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13/11/2014 | FRANCE | N°10-28023

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 novembre 2014, 10-28023


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 octobre 2010), que la société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (SPEDIDAM), estimant que l'exploitation sous forme de vidéogrammes, par la société Idéale Audience International, des enregistrements audiovisuels d'interprétations d'oeuvres de musique classique par diverses formations orchestrales, constituait une exploitation secondaire réalisée sans son autorisation, pour les artistes-interprète

s dont elle gérait les droits, a assigné la société Idéale Audience ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 octobre 2010), que la société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (SPEDIDAM), estimant que l'exploitation sous forme de vidéogrammes, par la société Idéale Audience International, des enregistrements audiovisuels d'interprétations d'oeuvres de musique classique par diverses formations orchestrales, constituait une exploitation secondaire réalisée sans son autorisation, pour les artistes-interprètes dont elle gérait les droits, a assigné la société Idéale Audience International, devenue la société Medici Arts International, aux droits de laquelle vient la société Idéale Audience Group, en réparation de leur préjudice individuel et du préjudice collectif subi par la profession des artistes-interprètes ; que l'Union syndicale de production audiovisuelle (USPA) est intervenue volontairement à l'instance ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le premier moyen du pourvoi incident, réunis, ci-après annexés :
Attendu que la société Idéale Audience Group et l'USPA font grief à l'arrêt de dire que la société Medici devait solliciter l'autorisation écrite des trois cent treize artistes-interprètes concernés avant de commercialiser les vidéogrammes litigieux et de condamner la société Medici à payer la somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice individuel de l'ensemble des artistes représentés par la SPEDIDAM ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel qui a constaté que les vidéogrammes avaient été réalisés par l'ORTF entre 1960 et 1969, en a exactement déduit que les dispositions de l'article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle, introduites par la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985, n'avaient vocation à s'appliquer qu'aux seuls droits que les artistes-interprètes n'avaient pas cédés avant l'entrée en vigueur de celle-ci ;
Et attendu, d'autre part, que c'est par une interprétation souveraine de la portée de l'autorisation donnée par les musiciens et formalisée, notamment, par l'apposition de leur signature sur les feuilles de présence aux séances d'enregistrement, que la cour d'appel a retenu que celle-ci était limitée à la télédiffusion des enregistrements réalisés et à leur exploitation commerciale par l'ORTF, sous forme de phonogramme ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal et sur le deuxième moyen du pourvoi incident, réunis, ci-après annexés :
Attendu que la société Idéale Audience Group et l'USPA font grief à l'arrêt de condamner la société Medici à verser la somme globale de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts à la SPEDIDAM ;
Mais attendu que la cour d'appel a, comme il le lui était demandé, réparé le préjudice subi par l'ensemble des artistes-interprètes en cause, dont-elle a apprécié l'existence et l'importance par l'évaluation qu'elle en a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les troisième moyen du pourvoi principal et le troisième moyen du pourvoi incident, réunis, ci-après annexés :
Attendu que la société Idéale Audience Group et l'USPA font reproche à l'arrêt d'infirmer le jugement qui avait retenu que la SPEDIDAM avait abusé de sa position dominante dans la négociation des droits ;
Mais attendu que procédant à la comparaison prétendument omise entre les redevances exigées par la SPEDIDAM et celles appelées dans d'autres Etats membres de l'Union, et prenant en considération les différences dans les modalités de leur perception, la cour d'appel a estimé que le tarif pratiqué par la SPEDIDAM, calculé en fonction du nombre de musiciens impliqués, de l'ancienneté de l'enregistrement et de sa durée, ne s'avérait ni abusif ni excessif, et n'était pas de nature à empêcher la réalisation d'un projet d'exploitation dont il ne représentait en l'espèce qu'un pourcentage relativement modeste du budget ; que par ces seuls motifs la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Idéale Audience Group et l'USPA aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Idéale Audience Group
