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20/11/2014 | FRANCE | N°13-20387

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2014, 13-20387


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Constate que la société Primonial, venant aux droits et obligations de la société W finance conseil, a repris l'instance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 avril 2013), que M. X... engagé par la société W finance conseil en qualité de conseiller financier stagiaire à compter du 26 mars 1990, y occupait depuis le 1er avril 2005 les fonctions de conseiller en gestion privée au sein de l'agence de Toulon ; qu'il était membre de la délégation unique du personnel depuis le 26 octobre 2006 ; q

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Constate que la société Primonial, venant aux droits et obligations de la société W finance conseil, a repris l'instance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 avril 2013), que M. X... engagé par la société W finance conseil en qualité de conseiller financier stagiaire à compter du 26 mars 1990, y occupait depuis le 1er avril 2005 les fonctions de conseiller en gestion privée au sein de l'agence de Toulon ; qu'il était membre de la délégation unique du personnel depuis le 26 octobre 2006 ; que courant 2008, la société a annoncé son intention de fermer cette agence dans le cadre d'une restructuration et, en janvier 2009, a informé le salarié de son rattachement à l'agence d'Aix-en-Provence, rattachement confirmé le 9 juin 2009, à compter du 1er juillet 2009, avec le statut « d'excentré » ; que par lettre du 6 novembre 2009, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail, puis a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et de prononcer diverses condamnation à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que la simple mise en oeuvre du contrat de travail ne requiert pas le consentement du salarié, qu'il soit ou non protégé ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver que le changement de rattachement administratif du salarié constituait simplement la mise en oeuvre de la clause du contrat de travail de M. X... prévoyant que celui-ci pouvait être amené à exercer son activité sur l'ensemble du territoire ; qu'en jugeant que la société W finance conseil ne pouvait pas conclure à l'absence de modification du contrat de travail ou de tout changement des conditions de travail en invoquant la clause contenue dans le contrat de travail du salarié, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, et L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que les juges ne peuvent dénaturer le sens ou la portée des écrits clairs et précis ; qu'en l'espèce, les représentants du personnel avaient expressément indiqué dans le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 janvier 2009 que les salariés concernés par le statut de salarié « excentré », dont M. X..., « souhaitent opter pour un statut d'excentré dont vous voudrez bien leur communiquer les modalités d'application » ; qu'il en résultait que M. X... avait d'ores et déjà donné son accord exprès et sans réserve quant au statut d'excentré ; qu'en affirmant qu'il ne pouvait pas être déduit de cette indication que M. X...avait accepté un statut de conseiller excentré dès lors qu'il avait demandé que les modalités d'application lui en soient communiquées, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal précité et méconnu le principe selon lequel les juges ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ;
3°/ qu'il résultait du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 janvier 2009 que les salariés concernés par le statut d'« excentré », dont M. X..., avaient demandé à leur employeur de bien vouloir « leur communiquer les modalités d'application par écrit » ; que l'employeur soutenait, offre de preuve à l'appui, qu'il avait satisfait à son obligation en remettant au salarié un « avenant de travail équipements » dont l'objet était de mettre à sa disposition le matériel nécessaire à l'exercice de son activité sous le statut d'excentré et donc de l'informer des modalités d'application de ce statut ; qu'en jugeant que la société W finance conseil n'avait pas remis lesdites modalités d'application par avenant et s'était contentée d'adresser un document de mise à disposition de matériel informatique, sans dire en quoi les éléments fournis par l'employeur n'étaient pas de nature à éclairer suffisamment le salarié sur les modalités d'application du statut d'excentré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, et L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. X... devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à relever que le l'employeur avait contraint le salarié à exercer son activité et à installer ses instruments de travail à son domicile, i. e avait imposé au salarié un statut de salarié excentré que ce dernier n'avait pas accepté ; qu'en statuant ainsi, sans dire en quoi ce manquement, à le supposer avéré, justifiait la prise d'acte, au regard notamment du fait que si le salarié devait être considéré comme n'ayant pas donné son accord exprès à ce changement de statut, il avait à tout le moins exprimé un souhait en ce sens et en avait été à l'initiative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, par une interprétation de la clause du contrat de travail que sa rédaction ambigüe rendait nécessaire, a retenu que la liberté, pour le salarié d'exercer son activité sur tout le territoire, sans affectation géographique, n'autorisait pas l'employeur à imposer à celui-ci d'exercer son activité et d'installer ses instruments de travail à son domicile ;
