LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal et sur les troisième et quatrième branches du moyen unique du pourvoi incident, réunis, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que les travaux d'entretien confiés à la société Corrèze constructions s'étendaient à des lots divers (plâtrerie, plafond, murs, menuiseries, peintures et même aux abords extérieurs de l'établissement où des arbres avaient été abattus), que ces travaux se déroulaient en l'absence des maîtres de l'ouvrage et impliquaient, par leur diversité, que la société Corrèze construction ait un accès général à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier et, procédant à la recherche prétendument omise, que les clés de l'établissement avaient été remises à M. X..., préposé chargé des travaux, par M. Y..., qui avait donné ses directives de travail à son préposé démontrant ainsi qu'il intervenait en sa qualité de dirigeant de la société Corrèze constructions, la cour d'appel, qui a pu en déduire que, dans un tel contexte, la société Corrèze construction était, pendant l'exécution des travaux, investie des attributs de la garde et présumée responsable de la perte du bien immobilier dont elle avait la garde, et ne pouvait s'exonérer de cette responsabilité qu'en rapportant la preuve qu'elle n'avait commis aucune faute, et qui a constaté qu'elle ne rapportait pas cette preuve, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses première, deuxième et cinquième branches ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que la société Corrèze constructions n'ayant soutenu ni l'absence de subrogation ni l'irrecevabilité de la demande de la société Sagena faute de ne pas avoir appelé dans la cause l'EURL, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;
Attendu, d'autre part, que le rejet du pourvoi principal rend sans objet la cinquième branche du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sagena à payer aux sociétés Amlin et Lloyd's France, la somme globale de 3 000 euros ; rejette les demandes de la société Sagena et de la société Corrèze constructions ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Sagena, demanderesse au pourvoi principal.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré la société CORREZE CONSTRUCTION responsable de l'incendie litigieux et D'AVOIR dit que la société SAGENA devait garantir son assurée des conséquences résultant de l'engagement de sa responsabilité, dans la limite des plafonds de garantie convenus au contrat d'assurance ;
AUX MOTIFS QUE « l'incendie est survenu en cours d'exécution du chantier de rénovation confié à la société CORREZE CONSTRUCTION, alors que Monsieur David X..., préposé de cette société, effectuait des travaux de nettoyage de traces de peinture et de bâchage de mobilier à l'intérieur de la discothèque en prévision de la pose d'un crépi au plafond ; que les travaux en cause ont fait l'objet d'un devis de la société CORREZE CONSTRUCTION pour un montant de 2. 344, 16 ¿ TTC, devis accepté par l'EURL GUET-APENS ; que les travaux décrits dans ce document consistent :- en la remise en état de la plâtrerie, plafond, murs, y compris les finitions de peinture,- en la remise en état des menuiseries, bar, étagères, tiroirs, y compris les finitions de peinture,- en la protection des lieux lors du chantier au moyen de bâches, film plastique et leur nettoyage après travaux ; que les travaux se sont déroulés en période de fermeture de la discothèque ; que les clefs pour l'accès à l'établissement ont été remises à Monsieur X... par Monsieur Damien Y...qui a donné ses directives de travail à son préposé, démontrant ainsi qu'il intervenait, non pas comme maître de l'ouvrage, mais en sa qualité de dirigeant de la société CORREZE CONSTRUCTION ; que les travaux d'entretien confiés à la société CORREZE CONSTRUCTION s'étendent à des lots divers (plâtrerie, plafond, murs, menuiseries, peintures et même aux abords extérieurs de l'établissement où des arbres ont été abattus) ; que ces travaux se déroulaient en l'absence des maîtres de l'ouvrage et impliquaient, par leur diversité, que la société CORREZE CONSTRUCTION ait un accès général à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier ; que, dans un tel contexte, la société CORREZE CONSTRUCTION était, pendant l'exécution des travaux, investie des attributs de la garde sur le bien immobilier concerné ; que l'incendie est survenu pendant l'exécution du chantier et s'est déclaré dans la pièce où Monsieur X... effectuait ses travaux de