LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société La Coque de nacre,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 28 février 2013, qui, infirmant, sur le seul appel de la partie civile, l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, l'a renvoyée devant le tribunal correctionnel sous la prévention de contrefaçons ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 octobre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER, les observations de Me BERTRAND, de la société civile professionnelle ROGER, SEVAUX et MATHONNET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général RAYSSÉGUIER ;
Vu les mémoires produits en demande, en défense et en réplique ;
Vu l'article 574 du code de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 511-2, L. 511-3, L. 513-4, L. 513-5, L. 521-10 du code de la propriété intellectuelle, 4, 5, 6, 10 du règlement CE n° 6/2002 du 12 décembre 2001, 574, 591, 592 et 593 du code de procédure pénale, arrêt manquant en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé la société La Coque de nacre devant le tribunal correctionnel pour contrefaçon des modèles déposés par la société Cartier création studio,
" aux motifs que, s'agissant de l'atteinte portée aux dessins et modèles enregistrés aux bénéfice de Cartier création studio, le caractère contrefaisant des bagues doit s'apprécier au regard des articles L. 513-5 du CPI et 9.1 du règlement sur les dessins communautaires, qui autorisent le propriétaire du modèle enregistré à s'opposer à toute commercialisation d'un objet qui produirait une impression d'ensemble identique ; qu'il n'est pas contesté que la société SA Cartier création studio est titulaire de 3 modèles et dessins, modèle international n° 063.200 déposé en mars 2003 et renouvelé le 20 mars 2008, modèles communautaires n° 000398565-0015, déposé le 09 septembre 2005 et n° 00063562-0006 déposé le 2 février 2007, que cette société avait pour mission outre de fabriquer, de commercialiser, de coordonner l'activité de création et de développement des produits Cartier et notamment des produits de joaillerie et d'horlogerie (D 2/2) ; que le concept du dessin ou modèle n'est pas défini par la loi, mais qu'il l'est communément par la notion de toute disposition de trait ou couleur représentant des images ayant un sens déterminé, tandis que le modèle est toute forme plastique, toute maquette, toute oeuvre de sculpture ou d'ornement notamment, et que leur protection est assurée par les dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, par référence à l'apparence d'un produit ou de partie d'un produit caractérisé par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou de ses matériaux ; qu'en l'espèce, les dessin et modèle concernant la bague, objet à caractère ornemental et esthétique, ont été admis à bénéficier d'une protection juridique par l'INPI ; qu'il n'appartient pas à la juridiction pénale de remettre en cause cette protection, et qu'il est admis par la doctrine qu'un dessin ou modèle peut s'inspirer d'éléments du domaine public, un motif ou une figure connus, mais transposés dans un domaine nouveau, sont protégeables ; que les bijoux saisis en douanes, soit les 11 458 bagues, sont une reproduction quasi servile des dessins ou modèles déposés, à savoir un anneau à la ligne épurée, une tête de vis au centre de l'anneau, que les mêmes proportions sont respectées entre la taille des vis et celle de l'anneau, que les vis décoratives présentent une fente unique, qu'elles font corps avec l'anneau ; que les services douaniers ont identifié sept modèles différents, reproduisant un ou des modèles communautaires, ou à la fois un modèle communautaire et International protégés ; qu'en l'effet à l'oeil nu pour un observateur averti, les pièces saisies reproduisent les caractéristiques essentielles des modèles protégés, que la ressemblance d'ensemble n'est pas contestable, par le style, le dessin de l'anneau, le positionnement sur le bijou de l'élément décoratif que constitue la tête de vis, que de cette observation, même attentive, résulte une possibilité de confusion avec un bijou, un anneau Cartier, le métal, l'utilisation, le prix de vente, le marché, étant des signes distinctifs appréciables ou appréciés dans un second temps, et pouvant être dissociés des caractéristiques initialement considérées et suffisantes pour que la contrefaçon soit constituée ; qu'il n'a pas été contesté par le représentant légal, que la société La Coque de nacre était le dessinateur, le fabricant, l'exportateur, le réimportateur des produits saisis en douanes le 17 juin 2008, et ce aux fins de commercialisation sur le marché