Et attendu, ensuite, qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis et sans les dénaturer, elle a constaté que la preuve de l'acceptation claire et non équivoque du salarié à la modification de son contrat de travail n'était pas rapportée ; qu'elle a pu en déduire que la modification imposée au salarié dont elle a fait ressortir qu'elle était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, justifiait la prise d'acte par le salarié de la rupture de ce contrat de travail qui dès lors produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le premier moyen ayant été rejeté, le deuxième moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence est devenu sans portée ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que l'article 5. 3 du contrat de travail du salarié s'analyse en une clause de non-concurrence, nulle en l'absence de contrepartie financière, de le condamner à payer au salarié une somme en réparation du préjudice subi et de le débouter de sa demande indemnitaire sur le fondement de la clause litigieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la clause selon laquelle le salarié est tenu de ne pas reprendre contact avec la clientèle et les partenaires de son employeur, i. e ne pas adopter une démarche active de sollicitation, n'est pas une clause de non-concurrence ; qu'en l'espèce, en jugeant que la clause, qui laissait pourtant au salarié, toute liberté de rentrer au service d'une entreprise concurrente ou de créer lui-même sa propre société, selon laquelle « en cas de résiliation du contrat, le conseiller en gestion privée s'engage à » « ne pas prendre contact, pendant une durée de vingt-quatre mois, avec les clients de la société en vue de leur proposer une formule de placement de quelque nature que ce soit. En cas de départ de la société et pendant une durée de vingt-quatre mois, le conseiller s'engage à ne pas prendre contact avec les experts comptables du réseau expertise et solutions ou un quelconque professionnel avec lequel la société a conclu un accord de partenariat, soit directement, soit par toute entreprise dans laquelle il aurait directement ou indirectement des intérêts, ou avec laquelle il aurait des relations de collaboration sous quelque forme que ce soit, notamment en qualité de salarié, représentant, agent commercial ou dirigeant » interdisait au salarié d'entrer en contact avec les clients et partenaires de la société de sorte qu'elle portait atteinte au libre exercice d'un activité professionnelle et constitué une clause de non-concurrence nulle en l'absence de contrepartie financière, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1121-1 du code du travail ;
2°/ que si un salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts lorsqu'il a été soumis à une clause de non concurrence illicite pour absence de contrepartie financière, c'est à la condition qu'il ait respecté ladite clause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que M. X... avait enfreint la clause prévue à l'article 5. 3 de son contrat de travail et ce, dès le mois de février 2010 ; qu'en jugeant néanmoins que le salarié avait nécessairement subi un préjudice, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1121-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la clause interdisait au salarié, après son départ de la société et pendant une durée de vingt-quatre mois, d'entrer en contact, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit, avec les clients et les partenaires de son employeur, la cour d'appel a décidé à bon droit que cette clause s'analysait en une clause de non-concurrence, laquelle était illicite en l'absence de contrepartie financière, de sorte que sa stipulation dans le contrat de travail causait nécessairement au salarié un préjudice ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Primonial aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Primonial et condamne celle-ci à payer à M. X...la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Primonial
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Monsieur X... produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence, d'AVOIR condamné la société à verser au salarié la somme de 11. 537, 06 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 1153, 70 ¿ brut au titre des congés payés sur préavis, la somme de 29. 688, 29 € bruts à titre d'indemnité de licenciement, la somme de 136. 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR enjoint la société W FINANCE CONSEIL de délivrer au salarié un certificat de travail rectifié et l'attestation pôle emploi avec la mention rupture imputable à l'employeur, et d'AVOIR condamné la société W FINANCE CONSEIL à verser 1. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance.
