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03/12/2014 | FRANCE | N°13-19992

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 décembre 2014, 13-19992


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et deuxième moyens réunis :
Vu les articles 455 du code de procédure civile et L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 13 février 2008 par la société Hafiba en qualité d'opérateur PAO, à compter du 13 février 2008 ; qu'il a été licencié le 5 octobre 2010 pour motif économique ;
Attendu que pour dire que le licenciem

ent du salarié reposait sur un motif économique réel et sérieux, la cour d'appel reti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et deuxième moyens réunis :
Vu les articles 455 du code de procédure civile et L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les éléments de la cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 13 février 2008 par la société Hafiba en qualité d'opérateur PAO, à compter du 13 février 2008 ; qu'il a été licencié le 5 octobre 2010 pour motif économique ;
Attendu que pour dire que le licenciement du salarié reposait sur un motif économique réel et sérieux, la cour d'appel retient notamment que les pièces produites par le mandataire liquidateur font apparaître une baisse réelle du chiffre d'affaires de la société Hafiba, les résultats de la société étant déficitaires sur les années 2008 (- 38 982 euros d'avril à décembre 2008), 2009 (- 18 542 euros) et 2010 (- 8 853 euros) et qu'il ressort des documents comptables des autres sociétés du groupe auquel la société Hafiba appartient que celles qui exercent leur activité dans le même secteur de l'imprimerie, à savoir les sociétés Bepong et La Colline connaissaient elles-mêmes des difficultés économiques ; qu'elle ajoute que, pour la société Espace Image 3, les résultats étaient déficitaires en 2010 de 94 901 euros, que, pour la société Bepong ils ont été bénéficiaires de 1 567 euros et que, pour la société La Colline, ils ont été bénéficiaires de 10 565 euros ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs contradictoires et alors que les chiffres qu'elle retenait correspondaient au solde entre les charges financières de l'entreprise et ses produits financiers et non aux résultats d'exploitation, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a constaté la réalité du motif économique du licenciement de M. X... et rejeté les demandes présentées par le salarié à ce titre, l'arrêt rendu le 23 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Ouizille Hart de Keating aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur Alex X... tendant à voir dire et juger que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et voir fixer sa créance à la somme de 29 319 euros ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement du 5 octobre 2010 qui fixe les limites du litige, vise les motifs suivants : - la baisse du chiffre d'affaires en 2008 et 2009 ; - la cessation de parution du magazine ENVY, qui entraîne une perte de chiffre d'affaires de 400.000 € annuel, représentant 10% de l'activité ; - les autres sociétés du groupe connaissent une dégradation globale de leur chiffre d'affaire de 14% et de leur résultat d'exploitation de 32% ; - face à la baisse de l'activité, la direction est conduite à restructurer l'entreprise et à réduire la capacité de production pour l'adapter au volume de travail, entraînant la suppression de deux postes d'opérateur PAO ; - l'article 328 de la convention collective de l'imprimerie fixe l'ordre des licenciements économiques en fonction de la seule ancienneté et vous êtes le salarié le plus récent de votre catégorie professionnelle ; - nous avons une obligation légale de recherche de reclassement ; or il s'avère qu'aucun autre poste relevant de la même catégorie ou d'une catégorie inférieure à celui que vous occupez n'est actuellement disponible au sein de la société ou des sociétés apparentées ; - en outre, nous avons également procédé à une recherche de reclassement externe auprès de la CPNE, conformément à l'accord du 24 mars 1970 ; - sans possibilité de reclassement, nous sommes au regret de prononcer votre licenciement ; à l'appui de son appel, la SCP OUIZILLE-HART DE KEATING soutient que les difficultés économiques sont réelles, justifiant la suppression du poste, la société HAFIBA ayant en outre respecté ses obligations en matière de reclassement et sur l'ordre des licenciements, ce qui