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06/11/2014 | FRANCE | N°13-23805

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 novembre 2014, 13-23805


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 28 juin 2013), que M. X..., salarié de la société Uniroute (l'employeur), a déclaré avoir été victime d'un accident le 17 octobre 2011 ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Cher (la caisse) ayant pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle, l'employeur a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale aux fins que la décision lui soit déclarée inopposable ;
Attendu que la caisse fait

grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen, que les rése...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 28 juin 2013), que M. X..., salarié de la société Uniroute (l'employeur), a déclaré avoir été victime d'un accident le 17 octobre 2011 ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Cher (la caisse) ayant pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle, l'employeur a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale aux fins que la décision lui soit déclarée inopposable ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande, alors, selon le moyen, que les réserves qui contraignent la caisse primaire d'assurance maladie à procéder à une mesure d'instruction et à l'information préalable de l'employeur sur la procédure d'instruction, les points susceptibles de lui faire grief, la possibilité de consulter le dossier constitué et la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce, la société Uniroute avait joint à sa déclaration d'accident du travail dénuée de réserve et précisant que l'accident avait été constaté par « ses préposés », une lettre faisant état de « réserves » tirées de l'absence de témoin de l'accident et du fait qu'elle n'avait été avertie de l'accident que le lendemain ; que ce courrier ne fournissant aucun élément permettant de remettre en cause les circonstances de temps et de lieu de l'accident telles que décrites dans la déclaration d'accident ou d'envisager l'existence d'une cause totalement étrangère au travail la cour d'appel n'a pu décider que ce courrier était de nature à contraindre la caisse à procéder à une enquête ou à l'envoi d'un questionnaire, ce qui aurait permis à l'employeur de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief, de consulter le dossier et de connaître la date à laquelle la caisse prévoyait de prendre sa décision sans violer l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que constituent des réserves motivées de la part de l'employeur, au sens des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, toute contestation du caractère professionnel de l'accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'un cause totalement étrangère au travail ;
Et attendu que l'arrêt retient que la déclaration d'accident du travail parvenue à la caisse indique comme lieu de l'accident « Alfa Roméo 42000 Saint-Étienne », comme date et heure « 17 octobre 2011, 15 h 30 » et comme circonstances détaillées « M. X... dessanglait un véhicule lorsqu'il se serait cogné l'épaule droite contre un élément métallique du camion » ; que cet accident a été déclaré à l'employeur le lendemain à 8 h 15, sans mention d'arrêt de travail ; que le même jour, le salarié a consulté un médecin à Ambérieu-en-Bugey (Ain) qui a constaté un « traumatisme contusion épaule droite face antérieure cervicalgies irradiées début névralgie cervico brachiale » et a accordé un arrêt de travail jusqu'au 24 octobre 2011 ; que dans sa lettre, la société fait valoir que la survenance au temps et au lieu de travail n'est aucunement rapportée, le sinistre étant survenu sans témoin et la déclaration d'accident n'ayant été renseignée que sur la base des seules allégations de la victime non corroborées par des éléments objectifs ; que l'employeur ajoute que l'accident litigieux n'a été porté à sa connaissance que le 18 octobre 2011 ; qu'ainsi, la société a émis des réserves motivées concernant la déclaration d'accident du travail de son salarié ; que, cependant, la caisse n'a ni adressé un questionnaire ni procédé à une enquête ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve soumis aux débats, la cour d'appel a pu décider que la déclaration d'accident de travail était assortie de réserves de nature à rendre obligatoire l'ouverture d'une instruction, de sorte que la prise en charge intervenue sans une telle instruction lui était inopposable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Cher aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher et la condamne à payer à la société Uniroute la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du Cher
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré inopposable à la Société UNIROUTE, la prise en charge au titre d'un accident du travail reconnu à Monsieur David X... pour des faits du 17 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en vertu de l'article R. 441-11 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale, en cas de réserves de la part de l'employeur, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du CHER envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procède à une enquête auprès des intéressés ; que les réserves visées par ce texte, s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur, ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce, la déclaration de l'accident du travail parvenue à la CPAM du CHER indique comme lieu de l'accident " Alfa Roméo 42 000 Saint-Etienne ", comme date et heure " 17 octobre 2011 15 h 30 " et comme circonstances détaillées " Monsieur X... dessanglait un véhicule lorsqu'il se serait cogné l'épaule droite