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16/12/2014 | FRANCE | N°13-23864

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 décembre 2014, 13-23864


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la SCI Omega (la SCI), qu'après adjudication de biens immobiliers, a remis à M. X..., avocat, un chèque établi à l'ordre de la Caisse des règlements pécuniaires des avocats (la Carpa) ; qu'après avoir falsifié ce chèque en complétant l'ordre par la mention « Cabinet X... », M. X... l'a encaissé sur son compte personnel ouvert dans les livres de la caisse de Crédit agricole mutuel de la Guadeloupe (la caisse) ; que la SCI a recherché la responsabilit

é solidaire de M. X... et de la caisse pour obtenir réparation du pré...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la SCI Omega (la SCI), qu'après adjudication de biens immobiliers, a remis à M. X..., avocat, un chèque établi à l'ordre de la Caisse des règlements pécuniaires des avocats (la Carpa) ; qu'après avoir falsifié ce chèque en complétant l'ordre par la mention « Cabinet X... », M. X... l'a encaissé sur son compte personnel ouvert dans les livres de la caisse de Crédit agricole mutuel de la Guadeloupe (la caisse) ; que la SCI a recherché la responsabilité solidaire de M. X... et de la caisse pour obtenir réparation du préjudice résultant pour elle de l'échec de l'adjudication et des frais engagés ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes formées par la SCI contre la caisse, l'arrêt retient que la faute de cette dernière, qui a encaissé un chèque grossièrement falsifié sur le compte personnel de M. X... destiné à la Carpa, est avérée mais que le lien de causalité entre cette faute et le préjudice de la SCI n'est pas démontré car la vigilance de l'établissement bancaire n'aurait pas empêché l'échec de la procédure d'adjudication, dès lors que M. X... avait détourné le chèque en ne le déposant pas sur le compte Carpa et l'avait falsifié, le rendant ainsi inutilisable ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que la mention « Cabinet X... » ajoutée sur le chèque litigieux rédigé à l'ordre de la Carpa n'aurait pas permis son encaissement sur le sous-compte Carpa de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande en paiement de la SCI des sommes de 2 847 et 4 191 euros correspondant aux droits d'enregistrement et aux frais taxés de saisie, l'arrêt retient qu'il ressort des documents communiqués, notamment des pièces issues du dossier d'instruction, que M. X... a indemnisé la SCI à concurrence de 50 500 euros puis que cette somme inclut le montant détourné, augmenté des frais d'adjudication ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par simple affirmation, sans analyser, fût-ce sommairement, les documents qui lui étaient soumis, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne M. X... et la caisse de Crédit agricole mutuel de la Guadeloupe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse de Crédit agricole mutuel de la Guadeloupe et la condamne, ainsi que M. X..., à payer à la SCI Omega la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Oméga
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI OMEGA de son action en responsabilité contre la CRCAM de la Guadeloupe,
AUX MOTIFS PROPRES QUE :
« C'est également par des motifs pertinents qui méritent adoption que les juges du premier degré ont considéré que, si la fraude de l'établissement bancaire, qui a encaissé le chèque grossièrement falsifié sur le compte personnel de M. Jacques X... alors même qu'il était destiné à la CARPA est avérée, le lien de causalité entre cette faute et le préjudice de la SCI OMEGA n'est pas démontré ;
Qu'en effet, la société appelante sollicite devant la Cour l'indemnisation du préjudice qui découle de l'échec de l'adjudication et des frais engagés pour cette enchère qui n'a pas abouti ;
Que les juges ont bien jugé en considérant que la vigilance de l'établissement bancaire n'aurait pas pour autant empêché l'échec de la procédure d'adjudication dès lors que l'avocat a pris l'initiative de détourner le chèque en ne le déposant pas sur le compte CARPA et de le falsifier, le rendant ainsi inutilisable ;
Qu'il s'en suit que la décision qui a débouté la SCI OMEGA de son action en responsabilité contre la Caisse régionale de Crédit Agricole de la Guadeloupe sera confirmée sur ce point. » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE :
« Suivant les dispositions des articles L. 131-11 et suivants du Code monétaire et financier, la banque à l'encaissement, en qualité de mandataire appointé, doit vérifier, pour dégager sa responsabilité, la régularité formelle apparente du chèque.
Qu'en l'espèce, le nom du bénéficiaire du chèque écrit en forme dactylographiée est « CARPA », immédiatement précédé et suivi de 4 astérisques destinés manifestement à éviter qu'avant ou après le mot CARPA ne soit ajoutée une mention quelconque.
Qu'immédiatement après les astérisques qui suivent le mot CARPA, M. Jacques X... a ajouté de manière manuscrite les mots « Cabinet X... ».
Que cette falsification grossière n'aurait pas dû échapper à la vigilance d'un banquier normalement avisé, qui ne saurait s'exonérer de sa responsabilité en invoquant la qualité d'avocat de Maître X... qui, selon lui, constituait un gage de probité.
Cependant, que le lien entre la faute et le dommage n'est pas établi à l'égard de la banque car, si celle-ci avait fait obstacle à l'encaissement du chèque sur le compte de M. Jacques X..., rien ne permet d'affirmer que celui-ci aurait conduit la procédure d'adjudication à son terme puisque, dans ce cas, il aurait été contraint de confesser ses malversations à sa cliente, le chèque libellé à l'ordre de « CARPA Cabinet X... » ne pouvant plus être encaissé sur le compte CARPA.