AUX MOTIFS QUE « sur les effets de la prise d'acte Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Un salarié n'est pas tenu d'accepter de travailler à son domicile, ni d'y installer ses dossiers et ses instruments de travail, ce qui constitue une modification de son contrat de travail nécessitant son accord exprès. En outre, aucun changement des conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé.
En l'espèce, par courriel du 9 juin 2009, l'employeur a confirmé au salarié son rattachement à l'établissement d'Aix-en-Provence à compter du 1er juillet 2009, en raison de la prochaine fermeture de l'agence de Toulon, et lui a annoncé l'envoi d'un « avenant à son contrat de travail pour la mise en place des équipements réservés aux conseillers excentrés », « conformément à (son) souhait, formulé en séance du comité d'entreprise, de devenir excentré ».
Par courrier du 30 juin 2009, l'employeur a transmis au salarié cet avenant prévoyant la mise à disposition des équipements suivants : « un téléphone mobile », « un forfait de téléphonie mobile », « une imprimante multifonctions » et « une carte 3G permettant l'accès aux outils de l'entreprise ».
Le salarié ayant observé, par courrier du 20 juillet 2009, que « pas un mot (n'était dit) concernant (le) changement de (son) lieu de travail », l'employeur lui a précisé, par lettre du 22 juillet 2009, que ses fonctions et missions s'étendaient au territoire national, que sa présence en agence n'était pas requise quotidiennement, que ses déplacements liés aux réunions d'agence seraient pris en charge sous forme d'indemnités kilométriques, qu'il pouvait continuer à travailler normalement avec les moyens dont il disposait déjà et que la mise à disposition de nouveaux équipements de nature à lui apporter un confort supplémentaire était subordonnée au retour de l'avenant dûment signé.
Pendant la suspension de son contrat de travail consécutive à son accident du travail du 1er octobre 2009, le salarié a pris acte de la rupture de ce contrat, par lettre adressée le novembre 2009, aux motifs notamment que l'employeur avait « décrété » qu'après la fermeture de l'agence de Toulon, il deviendrait « salarié excentré », ce qui signifiait, « en bref », qu'il était privé des « conditions matérielles et logistiques » offertes par son ancienne structure et qu'il était contraint de travailler à son domicile.
Dès lors qu'il résulte des éléments de la cause que la fermeture de l'agence de Toulon et l'attribution à Monsieur X...du statut d'excentré ont eu pour effet de priver celui-ci du lieu de travail précédemment fourni par l'employeur et de l'obliger à exercer son activité et à installer ses instruments de travail à son domicile, ce qui constituait une modification de son contrat de travail nécessitant son accord exprès, l'employeur conclut à tort à l'absence de toute modification du contrat de travail et même de tout changement des conditions de travail, au motif inopérant qu'il avait été stipulé au contrat de travail, signé le 1er avril 2005, que le salarié était « libre d'exercer son activité sur tout le territoire et qu'il ne lui (était) affecté aucun secteur géographique ».
L'employeur n'est pas fondé à soutenir par ailleurs que le salarié a fait le choix du statut d'excentré, au motif qu'il résulte du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise en date du 23 janvier 2009, tenue en présence de Monsieur X..., que les conseillers financiers de Toulon, refusant l'offre de création d'un bureau dans un centre d'affaires, faute de pouvoir y disposer des dossiers clients, ont souhaité « opter pour un statut d'excentré ».
En effet, cette simple indication ne saurait valoir accord exprès de Monsieur X...à la modification de son contrat de travail, d'autant qu'il est indiqué au procès-verbal que les salariés concernés par ce statut ont demandé à l'employeur de leur en communiquer'les modalités d'application par écrit'.
