LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 26 avril 1982 en qualité de secrétaire comptable par la société Gerland, aux droits de laquelle vient la société Eiffage travaux publics Rhône Alpes Auvergne, a été licenciée le 12 juillet 2010 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, après avoir été déclarée inapte à tous les postes de l'entreprise par le médecin du travail à l'issue de deux visites de reprise ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives au licenciement et à un harcèlement moral ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ que la mise à l'écart d'un salarié constitue un élément de fait précis et concordant pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en affirmant que « Mme X... n'établit aucun fait précis, daté et circonstancié, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral », quand elle avait constaté, par motifs adoptés des premiers juges, que « le témoignage de M. Jean-Louis Y... fait état des qualités personnelles de Mme X... et se borne à indiquer qu'il a remarqué un certain isolement de celle-ci notamment lors de la pause café », ce dont il résultait que Madame X... avait produit un élément de fait permettant de présumer l'existence d'un agissement de harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ qu'aux termes du compte rendu d'intervention du médiateur, « Premier constat : depuis 15 mois, le service « tourne » et les habitudes sont prises pour « oublier » la présence de M. X..., hormis l'appréhension liée à chaque fin de période d'arrêt de travail. Va-t-elle revenir ? Disons brutalement que le collectif s'en remet à l'entreprise pour régler le problème, c'est-à-dire à mon sens ne pas réintégrer M. X.... Il y a donc eu rejet collectif, sauf si la Direction l'imposait, pour une rencontre avec D. X..., rencontre dont le contenu ne leur paraît pas évident. Autre constat : la situation de J. Z... est quelque peu différente. A 2 ans de la retraite, elle estime qu'elle peut effectuer son travail sans avoir de relation avec D. X.... Mais quoiqu'elle en dise, elle ne pourra pas rester insensible à la présence physique de sa collègue ; il me paraît utopique d'imaginer une réintégration sans qu'un minimum de dialogue soit amorcé, ce que J. Z... rejette aujourd'hui totalement » ; qu'en affirmant, pour juger que « Mme X... n'établit aucun fait précis, daté et circonstancié, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral », que « dans son compte-rendu, le médiateur évoque expressément un syndrome de victimisation de Mme Dominique X..., rappelant en conclusion que les chances étaient trop minces pour que les parties s'engagent, elles-mêmes, dans un processus où elles seraient obligées de « bouger », la cour d'appel, qui a occulté du rapport émis par le médiateur l'aversion physique de Mme Z... à l'égard de Mme X... ainsi que le « rejet collectif » de la réintégration de la salariée, a dénaturé le compte-rendu litigieux, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a examiné l'ensemble des éléments invoqués par la salariée, a constaté, par motifs propres et adoptés, sans dénaturation, que Mme X... n'établissait pas de faits précis et circonstanciés laissant présumer un harcèlement moral ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes relatives au licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se fondant exclusivement sur « la proposition de mutation temporaire à l'agence de Chambéry dans l'attente du déménagement de l'entreprise d'Amancy et de l'aménagement de nouveaux locaux, la mise en oeuvre d'une médiation avec un conseil en relation sociale et enfin la saisine du CHSCT et de la médecine du travail » pour juger que la société « a bien tout mis en oeuvre pour que ce conflit personnel puisse se résoudre au mieux des intérêts de Mme Dominique X... », sans cependant examiner les rapports annuels d'activité établis par le médecin du travail pour les années 2009 et 2010, lesquels étaient de nature à établir le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et, par voie de conséquence, l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme X..., la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments qu'elle décidait d'écarter, a relevé, par motifs propres et adoptés, que l'employeur justifiait avoir tout mis en oeuvre pour que le conflit personnel de Mme X... avec une autre salariée puisse se résoudre au mieux des intérêts de l'intéressée, en adoptant des mesures telles que la saisine du médecin du travail et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et en prenant la décision au cours d'une réunion de ce comité de confier une médiation à un organisme extérieur ; qu'elle a pu en déduire que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de sécurité ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que la cour d'appel a dit le licenciement pour inaptitude de la salariée fondé sur une cause réelle et sérieuse aux motifs propres et adoptés que l'intéressée n'établissait aucun fait permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral à l'origine de l'inaptitude ;
