LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 7 mai 2013) que par contrat de chantier à durée indéterminée et à temps complet du 21 janvier 2008, la société Capalia, a engagé Mme X... en qualité " d'assistante achat " ; que, le 28 septembre 2008, les parties ont conclu un nouveau contrat de chantier concernant un poste " d'assistante projet ", ayant pour objet l'exécution d'une " prestation d'assistance de projets pour le département Engineering et Industrial Technology des Opérations Industrielles de la société Sanofi Pasteur " ; que, contestant la décision de licenciement prise à son égard, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives tant à l'exécution de son contrat de travail qu'à sa rupture ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de la salariée dépourvue de cause réelle et sérieuse et de lui allouer une indemnité à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que la validité d'un licenciement prononcé en raison de la fin d'un chantier est uniquement subordonnée à l'indication dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés, et à l'achèvement des tâches pour lesquelles le salarié a été embauché ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de l'arrêt attaqué et du jugement confirmé que, comme celui du 21 janvier précédent, le contrat de chantier du 28 septembre 2008 mentionnait expressément avoir été conclu " pour faire face à une mission ponctuelle d'assistance technique auprès de la société Sanofi Pasteur " ; qu'il mentionnait donc qu'il avait été conclu pour un chantier déterminé ; que dès lors, il appartenait uniquement à la cour d'appel de vérifier, au regard des éléments de fait produits devant elle, si les tâches inhérentes à la mission " d'assistante projet " confiées à la salariée dans le cadre de ce chantier étaient achevées au moment de son licenciement ; qu'en s'y refusant au motif " ¿ qu'en s'étant abstenue de déterminer de manière claire et précise le dernier chantier sur lequel était affectée Mme Géraldine X..., la société Capalia ne peut sérieusement soutenir que celui-ci était terminé ", la cour d'appel a violé l'article L. 1236-8 du code du travail ;
2°/ que la preuve, en matière prud'homale, est libre ; qu'en l'espèce, la société Capalia avait, dans ses écritures, invoqué divers éléments de preuve ¿ attestation de M. Y..., bons de commande Sanofi, conclusions de la salariée, lettre de Sanofi signifiant le terme de la prestation afférente à la commande n° 4400213252 dont il résultait que la mission d'assistante projets confiée à Mme X... suivant contrat du 28 septembre 2008 s'était achevée avec la mission d'assistance technique dont était chargé son employeur, relative aux projets D2P3 et ECLA, pour laquelle ce contrat avait été conclu ; qu'en déclarant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sans examiner ces éléments au motif "qu'en s'étant abstenue de déterminer de manière claire et précise le dernier chantier sur lequel était affectée Mme Géraldine X..., la société Capalia ne peut sérieusement soutenir que celui-ci était terminé ", la cour d'appel a violé le principe de liberté de la preuve prud'homale ;
3°/ que la validité d'un licenciement prononcé en raison de la fin d'un chantier est uniquement subordonnée à l'indication dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés, et à l'achèvement des tâches pour lesquelles le salarié a été embauché ; qu'en déclarant dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour fin de chantier prononcé le 22 juin 2011 sans examiner les éléments produits par l'employeur afin de démontrer l'achèvement de la " mission ponctuelle d'assistance technique auprès de la société Sanofi Pasteur " pour laquelle la salariée avait été recrutée le 28 septembre 2008, au nombre desquels un courrier du donneur d'ordre du 16 mai 2011 lui signifiant " la fin de la mission d'assistance projet " au motif, inopérant, qu'une nouvelle proposition pour un nouveau chantier d'assistance technique relatif à une nouvelle prestation d'assistance-projets avait été soumise par la société Capalia à la demande de Sanofi Pasteur postérieurement au licenciement, ce qui rendait " vraisemblable le fait que Mme Géraldine X... aurait pu continuer une nouvelle mission dans le cadre de son contrat de travail ", la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1236-8 du code du travail ;
Mais attendu que la validité du licenciement prononcé en raison de la survenance de la fin d'un chantier est subordonnée à l'existence, dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche, d'une clause précisant que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés ;
