision de 2 895 000 euros, le procès-verbal de saisie-attribution pratiquée le 4 mai 2007 à l'encontre de la société MAF et entre les mains de la BNP à hauteur de 2 316 000 euros et l'arrêt de la cour d'appel de Paris rejetant le recours de la société MAF contre cette saisie, la cour d'appel derechef a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu'à supposer qu'elle ait adopté le motif du premier juge selon lequel la société n'avait plus aucune activité, en ne visant pas et en analysant encore moins les pièces sur lesquelles elle fondait sa décision, la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en retenant la circonstance que le site n'était plus exploité depuis 2008 et que la société avait transféré son siège à Neuilly-sur-Seine, laquelle était radicalement inapte à établir une quelconque menace sur le recouvrement de la prétendue créance de la commune, la cour d'appel a violé l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
6°/ que le contrat de crédit-bail stipulait, en son article 5. 3, qu'« en tout état de cause, les loyers sont tels que la commune ne réalise sur l'opération de construction ni bénéfice, ni perte » ; qu'en refusant de cantonner la saisie conservatoire litigieuse pratiquée sur la base de l'ancien loyer, au prétexte que la société n'avait pas donné suite à la proposition de nouveau loyer faite par la commune de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir ni de la lettre du 31 mai 2002 (en réalité du 30 avril 2002) ni des tableaux d'amortissement d'emprunts bancaires y annexés qu'elle avait reçus pour information et qui ne concernaient que les relations de la commune avec ses banquiers, quand il résultait de l'article 5. 3 précité que le loyer devait de plein droit être diminué à due concurrence de toute réduction des remboursements de ses emprunts que la commune avait pu obtenir, la cour d'appel, qui a méconnu la loi des parties, a violé l'article 1134 du code civil ;
7°/ que la lettre du maire de la commune du 30 avril 2002, après avoir rappelé que le 5 juillet 2002 au plus tard soit le paiement des loyers recalculés selon les modalités prévues à la convention devait être repris, soit les lieux devaient être libérés, ajoutait : « Je vous prie de trouver ci-joint en annexe le montant du nouveau loyer mensuel et les éléments permettant de le déterminer » ; que l'annexe à cette lettre précisait : « Nouveau montant mensuel du loyer : 545 043, 16 euros = 8 516, 30 euros » ; qu'aux termes clairs et précis de ladite lettre et de son annexe, la commune réclamait le paiement d'un nouveau loyer mensuel de 8 516, 30 euros calculé selon les stipulations contractuelles, ou à défaut la libération des lieux ; qu'en refusant de cantonner la saisie conservatoire litigieuse pratiquée sur la base de l'ancien loyer, au prétexte qu'il résultait des courriers versés aux débats que le nouveau loyer aurait dû faire l'objet d'un avenant qui n'a pas été formalisé et que la société n'avait pas donné suite à la proposition de nouveau loyer faite par la commune, la cour d'appel a dénaturé la lettre du 30 avril 2002 et son annexe, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'il résulte de la procédure que le dispositif des conclusions de la société devant la cour d'appel ne contenait pas de prétention relative à une demande de mainlevée totale de la saisie conservatoire de sorte que, conformément à l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, la cour d'appel n'en était pas saisie ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, après avis donné aux parties en application des dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée ;
Et attendu que c'est par une interprétation du contrat de crédit-bail et des lettres échangées entre les parties, que leur rapprochement rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation qu'en l'absence d'avenant formalisé entre les parties sur le montant du loyer, celui-ci était resté fixé dans les conditions prévues au contrat initial ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Médoc gourmand aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Le Médoc gourmand et de la commune de Castelnau-de-Médoc ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Le Médoc gourmand