français pour le moins de ces bagues, dans la catégorie « des bijoux fantaisie », tous actes expressément énumérés à l'article L. 513-4 du code de la propriété intellectuelle ; que la société La Coque de nacre a été à la fois le dessinateur créateur, le fabricant, l'importateur et le revendeur des produits contestés, que ces trois qualités réunies laissent présumer l'élément intentionnel de l'infraction de contrefaçon à son égard ; que ces agissements ont été reconnus par M. X..., le dirigeant de La Coque de nacre dans son audition du 10 novembre 2009 (D 38), au cours de laquelle il a indiqué : - que ses salariés dessinaient leurs produits en France et que les dessins étaient envoyés en Asie aux fins de fabrication, ce qui constitue les infractions prévues par les articles L. 716-9 b) et c) du code de la propriété intellectuelle (D38/3-4) ; que ces déclarations révèlent ainsi que La Coque de nacre ne se contentait pas d'importer les bijoux portant la marque litigieuse mais les faisait fabriquer, - que les produits étaient ensuite « rapatriés » en Europe (D38/3) ; - que les produits étaient destinés à être vendus (D 38-3 et D 56-2) ; que dès lors il existe des charges suffisantes à l'encontre de la société La Coque de nacre d'avoir commis le délit de contrefaçon de dessins et modèles ; qu'en conséquence, le délit de contrefaçon des trois dessins et modèles, modèle International n° 063.200 déposé en mars 2003 et renouvelé le 20 mars 2008, modèle communautaire n° 00398565-0015, déposé le 09 septembre 2005 et n° 00063562-0006 8 déposé le 2 février 2007 est constitué à l'encontre de la La Coque de nacre, qu'il convient d'infirmer l'ordonnance de non lieu de ce chef et de renvoyer la personne morale mise en examen devant le tribunal correctionnel pour y répondre de ce délit ;
"1°) alors que la nullité des dessins ou modèles peut être invoquée par le prévenu par voie d'exception en défense à l'action en contrefaçon exercée devant le juge répressif ; qu'appelée à décider s'il y a lieu à renvoi sur les poursuites exercées pour contrefaçon de modèle, il appartient à la juridiction d'instruction, devant laquelle la nullité des modèles est invoquée par voie d'exception, de se prononcer sur cette nullité ; qu'en refusant d'examiner le moyen de nullité, pour défaut de caractère propre, de chacun des trois modèles opposés à la société La Coque de nacre pour la raison erronée qu'il ne lui appartenait pas de remettre en cause la protection qui leur a été reconnue par l'INPI, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs et omis de répondre aux articulations essentielles du mémoire qui lui était soumis en violation des textes visés au moyen ;
"2°) alors qu'en se fondant tout à la fois, pour décider qu'il existait des charges suffisantes de contrefaçon des trois modèles, sur l'existence d'une contrefaçon par incorporation, tenant à une reproduction des modèles déposés, et sur le fait que les modèles procuraient une impression d'ensemble non différente, même pour un observateur ou un utilisateur averti, ce qui supposait qu'il existait des différences entre les modèles, la chambre de l'instruction a statué par des motifs contradictoires qui privent sa décision de motifs et ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, en violation des textes visés au moyen ;
"3°) alors qu'en affirmant qu'il existait des charges suffisantes de commission du délit de contrefaçon de modèles sans préciser, article par article, les caractéristiques des bijoux saisis en douanes, correspondant à sept modèles distincts dont la société La Coque de nacre faisait valoir dans son mémoire qu'elles différaient sur des points essentiels (positionnement de la vis, proportions, disposition des éléments décoratifs) de celles des trois modèles invoqués, ni procédé à une comparaison entre ces caractéristiques et celles des modèles invoqués, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motifs et n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, en violation des textes visés au moyen ;