En considérant à tort que Monsieur X...avait choisi le statut d'excentré et en le contraignant à exercer son activité et à installer ses instruments de travail à son domicile, l'employeur a commis un manquement d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte par l'intéressé de la rupture de son contrat de travail, laquelle produit dès lors les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le premier jugement déféré qui a statué en ce sens sera confirmé » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la rupture du contrat de travail Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit dans le cas contraire d'une démission ;
Attendu que si le salarié concrétise cette prise d'acte dans un écrit, la dite missive ne fixe pas les limites du litige et qu'il il appartient aux juges du fond d'examiner l'ensemble des manquements dont le salarié viendrait à faire état à l'encontre de son employeur ;
Attendu que la SA W FINANCE CONSEIL arguant de ce que la prise d'acte de monsieur X...produirait les effets d'une démission a conclu au débouté de la demande et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de monsieur X...à lui payer la somme de 11537, 06 euros au titre de dommages et intérêts pour préavis non effectué ;
Attendu qu'après avoir soutenu que toute argumentation relative à la contractualisation du lieu de travail et à la modification du contrat de travail serait inopérante dans la mesure où les conseillers financiers ont vocation à se déplacer sur tout le territoire national et que l'agence à laquelle ils sont rattachés constituerait uniquement un lien administratif la SA W FINANCE CONSEIL a expliqué :
- que la structure de TOULON qui n'avait ni directeur ni secrétaire sur place et qui comprenait deux conseillers financiers dont monsieur X...était déjà sous la hiérarchie du directeur d'AIX EN PROVENCE depuis avril 2005 et qu'un souci d'efficacité commandait de rapprocher les deux structures ;
- que la direction a fait part de son projet de transfert de la structure au comité d'entreprise et qu'après diverses réunions cette dernière avait proposé aux deux conseillers financiers concernés par le transfert de la structure de l'agence de TOULON l'option suivante :
«- soit la mise à disposition d'un bureau à TOULON
-soit le statut d'excentré
-que ce point avait été à nouveau abordé lors de la réunion du CE du 23 JANVIER 2009
- que le procès-verbal de cette réunion indique :
« Ainsi et aux vues de vos réponses concernant les conditions de travail des conseillers de l'agence de TOULON en cas de création d'un bureau, en particulier sur l'absence physique des dossiers clients, les conseillers de TOULON souhaitent opter pour un statut d'excentré dont vous voudrez bien leur communiquer les modalités d'application par écrit, »
- que les membres du CE ayant rendu un avis négatif sur le projet de transfert de la structure de l'agence de TOULON lors d'une réunion du 24 avril 2009, elle avait prenant en considération la décision des élus de devenir excentré décidé de ne plus ouvrir de bureau à TOULON ;
- qu'il aurait été confirmé dans ce contexte à monsieur X...le 9 juin 2009 qu'il serait désormais rattaché à l'agence d'AIX EN PROVENCE ;
- que par avenant au contrat de travail en date du 30 juin 2009 il avait été proposé à monsieur X...de mettre à sa disposition un téléphone portable avec un forfait illimité, une imprimante multi fonction et une carte 3 G permettant une connexion à Internet et que ce dernier avait refusé de signer cet avenant invoquant une modification de son lieu de travail ;
Attendu qu'elle estime ainsi qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir manqué à ses obligations dès lors qu'elle n'aurait fait qu'accéder à la demande du salarié qui avait souhaité être « excentré » et mis à sa disposition les moyens d'accomplir ses missions ;
Attendu qu'il est manifeste que la fermeture de l'agence de Toulon impliquait nécessairement un nouveau contrat de conseiller excentré avec un travail à domicile comportant un équipement informatique et le tenue de dossiers N'impliquait pas seulement pour le salarié un changement de son lieu de travail mais, modifiait l'ensemble de l'organisation contractuelle du travail rendant ainsi l'accord de ce dernier incontournable ;
Attendu qu'il ne saurait être déduit à la lecture du procès-verbal du comité d'entreprise du 23 JANVIER 2009 que monsieur X...avait accepté un statut de conseiller excentré dès lors qu'il avait sollicité que les modalités lui en soient précisées par avenant ce qui n'a pas été le cas en l'espèce l'employeur s'étant contenté de d'adresser à ce dernier un document de mise à disposition de matériel informatique ;
Attendu que la SA W FINANCE CONSEIL ayant manqué gravement à ses obligations contractuelles, en imposant à monsieur X...cette modification d'un élément essentiel de son contrat sans l'accord de ce dernier. La prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur par le salarié le 6 novembre 2009, doit être considérée en conséquence parfaitement justifiée.
