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19/11/2014 | FRANCE | N°13-10415

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 novembre 2014, 13-10415


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Paris, 12 novembre 2012), que le comité de l'établissement du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom de la société Electricité de France (EDF) a, par délibération du 12 avril 2011, missionné le cabinet d'expertise-comptable 3E consultants afin de l'assister dans le cadre de l'examen annuel des comptes de l'année 2010 ; que ce dernier a réclamé à l'employeur un certain nombre de documents et a saisi le juge

des référés pour faire constater la carence de la société EDF et qu'il lui s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Paris, 12 novembre 2012), que le comité de l'établissement du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom de la société Electricité de France (EDF) a, par délibération du 12 avril 2011, missionné le cabinet d'expertise-comptable 3E consultants afin de l'assister dans le cadre de l'examen annuel des comptes de l'année 2010 ; que ce dernier a réclamé à l'employeur un certain nombre de documents et a saisi le juge des référés pour faire constater la carence de la société EDF et qu'il lui soit ordonné de produire les documents demandés ;
Attendu que la société EDF fait grief à l'arrêt de la condamner à remettre à l'expert-comptable désigné par le comité d'établissement les documents et éléments réclamés par lui, alors, selon le moyen :
1°/ que les comités d'établissement ayant les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements, les comités des établissements qui ne disposent pas de comptes propres ne peuvent se faire communiquer les comptes de l'entreprise les concernant ; qu'en retenant que rien n'autorise l'employeur à refuser la communication des documents comptables au niveau de l'entreprise dès lors que le chef d'établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'absence de comptes propres à l'établissement n'excluait pas que la mission de l'expert-comptable puisse porter sur les comptes, fussent-ils issus de la comptabilité de l'entreprise, comme sur la situation de cet établissement, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 2327-15 du code du travail, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
2°/ subsidiairement, que l'expert-comptable choisi par le comité d'établissement pour se faire assister en vue de l'examen annuel des comptes de l'entreprise, en application des articles L. 2323-8 alinéa 1er, L. 2325-35 et L. 2327-15 du code du travail, ne peut exiger de l'entreprise la production de documents qui n'existent pas et dont l'établissement n'est pas obligatoire pour l'entreprise ; qu'en retenant que rien n'autorisait le refus de la société EDF de communiquer à l'expert-comptable choisi par le comité d'établissement du CNPE de Cattenom les documents se rapportant aux comptes de la société EDF, pour en déduire qu'un tel refus constituait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme cela lui était demandé, si les documents demandés existaient ou s'ils devaient légalement être établis par la société EDF, a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard des articles précités, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en statuant de la sorte, sans répondre aux conclusions la société EDF qui faisait valoir que les documents demandés par l'expert-comptable du comité d'établissement du CNPE de Cattenom n'existaient pas et qu'il ne pesait sur elle aucune obligation légale d'établissement des documents demandés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
4°/ que la mission de l'expert-comptable, choisi par le comité d'établissement, porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de ce seul établissement ; qu'en retenant que rien n'autorisait le refus de la société EDF de communiquer à l'expert-comptable choisi par le comité d'établissement du CNPE de Cattenom les documents se rapportant aux comptes de la société EDF, pour en déduire qu'un tel refus constituait un trouble manifestement illicite, sans rechercher, comme il le lui était demandé par la société EDF, si les documents réclamés entraient dans le cadre de sa mission légale, tirée de la double nécessité de compréhension des comptes et d'appréciation de la situation de l'établissement concerné, en l'absence de comptes établis au niveau de l'établissement et de tout document comptable spécifique à l'établissement, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 2325-36 du code du travail, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'aux termes de l'article L. 2327-15 du code du travail, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement ; que la mise en place d'un tel comité suppose que ce chef d'établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement ;
Attendu, ensuite, qu'en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail, le droit du comité central d' entreprise d'être assisté pour l'examen annuel des comptes de l'entreprise dans les conditions prévues par l'article L. 2323-8 du code du travail, ne prive pas le comité d'établissement du droit d'être assisté par un expert-comptable chargé de lui fournir tous éléments d'ordre économique, social et financier nécessaires à la compréhension des documents comptables de l'établissement, peu important que la comptabilité soit établie au niveau de l'entreprise et que les comptes spécifiques à l'établissement n'y aient pas été différenciés ;
D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société EDF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au comité d'établissement du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom et au Cabinet d'expertise-comptable 3E consultants la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour la société Electricité de France