"4°) alors qu'il résulte des dispositions des articles 81 et 114 du code de procédure pénale que les juridictions d'instruction ne peuvent statuer qu'au vu des pièces figurant régulièrement au dossier de la procédure ; qu'en matière de contrefaçon de dessins ou modèles, les pièces originales arguées de contrefaçon doivent nécessairement figurer au dossier de la procédure ; qu'en énonçant "qu'à l'oeil nu, pour un observateur averti, les pièces saisies reproduisent les caractéristiques essentielles des modèles protégés", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société demanderesse devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de modèles, quand il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces saisies, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs en violation des textes visés au moyen, ensemble de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"5°) alors qu'en toutes matières, tant au stade de l'instruction que du jugement, le juge ne peut se déterminer qu'au regard des éléments de preuve régulièrement soumis au débat contradictoire ; qu'en énonçant "qu'à l'oeil nu, pour un observateur averti, les pièces saisies reproduisent les caractéristiques essentielles des modèles protégés", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société exposante devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de modèles, quand il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces saisies, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, de sorte qu'elles n'ont pas été soumises à un débat contradictoire, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs en violation de l'article 427 du code de procédure pénale, ensemble de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"6°) alors et subsidiairement, qu'en énonçant "qu'à l'oeil nu, pour un observateur averti, les pièces saisies reproduisent les caractéristiques essentielles des modèles protégés", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société exposante devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de modèles, sans indiquer l'origine de ces constatations de fait, d'où il résulterait que les juges ont pu examiner « à l'oeil nu » les pièces saisies, et alors qu'il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces litigieuses, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs et violé les textes visés au moyen ;
"7°) alors que le délit de contrefaçon de modèle, délit intentionnel, n'est constitué qu'à condition qu'une atteinte ait été portée sciemment aux droits sur les modèles déposés ; que la société La Coque de nacre faisait valoir dans son mémoire devant la chambre de l'instruction qu'elle n'avait pas voulu porter atteinte à des droits dont la société Cartier aurait été titulaire sur ces modèles mais simplement utiliser, comme de nombreux autres bijoutiers, un motif décoratif (la tête de vis) très largement répandu pour s'inscrire dans un courant de la mode masculine ; qu'en se bornant à énoncer, au prix d'un renversement de la charge de la preuve et d'une confusion entre l'imputabilité et la constitution du délit, que la société La Coque de nacre avait été "à la fois le dessinateur, le créateur, le fabricant, l'importateur et le revendeur des produits contestés" et que "ces trois qualités réunies laissaient présumer l'élément intentionnel de l'infraction de contrefaçon", la chambre de l'instruction a statué par des motifs qui ne répondent pas aux articulations essentielles du mémoire qui lui était soumis, qui sont insuffisantes à caractériser l'élément moral de l'infraction et qui ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, en violation des textes visés au moyen" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 712-1, L. 713-2, L. 713-3, L. 716-9 et L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle, 202, 574, 591, 592 et 593 du code de procédure pénale, arrêt manquant en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé la société La Coque de nacre devant le tribunal correctionnel pour contrefaçon de la marque "tête de vis" dont la société Cartier international est titulaire ;
" aux motifs que, s'il est exact, comme l'a soutenu le représentant légal de La Coque de nacre que celle-ci n'a pas commercialisé ces bijoux sous la marque Cartier ou Love, mais sous sa propre marque, il a cependant pu être constaté que les produits portaient bien un signe contrefait de la marque de la société Cartier International, au sens de l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle et des textes susvisés, ces anneaux créant une impression d'ensemble similaire aux dessins et modèles protégés ; que la maison Cartier rappelle qu'elle commercialise depuis plusieurs décennies des bijoux comportant un motif gravé de tête de vis et notamment depuis 1970, que l'exploitation de la gamme Love s'est intensifiée dans le monde entier depuis 2000, qu'il s'agit d'une exploitation continue et durable du motif « vis », enregistré sous plusieurs marques, et notamment le 19 mai 2006 sous le n° 892848 et notamment pour la France, qu'à ces fins Cartier création studio a déposé de nombreux dessins et modèles pour protéger le motif « tête de vis » ; que cette commercialisation durable et continue sur le marché a fait reconnaître la marque Cartier à partir de