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18/12/2014 | FRANCE | N°13-26793

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 18 décembre 2014, 13-26793


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment, en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens du texte susvisé lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas p

ris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
Attendu, selon l'arrêt at...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment, en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens du texte susvisé lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 5 juillet 2006, M. X..., salarié de la société Daessle et Klein (l'employeur), qui procédait avec deux autres salariés au remplacement des pneumatiques d'un engin de levage portuaire, a été victime d'un accident occasionné par la chute d'une roue ; que le caractère professionnel de l'accident ayant été reconnu, il a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Attendu que pour rejeter celle-ci, l'arrêt retient qu'il est admis que l'employeur ne pouvait ignorer qu'il avait chargé ses salariés, dont la victime, d'une tâche délicate exposant à des risques particuliers tenant au poids des roues à changer et à la circonstance que l'opération devait être exécutée en dehors des ateliers de l'entreprise ; qu'il relève que l'intervention était dirigée par le chef d'équipe qui était titulaire d'un certificat de stage pour avoir participé à la formation "les pneumatiques génie civil niveau 1" ; qu'il en résulte la preuve que l'employeur n'avait pas manqué de veiller à placer l'équipe sous la direction d'un salarié qui avait reçu une formation spécialement adaptée à l'engin sur lequel l'intervention devait être opérée ; que l'employeur a fourni un exposé complet du mode opératoire donné pour consigne à suivre, selon lequel les roues de l'engin de levage devaient être démontées l'une après l'autre et sorties des goujons à l'aide d'un tire-palettes, chaque roue devant être descendue du tire-palettes et poussée sur le sol sur des chevrons pour démontage et remontage du pneumatique, puis être ensuite relevée et replacée sur le tire-palettes pour être positionnée sur les goujons et fixée à l'engin de levage ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme cela lui était demandé, si des mesures avaient été prises afin de préserver du risque de basculement d'une roue le salarié, qui n'avait pas bénéficié d'une formation spécifique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Daessle et Klein aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Daessle et Klein à payer à la SCP Delaporte, Briard et Trichet la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Fabrice X... de toutes ses prétentions ;
Aux motifs que « la faute inexcusable, qui ouvre droit à la victime d'un accident de travail à une indemnisation complémentaire en application de l'article L. 452-1 du code de sécurité sociale, s'entend d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat lorsqu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en l'espèce, sur la conscience du danger, il est admis que la société appelante ne pouvait ignorer qu'elle avait chargé ses salariés, dont M. Fabrice X..., d'une tâche délicate, exposant à des risques particuliers tenant au poids des roues à changer, à savoir 300 kg, et à la circonstance que l'opération devait être exécutée en dehors des ateliers de l'entreprise, sur le lieu même de l'exploitation de l'engin de levage portuaire ; que sur les mesures de préservation, le salarié intimé fait grief à son employeur, en premier lieu, de l'avoir affecté à une tâche à laquelle il n'était pas formé ; que M. Fabrice X... fait valoir qu'il a été embauché en qualité de "technicien poids-lourds", mais il ne démontre pas pour autant que sa qualification ne l'habilitait pas à intervenir sur un engin de levage ; qu'en tout cas, comme il le souligne lui-même, l'intervention était dirigée par le chef d'équipe William Y... qui était titulaire d'un certificat de stage délivré par la Manufacture Française des Pneumatiques Michelin pour avoir participé à la formation "les pneumatiques génie civil niveau 1" ; qu'il en résulte la preuve que la société appelante n'avait pas manqué de veiller à placer l'équipe, à laquelle appartenait M. Fabrice X..., sous la direction d'un salarié qui avait reçu une formation spécialement adaptée à l'engin sur lequel l'intervention devait être opérée ; qu'en deuxième lieu, le salarié intimé reproche à son employeur d'avoir fait employer un tire-palettes au lieu d'un "Fenwick" ; que le salarié intimé se garde de préciser quel engin il désigne sous la marque "Fenwick" ; qu'il se limite à produire une attestation par laquelle M. Laurent Z..., gérant de la société LK Pneus, a affirmé qu'un "tire-pal ne permet pas d'intervenir sur une roue de façon sécurisée" et qu'il "existe