Qu'en statuant ainsi, en examinant les seuls éléments relatifs au harcèlement moral, sans répondre aux conclusions de la salariée, reprises oralement à l'audience, soutenant que l'employeur ne démontrait pas la réalité des recherches de reclassement, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres branches du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement pour inaptitude de Mme X... fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il déboute la salariée de ses demandes relatives au licenciement, l'arrêt rendu le 4 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Eiffage travaux publics Rhône Alpes Auvergne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et d'avoir, en conséquence, débouté Madame Dominique X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Aux motifs propres qu'en l'espèce, Madame Dominique X... a, le 22 janvier 2008, adressé un courrier à Monsieur A..., responsable administratif et comptable, pour lui demander de trouver une solution dans le conflit qui existait avec Madame Z... et d'intervenir en conséquence dans la répartition du travail afin qu'il n'y ait plus de communication possible entre elles ; que pour étayer sa souffrance au travail du fait du comportement de sa collègue, Madame Dominique X... produit deux attestations, celle de Madame B... et celle de Monsieur Jean-Yves C... ; qu'en premier lieu, l'attestation de Madame B... ne relate aucun fait précis ou daté laissant présumer un quelconque conflit, voire harcèlement, de la part de Madame Z... envers Madame Dominique X... ; qu'elle ne fait en réalité que relater sa propre difficulté avec Madame Z..., allant jusqu'à en tirer une conclusion de portée générale et très subjective, à savoir : « ce type d'individu nuit terriblement à la vie d'autrui » ; qu'un tel jugement de valeur, porté à l'encontre de Madame Z... en l'absence de fait précis et circonstanciés, ne permet pas de caractériser le présumé harcèlement moral dont aurait été victime Madame Dominique X... ; qu'en ce qui concerne l'attestation de Monsieur Jean-Yves C..., celui-ci ne fait pas non plus état de faits de harcèlement entre Madame Z... et Madame X... ; qu'il indique que pendant son passage à l'entreprise, il a constaté que Madame Dominique X... était une très bonne salariée et qu'à l'inverse Madame Z... était : « une personne plus complexe, avec parfois des attitudes très égocentriques, qu'il avait été dans l'obligation d'intervenir fortement pour l'amener à changer d'attitude et lui rappeler les bons usages du travail en équipe ¿ en particulier accepter sa part de travail au fil de l'eau sans négliger les tâches les moins passionnantes pour les laisser à d'autres » ; que cette attestation ne constitue pas la démonstration que la relation de travail de Madame Z... avec Madame Dominique X... était très conflictuelle et que Madame Z... avait une attitude envers Madame Dominique X... confinant au harcèlement moral ; que l'attestation de Monsieur Gérard X..., du fait du lien d'alliance existant entre les parties, doit être prise avec la plus grande précaution, les faits relatés n'étant que la reprise intégrale des difficultés énumérées par son épouse, sans que personnellement il ait assisté à un quelconque comportement répréhensible de la part de Madame Z... ; qu'à l'inverse, il est justifié que suite au courrier qu'il a reçu, Monsieur Pierre-Louis A... a procédé à une nouvelle répartition des tâches dès la mi-février 2008 pour que ces deux personnes n'aient plus entre elles de contact professionnel ; que par la suite il est également justifié d'entretiens réguliers entre la direction et Madame X..., d'une proposition de mutation temporaire à l'agence de Chambéry dans l'attente du déménagement de l'entreprise à Amancy et de l'aménagement de nouveaux locaux, de la mise en oeuvre d'une médiation avec un conseil en relation sociale et enfin de la saisine du CHSCT et de la médecine du travail ; que la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a donc bien, contrairement aux allégations de Madame Dominique X..., tout mis en oeuvre pour que ce conflit personnel puisse se résoudre au mieux des intérêts de Madame Dominique X... ; que les propositions n'ont pas eu de suite dans la mesure où Madame X... a été en arrêt de maladie à compter du mois de juin 2008 et n'a pas repris son travail par la suite, alors même que Madame Z... était également en arrêt maladie du 8 février 2009 au 28 juin 2009 ; que dans son compte rendu, le médiateur évoque expressément un syndrome de victimisation de Madame Dominique X..., rappelant en conclusion, que les chances étaient assez minces pour que les parties s'engagent elles-mêmes dans un processus où elles seront obligées de « bouger » ; que Madame X... ne peut contester le bien-fondé, l'utilité, voire l'existence même de cette médiation, dès lors que les parties elles-mêmes ont refusé d'adhérer à la mesure, le médiateur n'ayant de ce fait aucun pouvoir ni aucune légitimité pour contraindre les parties