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06/11/2014 | FRANCE | N°13-23571

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 novembre 2014, 13-23571


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 juin 2013) et les productions, que, par jugement du 30 septembre 2010, un tribunal de grande instance a constaté qu'un protocole d'accord conclu entre la société Etablissements Mascitti Nino et les consorts X... le 2 novembre 2009 avait valablement opéré, à effet du 1er juillet 2009, la cession, par la première au profit de la société Groupe X... qui s'était substituée aux acquéreurs, du fonds de commerce Carrières de Bonneuil

; que l'URSSAF de l'Oise, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Picard...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 25 juin 2013) et les productions, que, par jugement du 30 septembre 2010, un tribunal de grande instance a constaté qu'un protocole d'accord conclu entre la société Etablissements Mascitti Nino et les consorts X... le 2 novembre 2009 avait valablement opéré, à effet du 1er juillet 2009, la cession, par la première au profit de la société Groupe X... qui s'était substituée aux acquéreurs, du fonds de commerce Carrières de Bonneuil ; que l'URSSAF de l'Oise, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Picardie (l'URSSAF), ayant refusé de lui rembourser les cotisations sociales qu'elle avait versées du mois d'août 2009 au mois d'août 2010, la société Mascitti a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la société Mascitti fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen :
1°/ que si, en principe, les conventions ne sont pas opposables à ceux qui n'y ont pas été parties, les tiers ne peuvent pour autant prétendre ignorer la situation juridique née des stipulations contractuelles de sorte que l'organisme chargé du recouvrement des cotisations sociales auprès de l'employeur ne peut refuser de prendre en compte une modification dans la situation juridique de l'employeur intervenue, fût-ce de manière rétroactive, à la suite d'une convention ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Mascitti de sa demande de remboursement de cotisations sociales afférentes à l'activité de l'entité « Les carrières de Bonneuil » pour la période d'août 2009 à août 2010, la cour affirme que l'accord transactionnel signé le 2 novembre 2009 dans la perspective d'une cession de cette entité avec effet rétroactif au 1er juillet 2009 n'est pas opposable à l'Urssaf compétente ; qu'en statuant ainsi, la cour viole par refus d'application les articles 1134 du code civil ensemble l'article R. 243-6 du code de la sécurité sociale et par fausse application, l'article 1165 du code civil ;
2°/ que lorsqu'une personne qui, par erreur, se croyait débitrice a acquitté une dette, elle a droit à répétition contre le créancier ; qu'est assimilée à l'erreur la contrainte exercée à l'encontre du cotisant par une URSSAF, organisme disposant de moyens de coercition à son égard ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Mascitti de sa demande de remboursement de cotisations sociales, la cour se borne à retenir que le paiement ne procède pas d'une erreur ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le faisaient valoir les écritures d'appel de la société Mascitti, celle-ci ne s'était pas acquittée des cotisations sociales litigieuses sous la menace de se voir refuser l'attestation de l'URSSAF lui permettant d'être attributaire de marchés publics essentiels à la survie de son activité, la cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1377 du code civil, ensemble l'article 46 I du code des marchés publics ;
Mais attendu que la société Mascitti n'a pas soutenu, devant la cour d'appel, qu'un paiement effectué sous la contrainte ouvrait droit à répétition contre le créancier ;
Et attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 243-1 du code de la sécurité sociale que seul l'employeur qui paie les rémunérations après avoir précompté la contribution des salariés est redevable des cotisations, lesquelles sont versées, sous sa responsabilité personnelle, à l'organisme de recouvrement ; que la clause de rétroactivité insérée dans l'acte de cession d'un fonds de commerce ne peut avoir pour effet de rendre indus les paiements précédemment effectués par le cédant ;