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'A VOIR débouté la société LE MEDOC GOURMAND de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « La SA Le Médoc Gourmand fait valoir qu'au jour où elle a été pratiquée, les conditions juridiques de la saisie conservatoire n'étaient pas réunies, puisqu'aucune circonstance n'était susceptible de menacer le recouvrement de la créance la Commune de Castelnau-de-Médoc, à son encontre, créance contestée devant la cour d'appel de Bordeaux ; qu'en effet elle soutient qu'il lui a été accordé en avril 2007 dans le cadre de la procédure engagée contre les constructeurs, une provision couvrant les loyers de la période curant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002, et les loyers échus jusqu'au terme du bail ; qu'elle estime que le juge de l'exécution a inversé la charge de la preuve du péril pesant sur le recouvrement de la créance celle-ci n'étant pas apportée par la Commune de Castelnau-de-Médoc et n'a pas tenu compte de ce qu'elle est devenue propriétaire de l'immeuble par la levée de l'option prévue au contrat de crédit-bail du 27 avril 1993 et qu'enfin elle détient une créance indemnitaire à l'encontre des responsables de ses dommages pour un montant qu'elle a chiffré à plus de 3. 000. 000 ¿ ; que la Commune de Castelnau-de-Médoc maintient que sa créance est fondée et que le péril pour son recouvrement est avéré malgré l'octroi de provisions à valoir sur son préjudice la société le Médoc Gourmand n'a effectué aucun paiement de loyers et a abandonné les lieux ayant cessé l'exploitation de son activité sur le site de Castelnau ; qu'aux termes de l'article L. 511-1, « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut demander au juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement » ; que l'article L. 511-2 du même code prévoit que l'autorisation du juge n'est pas nécessaire dans certains cas, et notamment lorsque le créancier se prévaut d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire ;-1- Créance fondée en son principe ; qu'il résulte de ces textes la possibilité de pratiquer une mesure conservatoire lorsqu'un créancier dispose d'une décision de justice qui n'est pas encore exécutoire, · qu'en l'espèce, le fondement de la créance dont se prévaut la commune résulte d'une part de titres exécutoires administratifs qui ont été validés par la juridiction compétente, et d'autre part de la décision du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 2 mars 2006, qui a condamné la société Le Médoc Gourmand à payer à la Commune les sommes dues au titre des loyers et de l'indemnité d'occupation ; que cette décision, bien que frappée d'appel est assortie dès son prononcé de l'autorité de la chose jugée, le juge de l'exécution ne pouvant remettre en cause ce qui a été décidé par le tribunal de grande instance de Bordeaux statuant au fond, · qu'en conséquence, il est établi que la créance dont se prévaut la Commune de Castelnau-de-Médoc est fondée en son principe au sens du texte ci-dessus retranscrit ;-2- Le péril menaçant le recouvrement de la créance ; que la commune rapporte la preuve que le site n'est plus exploité depuis mai 2008, notamment par la production d'un constat d'huissier dressé le 5 juin 2009 qui fait la description des lieux comme étant abandonnés et clôturés ; qu'il est également établi que la société a transféré son siège social à Neuilly sur Seine adresse à laquelle elle se domicile pour la présente procédure ; qu'ainsi c'est par une juste appréciation que le premier juge a indiqué « que les locaux litigieux qui abritaient autrefois son activité sont désormais abandonnés, de sorte qu'aucun élément d'actif corporel ou incorporel n'est de nature à garantir le paiement des dettes de loyer » ; que par ailleurs, la société Le Médoc Gourmand a fait elle-même l'aveu de son impossibilité de payer lorsqu'elle a saisi le premier président en mars 2006 pour obtenir l'arrêt de l'exécutoire provisoire du jugement du 2 mars 2006 en indiquant : « il résulte de l'examen de ses bilans qu'elle a accumulé des pertes considérables, du fait de l'impossibilité d'exercer normalement son activité dans les lieux, situation qui n'a été que provisoirement réglée par l'obtention des diverses provisions qu'elle a reçues, notamment du tribunal de grande instance en avance sur son préjudice commercial et qui lui ont permis jusqu'à ce jour de se maintenir à flot, qu'il résulte cependant de l'attestation établie le 8 mars 2006 par son expert-comptable Monsieur X..., que le solde bancaire n'est aujourd'hui créditeur que de 56. 