ce signe distinctif ; que des signes distinctifs de la marque Love, et précisément la « tête de vis » a été utilisé avec et dans le logo de Love, que cette tête de vis est un signe distinctif à l'identique de celui visé lors de l'enregistrement de la marque sur des produits à visée identique « bagues), que cet élément suffit à caractériser le caractère contrefaisant (article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle), la démonstration d'un risque de confusion résultant de ces constatations, sans qu'il soit nécessaire que la marque Cartier ou Love figure expressément sur le bijou en question ; que dès lors que les éléments constitutifs de la contrefaçon de marque sont rassemblés : la société La Coque de nacre ayant reconnu la conception, la fabrication, l'importation, la détention des modèles de bagues saisies par les douanes le 18 juin 2008, elle est l'auteur des actes de contrefaçon de marque visés aux articles L. 716-9 et L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle ; que dès lors il existe des charges suffisantes à l'encontre de la société La Coque de nacre d'avoir commis le délit de contrefaçon de marque ; qu'en conséquence l'ordonnance de non lieur doit être également infirmée de ce chef d'infraction, et qu'il y a lieu de renvoyer la société Coque de nacre devant le tribunal correctionnel de Paris pour y répondre de ce second chef d'infraction ;
"1°) alors que la plainte avec constitution de partie civile, définissant les termes de la prévention, portait sur la contrefaçon de deux marques distinctes ¿ la marque française semi-figurative Love, n° 07 3505 018 déposée le 6 juin 2007, constituée des lettres L, O, V et E, la société Cartier voyant dans le O coupé en deux par un trait horizontal la forme d'une vis, et la marque Internationale figurative n° 892 848 déposée le 19 mai 2006 constituée par le dessin plan d'une tête de vis inclinée à une fente ; que la chambre de l'instruction ne pouvait ordonner le renvoi pour contrefaçon de "la marque tête de vis", sans donner aucune précision permettant de déterminer laquelle des deux marques comportant la représentation d'une "tête de vis" constituait le fondement du renvoi ; qu'en laissant incertains les termes du renvoi qu'elle a prononcé, la chambre de l'instruction n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que le renvoi était prononcé pour des faits compris dans la prévention, violant ainsi les textes visés au moyen ;
"2°) alors qu'au sens des articles L. 713-2 et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, la reproduction de la marque s'entend d'une reproduction pure et simple sans retranchement ni ajout, contrairement à l'imitation qui suppose simplement qu'il existe un risque de confusion ; qu'en énonçant que la reprise de la "tête de vis" suffisait à "caractériser le caractère contrefaisant (article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle), la démonstration d'un risque de confusion résultant de ces constatations", la chambre de l'instruction a statué par des motifs contradictoires et insuffisants à déterminer si l'existence de charges suffisantes de la commission du délit de contrefaçon était retenue à raison de la reproduction ou à raison de l'imitation de la marque, en violation des textes visés au moyen ;
"3°) alors qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le fait que, en l'absence de toute reprise du mot Love dans le signe critiqué, la marque semi-figurative Love n° 07 3505 018 n'avait pas été reproduite et en ne relevant aucun motif propre à établir l'existence d'un risque de confusion entre cette marque et le signe critiqué, ce risque devant être apprécié à partir d'une comparaison d'ensemble entre les signes en présence, en tenant compte de tous les éléments pertinents, la chambre de l'instruction, qui a déduit l'existence d'un risque de confusion de la reproduction prétendue de la marque, a statué par des motifs insuffisants et impropres à permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, violant ainsi les textes visés au moyen ;
"4°) alors qu'en laissant sans réponse les articulations essentielles du mémoire dans lequel la société La Coque de nacre concluait à l'absence de toute reproduction de la marque figurative n° 892 848 en raison des caractéristiques différentes de la marque et du signe critiqué tenant au caractère plan ou en trois dimensions du motif et à son inclinaison et concluait à l'absence de toute imitation de la marque, les différences d'aspect des motifs en présence, de distribution et de commercialisation des produits étant exclusives de tout risque de confusion aux yeux d'un consommateur d'attention moyenne, la chambre de l'instruction a statué par des motifs insuffisants et impropres à permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, violant ainsi les textes visés au moyen ;