contre un élément métallique du camion " ; que cet accident a été déclaré à l'employeur le lendemain 18 octobre 2011 à 8 h 15, sans mention d'arrêt de travail ; que le même jour, le salarié a consulté un médecin à Ambérieu en Bugey (Ain) qui a constaté « traumatisme contusion épaule droite face antérieure cervicales irradiées début névralgie cervico brachiale » et a accordé un arrêt de travail jusqu'au 24 octobre 2011 ; que dans sa lettre de réserves, la SA UNIROUTE fait valoir que la survenance au temps et au lieu de travail n'est aucunement rapportée, le sinistre étant survenu sans témoin et la déclaration d'accident n'ayant été renseignée que sur la base des seules allégations de la victime non corroborées par des éléments objectifs ; que l'employeur ajoute que de surcroît l'accident litigieux n'a été porté à sa connaissance que le 18 octobre 2011 ; qu'au surplus, la SA UNIROUTE précise dans sa lettre que dans l'hypothèse où la CPAM du CHER considérerait que les réserves émises étaient insuffisamment motivées ou n'enrichissaient pas substantiellement le dossier d'instruction, l'employeur lui saurait gré de bien vouloir l'en aviser afin qu'il puisse compléter ses observations ; qu'ainsi, la SA UNIROUTE a émis des réserves motivées concernant la déclaration d'accident du travail de son salarié au sens des dispositions précitées du code de la sécurité sociale ; que cependant la CPAM du CHER n'a ni adressé un questionnaire ni procédé à une enquête ; que dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré inopposable à l'employeur la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle ;
AUX MOTIFS ADOPTES QU'en vertu de l'article L. 411-1 du Code de Sécurité Sociale, pour bénéficier de la présomption d'origine professionnelle, il appartient au salarié d'apporter la preuve que l'accident non seulement s'est réellement produit mais encore qu'il est survenu par le fait ou à l'occasion du travail et que cette preuve, qui ne peut résulter de ses seules propres affirmations, doit être corroborée par des allégations de tiers ; qu'il appartient alors dans un deuxième temps à l'employeur de détruire la présomption d'origine professionnelle qui en découle en apportant la preuve que cette lésion a une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce, la déclaration d'accident du travail établie le 18 octobre 2011 indique que la veille vers 15 h 30, Monsieur David X... employé en qualité de chauffeur poids lourd, se serait cogné l'épaule droite contre un élément mécanique du camion en dessanglant un véhicule ; que la déclaration mentionnait que l'accident avait été porté à la connaissance des préposés le lendemain à 8 h 15 ; qu'y était joint un certificat médical du 18 octobre 2011 dans lequel le Docteur Z..., médecin généraliste, diagnostiquait un traumatisme contusion de l'épaule droite et des cervicalgies irradiées avec début de névralgies cervicobrachiales ; que si la déclaration ne portait pas mention de réserves, y était jointe un courrier de la Société où celle-ci émettait des réserves sur le caractère professionnel de l'accident notamment en raison de l'absence de témoin et d'une information tardive à l'employeur, ce qui constitue une motivation ; que l'article R. 441-11 du Code de Sécurité Sociale dispose qu'en cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la Caisse hors le cas d'enquête de l'article L. 442-1, envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ; que l'existence d'un courrier de contestation devait inciter la Caisse à vérifier les conditions de l'article L. 411-1 précité, notamment s'agissant de simples douleurs alléguées, en faisant procéder à l'envoi de questionnaires ou en diligentant une enquête administrative ; que la CPAM du CHER n'aurait pas dû sans autre élément, prendre en charge cette lésion au titre d'un accident du travail ; que si cette décision ne peut être remise en cause à l'égard de Monsieur David X..., elle doit être déclarée inopposable à l'employeur ; qu'en conséquence, il y a lieu d'accueillir le recours et d'infirmer la décision entreprise ;
ALORS QUE les réserves qui contraignent la caisse primaire d'assurance maladie à procéder à une mesure d'instruction et à l'information préalable de l'employeur sur la procédure d'instruction, les points susceptibles de lui faire grief, la possibilité de consulter le dossier constitué et la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce, la Société UNIROUTE avait joint à sa déclaration d'accident du travail dénuée de réserve et précisant que l'accident avait été constaté par « ses préposés », une lettre faisant état de « réserves » tirées de l'absence de témoin de l'accident et du fait qu'elle n'avait été avertie de l'accident que le lendemain ; que ce courrier ne fournissant aucun élément permettant de remettre en cause les circonstances de temps et de lieu de l'accident telles que décrites dans la déclaration d'accident ou d'envisager l'existence d'une cause totalement étrangère au travail la Cour d'appel n'a pu décider que ce courrier était de nature à contraindre la CPAM du CHER à procéder à une enquête ou à l'envoi d'un questionnaire, ce qui aurait permis à l'employeur de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief, de consulter le dossier et de connaître la date à laquelle la CPAM du CHER prévoyait de prendre sa décision sans violer l'article R. 441-11 du Code de la Sécurité Sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-23805
Date de la décision : 06/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 28 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 nov. 2014, pourvoi n°13-23805


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23805
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