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société MEDICI devait solliciter l'autorisation écrite des 313 artistes interprètes avant de commercialiser les DVD litigieux et d'avoir condamné la société MEDICI à payer la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice individuel de l'ensemble des artistes représentés par la SPEDIDAM ;
AUX MOTIFS QU'il ne peut pas être contesté que les artistes interprètes ont enregistré les prestations produites sur les 17 vidéogrammes litigieux entre 1950 et 1969 pour l'ORTF et que celles-ci relevaient du fonds d'archive de l'INA laquelle a cédé ses droits à la société IDEALE le 15 octobre 1999 pour l'exploitation de programmes sous réserve que cette société fasse son affaire de l'obtention des autorisations des artistes interprètes ; que s'il peut être déduit de la participation aux émissions de concert enregistrées pour l'ORTF que les artistes interprètes ont autorisé la fixation de leurs prestations pour une diffusion par l'ORTF, il ne peut être admis que cette autorisation vaut pour la communication au public sous forme de vidéogrammes par la société IDEALE de la restauration de ces enregistrements ; que les premiers juges ont exactement relevé que la seule signature de feuilles de présence lors d'émission de radio télévision française ne permet pas de prouver que leur autorisation n'était pas limitée à la télédiffusion ; qu'à supposer établi ce qui n'est pas le cas, que les dispositions réglementaires régissant l'ORTF actuellement invoquées par la société MEDICI aient vocation à s'appliquer à tous les artistes interprètes en cause, il n'en résulterait pas pour autant la preuve d'une acceptation sans restriction de l'exploitation de leurs prestations ; qu'en effet, si pour assurer sa mission de service public, l'ORTF pouvait librement utiliser les prestations de musiciens, il était expressément prévu, s'agissant de l'exploitation commerciale pour la réalisation de disques du commerce, que celle-ci était limitée notamment à huit heures par an et il ne peut être admis qu'une exploitation non envisagée sous forme de vidéogrammes par une société ne pouvant se prétendre investie d'une mission de service public nonobstant la qualité non déniée de sa démarche, serait autorisée ; qu'au contraire, les éléments du dossier permettent de retenir que la portée de leur autorisation ne couvrait pas cette exploitation qui constitue une nouvelle communication au public manifestement non prévue ; que les dispositions de l'article L212-3 du code de la propriété intellectuelle 6 6 doivent régir les droits qui ne peuvent être considérés comme ayant été cédés avant l'entrée en vigueur de la loir du 3 juillet 1985 ; que dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a retenu à l'encontre de la société IDEALE, le défaut d'autorisation écrite des artistes interprètes représentés par la SPEDIDAM pour la diffusion de leur prestation sur les DVD litigieux réalisés postérieurement au 1er janvier 1986 portant atteinte aux droits des artistes interprètes,
1) ALORS QUE les contrats passés antérieurement au 1er janvier 1986 entre un artiste interprète et un producteur d'oeuvre audiovisuelle ou leurs cessionnaires sont soumis aux dispositions de la loi du 3 juillet 1985 en ce qui concerne les modes d'exploitation qu'ils excluaient ; que pour les modes d'exploitation non exclus, l'autorisation d'exploitation est régie par la loi ancienne, qui admet les cessions implicites ; que la cour d'appel a relevé que les artistes interprètes concernés avaient signé la feuille de présence lors de l'émission au cours de laquelle leur prestation avait été enregistrée, ce dont il résultait qu'ils avaient accepté l'exploitation de l'enregistrement en vue d'une télédiffusion, et, par là même, consenti à la diffusion de cette interprétation sur support vidéo; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L217-7 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2) ALORS QU'en tout état de cause, à supposer même la loi du 3 juillet 1985 applicable au litige, il en résulte que la signature du contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur pour la réalisation d'une oeuvre audiovisuelle vaut autorisation de fixer, reproduire et communiquer au public la prestation de l'artiste-interprète ; que la société MEDICI indiquait qu'ayant signé les feuilles de présence, ce dont il résultait une autorisation pour l'exploitation audiovisuelle de leur interprétation, les artistes en avaient autorisé la fixation, la reproduction et la communication au public (conclusions p.42) ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de motif et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE selon les décrets 63-427 du 22 avril 1963 et 69-1143 du 28 novembre 1968, l'ORTF, aux droits de laquelle se trouve la société MEDICI, était « notamment » autorisée à exploiter les prestations des artistes permanents de ses orchestres