Que l'arrêt constate que l'URSSAF était bien créancière des cotisations afférentes aux rémunérations versées par la société Mascitti à ses salariés entre les mois d'août 2009 et d'août 2010, que cette société a conservé la qualité d'employeur jusqu'à la date du transfert effectif des Carrières de Bonneuil intervenu le 30 septembre 2010 par l'effet du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Soissons, et que le protocole d'accord du 2 novembre 2009 qui conférait à la cession du fonds de commerce un caractère rétroactif ne pouvait être opposé à l'URSSAF ;
Que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Mascitti aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Mascitti et la condamne à payer à l'URSSAF de Picardie la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Mascitti Nino.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de l'Oise du 14 septembre 2011 et d'avoir en conséquence rejeté la demande de la société Mascitti tendant au remboursement de cotisations versées pour la période du mois d'août 2009 au mois d'août 2010 à hauteur de 120 681 euros;
AUX MOTIFS QUE par courrier du 27 janvier 2011 la SA Mascitti Nino a sollicité auprès de l'URSSAF de l'Oise (devenue l'URSSAF de Picardie) le remboursement de cotisations qu'elle estimait avoir indûment versées à hauteur d'une somme de globale de 120 681 euros pour la période d'août 2009 à août 2010 ; que ce remboursement lui ayant été refusé suivant décision du 23 février 2011, elle a saisi la commission de recours amiable de l'organisme, puis, après rejet de sa réclamation par décision du 14 septembre 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais, qui, statuant par jugement du 14 juin 2012, a confirmé la décision de la commission de recours amiable et l'a débouté de son recours ; qu'à l'appui de son appel la société Mascitti reprend les moyens et arguments développés en première instance que le tribunal a rejeté à la faveur de justes considérations de fait et de droit qui ne sont l'objet d'aucune critique utile en cause d'appel, dès lors notamment que comme relevé par le tribunal l'union de recouvrement était bien créancière de cotisations pour un montant non contesté au titre des rémunérations versées par la SA Mascitti à ses salariés au cours de la période considérée s'étant écoulée du mois d'août 2009 au mois d'août 2010, cotisations dont elle s'est acquittée, en toute connaissance de cause, en sa qualité d'employeur des salariés attachés à l'entité économique autonome constituée par les Carrières de Bonneuil, qualité qu'elle a conservé jusqu'à la date du transfert effectif de cette entité à la SAS Groupe X... intervenu le 30 septembre 2010 par l'effet du jugement rendu à cette date par le tribunal de grande instance de Soissons ; qu'en l'état et si l'on considère en outre que l'union de recouvrement ne peut se voir opposer pour ne pas y avoir été partie le protocole d'accord conclu entre les employeurs successifs le 2 novembre 2009 dans la perspective d'une cession de fonds de commerce à effet rétroactif au 1er juillet 2009 qui ne devait finalement se concrétiser que le 30 août 2010, les premiers juges ont à bon droit constaté l'absence d'indu susceptible d'ouvrir droit à répétition et débouté par voie de conséquences la société Mascitti Nino de sa demande de remboursement de cotisations sociales en définition acquittées à une époque où le règlement lui incombait en sa qualité d'employeur ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la SA Mascitti sollicite sur le fondement de l'indu le remboursement par l'URSSAF de l'Oise des cotisations d'août 2009 à juillet 2010 pour un montant global de 120 681 euros en faisant valoir que la restructuration commerciale visée dans le protocole transactionnel du 2 novembre 2009, la SA Mascitti Nino a cédé aux consorts X..., le fonds de commerce de la branche « Carrières de Bonneuil » à effet au 1er juillet 2009 et que n'étant plus l'employeur desdits salariés, elle n'était plus redevable des cotisations correspondantes déjà réglées ; que le tribunal constate cependant que les dispositions de cet accord transactionnel tout comme le jugement du Tribunal de Grande Instance de Soissons ne sauraient être opposés à l'URSSAF de l'Oise ; qu'en toute hypothèse, l'URSSAF de l'Oise est créancière des sommes versées au titre des cotisations et contributions afférentes à la période d'août 2009 à juillet 2010 ; qu'alors les articles 1235 et 1376 du Code civil et la Jurisprudence citée par la requérante ne sont pas applicables à l'espèce ; qu'en outre il est de jurisprudence constante de dire et juger que le solvens qui a payé la dette d'autrui doit prouver qu'il a payé à la suite d'une erreur ou sous la contrainte ; qu'en l'espèce tel n'est pas le cas puisque la SA Mascitti a délibérément assumé les obligations sociales concernant les salariés rattachés aux carrières de Bonneuil à compter du 2 novembre 2009, date à laquelle elle ne pouvait ignorer le transfert de la branche d'activité à la SAS X... puisqu'elle avait signé le protocole prévoyant sa cession ; qu'alors le paiement ne procédant pas d'une erreur, ledit paiement ne peut donner lieu à répétition ; qu'ainsi il appartient à la SA Mascitti d'agir contre la SAS X... pour obtenir le remboursement des cotisations qu'elle a réglées pour la période litigieuse ; qu'en conséquence au vu de l'ensemble de ces motifs, il convient de confirmer la décision entreprise et de débouter la SA Mascitti de l'ensemble de ses demandes, y compris sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'UNE PART, si, en principe, les conventions ne sont pas opposables à ceux qui n'y ont pas été parties, les tiers ne peuvent pour autant prétendre ignorer la situation juridique née des stipulations contractuelles de sorte que l'organisme chargé du recouvrement des cotisations sociales auprès de l'employeur ne peut refuser de prendre en compte une modification dans la situation juridique de l'employeur intervenue, fût-ce de manière rétroactive, à la suite d'une convention ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Mascitti de sa demande de remboursement de cotisations sociales afférentes à l'activité de l'entité « Les carrières de Bonneuil » pour la période d'août 2009 à août 2010, la Cour affirme que l'accord transactionnel signé le 2 novembre 2009 dans la perspective d'une cession de cette entité avec effet rétroactif au 1er juillet 2009 n'est pas opposable à l'URSSAF compétente ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole par refus d'application les articles 1134 du Code civil ensemble l'article R. 243-6 du Code de la sécurité sociale et par fausse application, l'article 1165 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, lorsqu'une personne qui, par erreur, se croyait débitrice a acquitté une dette, elle a droit à répétition contre le créancier ; qu'est assimilée à l'erreur la contrainte exercée à l'encontre du cotisant par une URSSAF, organisme disposant de moyens de coercition à son égard ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Mascitti de sa demande de remboursement de cotisations sociales, la Cour se borne à retenir que le paiement ne procède pas d'une erreur ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le faisaient valoir les écritures d'appel de la société Mascitti (pages 7 et 8), celle-ci ne s'était pas acquittée des cotisations sociales litigieuses sous la menace de se voir refuser l'attestation de l'URSSAF lui permettant d'être attributaire de marchés publics essentiels à la survie de son activité, la Cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1377 du Code civil, ensemble l'article 46 I du code des marchés publics.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-23571
Date de la décision : 06/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Paiement - Employeur débiteur - Fonds de commerce - Cession - Clause de rétroactivité - Effet

Il résulte des dispositions de l'article L. 243-1 du code de la sécurité sociale que seul l'employeur qui paie les rémunérations après avoir précompté la contribution des salariés est redevable des cotisations, lesquelles sont versées, sous sa responsabilité personnelle, à l'organisme de recouvrement. La clause de rétroactivité insérée dans l'acte de cession d'un fonds de commerce ne peut avoir pour effet de rendre indus les paiements précédemment effectués par le cédant


Références :

article L. 243-1 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 25 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 nov. 2014, pourvoi n°13-23571, Bull. civ. 2014, II, n° 219
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, II, n° 219

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Rapporteur ?: M. Poirotte
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Boutet-Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 27/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23571
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