est contesté par Monsieur X... ; il convient de constater que les pièces produites par le mandataire liquidateur, font apparaître une baisse réelle du chiffre d'affaires de la société HAFIBA, les résultats de la société étant déficitaires sur les années 2008 (- 38.982 euros d'avril à décembre 2008), 2009 (- 18.542 euros) et 2010 (- 8.853 euros), ce justifiait le plan de restructuration présenté aux délégués du personnel le 8 septembre 2010, organisant la suppression de 4 postes sur les 33 existants ; les difficultés économiques ont perduré puisque la liquidation judiciaire de la société HAFIBA a été prononcée le 13 décembre 2012 ; par ailleurs, le mandataire liquidateur produit également les documents comptables des autres sociétés du groupe LE CERCLE auquel la société HAFIBA appartient, et dont il ressort que les 3 sociétés qui exercent leur activité dans le même secteur de l'imprimerie, les sociétés ESPACE IMAGE 3, BEPONG, LA COLLINE, connaissaient elles-mêmes des difficultés économiques ; ainsi, pour la société ESPACE IMAGE 3, les résultats étaient déficitaires en 2010 de 94.901 euros, pour la société BEPONG les résultats ont été bénéficiaires de 1.567 euros, et pour la société LA COLLINE, les résultats ont été bénéficiaires de 10.565 euros ; seule la société LE CERCLE CREATIVE INVESTMENT présente des résultats bénéficiaires mais s'agissant de la holding, qui réalise ses bénéfices au titre de participations, ces résultats ne peuvent pas avoir d'incidence sur la réalité des difficultés économiques constatées dans le secteur de l'imprimerie ; le mandataire liquidateur produit les registres d'entrées et de sorties des 4 sociétés, dont il ressort que toutes ont procédé à des licenciements sur la même année 2010 ; pour la société BEPONG, l'embauche de Monsieur Y... correspond au reclassement de ce salarié qui provenait de la société HAFIBA ; l'embauche de Monsieur Z... au sein de la société HAFIBA, s'est réalisé en août 2011, soit près d'un an après le licenciement de Monsieur X..., et s'est limitée à une période d'emploi de 3 mois ; l'embauche de Monsieur Z... est toutefois contraire à la priorité de réembauchage de Monsieur X..., qui en avait fait la demande par lettre du 5 novembre 2010, justifiant ainsi l'indemnité de 5.864 € accordée par le conseil de prud'hommes de NANTERRE à ce titre ; il se déduit cependant de ces éléments que le reclassement de Monsieur X... n'était pas possible ; enfin, il sera relevé que s'agissant de l'ordre des licenciements, Monsieur X... présentait l'ancienneté la plus faible parmi les 8 opérateurs PAO de la société HAFIBA, puisqu'embauché en février 2008 ; en outre, les dispositions de la convention collective qui recommandent de réduire l'horaire de travail en cas de baisse d'activité, ne font pas obstacle à la décision de présenter un plan de licenciement dès lors que la simple réduction des heures de travail était insuffisante pour faire face aux difficultés économiques, nécessitant dès la fin 2010, la suppression de 4 postes dont 3 opérateurs PAO ; compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le conseil de prud'hommes de NANTERRE qui a seulement relevé que la société HAFIBA ne rapportait pas la preuve du motif économique du licenciement, sera réformé dans ses dispositions sur la cause du licenciement ;
ALORS QUE le juge doit se prononcer au vu des motifs invoqués dans la lettre de rupture ; que, alors que la lettre de licenciement faisait état d'une dégradation globale du chiffre d'affaires et du résultat d'exploitation des autres sociétés du groupe, la cour d'appel s'est uniquement prononcée au regard des bénéfices et déficits des sociétés du groupe ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que la lettre de licenciement faisait état d'une dégradation globale du chiffre d'affaire et du résultat d'exploitation, la cour d'appel a violé les articles L 1233-3 et L 1233-16 du code du travail ;
ALORS encore QUE, s'agissant de ces sociétés, la Cour d'appel a relevé que les résultats des sociétés BEPONG et LA COLLINE étaient bénéficiaires ; qu'en affirmant cependant que les 3 sociétés du groupe LE CERCLE qui exercent leur activité dans le secteur de l'imprimerie, les sociétés ESPACE IMAGE 3, BEPONG et LA COLLINE connaissaient des difficultés économiques, la Cour d'appel a statué par des motifs contradictoire, équivalent à un défaut de motifs, et a donc privé sa décision de base légale au regard des articles L 1233-3 et L 1233-16 du code du travail ;