dans la limite d'une durée, pour chaque formation, de 8 heures par an, pour la réalisation de disques commerciaux ; que pour écarter une exploitation sous forme de vidéogrammes, la cour d'appel a retenu que ce mode d'exploitation n'était pas prévu par les décrets ; qu'en statuant ainsi, quand les modes d'exploitation « notamment » prévus par les décrets n'étaient pas limités et étaient appelés à être complétés au gré des évolutions technologiques, la cour d'appel a violé les décrets 63-427 du 22 avril 1963 et 69-1143 du 28 novembre 1968 ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société MEDICI au paiement de la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant du préjudice individuel subi par les artistes interprètes, la SPEDIDAM demande de tenir compte de son tarif étant rappelé que celui-ci n'a pu être négocié et étant observé que ses calculs établissant la perte de redevance par interprète à 10,40 euros par ayant droit et par enregistrement se fondent sur les participations de 424 artistes interprètes et non de ses seuls 313 adhérents ; que la société MEDICI pour sa part invoque la pertinence d'un accord passé le 3 mai 2006 entre l'INA et les syndicats d'artistes interprètes sur la rémunération des nouvelles utilisations des prestations des musiciens sans toutefois avancer la moindre évaluation à ce titre ni fournir les chiffres certifiés qu'elle posséderait pour en permettre le calcul ; qu'eu égard aux atteintes en cause, aux agissements imputables à la société IDEALE et aux éléments d'appréciation, il sera alloué une indemnité de 60.000 euros en réparation de l'entier préjudice individuel subi par les adhérents concernés ;
ALORS QUE les dommages et intérêts doit correspondre au préjudice direct et personnel subi par la victime; qu'en condamnant la société MEDICI au paiement de la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'ensemble des 331 artistes concernés sans préciser, pour chacun d'eux, le dommage subi, la cour d'appel a violé le principe de réparation intégrale du préjudice, ensemble l'article 1382 du code civil ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société MEDICI de ses demandes contre la SPEDIDAM ;
AUX MOTIFS QUE il ne peut être reproché à la SPEDIDAM d'avoir imposé des conditions de transaction abusives alors qu'il s'avère qu'en l'espèce son tarif, calculé en fonction du nombre de musiciens impliqués, de l'ancienneté de l'enregistrement et de sa durée n'apparaissait pas excessif bien que ne prenant pas en compte, contrairement à ceux pratiqués dans d'autres Etats de l'Union, d'un pourcentage des recettes ; qu'en effet, il n'est pas contesté que la somme globale réclamée de 237.758,40 à 365.745,60 euros pour l'exploitation envisagée de 2000 qui représente environ 8% du budget global de la production estimé à 5 millions d'euros était en fait, ainsi que retenu par le tribunal comparable à celle de 300.000 euros que le producteur prévoyait de verser selon les simulations de juin 1999 ; que même s'il ne s'agissait que d'un objectif de recettes sur une durée de licence de 15 ans et non d'un investissement immédiat le tarif forfaitaire ne s'avérait en fait pas inéquitable ou disproportionné, que la seule production de la société MEDICI d'un nouvel état qui tiendrait compte d'une exploitation jusqu'au 31 décembre 2006 contredisant les données initialement en discussion sur la base de ses propres prévisions ne saurait suffire à démontrer le caractère abusif du tarif de la SPEDIDAM dans le présent litige ; qu'il est regrettable que celle-ci entende imposer unilatéralement le tarif forfaitaire d'usage par elle pratiqué sans accepter de le négocier, même si elle explique sa position par une non discrimination, une pratique antérieure de rémunération de musiciens d'orchestre, des difficultés de gestion ou sa spécificité, son interlocuteur entendant manifestement permettre une nouvelle exploitation de prestations archivées d'artistes interprètes et négocier un accord de même nature que celui obtenu notamment dans un autre pays européen, que pour autant cette attitude ne suffit pas à caractériser en la cause un abus préjudiciable de la SPEDIDAM alors que son prix n'apparaissait ni excessif ni réellement de nature à empêcher la réalisation d'un projet dont il ne représentait qu'un pourcentage relativement modeste du budget ;