nettoyage ; que dès lors, la société CORREZE CONSTRUCTION est présumée responsable de la perte du bien immobilier dont elle avait la garde et elle ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en rapportant la preuve qu'elle n'a commis aucune faute ; que les deux hypothèses successivement émises par Monsieur X... pour tenter d'expliquer le départ du feu, à savoir le renversement accidentel d'un poêle à pétrole et la chute de sa cigarette allumée sur un carton, ont été écartées par Monsieur B..., expert judiciaire, dont les investigations n'ont pas permis de déterminer avec exactitude la cause du sinistre ; que dès lors, la société CORREZE CONSTRUCTION ne rapporte pas la preuve de son absence de faute dans la survenance de l'incendie ; que cette société doit donc être déclarée responsable du sinistre » (arrêt pp. 3 et 4) ;
1/ ALORS QUE, dans le cas où l'ouvrier fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient à périr, l'ouvrier n'est tenu que de sa faute ; que, lorsqu'il se contente de procéder à des travaux mineurs, l'intervention d'un entrepreneur sur un immeuble n'est pas de nature à lui en transférer la garde juridique et sa responsabilité en cas de perte de l'immeuble n'est engagée que s'il est démontré sa faute ; que la cour d'appel a constaté que, le jour de l'incendie des locaux litigieux, le préposé de la société CORREZE CONSTRUCTION effectuait des travaux de nettoyage de traces de peinture et de bâchage de mobilier à l'intérieur de la discothèque en prévision de la pose d'un crépi au plafond, ce dont il résultait que le caractère très limité de son intervention n'était pas de nature à lui conférer la garde des locaux ; qu'en retenant néanmoins la responsabilité de la société CORREZE CONSTRUCTION pour faute présumée, du fait qu'il aurait eu la garde de l'immeuble, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article 1789 du code civil ;
2/ ALORS QUE, dans le cas où l'ouvrier fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient à périr, l'ouvrier n'est tenu que de sa faute ; que, lorsqu'il se contente de procéder à des travaux mineurs, l'intervention d'un entrepreneur sur un immeuble n'est pas de nature à lui en transférer la garde juridique et sa responsabilité en cas de perte de l'immeuble n'est engagée que s'il est démontré sa faute ; que la cour d'appel a affirmé que les tâches de l'entreprise impliquaient, par leur diversité, qu'elle ait un accès général à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier et qu'elle était, pendant l'exécution des travaux, investie des attributs de la garde sur le bien immobilier concerné ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi que l'y invitait la société SAGENA (conclusions, p. 7), si le caractère modique du montant des travaux confiés à la société CORREZE CONSTRUCTION, de 1. 969 ¿ HT, ne traduisait pas le caractère mineur de ces travaux, nonobstant leur diversité, et n'excluait pas nécessairement tout transfert de garde de l'immeuble au locateur d'ouvrage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1789 du code civil ;
3/ ALORS QUE, dans le cas où l'ouvrier fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient à périr, l'ouvrier n'est tenu que de sa faute ; que, lorsqu'il se contente de procéder à des travaux mineurs, l'intervention d'un entrepreneur sur un immeuble n'est pas de nature à lui en transférer la garde juridique et sa responsabilité en cas de perte de l'immeuble n'est engagée que s'il est démontré sa faute ; que la cour d'appel a constaté que les travaux d'entretien confiés à la société CORREZE CONSTRUCTION s'étendaient à des lots divers, pour en déduire que les tâches de l'entreprise impliquaient, par leur diversité, qu'elle ait un accès général à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier et qu'elle était, pendant l'exécution des travaux, investie des attributs de la garde sur le bien immobilier concerné ; qu'en statuant ainsi, au regard de l'ensemble des prestations contractuellement attendues de la société CORREZE CONSTRUCTION, sans caractériser la garde qu'elle aurait eue de l'immeuble au regard des tâches beaucoup plus limitées qui lui étaient confiées et qu'elle exécutait précisément le jour de l'incendie litigieux, et en retenant la responsabilité de l'entreprise pour faute présumée sur le fondement de l'article 1789 du code civil, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce texte. Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Corrèze constructions, demanderesse au pourvoi incident.