Attendu par contre que monsieur X...qui se contente de procéder par voie d'affirmation s'agissant des heures supplémentaires et de droit à la formation et du droit à congé n'établit pas la réalité de faits fautifs imputables à l'employeur lesquels doivent être suffisamment sérieux pour avoir justifié la rupture du contrat.
Attendu que la prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle ouvre donc droit pour le salarié aux indemnités dites de rupture, outre l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse »
1°) ALORS QUE la simple mise en oeuvre du contrat de travail ne requiert pas le consentement du salarié, qu'il soit ou non protégé ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver que le changement de rattachement administratif du salarié constituait simplement la mise en oeuvre de la clause du contrat de travail de Monsieur X... prévoyant que celui-ci pouvait être amené à exercer son activité sur l'ensemble du territoire ; qu'en jugeant que la société W FINANCE CONSEIL ne pouvait pas conclure à l'absence de modification du contrat de travail ou de tout changement des conditions de travail en invoquant la clause contenue dans le contrat de travail du salarié, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, et L. 1221-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer le sens ou la portée des écrits clairs et précis ; qu'en l'espèce, les représentants du personnel avaient expressément indiqué dans le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 janvier 2009 que les salariés concernés par le statut de salarié « excentré », dont Monsieur X..., « souhaitent opter pour un statut d'excentré dont vous voudrez bien leur communiquer les modalités d'application » ; qu'il en résultait que Monsieur X... avait d'ores et déjà donné son accord exprès et sans réserve quant au statut d'excentré ; qu'en affirmant qu'il ne pouvait pas être déduit de cette indication que Monsieur X...avait accepté un statut de conseiller excentré dès lors qu'il avait demandé que les modalités d'application lui en soient communiquées, la Cour d'appel a dénaturé le procès-verbal précité et méconnu le principe selon lequel les juges ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ;
3°) ALORS QU'il résultait du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 janvier 2009 que les salariés concernés par le statut d'« excentré », dont Monsieur X..., avaient demandé à leur employeur de bien vouloir « leur communiquer les modalités d'application par écrit » ; que l'employeur soutenait, offre de preuve à l'appui, qu'il avait satisfait à son obligation en remettant au salarié un « avenant de travail équipements » dont l'objet était de mettre à sa disposition le matériel nécessaire à l'exercice de son activité sous le statut d'excentré et donc de l'informer des modalités d'application de ce statut ; qu'en jugeant que la société W FINANCE CONSEIL n'avait pas remis lesdites modalités d'application par avenant et s'était contentée d'adresser un document de mise à disposition de matériel informatique, sans dire en quoi les éléments fournis par l'employeur n'étaient pas de nature à éclairer suffisamment le salarié sur les modalités d'application du statut d'excentré, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, et L. 1221-1 du Code du travail ;
4°) ALORS en tout état de cause QUE la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Monsieur X... devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel s'est bornée à relever que le l'employeur avait contraint le salarié à exercer son activité et à installer ses instruments de travail à son domicile, i. e avait imposé au salarié un statut de salarié excentré que ce dernier n'avait pas accepté ; qu'en statuant ainsi, sans dire en quoi ce manquement, à le supposer avéré, justifiait la prise d'acte, au regard notamment du fait que si le salarié devait être considéré comme n'ayant pas donné son accord exprès à ce changement de statut, il avait à tout le moins exprimé un souhait en ce sens et en avait été à l'initiative, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société W FINANCE CONSEIL à verser à Monsieur X... la somme de 2. 000 €pour perte du droit individuel à la formation.