444, 00 ¿ le portefeuille de SICAV que détenait l'entreprise ayant été réalisé pour assurer la trésorerie courante ; que la société Le Médoc Gourmand ne pourra alors que déclarer son état de cessation de paiement, sa situation de trésorerie ne pouvant conduire qu'à sa liquidation judiciaire » ; qu'ainsi l'appelante indique elle-même que l'indemnité provisionnelle perçue a été absorbée pour combler les pertes de l'entreprise et se maintenir à flot ; qu'enfin, il est contesté par la Commune que la société Le Médoc Gourmand soit devenue propriétaire des lieux par la levée de l'option, ceci ne relève pas de l'appréciation du juge de l'exécution d'autant plus que cette question n'a pas été tranchée et dépend d'une procédure au fond pendante devant la cour d'appel ; qu'en conséquence, la commune de Castelnau établi, au jour de la saisie pratiquée et encore à ce jour, les circonstances constitutives d'une menace sur le recouvrement de sa créance ; que sur le montant de la créance, la SA Le Médoc Gourmand conteste le montant de la créance concernant le montant de l'indemnité d'occupation, en faisant valoir que la commune lui avait notifié un nouveau loyer de 79. 425, 77 ¿ annuels et non plus 94. 913, 52 ¿ et pour l'année 2007 de 4. 426, 07 ¿ ; que c'est de façon fondée que la commune de Castelnau-de-Médoc fait valoir que la société Le Médoc Gourmand a omis de préciser que l'avenant envisagé sur le montant du loyer n'a jamais été formalisé, cette dernière n'ayant pas donné suite aux propositions de la commune en ce sens et ce malgré les relances de cette dernière par courriers auxquels l'appelante n'a pas répondu ; que ceci résulte des courriers versés aux débats par la commune ; que la société Le Médoc Gourmand ne peut donc se prévaloir des termes du courrier du 31 mai 2002 et des tableaux d'amortissement des emprunts bancaires qu'elle a reçus pour information et qui ne concernent que les relations de la commune avec ses banquiers, et ce, dans la mesure où elle n'a jamais donné suite à ces propositions et qu'aucun avenant au contrat initial n'a été signé entre les parties ; qu'il s'ensuit que le loyer est resté fixé dans les conditions prévues au contrat initial ; qu'en conséquence le montant de la créance réclamée par la Commune de Castelnau est justifié par celle-ci, le décompte ayant été établi sur la base des titres exécutoires émis par la Trésorerie au vu du montant contractuel du loyer ; que la décision entreprise sera donc confirmée en toutes ses dispositions la société Le Médoc Gourmand étant déboutée de l'intégralité de ses demandes et contestations, · qu'il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la commune de Castelnau ; que la société Le Médoc Gourmand qui succombe en son appel sera condamnée à en supporter les dépens » ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « les parties sont en litige depuis plusieurs années au sujet d'un contrat consenti à la SA LE MEDOC GOURMAND par la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC et portant sur un bâtiment à usage industriel édifié par la commune ; qu'j apparaît notamment que, le 27 janvier 2003, la Trésorerie de CASTELNAU-DE-MEDOC a émis trois titres exécutoires pour le compte de la commune, pour paiement des loyers des années 2000, 2001 et 2002 ; que la SA LE MEDOC GOURMAND a formé opposition à ces titres devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, lequel, par jugement en date du 2 mars 2006, a notamment déclaré valables les trois titres exécutoires du 27 janvier 2003, prononcé la résiliation du contrat de bail avec promesse de vente, ordonné l'expulsion de la société, et fixé au montant du loyer l'indemnité d'occupation due jusqu'à libération effective des lieux, avec exécutoire provisoire ; que la SA LE MEDOC GOURMAND a formalisé un appel à l'encontre de cette décision, et obtenu l'arrêt de l'exécution provisoire par ordonnance du Premier président de la cour d'appel en date du 22 juin 2006 ; que par acte d'huissier en date du 12 novembre 2007, la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC a fait procéder à une saisie conservatoire de créances entre les mains de la SCP DAIGREMONT et CHAPUIS, Huissier de justice à PARIS, pour garantir le paiement d'une somme de 752. 171, 24 ¿, sur le fondement des trois titres exécutoires émis le 27 janvier 2003 et du jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 2 mars 2006, · que cette saisie a été dénoncée à la SA LE MEDOC GOURMAND dans des conditions qui n'entraînent pas de contestations ; que cette société demande aujourd'hui la mainlevée de cette saisie conservatoire, fructueuse dans la mesure où le tiers saisi a déclaré détenir 2. 