à entamer un tel processus ; qu'en tout état de cause, la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a bien au cas d'espèce initié la procédure ; qu'au surplus, le CHSCT, avisé de ces difficultés relationnelles entre ces deux salariés, n'a pas pour autant exigé, ni jugé utile de mettre en oeuvre d'autres mesures que celles déjà mises en place par l'employeur (compte rendu du 25 septembre 2008 et du 2 décembre 2009) ; que les mesures proposées par la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE étaient en outre compatibles avec l'organisation du travail, dans la mesure où la structure d'Amancy était une petite structure composée uniquement de quatre personnes ; que si effectivement Madame Dominique X... a pu vivre difficilement sa relation avec Madame Z..., ces difficultés relationnelles entre ces deux salariées ne sont pas en tout état de cause constitutives au cas d'espèce d'un harcèlement moral, dès lors qu'il n'est pas expressément démontré que le mal être de Madame Dominique X... trouve son origine dans le comportement confinant au harcèlement moral de Madame Z..., le syndrome anxio-dépressif constaté médicalement pouvant avoir une autre origine et être dès lors simplement exacerbé par une relation de travail conflictuelle, ce qui n'est pas contesté ; qu'au surplus, il est justifié que face à ce conflit de personnes, la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a tout mis en oeuvre pour permettre à chacune des salariées de poursuivre sereinement sa relation de travail ; qu'enfin, il n'est justifié d'aucun fait présumé de harcèlement moral de la part de Monsieur E... ;
Et aux motifs éventuellement adoptés qu'en l'espèce, si Madame X... fait état de nombreux agissements, tel que des dénigrements, de la médisance, de l'exclusion pouvant laisser supposer l'existence d'un harcèlement, force est de constater qu'elle n'établit pas la matérialité de faits précis venant étayer ses accusations formées en des termes généraux ; que les seules pièces qu'elle verse aux débats, autre que des courriers rédigés par elle-même, sont deux attestations établies par Madame B... et Monsieur C... qui, outre qu'elles ne respectent pas le formalisme prescrit par l'article 202 du code de procédure civile, ne font état d'aucun faits précis et circonstanciés ou d'incidents qui auraient été constatés entre la requérante et Madame Josiane Z... ; qu'en effet, l'attestation rédigée par Madame Sylviane B... fait seulement état de ses propres relations avec Madame Z... et comporte son appréciation de la personnalité de cette dernière ; que de même, l'attestation établie par Monsieur Jean-Yves C... contient des précisions sur les qualités professionnelles de Madame X... qui a été sa subordonnée hiérarchique, ainsi qu'une comparaison entre les deux personnalités de Madame X... et Madame Z... sans contenir la moindre description ou le moindre constat des interactions entre elles ; que le témoignage de Monsieur Jean-Louis Y... fait état des qualités personnelles de Madame X... et se borne à remarquer un certain isolement de celle-ci notamment lors de la pause café ; que Madame X... soutient avoir fait l'objet d'un harcèlement sur son lieu de travail par Monsieur E... ; qu'il résulte des éléments produits qu'aucun fait précis ni aucun témoignage ne mentionnent cette personne ; qu'aucune des pièces produites par Madame X... n'étaye ses affirmations selon lesquelles elle était exclue, faisait l'objet de sarcasmes, de médisances ou de dénigrement de son travail de la part de ses collègues ; que Madame X... n'établit aucun fait précis, daté et circonstancié, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard ; que s'il résulte des éléments versés aux débats que Madame X... a subi de nombreux arrêts de travail, rien ne permet toutefois de les mettre en lien de cause à effet avec l'existence d'un harcèlement moral ; que si dans le courrier qu'elle a adressé le 25 novembre 2009 à l'inspection du travail, Madame X... soutient qu'elle a été victime de harcèlement moral, il est constant que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même et que ces allégations ne peuvent servir de fondement à la présomption de l'existence d'un harcèlement moral ; que dès lors, au vu de l'ensemble de ces éléments, le conseil ne peut que constater que Madame X... n'établit pas les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral comme l'exige les dispositions susvisées, de sorte qu'elle ne pourra qu'être déboutée de se demandes ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la mise à l'écart d'un salarié constitue un élément de fait précis et concordant pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en affirmant que « Madame X... n'établit aucun fait précis, daté et circonstancié, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral », quand elle avait constaté, par motifs adoptés des premiers juges, que « le témoignage de Monsieur Jean-Louis Y... fait état des qualités personnelles de Madame X... et se borne à indiquer qu'il a remarqué un certain isolement