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18/11/2014 | FRANCE | N°13-23182

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 novembre 2014, 13-23182


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mai 2013), que le 19 février 2004 M. et Mme X... ont acquis un fonds de commerce pour un prix partiellement financé au moyen d'un prêt consenti par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France (la caisse) ; que M. X... ayant été mis en liquidation judiciaire, la caisse a assigné en remboursement du solde du prêt Mme X..., laquelle, lui reprochant d'avoir manqué à son obligation de

mise en garde, a formé une demande reconventionnelle en paiement de do...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mai 2013), que le 19 février 2004 M. et Mme X... ont acquis un fonds de commerce pour un prix partiellement financé au moyen d'un prêt consenti par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France (la caisse) ; que M. X... ayant été mis en liquidation judiciaire, la caisse a assigné en remboursement du solde du prêt Mme X..., laquelle, lui reprochant d'avoir manqué à son obligation de mise en garde, a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter son action en responsabilité alors, selon le moyen, qu'à l'égard d'un emprunteur non averti, la banque a une obligation de mise en garde et doit justifier avoir satisfait à cette obligation au regard des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'en cas de coemprunteurs, la banque doit apprécier les capacités financières de chacun d'eux ; qu'en n'ayant pas tenu compte des seuls revenus de Mme X... d'un montant annuel de 12 000 euros pour une charge annuelle de remboursement du prêt de 15 848,24 euros, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que M. et Mme X... avaient souscrit le prêt litigieux ensemble et par le même acte, en vue d'un projet commun d'entreprise, la cour d'appel en a exactement déduit que le caractère adapté du prêt devait s'apprécier au regard non des capacités financières de chacun des époux mais de celles, globales, du couple qu'ils forment ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les autres griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X..., co-emprunteur avec son mari d'un prêt consenti par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France pour l'acquisition d'un fonds de commerce de restaurant exploité par M. X..., de son action en responsabilité contre le crédit agricole,
Aux motifs des premiers juges que Mme X... n'avait aucune expérience professionnelle, ni dans le domaine de la restauration, ni dans celui de la gestion d'entreprise ; qu'elle était ainsi un emprunteur non averti ; que ses capacités financières et le risque d'endettement ne doivent pas être analysées au seul regard de ses revenus salariaux d'un montant annuel de 12 000 euros lors de l'octroi du prêt ; que l'objet du prêt était l'acquisition, le 19 février 2004, au prix de 110 000 euros d'un fonds de commerce alors que les vendeurs en avaient fait l'acquisition, le 3 août 1993, au prix de 106 714,31 euros ; que l'ancienneté du fonds de commerce démontre qu'il était viable et sa valeur était supérieure au montant du prêt ; que, d'après le dossier de demande de prêt, constitué par les emprunteurs, l'exploitation du fonds de commerce devait dégager un chiffre d'affaires annuel de 137 253 euros, alors que la charge annuelle du prêt s'élevait à 15 846,24 euros et la masse salariale à 33 892 euros ; qu'il n'est donc pas établi que l'octroi du prêt créait un risque d'endettement excessif contre lequel la banque aurait dû mettre en garde Mme X...,
Et aux motifs qu'il n'est pas contestable que Mme X..., qui est agent de service dans un service d'autodyalise, est un emprunteur non averti ; que M. et Mme X... ont fait établir une étude sur leur projet d'acquisition du fonds de commerce pour obtenir le prêt ; qu'il en résulte que Mme X... travaille trois jours par semaine dans le service d'autodyalise, que le fonds de commerce est exploité depuis dix ans par les vendeurs, que le projet est de réduire les charges salariales par la participation de Mme X... à l'exploitation trois jours par semaine ; que l'acte de vente indique un chiffre d'affaires de 105 193 euros en 2001, 112 936 euros en 2002 et 92 972 euros en 2003 et un bénéfice de 10 359 euros en 2000, de 3 118 euros en 2001 et de 10 331 euros en 2003 ; que l'exploitation du fonds pendant dix ans avant son acquisition démontre qu'il était et reste viable, compte tenu du projet de réduction des charges ; que le bilan des exercices 2004 et 2005 démontre que les rémunérations du personnel et les charges d'exploitation ont doublé, augmentation sans commune mesure avec le prévisionnel établi ; qu'ainsi, la cause des difficultés de l'exploitation du fonds ne tient pas à la charge du prêt, mais aux charges salariales qui n'ont pas été réduites comme prévu ; qu'à juste titre, le premier juge n'a pas tenu compte des seuls revenus de Mme X... dans le prêt en cause qui porte sur un projet commun aux deux époux, copropriétaires d'un fonds de commerce acquis en commun, bien qu'exploité par l'époux seul, mais avec la participation de son épouse qui devait y venir trois jours par semaine,
Alors que 1°), à l'égard d'un emprunteur non averti, la banque a une obligation de mise en garde et doit justifier avoir satisfait à cette obligation au regard des capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; qu'en cas de co-emprunteurs, la banque doit apprécier les capacités financières de chacun d'eux ; qu'en n'ayant pas tenu compte des seuls revenus de Mme X... d'un montant annuel de 12 000 euros pour une charge annuelle de remboursement du prêt de 15 848,24 euros, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil,
Alors que 2°) il appartient à la banque de vérifier par elle-même les capacités financières de remboursement de l'emprunteur et qu'elle n'est pas dispensée de son obligation de mise en garde par la présence aux côtés de l'emprunteur d'une personne avertie ; qu'en s'étant fondée, pour dispenser le Crédit Agricole de son obligation de mise en garde, sur les indications relatives aux capacités financières de Mme X... contenues dans l'étude d'un tiers qui lui avait été présentée pour obtenir le prêt, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil,
Alors 3°) qu'il ne peut être inféré des résultats d'exploitation du cédant d'un fonds de commerce la capacité financière du cessionnaire à faire face aux charges du prêt ; qu'en ayant retenu, pour dispenser le crédit agricole de son obligation de mise en garde à l'égard de Mme X..., que le fonds de commerce pour l'acquisition duquel le prêt avait été contracté était viable parce que les cédants l'avaient exploité pendant dix ans, au vu de résultats (chiffre d'affaires, bénéfices et prix de vente) d'ailleurs en chute, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil,
Alors que 4°) la cour d'appel qui a constaté que le bénéfice du fonds de commerce réalisé par les cédants en 2001 et 2002 au cours des deux dernières années précédant la cession n'était que de 3 118 et 10 331 euros et que les charges annuelles que n'avaient pas les cédants, du prêt contracté par Mme X... s'élevaient à 15 846,24 euros, ce dont il résultait un risque manifeste d'endettement né de l'octroi du prêt, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-23182
Date de la décision : 18/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 nov. 2014, pourvoi n°13-23182


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23182
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