LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 462 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement définitif du tribunal de grande instance de Bayonne du 3 octobre 2011 a condamné in solidum la société SA Le Majestic (la société), preneur, et M. X..., propriétaire des locaux, à faire procéder, sous astreinte, à divers travaux de mise en conformité acoustique d'un local commercial prescrit dans un rapport d'expertise judiciaire ; que la société a déposé une requête en rectification d'erreur matérielle ; qu'elle a relevé appel du jugement rendu le 7 janvier 2013 ayant rejeté sa demande ;
Attendu que pour, infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 7 janvier 2013 et ordonner la rectification du dispositif du jugement du même tribunal du 3 octobre 2011 en ce qu'il a condamné in solidum la société et M. X... à faire réaliser les travaux de mise en conformité acoustique du local commercial prescrits par l'expert Y..., en supprimant la mention in solidum et la société, l'arrêt retient que la motivation qui met à la charge du bailleur M. X... la réalisation des travaux de mise en conformité acoustique des locaux, est en contradiction manifeste avec le prononcé d'une condamnation in solidum au profit des époux Z... avec le locataire la société, qu'il convient de réparer, conformément à l'article 462 du code de procédure civile ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui, sous le couvert d'une rectification d'erreur matérielle, a modifié les droits et obligations des parties, a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2013 entre les parties par la cour d'appel de Pau ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit n'y avoir lieu à rectification d'une erreur matérielle ;
Condamne la société Le Majestic aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR ordonné la rectification du dispositif du jugement du Tribunal de grande instance de Bayonne du 3 octobre 2011 en ce qu'il a condamné in solidum la SA LE MAJESTIC et Monsieur X... à faire réaliser les travaux de mise en conformité acoustique du local commercial prescrits par l'expert Y..., en supprimant la mention in solidum et la SA LE MAJESTIC, d'AVOIR ordonné la rectification en marge de la minute de ce jugement et des expéditions qui seront délivrées et dit que l'arrêt rectificatif serait notifié comme le jugement, et d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts.
AUX MOTIFS QU' « en l'espèce le jugement du 3 octobre 2011 comporte une contradiction manifeste entre ses motifs et une partie de son dispositif, que la raison commande de réparer.
(...)
Au contraire les motifs du jugement sont à ce sujet parfaitement clairs, mais en contradiction manifeste avec la disposition sur une condamnation in solidum de la SA LE MAJESTIC et de Monsieur X....
En effet (...) le jugement a successivement énuméré, sur le plan des obligations contractuelles entre le bailleur et le locataire, les trois motivations suivantes :
- « les travaux préconisés par l'expert pour mettre fin aux nuisances sont des travaux qui visent les grosses réparations de l'article 606 du Code civil, dont la charge, aux termes de ces dispositions, reste au bailleur;
- ce sont des travaux faits pour remédier à un vice de la construction qui préexistait à la conclusion du bail et qui était caché aux yeux du locataire,
- la clause par laquelle le locataire s'engage à prendre les lieux loués en l'état où ils se trouvaient le jour de la prise de possession ne peut être opposée au locataire lorsque ces désordres sont de nature à empêcher l'usage même des locaux loués conformément à leur destination, de sorte que l'obligation de délivrance n'est pas valablement remplie. »
L'attendu qui suit ces trois motivations est parfaitement clair et explicite :
« Attendu qu'en conséquence il incombe au bailleur de prendre en charge les travaux de mise en conformité des locaux. »
Le paragraphe qui suit relatif à l'obligation faite à la SA LE MAJESTIC de produire aux époux Z... et à la copropriété les certificats de conformité concernant les normes acoustiques, le réseau électrique et le système de coupe-feu (troisième disposition du jugement du 3 octobre 2011) précise si besoin était la décision du Tribunal de grande instance sur la charge de ces travaux, dès lors que, « pour dire n'y avoir lieu d'ordonner de ce chef une astreinte » à l'encontre de la SA LE MAJESTIC, le jugement indique que «ces documents ne pouvant être établis qu'après la réalisation des travaux de reprise de l'isolation acoustique qui ne sont pas à sa charge ».
Dès lors que cette motivation, parfaitement détaillée et explicite, qui met à la charge du bailleur Monsieur X... la charge des travaux de mise en conformité acoustique des locaux, est en contradiction manifeste avec le prononcé d'une condamnation in solidum avec le locataire la SA LE MAJESTIC, la raison commande de considérer qu'il s'agit d'une erreur matérielle, qu'il convient de réparer, conformément à l'article 462 du Code de procédure civile.
La rectification proposée par la SA LE MAJESTIC, par une distinction subtile entre « la prise en charge du coût des travaux » de mise en conformité par Monsieur X..., et « la réalisation qui a été mise in solidum » à la charge de la SA LE MAJESTIC et de Monsieur X..., ne correspond pas à la motivation du jugement et à la contradiction manifeste relevée ; plus simplement il s'agira de rectifier le dispositif du jugement en ce qu'il a, par erreur, condamné Monsieur X... « in solidum avec la SA LE MAJESTIC » par suppression de cette mention, pour ne retenir que la seule condamnation de Monsieur X....
Dès lors qu'il est fait droit à la demande en rectification de la SA LE MAJESTIC, Monsieur X... ne saurait prétendre à de quelconques dommages et intérêts pour procédure abusive » (arrêt p.5, § 2, 6 et 7, et p. 6).
ALORS QUE le juge ne peut, sous couvert de rectification, prononcer une condamnation que ne comporte pas le jugement ni modifier les droits et obligations des parties tels qu'ils résultent du jugement ; que le jugement du 3 octobre 2011 a condamné in solidum le bailleur et le locataire à faire réaliser les travaux de mise en conformité acoustique du local commercial, en énonçant dans sa motivation qu'à l'égard des époux Z..., Monsieur X... et la Société LE MAJESTIC « sont responsables des préjudices ainsi occasionnés au voisinage par le bruit anormal provenant desdits locaux », et que « c'est à bon droit que les époux Z... demandent la condamnation in solidum de M. X... et de la Société LE MAJESTIC... à faire cesser les nuisances commises » ; qu'en rectifiant ce jugement par suppression de la mention « in solidum avec la SA MAJESTIC », pour ne retenir que la seule condamnation de Monsieur X..., la Cour d'appel a modifié les obligations des parties telles qu'elles résultaient explicitement du jugement du 3 octobre 2011 et a violé, par fausse application, l'article 462 du Code de procédure civile.