Et ALORS enfin QUE les difficultés économiques invoquées à l'appui d'un licenciement pour motif économique doivent être appréciées au niveau du groupe s'il ne comporte qu'un seul secteur d'activité, ou au niveau du secteur d'activité du groupe dont relève l'entreprise s'il comporte plusieurs secteurs d'activité ; que la cour d'appel a refusé de prendre en considération les résultats de la société LE CERCLE CREATIVE INVESTMENT aux motifs que « s'agissant de la holding, qui réalise ses bénéfices au titre de participations, ces résultats ne peuvent pas avoir d'incidence sur la réalité des difficultés économiques constatées dans le secteur de l'imprimerie » ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans constater l'existence de plusieurs secteurs d'activité justifiant que les résultats de la société LE CERCLE ne soient pas pris en considération, la cour d'appel a violé l'article l'article L.1233-3 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur Alex X... tendant à voir dire et juger que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et voir fixer sa créance à la somme de 29 319 euros ;
AUX MOTIFS visés dans le premier moyen ;
Et ALORS QUE le juge doit se prononcer au vu des motifs invoqués dans la lettre de rupture ; alors que la lettre de licenciement fait état d'une baisse d'activité et du chiffre d'affaires, la cour d'appel a affirmé que la baisse du chiffre d'affaires de la société HAFIBA en 2008, 2009 et 2010 était réelle en se référant non pas au montant du chiffre d'affaires mais au montant des résultats financiers ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L 1233-3 et L 1233-16 du code du travail ;
Et ALORS QUE la société HAFIBA a enregistré non pas des déficits mais des bénéfices de 82 286 euros en 2008, de 51 248 euros en 2009 et de 5.606, 30 euros en 2010 (cf ligne « bénéfice ou perte » page 8 des comptes annuels pour l'exercice 2009 et page 14 des comptes annuels pour l'exercice 2010) ; que la cour d'appel a relevé que « les pièces produites par le mandataire liquidateur font apparaître une baisse réelle du chiffre d'affaires de la société HAFIBA, les résultats de la société étant déficitaires sur les années 2008 (- 38.982 euros d'avril à décembre 2008), 2009 (- 18.542 euros) et 2010 (- 8.853 euros)¿ » ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que la société HAFIBA avait enregistré des bénéfices en 2008, 2009 et 2010, la cour d'appel a dénaturé les comptes annuels de la Société HAFIBA pour les exercices 2009 et 2010 ;
ALORS en tout état de cause QUE la réalisation d'un chiffre d'affaires moindre ou la perte d'un contrat ne suffit pas à établir la réalité de difficultés économiques ; que le salarié avait souligné que les bilans communiqués ne caractérisaient pas une situation économique difficile, que la baisse du chiffre d'affaire alléguée n'était pas significative, que la société avait fait des bénéfices et qu'elle avait signé de nouveaux contrats ; qu'en statuant par des motifs ne permettant pas de caractériser l'existence de difficultés économiques susceptibles de justifier le licenciement, sans rechercher si la société avait fait des bénéfices et si elle avait signé de nouveaux contrats, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L 1233-3 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur Alex X... tendant à voir dire et juger que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et voir fixer sa créance à la somme de 29 319 euros ;
AUX MOTIFS visés dans le premier moyen ;
ALORS QUE le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; qu'il appartient à l'employeur de justifier d'une recherche effective et sérieuse de reclassement et de l'impossibilité de procéder à son reclassement ; que la cour d'appel a affirmé que le reclassement de Monsieur X... n'était pas possible ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans préciser quelles recherches de reclassement avaient été effectivement envisagées ou effectuées par l'employeur et sans motiver sa décision pour caractériser l'impossibilité pour l'employeur de reclasser le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-19992
Date de la décision : 03/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 23 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 déc. 2014, pourvoi n°13-19992


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19992
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