Le pourvoi incident fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré que la société CORREZE CONSTRUCTIONS était responsable de l'incendie survenu le 9 janvier 2009 au préjudice de la société LE GUET APENS et de la SCI LE SAULE ;
AUX MOTIFS QU'en cause d'appel les sociétés AMLIH et LLOYD'S ne concluent plus à la nullité du contrat d'assurance ; qu'elles ne formulent aucune critique à l'encontre du chef de décision rejetant leur demande d'application de la règle proportionnelle ; qu'elles se bornent à soutenir que la société CORREZE CONSTRUCTIONS doit être déclarée responsable du sinistre et tenue, à ce titre, solidairement avec son assureur, la société SAGENA, de les relever indemnes de toutes condamnations, dans la limite des plafonds de garantie en ce qui concerne l'assureur ; que l'incendie est survenu en cours d'exécution du chantier de rénovation confié à la société Corrèze constructions, alors que M. David X..., préposé de cette société, effectuait des travaux de nettoyage de traces de peinture et de bâchage d'éléments de mobilier à l'intérieur de la discothèque en prévision de la pose d'un crépi au plafond ; que les travaux en cause ont fait l'objet d'un devis de la société-CORREZE CONSTRUCTIONS pour un montant de 2. 344, 16 euros TTC, devis accepté par l'EURL Le Guet-apens ; que les travaux décrits dans ce document consistent :- en la remise en état de la plâtrerie ; plafond, murs, y compris les finitions de peinture,- en la remise en état des menuiseries, bar, étagères, tiroirs, y compris les finitions de peinture,- en la protection des lieux lors du chantier au moyen de bâches, film plastique et leur nettoyage après travaux ; que les travaux se sont déroulés en période de fermeture de la discothèque ; que les clefs pour l'accès à l'établissement ont été remises à M. X... par M. Damien Y...qui a donné ses directives de travail à son préposé, démontrant ainsi qu'il intervenait, non pas comme maitre de l'ouvrage, mais en sa qualité de dirigeant de la société CORREZE CONSTRUCTIONS ; que les travaux d'entretien confiés à la société CORREZE CONSTRUCTIONS s'étendent à des lots divers (plâtrerie, plafond, murs, menuiseries, peintures et même aux abords extérieurs de l'établissement où des arbres ont été abattus) ; que ces travaux se déroulaient en l'absence des maîtres de l'ouvrage et impliquaient, par leur diversité, que la société CORREZE CONSTRUCTIONS ait un accès général à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier ; que, dans un tel contexte, la société CORREZE CONSTRUCTIONS était, pendant l'exécution des travaux, investie des attributs de la garde sur le bien immobilier concerné ; que l'incendie est survenu pendant l'exécution du chantier et s'est déclaré dans la pièce où M. X... effectuait ses travaux de nettoyage ; que, dès lors, la société CORREZE CONSTRUCTIONS est présumée responsable de la perte du bien immobilier dont elle avait la garde et elle ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en rapportant la preuve qu'elle n'a commis aucune faute ; que les deux hypothèses successivement émises par M. X... pour tenter d'expliquer le départ du feu, à savoir le renversement accidentel d'un poêle à pétrole et la chute de sa cigarette allumée sur un carton, ont été écartées par M. B..., expert judiciaire, dont les investigations n'ont pas permis de déterminer avec exactitude la cause du sinistre ; que, dès lors, la société CORREZE CONSTRUCTIONS ne rapporte pas la preuve de son absence de faute dans la survenance de l'incendie ; que cette société doit donc être déclarée responsable du sinistre ;
« 1. ALORS QU'il appartient à l'assureur qui se prévaut de la subrogation dans les droits et actions de son assuré de justifier de sa qualité à relever appel du jugement déboutant son assuré de l'action en responsabilité qu'il avait formée contre l'entrepreneur de travaux ; qu'en accueillant l'appel que la société AMLIN France et la société LLOYD'S France avaient seules relevé du jugement dégageant la société CORREZE CONSTRUCTIONS de toute responsabilité du fait de la survenance d'un incendie dans les locaux de leur assuré (la société GUET APENS), sans qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni des pièces versées aux débats que la société AMLIN France et la société LLOYD'S France aient justifié du paiement de l'indemnité d'assurance et de la subrogation dans les droits et actions du maître de l'ouvrage contre l'entrepreneur dont dépendait leur qualité pour relever appel du jugement, en l'absence de leur assuré, la cour d'appel a violé l'article 1251-3° du Code civil et l'article L 121-12 du Code des assurances, ensemble les articles 122, 125, alinéa 2, et 546 du Code de procédure civile »