"5°) alors que la contrefaçon de marque suppose qu'il soit fait un usage du signe incriminé à titre de marque, c'est-à-dire pour distinguer des produits aux yeux des consommateurs et qu'un usage à titre exclusivement décoratif n'est pas constitutif de contrefaçon ; qu'en laissant sans réponse les articulations du mémoire dans lequel la société La Coque de nacre faisait valoir que la présence des vis sur ses bijoux, comme sur les bijoux de nombreux intervenants sur le marché, avait un caractère exclusivement décoratif et était perçue comme telle par la clientèle et qu'il n'était donc porté aucune atteinte à la fonction d'identification d'origine de la marque, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motifs, la Cour de cassation n'étant pas en mesure d'exercer son contrôle, en violation des textes visés au moyen ;
"6°) alors qu'il résulte des dispositions des articles 81 et 114 du code de procédure pénale que les juridictions d'instruction ne peuvent statuer qu'au vu des pièces figurant régulièrement au dossier de la procédure ; qu'en matière de contrefaçon de marque, les pièces originales arguées de contrefaçon doivent nécessairement figurer au dossier de la procédure ; qu'en énonçant "qu'il a pu être constaté que les produits portaient bien un signe contrefait de la marque de la société Cartier international¿", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société exposante devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de marque, quand il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces saisies, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs en violation des textes susvisés, ensemble de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"7°) alors qu'en toutes matières, tant au stade de l'instruction que du jugement, le juge ne peut se déterminer qu'au regard des éléments de preuve régulièrement soumis au débat contradictoire ; qu'en énonçant "qu'il a pu être constaté que les produits portaient bien un signe contrefait de la marque de la société Cartier international¿", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société demanderesse devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de marque, quand il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces saisies, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, de sorte qu'elles n'ont pu être soumises au débat contradictoire, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs en violation de l'article 427 du code de procédure pénale, ensemble de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"8°) alors et subsidiairement, qu'en énonçant "qu'il a pu être constaté que les produits portaient bien un signe contrefait de la marque de la société Cartier International¿", pour en déduire qu'il convenait de renvoyer la société demanderesse devant la juridiction correctionnelle du chef de contrefaçon de marque, sans indiquer l'origine de ces constatations de fait, d'où il résulterait que les juges ont pu examiner « à l'oeil nu » les pièces saisies, et alors qu'il ne résulte pas de la consultation du dossier de l'information que les pièces litigieuses, arguées de contrefaçon, aient fait l'objet de scellés, ni qu'elles aient été versées au dossier de la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs et violé les textes visés au moyen ;
"9°) alors que le délit de contrefaçon de marque, incriminé par les articles L. 716-9 et L. 716-10 du code de la propriété Intellectuelle, constitue un délit intentionnel ; qu'en laissant sans réponse les articulations du mémoire dans lequel la société La Coque de nacre faisait valoir qu'elle n'avait pas voulu porter atteinte aux droits dont la société Cartier se prétendait titulaire sur ces marques mais qu'elle s'était bornée à utiliser, comme de nombreux autres bijoutiers, le motif de vis afin de se placer dans un courant de mode, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motifs, la Cour de cassation n'étant pas en mesure d'exercer son contrôle, en violation des textes visés au moyen ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les moyens se bornent à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre la prévenue ; que, ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la poursuite n'aurait pas le pouvoir de modifier, les moyens sont irrecevables en application de l'article 574 du code de procédure pénale ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit novembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;