LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 3 octobre 2013), que Mme X..., salariée de la société ISS propreté (l'employeur), ayant été victime, le 3 août 2005, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois (la caisse), celle-ci lui a reconnu un taux d'incapacité permanente partielle de 15 % ; que l'employeur a saisi d'un recours un tribunal de l'incapacité ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de fixer à 10 % le taux d'incapacité permanente partielle de la victime, alors, selon le moyen :
1°/ que si le juge de l'incapacité n'est pas lié par les conclusions du médecin consultant qu'il a désigné sur la nature des séquelles consécutives à un accident du travail et le taux d'incapacité permanente en résultant, il ne peut écarter ces conclusions qu'après avoir examiné les motifs du rapport ayant déterminé ces conclusions et s'être expliqué sur les éléments médicaux figurant dans ce rapport ; qu'au cas présent, le médecin consultant commis par la CNITAAT avait, pour écarter le taux de 10 % retenu en première instance et estimer le taux d'incapacité à 8 %, constaté, d'une part, que le diagnostic d'algoneurodystrophie n'était pas établi à la date de consolidation et, d'autre part, qu'il n'était décrit aucune pathologie pouvant limiter de manière anatomique la mobilité de l'épaule ; qu'en écartant ces conclusions, dont l'exposante s'était approprié la teneur et sollicitait l'homologation, sans s'expliquer sur l'existence d'une algoneurodystrophie et d'une pathologie pouvant limiter la mobilité de l'épaule gauche à la date de la consolidation, la CNITAAT a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-1, L. 143-3 et L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
2°/ qu'aux termes de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ; qu'au cas présent, en prétendant déduire le taux de 10 % « des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, contradictoirement débattus et contrairement à l'avis du médecin consultant dont elle écarte les conclusions » sans préciser, fût-ce sommairement, les différents éléments susceptibles d'expliquer l'attribution d'un tel taux, la CNITAAT n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que toute décision de justice doit être motivée à peine de nullité ; qu'en affirmant qu' « à la date du 5 novembre 2007, Mme Sandrine X... présentait une limitation moyenne de certains mouvements de l'épaule gauche, membre non dominant, accompagnée de douleurs » et qu' « au vu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour contradictoirement débattus et contrairement à l'avis du médecin consultant dont elle écarte les conclusions, que les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux de 10 % », sans indiquer sur quel élément produit aux débats, elle prétendait fonder sa motivation, la CNITAAT n'a pas motivé sa décision et méconnu les exigences de articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que les juges du fond ne sont pas tenus de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'ils écartent ;
Et attendu, d'autre part, que sous le couvert des griefs non fondés de violation de l'article 455 du code de procédure civile et de défaut de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la Cour nationale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société ISS propreté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société ISS propreté et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société ISS propreté
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'à la suite de l'accident du travail dont été victime Madame Y... il convenait de retenir un taux de 10 % dans les rapports entre la société ISS PROPRETE et la CPAM de l'ARTOIS ;
AUX MOTIFS QUE « sur l'évaluation du taux à la date de consolidation du 5 novembre 2007 : à titre liminaire, qu'aux termes de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale, « le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité » ; qu'à la date du 5 novembre 2007, Madame Sandrine X... présentait une limitation moyenne de certains mouvements de l'épaule gauche, membre non dominant, accompagnée de douleurs ; qu'ainsi, au vu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, contradictoirement débattus et contrairement à l'avis du médecin consultant dont elle écarte les conclusions, que les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 10 % à l'égard de la société ISS PROPRETE ; qu'en conséquence il y a lieu de confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris ; sur la demande d'expertise : qu'elle est suffisamment informée, la Cour estime inutile de recourir à une procédure d'examen complémentaire ; que la demande de ce chef sera donc rejetée » ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Madame Sandrine X..., née Y..., salariée de la société ISS ABILIS ayant