de celle-ci notamment lors de la pause café », ce dont il résultait que Madame X... avait produit un élément de fait permettant de présumer l'existence d'un agissement de harcèlement moral, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles L 1152-1 et L 1154-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'aux termes du compte rendu d'intervention du médiateur, « Premier constat : depuis 15 mois, le service « tourne » et les habitudes sont prises pour « oublier » la présence de M. X..., hormis l'appréhension liée à chaque fin de période d'arrêt de travail. Va-t-elle revenir ? Disons brutalement que le collectif s'en remet à l'entreprise pour régler le problème, c'est-à-dire à mon sens ne pas réintégrer M. X.... Il y a donc eu rejet collectif, sauf si la Direction l'imposait, pour une rencontre avec D. X..., rencontre dont le contenu ne leur paraît pas évident. Autre constat : la situation de J. Z... est quelque peu différente. A 2 ans de la retraite, elle estime qu'elle peut effectuer son travail sans avoir de relation avec D. X.... Mais quoiqu'elle en dise, elle ne pourra pas rester insensible à la présence physique de sa collègue ; il me paraît utopique d'imaginer une réintégration sans qu'un minimum de dialogue soit amorcé, ce que J. Z... rejette aujourd'hui totalement » ; qu'en affirmant, pour juger que « Madame X... n'établit aucun fait précis, daté et circonstancié, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral », que « dans son compte rendu, le médiateur évoque expressément un syndrome de victimisation de Madame Dominique X..., rappelant en conclusion que les chances étaient trop minces pour que les parties s'engagent, elles-mêmes, dans un processus où elles seraient obligées de « bouger », la Cour d'appel, qui a occulté du rapport émis par le médiateur l'aversion physique de Madame Z... à l'égard de Madame X... ainsi que le « rejet collectif » de la réintégration de la salariée, a dénaturé le compte-rendu litigieux, en violation de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et d'avoir, en conséquence, jugé que le licenciement pour inaptitude de Madame Dominique X... avait une cause réelle et sérieuse et rejeté l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la SNC EIFFAGE ;
Aux motifs qu'il est justifié que suite au courrier qu'il a reçu, Monsieur Pierre-Louis A... a procédé à une nouvelle répartition des tâches dès la mi-février 2008 pour que ces deux personnes n'aient plus entre elles de contact professionnel ; que par la suite il est également justifié d'entretiens réguliers entre la direction et Madame X..., d'une proposition de mutation temporaire à l'agence de Chambéry dans l'attente du déménagement de l'entreprise à Amancy et de l'aménagement de nouveaux locaux, de la mise en oeuvre d'une médiation avec un conseil en relation sociale et enfin de la saisine du CHSCT et de la médecine du travail ; que la SNC EFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a donc bien, contrairement aux allégations de Madame Dominique X..., tout mis en oeuvre pour que ce conflit personnel puisse se résoudre au mieux des intérêts de Madame Dominique X... ; que les propositions n'ont pas eu de suite dans la mesure où Madame X... a été en arrêt de maladie à compter du mois de juin 2008 et n'a pas repris son travail par la suite, alors même que Madame Z... était également en arrêt maladie du 8 février 2009 au 28 juin 2009 ; que dans son compte rendu, le médiateur évoque expressément un syndrome de victimisation de Madame Dominique X..., rappelant en conclusion, que les chances étaient assez minces pour que les parties s'engagent elles-mêmes dans un processus où elles seront obligées de « bouger » ; que Madame X... ne peut contester le bien-fondé, l'utilité, voire l'existence même de cette médiation, dès lors que les parties elles-mêmes ont refusé d'adhérer à la mesure, le médiateur n'ayant de ce fait aucun pouvoir ni aucune légitimité pour contraindre les parties à entamer un tel processus ; qu'en tout état de cause, la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a bien au cas d'espèce initié la procédure ; qu'au surplus, le CHSCT, avisé de ces difficultés relationnelles entre ces deux salariés, n'a pas pour autant exigé, ni jugé utile de mettre en oeuvre d'autres mesures que celles déjà mises en place par l'employeur (compte rendu du 25 septembre 2008 et du 2 décembre 2009) ; que les mesures proposées par la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE étaient en outre compatibles avec l'organisation du travail, dans la mesure où la structure d'Amancy était une petite structure composée uniquement de quatre personnes ; que si effectivement Madame Dominique X... a pu vivre difficilement sa relation avec Madame Z..., ces difficultés relationnelles entre ces deux salariées ne sont pas en tout état de cause constitutives au cas d'espèce d'un harcèlement moral, dès lors qu'il n'est pas expressément démontré que le mal être de Madame Dominique X... trouve son origine dans le comportement confinant au