2. ALORS, si tel n'est pas le cas, QUE l'irrecevabilité de l'appel doit être relevée d'office lorsqu'il est formé contre l'une des parties seulement à l'égard desquelles la matière est indivisible ; qu'il résulte des énonciations auxquelles la juridiction du second degré a procédé, d'une part, que le jugement entrepris est devenu définitif à l'égard de l'assuré, la société GUET APENS, en ce qu'il a dégagé la société CORREZE CONSTRUCTIONS de toute responsabilité à son égard dans la survenance de l'incendie dans les locaux dès lors qu'elle n'a été intimée à aucun moment de l'instance suivie devant la Cour d'appel, mais, d'autre part, que la décision attaquée n'a retenu la responsabilité de la société CORREZE CONSTRUCTION que dans ses seuls rapports avec les assureurs de la société GUET APENS, soit la société AMLIN France et la société LLOYD'S France ; qu'en s'abstenant au besoin d'office de déclarer irrecevable l'appel dont elle était saisie par la société AMLIN France et la société LLOYD'S France, en l'absence de la société GUET APENS qui n'avait été intimée à aucune étape de la procédure d'appel, quant l'existence d'une indivisibilité en raison de l'objet du litige aurait imposé aux appelants d'appeler à l'instance la société GUET APENS, la cour d'appel a subsidiairement violé l'article 553 du Code de procédure civile ;
3. ALORS, très subsidiairement, QUE la présomption de faute dans la conservation de la chose que l'article 1789 du Code civil met à la charge de l'entrepreneur est subordonnée à la condition qu'elle lui a été véritablement remise, qu'elle est passée sous sa garde et sa seule responsabilité dans son entier, de sorte qu'un tel transfert de garde est exclu dans l'hypothèse où le préposé de l'entrepreneur exécute isolément des travaux limités de nettoyage et de peinture dans l'une des pièces de l'immeuble ; qu'en retenant que la société CORREZE CONSTRUCTIONS était présumée responsable de la survenance de l'incendie durant l'exécution du chantier dont elle avait la garde, sauf à rapporter la preuve qu'elle n'ait commis aucune négligence, et qu'au cas particulier, elle ne justifiait pas de son absence de faute dès lors que les causes de l'incendie étaient indéterminées, dès lors que son préposé était susceptible d'accéder à l'ensemble de l'établissement pendant les heures d'ouverture du chantier, tout en constatant que les travaux de la société CORREZE CONSTRUCTIONS étaient expressément limités à certains lots divers, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser le transfert de garde de l'immeuble, à défaut d'avoir établi qu'elle avait acquis le contrôle effectif de l'entier immeuble ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1789 du Code civil ;
4. ALORS, plus subsidiairement encore, QUE la présomption de faute dans la conservation de la chose que l'article 1789 du Code civil met à la charge de l'entrepreneur est subordonnée à la condition qu'elle lui a été véritablement remise, qu'elle est passée sous sa garde et sa seule responsabilité dans son entier, de sorte qu'un tel transfert de garde est exclue dans l'hypothèse où le préposé de l'entrepreneur exécute isolément des travaux limités de nettoyage et de peinture sous les ordres du maître de l'ouvrage ; qu'en décidant que les travaux ont été réalisés en l'absence du maître de l'ouvrage, sous la seule surveillance de M. Y...qui était le dirigeant de la société CORREZE DISTRIBUTION, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, p. 6), si le donneur d'ordre n'agissait pas en tant que représentant de la société propriétaire, soit la SCI LE SAULE, dont il était également associé, et d'exploitant de la société LE GUET APENS, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1789 du Code civil ;
5. ALORS QU'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi principal de la société SAGENA emportera nécessairement l'annulation des dispositions de l'arrêt attaqué déclarant que la société CORREZE CONSTRUCTIONS était responsable de l'incendie survenu le 9 janvier 2009 au préjudice de la société LE GUET APENS et de la SCI LE SAULE.