Et attendu, qu'abstraction faite du motif surabondant visé par la troisième branche, la cour d'appel, qui a relevé que les stipulations du contrat de travail ne permettaient pas de déterminer avec précision le ou les chantiers pour lesquels la salariée a été engagée, a, par ce seul motif et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Capalia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Capalia et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Capalia
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour fin de chantier de Madame Géraldine X... par la Société Capalia et condamné en conséquence cette société à verser à son ancienne salariée la somme de 17 400 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS propres QUE " La Société Capalia soutient que :
- le second chantier concernait exclusivement un marché de prestations d'assistance à la gestion de projets pour le département Engineering et Industrial Technology (EIT) des opérations industrielles du seul établissement de Val de Reuil de la Société Sanofi Pasteur, s'agissant de travaux de construction concernant deux unités de production (projets D2P3 et ECLA gérés par le même service EIT),- la Société Sanofi Pasteur a informé sa salariée sic : lire : " a informé la Société Capalia " par lettre du 16 mai 2011 de la fin de la mission d'assistance projet (projet ECLA) le 30 mai 2011 ;
QUE par lettre recommandée avec avis de réception en date du 22 juin 2011, Madame Géraldine X... se voyait notifier son licenciement aux motifs que " le chantier Sanofi Pasteur à Val de Reuil concernant cette mission " pour laquelle elle avait été exclusivement engagée " était " en effet arrivé à expiration le 31 mai 2011 " ; que la Société Capalia assurait n'avoir pu lui assurer de réemploi, n'ayant pas de mission sur un autre chantier au sein de l'entreprise ;
QU'adoptant les motifs des premiers juges, la cour relève que si les deux contrats de travail précités ont précisé le lieu de travail de Madame Géraldine X... et son affectation comme assistante projet à l'établissement Sanofi Pasteur à Val de Reuil, ces contrats se sont référés à une seule mission ponctuelle d'assistance technique " non exhaustive ", sans définir autrement le chantier concerné par ces deux missions, s'agissant notamment de l'objet de ces deux chantiers, de la durée envisagée ; qu'il est produit aux débats une proposition technique et commerciale de la Société Capalia en réponse à une demande de Monsieur Jean-Denis Y... Société Sanofi Pasteur, en date du 29 juin 2011, soit quelques jours après le licenciement de Madame Géraldine X..., afin de proposer à ce client " une prestation d'assistance de projets pour le département Engineering et Industrial Technology (EIT) des opérations industrielles du client sur le site de Val de Reuil, rendant ainsi vraisemblable le fait que Madame Géraldine X... aurait pu continuer une nouvelle mission dans le cadre de son contrat de travail ; qu'il en résulte qu'en s'étant abstenue de déterminer de manière claire et précise le dernier chantier sur lequel était affectée Madame Géraldine X..., la Société Capalia ne peut sérieusement soutenir que celui-ci était terminé (...) " (arrêt p. 5, p. 6 alinéas 1 et 2) ;
ET AUX MOTIFS supposés QU'il est de jurisprudence constante que la validité du licenciement prononcé en raison de la fin d'un chantier est subordonnée à l'existence dans le contrat de travail d'une clause précisant que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés ; qu'en l'espèce, les deux contrats de Madame X... se sont succédé et sont rédigés dans les mêmes termes : " Nous vous confirmons nos différents entretiens au cours desquels nous vous avons informée que notre société s'est vu confier des travaux entrant dans le cadre de nos activités d'assistance technique et ce pour le compte de Sanofi Pasteur " ; que dans son article 3 le premier contrat indique : Assistance Achat ETAM position 2. 3 coefficient 355 ; que la mission est ensuite décrite de façon " non exhaustive " ; que les deux contrats précisent que " les fonctions qui vous seront confiées ont, par nature, un caractère évolutif ¿ vous reconnaissez également la nécessité d'une certaine polyvalence " ; que dans son article 5 (le contrat précise) : " Vous êtes affectée à l'établissement Sanofi Pasteur sis Parc Industriel d'Incarville 27400 Val de Reuil. Vous exercerez votre activité professionnelle sur ce site " ; que le Conseil constate que le contrat de chantier ne fait pas référence à un objet précis et qu'aucune durée liée à la réalisation du chantier n'est évoquée ;