différents appareils pour effectuer une telle manipulation", sans autre précision ; qu'il ne démontre ni que l'emploi d'un tire-palettes était contre-indiqué, ni que l'utilisation d'un autre appareil eût été mieux adaptée à l'opération en cause ; que rien n'atteste de l'existence d'une interdiction des tire-palettes que les premiers juges ont cru pouvoir relever dans les ateliers de la société appelante ; qu'en revanche, la société appelante a fourni un exposé complet du mode opératoire qu'elle avait donné pour consigne de suivre à ses salariés intervenants, selon lequel les roues de l'engin de levage devaient être démontées l'une après l'autre et sorties des goujons à l'aide d'un tire-palettes, chaque roue devait être descendue du tire-palettes et poussée au sol sur des chevrons pour démontage et remontage du pneumatique, puis être ensuite relevée et replacée sur le tire-palettes pour être positionnée sur les goujons et fixée à l'engin de levage ; que ces instructions étaient suffisamment précises pour prévenir les risques de manque de bon sens ou d'initiative malheureuse auxquelles les premiers juges ont considéré que M. Fabrice X... était exposé ; qu'il n'en résulte aucun manquement de la société appelante ni dans les instructions qu'elle devait donner à ses salariés, ni dans la fourniture d'appareils et outillages adaptés ; qu'en troisième et dernier lieu, le salarié intimé fait grief à son employeur de n'avoir disposé d'aucune protection particulière, mais il se limite à se référer à la lettre du 27 juillet 2006 par laquelle son employeur a répondu à la demande d'enquête de la CPAM sur les circonstances de l'accident, et dans laquelle il a ajouté en termes généraux : "chaque intervention est accompagnée systématiquement des équipements de protection individuelle nécessaires" ; que rien n'indique que pour l'intervention en cause, un quelconque équipement de protection était requis, ni même utile ; qu'en définitive, si la société appelante devait avoir conscience du danger auquel était exposé ses salariés, aucun manquement n'est caractérisé dans son obligation d'instaurer les mesures nécessaires pour en préserver M. Fabrice X... ; qu'une faute inexcusable de l'employeur ne peut dès lors être retenue comme étant à l'origine de l'accident de travail du 5 juillet 2006 ; que le jugement entrepris doit donc être infirmé sans qu'il ait lieu de statuer sur la demande de rectification d'erreur matérielle, et M. Fabrice X... doit être débouté de toutes ses prétentions, y compris celle visant à une contribution à ses frais irrépétibles» (arrêt attaqué, pages 3 à 5) ;
Alors, premièrement, qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article susvisé, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que pour infirmer le jugement ayant reconnu la faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient que si la société Daesslé et Klein SA devait avoir conscience du danger auquel était exposé M. X..., aucun manquement n'est caractérisé dans son obligation d'instaurer les mesures nécessaires pour en préserver le salarié ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses énonciations que la victime, bien que chargée d'une tâche délicate l'exposant à des risques particuliers liés au poids des roues à déplacer, n'avait pas bénéficié, à la différence de son chef d'équipe, d'une formation spécifique consacrée aux pneumatiques de génie civil, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, en violation de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Alors, deuxièmement, qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article susvisé, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que pour infirmer le jugement ayant reconnu la faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt se borne à retenir que la société Daesslé et Klein SA avait imposé à ses salariés un mode opératoire suffisamment précis pour prévenir les risques de manque de bon sens ou d'initiative malheureuse, selon lequel les roues de l'engin de levage devaient être démontées successivement et sorties des goujons à l'aide d'un tire-palettes, chaque roue devait être descendue du tire-palettes et poussée au sol sur des chevrons pour démontage et remontage du pneumatique, puis être relevée et replacée sur le tire-palettes pour être positionnée sur les goujons et fixée à l'engin de levage ; qu'en se déterminant de la sorte, sans relever la prise d'aucune mesure destinée à préserver le salarié de l'éventualité, réalisée en l'espèce, de la chute d'une roue suite au basculement accidentel du tire-palettes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-26793
Date de la décision : 18/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 22 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 18 déc. 2014, pourvoi n°13-26793


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.26793
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