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté l'existence d'un trouble manifestement illicite, d'avoir condamné la société EDF à fournir les renseignements et documents demandés par le Cabinet 3 E Consultants, en annexe de sa lettre de mission du 7 juillet 2011, fussent-ils établis au seul niveau de l'entreprise et ce, sous astreinte de 50 euros par renseignement ou document omis et par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt, et d'avoir condamné la société EDF à payer la somme de 1.500 euros tant au Cabinet 3 E Consultants qu'au comité d'établissement du CNPE de Cattenom en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Aux motifs qu'en application des articles L.2325 et L.2325-36 du Code du travail, le droit du comité central d'entreprise d'être assisté d'un expert pour l'examen annuel des comptes de l'entreprise dans les conditions prévues à l'article L.2323-8 du même Code, ne prive pas, en vertu de l'article L.2327-15 du Code du travail, le comité d'établissement du même droit, dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs d'établissements, de sorte qu'un comité d'établissement peut se faire assister d'un expert-comptable ; que l'article L.2325-36 du Code du travail précise que la mission de l'expert-comptable porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ; qu'il en est de même de l'établissement ; qu'en l'espèce, force est de constater qu'EDF n'a pas judiciairement contesté la délibération par laquelle le comité d'établissement du CNPE de Cattenom a décidé de recourir à l'expertise ; que dès lors ; en l'absence d'une telle contestation, il appartient au seul expert, désigné sur le fondement de l'article L.2325-35 du Code du travail, en vue de l'examen annuel des comptes, d'apprécier les éléments utiles à sa mission ; que rien n'autorise le refus d'EDF de communiquer à l'expert les documents se rapportant aux comptes de la société EDF, fussent-ils établis au niveau de l'entreprise, alors même que le chef d'établissement du CNPE de Cattenom dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement et doit pouvoir apprécier la situation de son établissement par rapport à celle de l'entreprise ; qu'un tel refus constitue un trouble manifestement illicite ; que, dès lors, il convient, infirmant l'ordonnance dont appel, de condamner la société EDF à fournir les éléments d'ordre économique, social et financier, nécessaires à la compréhension de la situation de l'établissement du CNPE de Cattenom, tels que demandés par l'expert et dont la liste est visée dans sa lettre de mission du 7 juillet 2011, précision faite que si les documents requis n'existent pas au niveau de l'établissement, il conviendra de transmettre ceux établis au niveau l'entreprise ;
Alors, de première part, que les comités d'établissement ayant les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements, les comités des établissements qui ne disposent pas de comptes propres ne peuvent se faire communiquer les comptes de l'entreprise les concernant ; qu'en retenant que rien n'autorise l'employeur à refuser la communication des documents comptables au niveau de l'entreprise dès lors que le chef d'établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions de la société EDF p. 7 à 11 et 25 à 33), si l'absence de comptes propres à l'établissement n'excluait pas que la mission de l'expert-comptable puisse porter sur les comptes, fussent-ils issus de la comptabilité de l'entreprise, comme sur la situation de cet établissement, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L.2327-15 du Code du travail, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile ;
Alors, subsidiairement, en outre, que l'expert-comptable choisi par le comité d'établissement pour se faire assister en vue de l'examen annuel des comptes de l'entreprise, en application des articles des articles L.2323-8 alinéa 1er, L.2325-35 et L.2327-15 du Code du travail, ne peut exiger de l'entreprise la production de documents qui n'existent pas et dont l'établissement n'est pas obligatoire pour l'entreprise ; qu'en retenant que rien n'autorisait le refus de la société EDF de communiquer à l'expert-comptable choisi par le comité d'établissement du CNPE de Cattenom les documents se rapportant aux comptes de la société EDF, pour en déduire qu'un tel refus constituait un trouble manifestement illicite, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme cela lui était demandé (conclusions de la société EDF p. 32 et 33), si les documents demandés existaient ou s'ils devaient légalement être établis par la société EDF, a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard des articles précités, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile ;
Alors, encore, qu'en statuant de la sorte, sans répondre aux conclusions la société EDF qui faisait valoir que les documents demandés par l'expert-comptable du comité d'établissement du CNPE de Cattenom n'existaient pas (conclusions de la société EDF p. 32) et qu'il ne pesait sur elle aucune obligation légale d'établissement des documents demandés (conclusions de la société EDF p. 32 et 33), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ensemble l'article 809 du Code de procédure civile ;
Alors, enfin, que la mission de l'expert-comptable, choisi par le comité d'établissement, porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de ce seul établissement ; qu'en retenant que rien n'autorisait le refus de la société EDF de communiquer à l'expertcomptable choisi par le comité d'établissement du CNPE de Cattenom les documents se rapportant aux comptes de la société EDF, pour en déduire qu'un tel refus constituait un trouble manifestement illicite, sans rechercher, comme il le lui était demandé par la société EDF (conclusions de la société EDF p. 26 à 28), si les documents réclamés entraient dans le cadre de sa mission légale, tirée de la double nécessité de compréhension des comptes et d'appréciation de la situation de l'établissement concerné, en l'absence de comptes établis au niveau de l'établissement et de tout document comptable spécifique à l'établissement, la Cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article L.2325-36 du Code du travail, ensemble l'article 809 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-10415
Date de la décision : 19/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 nov. 2014, pourvoi n°13-10415


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10415
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