AUX MOTIFS QUE « Le salarié étant fondé par ailleurs à réclamer l'indemnisation de la perte de chance d'utiliser ses droits acquis au titre du droit individuel à la formation et l'employeur ne contestant pas qu'il avait acquis 100 heures à ce titre, selon ses écritures de première instance, son préjudice afférent sera réparé par une somme de 2. 000 € et il sera ainsi partiellement fait droit à la demande de ce chef, nouvelle sous cette forme en appel »
ALORS QUE la cassation de l'arrêt à intervenir sur le premier moyen, entraînera, par voie de conséquence, la censure du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à payer une indemnité pour perte du droit individuel à la formation, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'article 5. 3 du contrat de travail de Monsieur X... s'analysait en une clause de non-concurrence, d'AVOIR dit que cette clause était nulle en l'absence de contrepartie financière et en conséquence, d'AVOIR condamné la société W FINANCE CONSEIL à payer à Monsieur X... la somme de 2. 000 € à ce titre et d'AVOIR débouté la société W FINANCE CONSEIL de sa demande indemnitaire sur le fondement de la clause litigieuse ;
AUX MOTIFS QUE « sur la clause litigieuse Il est stipulé à l'article 5. 3 du contrat de travail « (qu') en cas de résiliation de ce contrat, le conseiller en gestion privée s'engage à ne pas reprendre contact, pendant une durée de 24 mois, avec les clients de la Société en vue de leur proposer une formule de placement de quelque nature que ce soit », et « en cas de départ de la Société et pendant une durée de 24 mois (...), à ne pas prendre contact avec les experts comptables du réseau Expertise et Solutions ou un quelconque professionnel avec lequel la Société a conclu un accord de partenariat, soit directement, soit par toute entreprise dans laquelle il aurait directement ou indirectement des intérêts, ou avec laquelle il aurait des relations de collaboration sous quelque forme que ce soit, notamment en qualité de salarié, représentant, agent commercial ou dirigeant ».
Dès lors qu'elle interdit au salarié après son départ de la société d'entrer en contact, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit, avec les clients et partenaires de la société, cette stipulation, qui porte atteinte au libre exercice d'une activité professionnelle, constitue une clause de non-concurrence.
En l'absence de contrepartie financière, cette clause est illicite et le salarié est fondé à en voir prononcer la nullité.
Si la société W FINANCE CONSEIL prouve que Monsieur X... a enfreint cette clause dès le mois de février 2010, le préjudice qui a nécessairement été subi par l'intéressé de ce chef sera réparé par une somme de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts.
Le jugement sera infirmé de ce chef ».
1°) ALORS QUE la clause selon laquelle le salarié est tenu de ne pas reprendre contact avec la clientèle et les partenaires de son employeur, i. e ne pas adopter une démarche active de sollicitation, n'est pas une clause de non-concurrence ; qu'en l'espèce, en jugeant que la clause, qui laissait pourtant au salarié, toute liberté de rentrer au service d'une entreprise concurrente ou de créer lui-même sa propre société, selon laquelle « En cas de résiliation du contrat, le Conseiller en Gestion Privée s'engage à » « ne pas prendre contact, pendant une durée de 24 mois, avec les clients de la Société en vue de leur proposer une formule de placement de quelque nature que ce soit. En cas de départ de la société et pendant une durée de 24 mois, le Conseiller s'engage à ne pas prendre contact avec les experts comptables du réseau Expertise et Solutions ou un quelconque professionnel avec lequel la Société a conclu un accord de partenariat, soit directement, soit par toute entreprise dans laquelle il aurait directement ou indirectement des intérêts, ou avec laquelle il aurait des relations de collaboration sous quelque forme que ce soit, notamment en qualité de salarié, représentant, agent commercial ou dirigeant » interdisait au salarié d'entrer en contact avec les clients et partenaires de la société de sorte qu'elle portait atteinte au libre exercice d'un activité professionnelle et constitué une clause de non-concurrence nulle en l'absence de contrepartie financière, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1121-1 du Code du travail ;
2°) ALORS subsidiairement QUE si un salarié est fondé à solliciter des dommages et intérêts lorsqu'il a été soumis à une clause de non concurrence illicite pour absence de contrepartie financière, c'est à la condition qu'il ait respecté ladite clause ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément constaté que Monsieur X... avait enfreint la clause prévue à l'article 5. 3 de son contrat de travail et ce, dès le mois de février 2010 (arrêt p. 6 § 5) ; qu'en jugeant néanmoins que le salarié avait nécessairement subi un préjudice, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1121-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-20387
Date de la décision : 20/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2014, pourvoi n°13-20387


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.20387
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