Que M. Jacques X... supportera donc seul les conséquences de sa faute. » ;
ALORS QUE, pour critiquer la motivation des premiers juges aux termes de laquelle le chèque libellé à l'ordre « CARPA Cabinet X... » ne pouvait plus être encaissé sur le compte CARPA, la SCI OMEGA faisait valoir en pages 5 et 6 de ses conclusions d'appel (prod. 2) qu'en cas de refus d'encaissement du chèque falsifié par la CRCAM, il était encore possible à Monsieur X... de le déposer sur son compte CARPA puisque telle était sa destination et parce que la mention « Cabinet X... » était parfaitement compatible avec un versement sur le sous-compte « Cabinet X... » ouvert à la CARPA ; Que la SCI OMEGA ajoutait qu'il était encore temps pour Maître X... de « confesser ses malversations » au Bâtonnier de l'Ordre des avocats lequel, en présence d'un repentir actif, n'aurait pas manqué de régulariser la situation en provoquant le versement du chèque litigieux au sous-compte « Cabinet X... » de la CARPA ; Qu'en confirmant le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI OMEGA de son action en responsabilité contre la banque en se contentant d'énoncer, sans même répondre à ces moyens opérants, que le tribunal avait bien jugé en considérant que la vigilance de l'établissement bancaire n'aurait pas pour autant empêché l'échec de la procédure d'adjudication dès lors que l'avocat avait pris l'initiative de détourner le chèque en ne le déposant pas sur le compte CARPA et de le falsifier, le rendant ainsi inutilisable, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET PARTIELLEMENT INFIRMATIF ATTAQUE d'avoir débouté la SCI OMEGA de ses demandes en paiement des sommes de 2. 847 € correspondant aux droits d'enregistrement et de 4. 191 € correspondant aux frais taxés de saisie,
AUX MOTIFS QUE :
« devant la Cour d'appel, l'intimé soutient qu'il a déjà payé les sommes permettant le dédommagement de la SCI OMEGA, qui l'a reconnu puisqu'elle ne s'est pas constituée partie civile devant le tribunal correctionnel lors du procès et que, dès lors, les nouvelles demandes indemnitaires sont irrecevable ;
Qu'il ressort des documents communiqués et notamment des pièces issues du dossier d'instruction ouvert au cabinet du juge d'instruction de BASSE TERRE et ayant abouti à la condamnation du mis en examen que M. Jacques X... a détourné un chèque d'un montant de 43. 500 € au préjudice de la SCI OMEGA ;
Qu'il a indemnisé la victime à hauteur de 50. 500 €, cette somme comprenant le montant détourné augmenté des frais d'adjudication, à savoir les droits d'enregistrement (2. 847 €) et les frais de saisie (4. 191, 31 €) ;
Que dès lors, la SCI OMEGA, qui a été indemnisée de ce préjudice, ne peut qu'être déboutée de ses demandes visant à voir M. Jacques X... condamné à nouveau au paiement de ces sommes. » ;
ALORS D'UNE PART QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans s'expliquer sur l'ensemble des éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; Que, dès son assignation d'introductive d'instance (prod. 3), la SCI OMEGA avait régulièrement versé aux débats en pièces n° 2 à 4 de son bordereau les éléments de preuve de nature à démontrer que la somme de 50. 500 € qui lui avait été reversée par Monsieur X... dans le cadre de l'instruction pénale correspondait au seul prix d'adjudication, et qu'elle avait payé en sus sans en être remboursée la somme de 2. 487 € au titre des droits d'enregistrement et celle de 4. 191, 31 € au titre des frais taxés et du droit proportionnel ; Qu'en énonçant, sans s'expliquer sur ces éléments de preuve régulièrement versés aux débats et soumis à son examen, qu'il ressort des éléments communiqués et notamment des pièces issues du dossier d'instruction que Monsieur X... avait dédommagé la victime à hauteur de 50. 500 €, cette somme comprenant le montant détourné augmenté des frais d'adjudication pour 2. 847 € et des frais de saisie pour 4. 191, 31 €, la Cour d'appel a violé l'article 1353 du Code civil, ensemble l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE QUE Monsieur X... n'a jamais soutenu dans ses conclusions d'appel (prod. 8) avoir remboursé à la SCI OMEGA le montant des droits d'enregistrement et des frais taxés ; Qu'il faisait seulement valoir qu'en renonçant à soutenir sa constitution de partie civile à l'audience du tribunal correctionnel, la SCI OMEGA avait estimé être remplie de ses droits par le versement de la somme de 50. 000 €, de sorte que sa condamnation au paiement d'une somme supplémentaire de 21. 038 € constituait une double indemnisation se heurtant à la règle non bis in idem ; Que ce n'est donc qu'au prix de la méconnaissance des termes du litige tels que résultant des conclusions d'appel de Monsieur X... que la Cour d'appel a pu considérer que l'indemnisation de la victime à hauteur de 50. 500 € comprenait le montant détourné augmenté des frais d'adjudication, à savoir les droits d'enregistrement pour 2. 847 € et les frais de saisie pour 4. 191, 31 €, si bien que la SCI OMEGA ne pouvait qu'être déboutée de ses demandes visant à voir Monsieur X... condamné à nouveau au paiement de ces sommes ; Que, ce faisant, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-23864
Date de la décision : 16/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 28 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 déc. 2014, pourvoi n°13-23864


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23864
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