été victime d'un accident du travail le 3 août 2005 et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie d'ARRAS ayant fixé le taux d'incapacité en résultant à 15 %, cette société s'est régulièrement pourvue contre cette décision. A l'audience Maître BOILEAU, avocate à PARIS, assistée du Docteur Z..., représente la société ISS ABILIS. Maître BOILEAU dépose un dossier très complet et développe des conclusions écrites aux termes desquelles elle propose de retenir un taux d'incapacité de 8 % (huit pour cent). Le Docteur Z... évoque une pathologie bénigne et estime lui aussi que le taux d'incapacité à retenir est de 8 %. Monsieur A... représentant la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'ARTOIS, venant aux droits de la CPAM d'ARRAS, sollicite la confirmation du taux de 15 %.Au vu des éléments recueillis lors du débat oral le Tribunal, après en avoir délibéré et avant dire droit, désigne le Docteur B... comme consultant d'audience pour qu'il indique, au vu des pièces qui lui sont communiquées, s'il est en mesure de déterminer le taux médical d'incapacité de Madame Sandrine X... à la date du 05 novembre 2007 et dans l'affirmative de faire connaître au Tribunal les motifs de son appréciation. Après avoir été saisi oralement de sa mission et l'avoir exécutée sur le champ, l'Expert en rend compte immédiatement en donnant au Tribunal les renseignements suivants : L'avis du Docteur B... Ce dernier retient une luxation de l'épaule gauche chez une droitière compliquée d'algo-neuro-dystrophie aboutissant à une limitation de la mobilité de l'épaule gauche. L'abduction est limitée à 90° pour 180° physiologique, l'antépulsion est de 80° pour 180°, la rétropulsion est nulle, l'adduction est limitée du tiers, les mouvements complexes ne sont ni précisés ni mesurés. Le taux médical de 10 % (dix pour cent) est proposé. A la suite de ce rapport chaque partie reste sur ses positions. Le Tribunal retient les propositions du Docteur B... qui n'ont fait l'objet d'aucune critique pertinente. Dès lors, à la suite de l'accident du travail dont a été victime Madame X... le 3 août 2005, ce sera le taux de 10 % d'incapacité qui s'imposera dans les rapports entre la société ISS ABILIS et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'ARTOIS » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si le juge de l'incapacité n'est pas lié par les conclusions du médecin consultant qu'il a désigné sur la nature des séquelles consécutives à un accident du travail et le taux d'incapacité permanente en résultant, il ne peut écarter ces conclusions qu'après avoir examiné les motifs du rapport ayant déterminé ces conclusions et s'être expliqué sur les éléments médicaux figurant dans ce rapport ; qu'au cas présent, le médecin consultant commis par la CNITAAT avait, pour écarter le taux de 10 % retenu en première instance et estimer le taux d'incapacité à 8 %, constaté, d'une part, que le diagnostic d'algoneurodystrophie n'était pas établi à la date de consolidation et, d'autre part, qu'il n'était décrit aucune pathologie pouvant limiter de manière anatomique la mobilité de l'épaule ; qu'en écartant ces conclusions, dont l'exposante s'était approprié la teneur et sollicitait l'homologation, sans s'expliquer sur l'existence d'une algoneurodystrophie et d'une pathologie pouvant limiter la mobilité de l'épaule gauche à la date de la consolidation, la CNITAAT a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-1, L. 143-3 et L. 434-2 du code de la sécurité sociale ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'aux termes de l'article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ; qu'au cas présent, en prétendant déduire le taux de 10 % « des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, contradictoirement débattus et contrairement à l'avis du médecin consultant dont elle écarte les conclusions » sans préciser, fût-ce sommairement, les différents éléments susceptibles d'expliquer l'attribution d'un tel taux, la CNITAAT n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 434-2 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE toute décision de justice doit être motivée à peine de nullité ; qu'en affirmant qu' « à la date du 5 novembre 2007, Mme Sandrine X... présentait une limitation moyenne de certains mouvements de l'épaule gauche, membre non dominant, accompagnée de douleurs » et qu' « au vu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour contradictoirement débattus et contrairement à l'avis du médecin consultant dont elle écarte les conclusions, que les séquelles décrites ci-dessus justifiaient la reconnaissance d'un taux de 10 % », sans indiquer sur quel élément produit aux débats, elle prétendait fonder sa motivation, la CNITAAT n'a pas motivé sa décision et méconnu les exigences de articles 455 et 458 du code de procédure civile.