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17/12/2014 | FRANCE | N°13-26465

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 décembre 2014, 13-26465


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 21 janvier 2008 par la société Joen en qualité de plombier chauffagiste ; qu'à la suite d'un accident de trajet survenu le 20 avril 2009, le salarié a été en arrêt de travail du 29 septembre 2009 au 7 décembre suivant ; qu'il été licencié pour faute grave par lettre du 18 novembre 2009, l'employeur lui reprochant d'avoir, le 29 septembre 2009, retiré p

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 21 janvier 2008 par la société Joen en qualité de plombier chauffagiste ; qu'à la suite d'un accident de trajet survenu le 20 avril 2009, le salarié a été en arrêt de travail du 29 septembre 2009 au 7 décembre suivant ; qu'il été licencié pour faute grave par lettre du 18 novembre 2009, l'employeur lui reprochant d'avoir, le 29 septembre 2009, retiré pour son profit personnel des marchandises auprès d'un fournisseur de l'entreprise sur le compte de celle-ci, sans autorisation de sa part et alors qu'il était en arrêt maladie ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une faute grave, l'arrêt retient que la société Joen produit utilement le courrier du 5 octobre 2009 que lui a adressé la société Michel Vitalis, confirmant que le salarié était venu le 29 septembre 2009 dans son établissement, et le bon de livraison établi le même jour au nom de l'entreprise Joen par la société Vitalis pour l'achat de trois marchandises pour un montant total de 4,20 euros ; que le salarié ne conteste pas s'être rendu dans l'établissement le 29 septembre 2009 pour acheter un raccord et deux écrous en raison d'une fuite d'eau dans la cuisine de son propre appartement et avoir fait établir la facture de son achat personnel au nom de son employeur, se limitant à souligner le coût modique de l'achat, son intention de rembourser ultérieurement son employeur et l'absence de volonté frauduleuse ; que ces explications sont insuffisantes pour infirmer la réalité de la faute commise par le salarié, qu'en effet celui-ci n'a fait aucune démarche auprès de son employeur pour l'informer de l'opération litigieuse ou régulariser l'acquisition ; que peu importe la valeur du matériel détourné puisque l'important reste un manquement fautif caractérisé par un comportement frauduleux constitutif d'une faute grave de part une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise même pendant une période temporaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le fait pour le salarié d'avoir fait établir au nom de son employeur une facture d'un montant total de 4,20 euros pour l'achat, en vue de son usage personnel, d'un raccord et de deux écrous, n'était pas, au regard de la faible valeur de ces marchandises, de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement fondé sur une faute grave et en ce qu'il rejette les demandes de M. X... relatives à la rupture du contrat de travail, l'arrêt rendu le 14 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Joen aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Joen à payer à la SCP Hémery et Thomas-Raquin la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Bernard X..., opéré par la société SARL JOEN, était fondé sur une cause grave et de l'avoir en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes afférentes ;
AUX MOTIFS QUE « Bernard X... a rappelé que selon les dispositions de l'article L.1226-7 du code du travail, le contrat de travail du salarié, victime d'un accident du travail, est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident, qu'aux termes de l'article L.1226-9 du même code, au cours de la période de suspension, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail à durée indéterminée que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident, que l'article L.1226-13 du même code prévoit que toute résiliation du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions précédentes est nulle ; en droit, seul l'examen pratiqué par le médecin du travail dont doit bénéficier le salarié à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail lors de la reprise du travail met fin à la période de suspension; ainsi, si le salarié reprend le travail en l'absence d'examen médical de reprise, alors que celui-ci est obligatoire, le régime protecteur continue à s'appliquer ; aux termes de l'article R.4624-21 du code du travail, le salarié doit bénéficier de cet examen de reprise du travail par le médecin du travail après une absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail ; en l'espèce Bernard X... était toujours sous le régime de la suspension du contrat de travail en raison d'un accident de travail dont il a été victime, aucun document n'établissant que la visite médicale de reprise, pourtant obligatoire en raison de la durée de l'arrêt de travail, a été pratiquée conformément aux dispositions légales ; dès lors, la SARL JOEN ne pouvait décider le licenciement de Bernard X... qu'en présence d'une faute grave démontrée ; dans la lettre de rupture du 18 novembre 2009 adressée à Bernard X... et qui fixe les limites du litige, l'employeur justifiait en ces termes le licenciement opéré : "Suite à notre entretien du 19 Octobre 2009 ... nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre ; ces griefs se rapportent à : nous avons été informés par notre fournisseur VITALIS qu'en date du 29 septembre 2009 vous avez retiré des marchandises sur le compte de la société, à votre profit ; à aucun moment nous vous avons autorisé à faire de tels retraits au nom de la société ; de plus, à la date du 29 Septembre 2009, vous étiez en arrêt maladie et donc dispensé de toute activité au nom de la société... les conséquences immédiates de votre comportement rendent impossible la poursuite de votre activité au service de l'entreprise même pendant un préavis ; nous vous notifions par la présente votre licenciement immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture ..." ; la SARL JOEN, qui a la charge de démontrer la réalité de la faute grave, produit utilement les documents nécessaires : - le courrier du 5 Octobre 2009 que lui a expédié la SARL MICHEL VITALIS confirmant que Bernard X... était venu, le 29 septembre 2009, dans son établissement, - le bon de livraison du 29 Septembre 2009 établi au nom de la plomberie JOEN par la société VITALIS confirmant l'achat de 3 marchandises pour un montant global de 4,20 euros ; la Cour observe que Bernard X... ne conteste pas s'être rendu dans l'établissement, le 29 Septembre 2009, pour acheter un raccord et deux écrous en raison d'une fuite d'eau dans la cuisine de son propre appartement et qu'il a fait établir la facture de son achat personnel au nom de son employeur, se limitant à souligner le coût modique de l'achat, son intention de rembourser ultérieurement son employeur et l'absence de volonté frauduleuse ; de telles explications sont largement insuffisantes pour infirmer la réalité de la faute commise par Bernard X... ; aucune démarche de Bernard X... n'a été faite par Bernard X... auprès de son employeur pour l'informer de l'opération litigieuse ou régulariser l'acquisition ; peu importe la valeur du matériel détourné puisque l'important reste un manquement fautif caractérisé par un comportement frauduleux constitutif d' une faute grave de par une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise même pendant une période temporaire ; la mise à pied, mesure indissociable de la faute grave s'imposait ; elle n'était pas un sanction mais une décision de précaution indispensable, compte tenu des agissements de Bernard X... ; son caractère conservatoire était expressément indiqué dans le courrier de notification de la mesure qui était celui de la lettre de convocation à l'entretien préalable ; elle s'inscrivait dans la procédure de licenciement engagée et aucune règle n'imposait à la société SARL JOEN de rappeler la mise à pied conservatoire dans la lettre de notification du licenciement ; partant, en aucun cas, il n'y a eu double sanction ; dans ces conditions, a été justifié le licenciement de Bernard X... qui reposait sur un grief établi pouvant être qualifié de faute grave ; il convient de réformer le jugement déféré sur ce premier point ; les demandes de Bernard X..., présentées au titre du préavis, du rappel de salaire et des dommages et intérêts pour licenciement nul, sont rejetées ; » (cf. arrêt p.4, dernier §- p.6, §2) ;
ALORS QUE, la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; que ne constitue pas une faute grave le fait isolé pour un salarié, qui n'a jamais fait l'objet de reproche, d'avoir fait mettre au compte de la société qui l'employait du matériel d'une valeur de 4,20 ¿ qu'il avait l'intention de rembourser ; qu'en ayant jugé du contraire, la Cour d'appel a violé l'article L.1234-1 du Code du Travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-26465
Date de la décision : 17/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 déc. 2014, pourvoi n°13-26465


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.26465
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