318. 948, 66 ¿ pour le compte de la société débitrice, sans toutefois expliciter la raison pour laquelle elle a attendu près de cinq années pour élever la présente contestation ; que c'est de façon erronée que la SA LE MEDOC GOURMAND croit pouvoir arguer de l'arrêt de l'exécution provisoire par le Premier président pour en déduire l'interdiction de pratiquer la saisie conservatoire ; qu'aux termes de l'article L. 511-1, « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut demander au juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement » ; que l'article L. 511-2 du même code prévoit que l'autorisation du juge n'est pas nécessaire dans certains cas, et notamment lorsque le créancier se prévaut d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire ; qu'ainsi la possibilité de pratiquer une mesure conservatoire est expressément prévue par les textes lorsqu'un créancier dispose d'une décision de justice qui n'est pas encore exécutoire, ce qui est exactement le cas en l'espèce ; qu'en revanche, par application de l'article L. 512-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge ne peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article 67 ne sont pas réunies ; que la contestation de la SA LE MEDOC GOURMAND est donc recevable ; que la SA LE MEDOC GOURMAND débute ses contestations, outre l'argument déjà écarté ci-dessus, en faisant valoir que « d'une part, les conditions juridiques pour pratiquer une saisie conservatoire n'étaient pas réunies », sans toutefois s'en expliquer davantage, sinon en évoquant une provision versée qui serait selon elle de nature à démontrer l'absence de péril du recouvrement de l'éventuelle créance ; qu'en l'espèce, toutefois, c'est à juste titre que la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC objecte que les conditions juridiques pour pratiquer la saisie conservatoire étaient réunies ; qu'il apparaît que le fondement de créance revendiquée résulte d'une part de titres exécutoires administratifs qui ont été validés par la juridiction compétente, et d'autre part de la décision du tribunal de grande instance lui-même relativement aux sommes dues au titre des loyers ou de l'indemnité d'occupation, · que cette décision, bien que frappée d'appel, établit suffisamment que la créance dont se prévaut la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC soit fondée en son principe au sens du texte ci-dessus ; que ce jugement se trouve en effet assorti dès son prononcé de l'autorité de la chose jugée, et le juge de l'exécution, qui n'est pas juge d'appel de décisions des juridictions de première instance, ne peut remettre en cause ce qui a été décidé par le tribunal de grande instance de Bordeaux ; qu'à titre subsidiaire, la SA LE MEDOC GOURMAND apparaît contester le montant de la créance relativement au montant de l'indemnité d'occupation, en faisant valoir que la commune lui avait notifié un nouveau montant de loyers de 79. 425, 77 ¿ annuels et non plus 94. 913, 52 ¿, et pour l'année 2007 de 4. 426, 10 ¿ ; que pour autant, la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC objecte à juste titre que la SA LE MEDOC GOURMAND fonde cette prétention, qu'elle qualifie de « calcul fantaisiste », sur des pièces partielles, en omettant de préciser que l'avenant un temps projeté sur le montant du loyer n'a jamais été formalisé et que, faute d'avoir régularisé un avenant au bail, la SA LE MEDOC GOURMAND ne peut se prévaloir de tableaux d'amortissements des emprunts bancaires qu'elle a reçu pour information et qui ne concerne que les relations de la commune avec ses banquiers ; qu'ainsi l'intégralité de la créance revendiquée par la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC apparaît suffisamment fondée en son principe pour justifier la mesure conservatoire ; que la SA LE MEDOC GOURMAND fait aussi valoir l'absence de péril pesant sur le recouvrement ; que pour autant, son seul argument paraît être l'invocation d'une provision déjà versée, ce qui n'est pourtant pas de nature à écarter toute menace sur le recouvrement du solde, de sorte que cet argument est inopérant ; que la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC, sur laquelle repose la charge de la preuve de la menace pesant sur le recouvrement de sa créance, fait valoir à bon droit que la SA LE MEDOC GOURMAND n'exerce plus aucune activité commerciale depuis plusieurs années et ne génère aucun