QUE dans ses écrits, la Société Capalia fait référence aux bons de commande et de facturation qui correspondent à la mission pour laquelle Madame X... a été embauchée ; que ces documents font état de " mission d'ingénierie achats et divers projets d'investissement et de mission d'assistance projets " ; que ces bons de commandes font référence à différents devis ; que le conseil constate que l'employeur a établi des devis pour 8 missions du 16 janvier 2008 au 7 juillet 2011 ; que Madame X... a signé deux contrats correspondant aux deux premiers devis et n'a pas signé d'avenant pour les autres ; que pour Madame X..., le chantier n'était pas clairement identifié ni déterminé. Une mission " pour le compte de Sanofi Pasteur " ne peut pas être considérée comme définissant un chantier " ; que le Conseil constate, au regard du registre du personnel que des salariés de la Société Capalia étaient toujours sur le site du Val de Reuil à la date du licenciement de Madame X..., démontrant que le chantier n'était pas terminé ; que le Conseil dit que Madame X... est bien fondée en sa demande de dire que son licenciement est sans cause réelle ni sérieux " (jugement p. 4 in fine, p. 5) ;
1°) ALORS QUE la validité d'un licenciement prononcé en raison de la fin d'un chantier est uniquement subordonnée à l'indication dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés, et à l'achèvement des tâches pour lesquelles le salarié a été embauché ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de l'arrêt attaqué et du jugement confirmé que, comme celui du 21 janvier précédent, le contrat de chantier du 28 septembre 2008 mentionnait expressément avoir été conclu " pour faire face à une mission ponctuelle d'assistance technique auprès de la Société Sanofi Pasteur " ; qu'il mentionnait donc qu'il avait été conclu pour un chantier déterminé ; que dès lors, il appartenait uniquement à la Cour d'appel de vérifier, au regard des éléments de fait produits devant elle, si les tâches inhérentes à la mission " d'assistante projet " confiées à la salariée dans le cadre de ce chantier étaient achevées au moment de son licenciement ; qu'en s'y refusant au motif " ¿ qu'en s'étant abstenue de déterminer de manière claire et précise le dernier chantier sur lequel était affectée Madame Géraldine X..., la Société Capalia ne peut sérieusement soutenir que celui-ci était terminé ", la Cour d'appel a violé l'article L. 1236-8 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE la preuve, en matière prud'homale, est libre ; qu'en l'espèce, la Société Capalia avait, dans ses écritures, invoqué divers éléments de preuve ¿ attestation de Monsieur Y..., bons de commande Sanofi, conclusions de la salariée, lettre de Sanofi signifiant le terme de la prestation afférente à la commande n° 4400213252 dont il résultait que la mission d'assistante projets confiée à Madame X... suivant contrat du 28 septembre 2008 s'était achevée avec la mission d'assistance technique dont était chargé son employeur, relative aux projets D2P3 et ECLA, pour laquelle ce contrat avait été conclu ; qu'en déclarant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sans examiner ces éléments au motif "qu'en s'étant abstenue de déterminer de manière claire et précise le dernier chantier sur lequel était affectée Madame Géraldine X..., la Société Capalia ne peut sérieusement soutenir que celui-ci était terminé", la Cour d'appel a violé le principe de liberté de la preuve prud'homale ;
3°) ALORS enfin QUE la validité d'un licenciement prononcé en raison de la fin d'un chantier est uniquement subordonnée à l'indication dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés, et à l'achèvement des tâches pour lesquelles le salarié a été embauché ; qu'en déclarant dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour fin de chantier prononcé le 22 juin 2011 sans examiner les éléments produits par l'employeur afin de démontrer l'achèvement de la " mission ponctuelle d'assistance technique auprès de la Société Sanofi Pasteur " pour laquelle la salariée avait été recrutée le 28 septembre 2008, au nombre desquels un courrier du donneur d'ordre du 16 mai 2011 lui signifiant " la fin de la mission d'assistance projet " au motif, inopérant, qu'une nouvelle proposition pour un nouveau chantier d'assistance technique relatif à une nouvelle prestation d'assistance-projets avait été soumise par la Société Capalia à la demande de Sanofi Pasteur postérieurement au licenciement, ce qui rendait " vraisemblable le fait que Madame Géraldine X... aurait pu continuer une nouvelle mission dans le cadre de son contrat de travail ", la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1236-8 du Code du travail.