harcèlement moral de Madame Z..., le syndrome anxio-dépressif constaté médicalement pouvant avoir une autre origine et être dès lors simplement exacerbé par une relation de travail conflictuelle, ce qui n'est pas contesté ; qu'au surplus, il est justifié que face à ce conflit de personnes, la SNC EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS RHONE-ALPES-AUVERGNE a tout mis en oeuvre pour permettre à chacune des salariées de poursuivre sereinement sa relation de travail ; qu'enfin, il n'est justifié d'aucun fait présumé de harcèlement moral de la part de Monsieur E... ; que le jugement ayant dit que le licenciement de Madame Dominique X... pour inaptitude reposait sur une cause réelle et sérieuse et ayant débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes sera donc confirmé dans toutes ses dispositions ;
Et aux motifs éventuellement adoptés qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, le conseil ne peut que constater que Madame X... n'établit pas les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral comme l'exige les dispositions susvisées, de sorte qu'elle ne pourra qu'être déboutée de se demandes ; que surabondamment, il convient de relever que la société EIFFAGE a adopté toute une série de mesures propres à mettre un terme aux difficultés alléguées par Madame X... ; qu'en effet, la société EIFFAGE a répondu rapidement aux courriers successifs de Madame X... dès son premier courrier du 22 janvier 2008, a organisé divers entretiens avec sa hiérarchie (notamment avec Monsieur Jean-Louis A..., le responsable administratif et comptable), a convoqué en entretien Madame Z... dès le 4 février 2008, a mis en place une nouvelle répartition des tâches entre Madame X... et sa collègue Madame Z... à compter du 14 février 2008, a saisi le médecin du travail par courrier ainsi que le CHSCT des difficultés rencontrées par Madame X... dans les relations avec ses collègues ; que ce point a été inscrit à l'ordre du jour de la réunion du 25 septembre 2008, au cours de laquelle la décision a été prise de confier une médiation à un organisme extérieur, et de nouveau abordé lors de la réunion du CHSCT du 2 décembre 2009, lequel n'a pas formulé d'autres propositions ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le second moyen, en application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART et subsidiairement, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se fondant exclusivement sur « la proposition de mutation temporaire à l'agence de Chambéry dans l'attente du déménagement de l'entreprise d'Amancy et de l'aménagement de nouveaux locaux, la mise en oeuvre d'une médiation avec un conseil en relation sociale et enfin la saisine du CHSCT et de la médecine du travail » pour juger que la société « a bien tout mis en oeuvre pour que ce conflit personnel puisse se résoudre au mieux des intérêts de Madame Dominique X... », sans cependant examiner les rapports annuels d'activité établis par le médecin du travail pour les années 2009 et 2010, lesquels étaient de nature à établir le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et, par voie de conséquence, l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de Madame X..., la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENSUITE et subsidiairement, QUE lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que le licenciement pour inaptitude de Madame X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, que « les difficultés relationnelles entre ces deux salariées ie Madame Z... et Madame X... ne sont pas en tout état de cause constitutives d'un harcèlement moral » et « qu'il n'est justifié d'aucun fait présumé de harcèlement moral de la part de Monsieur E... », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la société avait satisfait à son obligation de reclassement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-2 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN et en tout état de cause, QUE l'exposante avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « alors même qu'EIFFAGE énonce avoir procédé à des recherches quant au reclassement, force est d'observer que le groupe EIFFAGE ne démontre pas la réalité de ces démarches. Le médecin du travail dans son rapport d'activité 2010 considère qu'il y a eu carence : « je n'ai pas le sentiment que l'entreprise a mis en oeuvre tous les moyens possibles pour son reclassement quand on sait que la collègue est partie en retraite quelque mois plus tard - Lui avait-on demandé ses intentions avant de licencier Mme X... ? Alors que sur la première fiche d'inaptitude j'avais stipulé que Mme B. était apte à un poste où elle ne serait pas en contact avec cette personne qui, de plus, avait refusé de participer à la médiation proposée l'année précédente » (rapport d'activité annuel 2010, pièce 24, page 10). Le licenciement intervenu sera donc déclaré abusif » (page 22) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que le licenciement pour inaptitude de Madame X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.