chiffre d'affaires ; qu'elle est sans activité et que les locaux litigieux qui abritaient autrefois son activité sont désormais abandonnés, de sorte qu'aucun élément d'actif corporel ou incorporel n'est de nature à garantir le paiement des dettes de loyer ; qu'il est ainsi suffisamment établi les circonstances qui sont constitutives d'une menace sur le recouvrement de la créance ; que les conditions exigées par la loi étant réunies, il n'y a aucunement lieu à donner mainlevée de la mesure, même partiellement, et la SA LE MEDOC GOURMAND sera déboutée de l'ensemble de ses demandes ; que partie tenue aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, la SA LE MEDOC GOURMAND, qui a engagé tardivement des contestations pour le moins inopérantes, paiera à la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC la somme de 3. 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du même code, en compensation des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge » ;
ALORS 1°) QUE : le juge de l'exécution a le devoir de rechercher lui-même si la créance invoquée paraît fondée en son principe en tranchant la question litigieuse entre les parties, sans pouvoir s'en remettre à ce qu'a décidé le jugement rendu sur le fond dont l'exécution provisoire a été arrêtée et qui est frappé d'un appel en cours, au motif qu'il est revêtu de l'autorité de chose jugée ; qu'en retenant que la créance de la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC apparaissait fondée en son principe au prétexte que les titres exécutoires ont été validés par la juridiction compétente, que le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 2 mars 2006 (qui était précisément la décision de la « juridiction compétente » ayant validé les titres exécutoires) a condamné la société LE MEDOC GOURMAND à payer à la commune les sommes dues au titre des loyers et l'indemnité d'occupation, et qu'il n'appartenait pas au juge de l'exécution de remettre en cause l'autorité de chose jugée attachée à cette décision bien qu'elle fût frappée d'appel, la cour d'appel, qui a par ailleurs constaté que l'exécution provisoire attachée audit jugement avait été arrêtée, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
ALORS 2°) QUE : la société LE MEDOC GOURMAND rappelait, preuves à l'appui, qu'un jugement du 8 octobre 2002 avait condamné les constructeurs de l'immeuble (objet du crédit-bail qu'elle avait conclu avec la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC) et leurs assureurs à l'indemniser de son préjudice tout en ordonnant une expertise, qu'après le dépôt du pré-rapport d'expertise, et par ordonnance du 4 avril 2007, le juge de la mise en état lui avait alloué une provision de 2 895 000 ¿, que l'un des assureurs (la SMABTP) avait spontanément exécuté cette décision pour sa quote-part mais non l'autre (la MAF) à l'encontre duquel elle avait donc fait pratiquer, le 4 mai 2007, une saisie attribution à hauteur de 2 316 000 ¿ entre les mains de la BNP, et que la contestation soulevée par la société MAF à l'endroit de cette mesure avait été rejetée par arrêt de la cour d'appel de Paris (conclusions, p. 8) ; que sur cette base, la société LE MEDOC GOURMAND soulignait que la somme de 2 895 000 ¿ qui lui avait été judiciairement allouée le 4 avril 2007 couvrait largement les causes de la saisie conservatoire litigieuse (d'un montant de 752 171, 24 ¿), de sorte que la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC ne rapportait pas la preuve, dont elle avait la charge, du péril menaçant le recouvrement de sa créance (conclusions, p. 11) ; que pour juger remplie la condition qu'il existe une menace sur le recouvrement de la créance, l'arrêt attaqué a retenu que la société LE MEDOC GOURMAND aurait reconnu n'être pas en mesure de payer sa dette envers la commune, fondée sur les titres exécutoires et le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 2 mars 2006, lorsque pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire de ce jugement elle avait saisi en mars 2006 le premier président de la cour d'appel de Bordeaux ; qu'en se référant ainsi à des faits judiciairement reconnus antérieurs de plus d'un an à la provision de 2 895 000 ¿ dont se prévalait la société LE MEDOC GOURMAND et qui était 3, 84 fois supérieure aux causes de la saisie litigieuse, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions sus rappelées de l'exposante, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE : les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les prétentions des parties sans examiner les éléments de preuve que celles-ci leur soumettent ; qu'en estimant remplie la condition qu'il existe une menace sur le recouvrement de la créance en se fondant sur les énonciations de la décision du premier président de la cour d'appel de Bordeaux du 22 juin 2006 ordonnant l'arrêt de l'exécution provisoire, sans rien dire des pièces que la société LE MEDOC GOURMAND produisait pour établir qu'après l'arrêt de l'exécution provisoire elle avait encaissé une somme près de 4 fois supérieure aux causes de la saisie conservatoire litigieuse, à savoir l'ordonnance du 4 avril 2007 lui allouant une provision de 2 895 000 ¿, le procès-verbal de saisie-attribution pratiquée le 4 mai 2007 à l'encontre de la société MAF et entre les mains de la BNP à hauteur de 2 316 000 ¿ et l'arrêt de la cour d'appel de Paris rejetant le recours de la société MAF contre cette saisie, la cour d'appel derechef a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 4°) QUE : à supposer qu'elle ait adopté le motif du premier juge selon lequel la société LE MEDOC GOURMAND n'avait plus aucune activité, en ne visant pas et en analysant encore moins les pièces sur lesquelles elle fondait sa décision, la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 5°) QUE : en retenant la circonstance que le site n'était plus exploité depuis 2008 et que la société LE MEDOC GOURMAND avait transféré son siège à Neuilly-sur-Seine, laquelle était radicalement inapte à établir une quelconque menace sur le recouvrement de la prétendue créance de la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC, la cour d'appel a violé l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
ALORS 6°) QUE : le contrat de crédit-bail stipulait, en son article 5. 3, qu'« en tout état de cause, les loyers sont tels que la commune de CASTELNAU-DE-MEDOC ne réalise sur l'opération de construction ni bénéfice, ni perte » ; qu'en refusant de cantonner la saisie conservatoire litigieuse pratiquée sur la base de l'ancien loyer, au prétexte que la société LE MEDOC GOURMAND n'avait pas donné suite à la proposition de nouveau loyer faite par la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC de sorte qu'elle ne pouvait se prévaloir ni de la lettre du 31 mai 2002 (sic, en réalité : du 30 avril 2002) ni des tableaux d'amortissement d'emprunts bancaires y annexés qu'elle avait reçus pour information et qui ne concernaient que les relations de la commune avec ses banquiers, quand il résultait de l'article 5. 3 précité que le loyer devait de plein droit être diminué à due concurrence de toute réduction des remboursements de ses emprunts que la commune avait pu obtenir, la cour d'appel, qui a méconnu la loi des parties, a violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS 7°) QUE : la lettre du maire de la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC du 30 avril 2002, après avoir rappelé que le 5 juillet 2002 au plus tard soit le paiement des loyers recalculés selon les modalités prévues à la convention devait être repris, soit les lieux devaient être libérés, ajoutait : « Je vous prie de trouver ci-joint en annexe le montant du nouveau loyer mensuel et les éléments permettant de le déterminer » ; que l'annexe à cette lettre précisait : « Nouveau montant mensuel du loyer : 545 043, 16 ¿ = 8 516, 30 ¿ » ; qu'aux termes clairs et précis de ladite lettre et de son annexe, la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC réclamait le paiement d'un nouveau loyer mensuel de 8 516, 30 ¿ calculé selon les stipulations contractuelles, ou à défaut la libération des lieux ; qu'en refusant de cantonner la saisie conservatoire litigieuse pratiquée sur la base de l'ancien loyer, au prétexte qu'il résultait des courriers versés aux débats que le nouveau loyer aurait dû faire l'objet d'un avenant qui n'a pas été formalisé et que la société LE MEDOC GOURMAND n'avait pas donné suite à la proposition de nouveau loyer faite par la COMMUNE DE CASTELNAU-DE-MEDOC, la cour d'appel a dénaturé la lettre du 30 avril 2002 et son annexe, en violation de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-26262
Date de la décision : 08/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 05 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 jan. 2015, pourvoi n°13-26262


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.26262
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award