1) ALORS QU'une société nationale de gestion de droits d'auteur se trouvant en position dominante sur une partie substantielle du marché européen impose des conditions de transaction non équitables lorsque les redevances qu'elle applique sont sensiblement plus élevées que celles pratiquées dans les autres Etats membres ; qu'en se bornant à considérer que les tarifs pratiqués par la SPEDIDAM n'étaient pas excessifs, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société MEDICI faisait valoir que ces tarifs étaient supérieurs à ceux pratiqués par les organismes de gestion collective des autres Etats membres, ce dont résultait un abus de position dominante, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE constitue un abus le fait, pour un acteur économique en position de monopole, d'imposer des tarifs excessifs, dans leur montant mais aussi dans leurs modalités de règlement ; que pour retenir que le tarif pratiqué par la SPEDIDAM n'était pas excessif, la cour d'appel a relevé qu'il représentait au final une charge équivalente à celle représentée par des tarifs proportionnels sur 15 ans ; qu'une projection sur 15 ans sur la base d'un succès commercial ne tient pas compte d'un risque d'échec ; qu'on ne peut comparer la charge que présente le fait de devoir débourser l'intégralité des droits avant tout début d'amortissement avec celle résultant d'un règlement des droits au fur et à mesure de l'amortissement ; qu'en se bornant à constater qu'au bout de 15 ans, la charge des droits, qu'ils soient forfaitaires ou proportionnels, était équivalente, sans tenir compte de la différence des modalités de règlement des droits, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils pour l'Union syndicale de la production audiovisuelle
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué incidemment D'AVOIR confirmé le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 5 novembre 2008 ayant dit que la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL devait solliciter l'autorisation écrite des 313 artistes interprètes ayant participé aux 31 enregistrements litigieux représentés par la SPEDIDAM avant de commercialiser les DVD litigieux et D'AVOIR condamné la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL, à payer à la SPEDIDAM la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice individuellement subi par les 313 artistes interprètes adhérents ;
AUX MOTIFS QU' il n'est pas contesté que les artistes interprètes ont enregistré les prestations reproduites sur les 17 vidéogrammes litigieux entre 1960 et 1969 pour l'ORTF et que celles-ci relevaient du fonds d'archives de l'INA, laquelle a cédé ses droits à la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL le 15 octobre 1999 pour l'exploitation de programmes sous réserve que cette société fasse son affaire de l'obtention des autorisations des artistes interprètes ; que s'il peut être déduit de la participation aux émissions de concerts enregistrés pour l'ORTF que les artistes interprètes ont autorisé la fixation de leurs prestations pour une diffusion par l'ORTF, il ne peut être admis que cette autorisation vaut pour la communication au public sous forme de vidéogrammes par la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL de la restauration de ces enregistrements ; que les premiers juges ont exactement relevé que la seule signature de feuilles de présence lors d'émission de radio télévision française ne permet pas de prouver que leur autorisation n'était pas limitée à la télédiffusion ; qu'à supposer établi, ce qui n'est pas le cas, que les dispositions réglementaires régissant l'ORTF actuellement invoquées par la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL aient vocation à s'appliquer à tous les artistes interprètes en cause, il n'en résulterait pas pour autant la preuve d'une acceptation sans restriction de l'exploitation de leurs prestations ; qu'en effet si, pour assurer sa mission de service public, l'ORTF pouvait librement utiliser les prestations de musiciens, il était expressément prévu, s'agissant de l'exploitation commerciale pour la réalisation de disques du commerce, que celle-ci était limitée notamment à huit heures par an et il ne peut être admis qu'une exploitation non envisagée, sous forme de vidéogrammes par une société ne pouvant se prétendre investie d'une mission de service public, nonobstant la qualité non déniée de sa démarche, serait ainsi autorisée ; qu'au contraire, les éléments du dossier permettent de retenir que la portée de leur autorisation ne couvrait pas cette exploitation qui constitue une nouvelle communication au public, manifestement non prévue ; que les dispositions de l'article L 212-3 du Code de la Propriété Intellectuelle doivent régir les droits qui ne peuvent être considérés comme ayant été cédés avant l'entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1985 ; que dès lors c'est à juste titre que le Tribunal a retenu, à l'encontre de la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL (actuellement MEDICI ARTS INTERNATIONAL), le défaut d'autorisation écrite des artistes interprètes représentés par la SPEDIDAM pour la diffusion de leur prestation sur les DVD litigieux, réalisés postérieurement au 1er janvier 1986, portant atteinte aux droits des artistes interprètes ;
ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL QU' il convient d'apprécier l'étendue de l'autorisation contractuelle donnée par les artistes interprètes à l'ORTF au moment de l'enregistrement selon le droit applicable avant l'entrée en vigueur de la loi de 1985 ; que le Tribunal relève que, sous l'empire de la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de la loi de 1985, les artistes interprètes étaient fondés à demander que leur interprétation ne reçoive pas une autre destination que celle par eux autorisée ; qu'en l'espèce, les artistes interprètes, par la signature de la feuille de présence, avaient donné leur autorisation à l'ORTF pour une télédiffusion ; qu'il appartient dans ces conditions au producteur de prouver qu'il en a été différemment par la production d'éléments de preuve concernant par exemple des accords collectifs ou des usages de la profession à l'époque, ce qu'il ne fait pas ; que, par ailleurs, il convient de rappeler que le régime de protection s'apprécie au jour de la contrefaçon ; que dès lors l'article L 212-3 du Code de la Propriété Intellectuelle s'applique, la loi de 1985 étant applicable aux utilisations postérieures à son entrée en vigueur, même si les interprétations ont été fixées antérieurement ; que dans ces conditions, il y a lieu de constater que les artistes interprètes représentés par la SPEDIDAM n'ont pas donné d'autorisation écrite à la diffusion de leur prestation sur des DVD par la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL ;
ALORS D'UNE PART QUE, antérieurement à la loi du 3 juillet 1985, sauf stipulation contraire, l'autorisation d'exploitation donnée par un artiste interprète par la signature d'une feuille de présence à l'occasion de l'enregistrement de sa prestation en vue de sa diffusion selon un procédé défini emportait cession implicite du droit de communication au public par d'autres modes d'exploitation voisins de cet enregistrement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que les artistes interprètes avaient autorisé par la signature des feuilles de présence la fixation de leurs prestations en vue d'une diffusion par l'ORTF, mais sans relever que les artistes interprètes avaient expressément limité à la seule télédiffusion l'exploitation des enregistrements, ce dont il résultait qu'ils avaient consenti à la diffusion de cette interprétation par d'autres moyens techniques dont les supports vidéos, la Cour d'Appel a violé les articles L 217-7 du Code de la Propriété Intellectuelle, ensemble l'article 1382 du Code Civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE, selon les décrets 63-427 du 22 avril 1963 et 69-1143 du 28 novembre 1968, l'ORTF, aux droits de laquelle se trouve la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, était « notamment » autorisée à exploiter les prestations des artistes permanents de ses orchestres dans la limite d'une durée, pour chaque formation de huit heures par an, pour la réalisation de disques commerciaux ; que pour écarter une exploitation sous forme de vidéogrammes, la Cour d'Appel a retenu que ce mode d'exploitation n'était pas prévu par les décrets ; qu'en statuant ainsi, quand les modes d'exploitation « notamment » prévus par les décrets n'étaient pas limités et étaient appelés à être complétés au gré des évolutions technologiques, la Cour d'Appel a violé les décrets susvisés ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué incidemment D'AVOIR rejeté la demande de l'USPA tendant au débouté de la SPEDIDAM de l'intégralité de ses demandes et condamné la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL, à payer à la SPEDIDAM la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice individuel subi par les 313 artistes interprètes adhérents ;
AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'évaluation du préjudice individuel subi par les artistes interprètes, la SPEDIDAM demande de tenir compte de son tarif, étant rappelé que celui-ci n'a pu être négocié et étant observé que ses calculs établissant la perte de redevance par interprète à 10,40 euros par ayant droit et par enregistrement se fondent sur les participations de 424 artistes interprètes et non de ses seuls 313 adhérents ; que la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL pour sa part invoque la pertinence d'un accord passé le 3 mai 2006 entre l'INA et les syndicats d'artistes interprètes sur la rémunération des nouvelles utilisations des prestations des musiciens sans toutefois avancer la moindre évaluation à ce titre ni fournir les chiffres certifiés qu'elle posséderait pour en permettre le calcul ; qu'eu égard aux atteintes en cause, aux agissements imputables à la Société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL (actuellement MEDICI ARTS INTERNATIONAL) et aux éléments d'appréciation, il sera par infirmation de la décision entreprise sur ce point alloué une indemnité de 60.000 euros en réparation de l'entier préjudice individuel subi par les adhérents ;
ALORS QUE les dommages et intérêts doivent correspondre au préjudice direct et personnel subi par la victime ; qu'en condamnant dès lors la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL au paiement d'une somme globale de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'ensemble des 331 artistes concernés sans préciser, pour chacun d'eux, le dommage subi, la Cour d'Appel a violé l'article 1382 du Code Civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué incidemment D'AVOIR infirmé le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 5 novembre 2008 ayant dit que la SPEDIDAM avait abusé de sa position dominante dans la négociation des droits ;
AUX MOTIFS QU'il ne peut être reproché à faute à la SPEDIDAM d'avoir imposé des conditions de transaction abusives alors qu'il s'avère qu'en l'espèce son tarif, calculé en fonction du nombre de musiciens impliqué, de l'ancienneté de l'enregistrement et de sa durée, n'apparaissait pas excessif bien que ne prenant pas en compte, contrairement à ceux pratiqués dans d'autres Etats de l'Union Européenne un pourcentage des recettes ; qu'en effet, il n'est pas contesté que la somme globale réclamée de 237.758,40 à 365.745,60 euros pour l'exploitation envisagée en 2000, qui représente environ 8 % du budget global de la production estimé à 5 millions d'euros, était en fait, ainsi que retenu par le Tribunal, comparable à celle de 300.000 euros que le producteur prévoyait de verser selon ses simulations de juin 1999 ; que même s'il ne s'agissait que d'un objectif de recettes sur une durée de licence de quinze ans, et non d'un investissement immédiat, le tarif forfaitaire ne s'avérait en fait pas inéquitable ou disproportionné ; que la seule production par la Société MEDICI ARTS INTERNATIONAL d'un nouvel état, qui tiendrait compte d'une exploitation jusqu'au 31 décembre 2006, contredisant les données initialement en discussion sur la base de ses propres prévisions, ne saurait suffire à démontrer le caractère abusif du tarif de la SPEDIDAM dans le présent litige ; que certes il est regrettable que celle-ci entende imposer unilatéralement le tarif forfaitaire d'usage par elle pratiquée sans accepter de le négocier, même si elle explique sa position par une non discrimination, une pratique antérieure de rémunération de musiciens d'orchestre, des difficultés de gestion ou sa spécificité, son interlocuteur entendant manifestement permettre une nouvelle exploitation de prestations archivées d'artistes interprètes et négocier un accord de même nature que celui obtenu notamment dans un autre pays européen ; que pour autant cette attitude ne suffit pas à caractériser en la cause un abus préjudiciable de la SPEDIDAM alors que son prix n'apparaissait ni excessif ni de nature à empêcher la réalisation d'un projet dont il ne représentait qu'un pourcentage relativement modeste du budget ;
ALORS D'UNE PART QU' une société nationale de gestion de droits d'auteur se trouvant en position dominante sur une partie substantielle du marché commun impose des conditions de transaction non équitables lorsque les redevances qu'elle applique sont sensiblement plus élevées que celles pratiquées dans les autres Etats membres, dans la mesure où la comparaison des tarifs a été effectuée sur une base homogène ; que, dans ses conclusions d'appel (p. 33), l'USPA faisait valoir que les redevances réclamées par la SPEDIDAM étaient sensiblement plus élevées que celles pratiquées en Grande-Bretagne, ce dont il résultait un abus de position dominante manifeste ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pourtant péremptoire, la Cour d'Appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
ALORS D'AUTRE PART QUE constitue un abus le fait, pour un acteur économique en position de monopole, d'imposer des tarifs excessifs, dans leur montant mais aussi dans leurs modalités de règlement ; que, pour retenir que le tarif pratiqué par la SPEDIDAM n'était pas excessif, la Cour d'Appel a relevé qu'il représentait au final une charge équivalente à celle représentée par des tarifs proportionnés sur quinze ans ; qu'une projection sur quinze ans sur la base d'un succès commercial ne tient pas compte d'un risque d'échec, ainsi que l'USPA le soulignait (conclusions p. 31, dernier al.), de sorte qu'en ne tenant aucun compte de la différence des modalités de règlement des droits, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 420-2 du Code de Commerce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-28023
Date de la décision : 13/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 13 nov. 2014, pourvoi n°10-28023


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:10.28023
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