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28/10/2014 | FRANCE | N°13-18529

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 octobre 2014, 13-18529


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 29 avril 2002 en qualité de responsable de production par la société Levasseur systèmes et occupant depuis le 1er juin 2005 le poste de responsable qualité sur le site de Torcy (77), a refusé le 10 avril 2009 la proposition de modification de son contrat de travail qui lui avait été remise par la société ISEO France, filiale du groupe italien ISEO, laquelle avait procé

dé à l'acquisition en juillet 2008 de la société Levasseur, dont elle a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 29 avril 2002 en qualité de responsable de production par la société Levasseur systèmes et occupant depuis le 1er juin 2005 le poste de responsable qualité sur le site de Torcy (77), a refusé le 10 avril 2009 la proposition de modification de son contrat de travail qui lui avait été remise par la société ISEO France, filiale du groupe italien ISEO, laquelle avait procédé à l'acquisition en juillet 2008 de la société Levasseur, dont elle avait, dès cette date, assuré la direction avant de décider de fixer son siège social et son activité sur le site de Vaux-le-Pénil, siège de la société ISEO France ; que licencié pour motif économique le 3 juin 2009, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en dirigeant son action à l'encontre de cette dernière société, la société Levasseur systèmes ayant fait l'objet d'une dissolution le 25 août 2009 avec transmission universelle de son patrimoine à son associé unique, la société ISEO France ;
Attendu que pour rejeter la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse formée par le salarié, l'arrêt retient qu'était légitime la décision des nouveaux dirigeants de la société Levasseur systèmes, qui avaient en leur qualité d'employeur le choix de la mise en oeuvre de la réorganisation destinée à maintenir la compétitivité de l'entreprise, de supprimer toute activité sur le site de Torcy pour la transférer sur le site de Vaux-le-Pénil, déjà exploité par la société ISEO et de regrouper sur le même site l'ensemble des activités ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, faisait état de la restructuration de l'entreprise dont l'appartenance à un groupe n'était pas contestée et qu'il appartenait à la cour d'appel de vérifier si cette réorganisation était justifiée par l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel la société appartenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement de M. X...fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté le salarié de sa demande au titre de la rupture, l'arrêt rendu le 2 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société ISEO France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X...la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. X...

PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a dit que le licenciement économique de M. Pascal X...repose sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence débouté de sa demande tendant à se voir allouer 96. 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société LEVASSEUR SYSTEMES, qui avait pour objet la mécanique générale de précision, producteur de ferme-portes, a fait l'objet d'une dissolution le 25 août 2009 avec transmission universelle de son patrimoine à l'associé unique, la société ISEO FRANCE, filiale du groupe italien ISEO, spécialisé notamment dans la vente de petite mécanique, cadenas, verrous, serrures, et qu'antérieurement à cette fusion absorption, la société ISEO avait, en juillet 2008, procédé à l'acquisition de la société LEVASSEUR dont elle a, dès cette date, assuré la direction, avant de décider de fixer à compter du 1er août 2009 son siège social et son activité de la ville de Torcy à celle de Vaux le Pénil, siège de la société ISEO FRANCE, que tous les postes de travail devant être transférés, il a été proposé le l3 mars 2009 aux salariés de la société LEVASSEUR SYSTEMES une modification de leur contrat de travail et leur transfert sur le site de Vaux le Pénil, situé à 42km de Torcy ; qu'à la suite du refus de 28 salariés d'accepter cette modification, il a été mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'Emploi qui a été suivi de licenciements pour motif économique, dont celui de M. X...; qu'il sera par ailleurs rappelé : que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du débat judiciaire, doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié, étant rappelé que pour avoir une cause économique, le licenciement, doit, ainsi que le dispose l'article L. 1233- l du code du travail, être prononcé pour un motif non inhérent à la personne du salarié et être consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit à une réorganisation de l'entreprise, soit à une cessation d'activités, que la réorganisation, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise et que les difficultés économiques invoquées par l'employeur doivent être réelles et constituer le motif véritable du licenciement, qu'en application de l'article L. 1233-4 du même code, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ; que dans la lettre de licenciement du 3 juin 2009, la société LEVASSEUR indique à M. X...: « Compte tenu du contexte économique actuel et de notre obligation d'effectuer des mises aux normes importantes et onéreuses sur le site de TORCY (qui ne nous appartient pas) et afin de mettre en commun les moyens des sociétés ISEO France et LEVASSEUR Systèmes, nous avons décidé de transférer le siège social et l'activité de notre société de la ville de TORCY à celle de VAUX LE PENIL ; le site de transfert appartient à la société ISEO FRANCE. Ainsi la restructuration d'un certain nombre d'éléments corporels de notre unité d'exploitation seront intégrés et induiront des économies substantielles et augmenteront la compétitivité de notre entreprise. Par courrier en date du 13 mars 2009 nous vous avons proposé le transfert de votre lieu de travail, cette mutation s'opérant en dehors de votre secteur géographique, elle constituait une modification de votre contrat de travail. Conformément à l'article L. 1222-6 du code du travail, vous disposiez d'un délai de 1 (UN) mois à compter de la réception de la lettre pour nous faire connaitre votre position ; Par courrier en date du 10 avril 2009 vous avez refusé ce transfert ; Par courrier en date du 20 avril 2009 nous vous avons fait savoir que malgré toutes nos recherches nous n'avions pas de poste de reclassement de disponible correspondant à votre profil et niveau de compétence. En dépit de la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, nous sommes dans l'obligation de procéder à votre licenciement » ; que s'agissant de la lettre du 13 mars 2009 proposant à M. X...une modification de son contrat de travail, il ne saurait être retenu que l'absence d'envoi en recommandé avec avis de réception de ce courrier priverait nécessairement de cause réelle et sérieuse le licenciement notifié le 3 juin 2009, alors que la remise en main propre à M. X...d'une lettre lui proposant une mutation sur le site de VAUX LE PENIL en lui indiquant expressément qu'il disposait d'un délai d'un mois à compter de la réception de ce courrier pour faire connaître sa décision, répondait aux exigences de l'article L. 1222-6 du code du travail, en ce qu'elle permettait d'établir que M. X...avait eu connaissance de la proposition de modification et de ses conséquences, étant précisé au surplus que les motif de la proposition de modification de son contrat de travail étaient mentionnés ; que concernant les dispositions de l'article 8 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, il sera observé que l'augmentation de la durée du trajet pour se rendre sur son lieu de travail, soit 44 minutes au lieu de22 pour effectuer 53 km au lieu de 20, en région parisienne n'imposait nullement un changement de résidence de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions sus visées imposant un délai de réflexion de six semaines au lieu de quatre ; que pour contester le motif économique de son licenciement, M. X...soutient qu'il n'y avait aucune nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, que la réalité des difficultés à venir et leur impact sur l'emploi n'étaient pas établis et qu'il était possible d'investir sur le site de Torcy et d'étaler les travaux à effectuer, à supposer que la mise aux normes invoquée ait été obligatoire ; que toutefois, il résulte des explications fournies et des pièces versées aux débats qu'il était, aux termes de l'analyse circonstanciée faite par M. Y..., consultant du groupe ISEO et au surplus confirmée par les rapports de vérification de I'APAVE (installations électriques et équipements mécaniques) et par le courrier de l'inspection du travail du 26 février 2009, nécessaire d'effectuer d'importants travaux pour assurer la mise aux normes du site de Torcy, que les différentes études et devis concernant tant les locaux que la mise aux normes des machines existantes (devis d'adaptation de systèmes électriques CANOBBIO GROUPE du 19 décembre 2008 s'élevant à 250 000 ¿, devis d'implantation de la ligne complète NOVAVERTA du 10 mars 2009 s'élevant à 303 000 ¿, devis d'installation d'air comprimé et sanitaire TERMOTECHNICA SEBINA du 18 décembre 2008 s'élevant à 230 000 ¿, devis de modification des 19 équipements de production s'élevant à44 161 ¿ auxquelles s'ajoutent le renouvellement du processus de peinture évaluée à 700 000 ¿) confirment l'évaluation faite d'un coût de l'ensemble des travaux à l, 5 million d'euros, que la société LEVASSEUR SYSTEMES était locataire du site de Torcy, le loyer trimestriel s'élevant à 54 464 ¿ (hors taxe foncière) alors que la société ISEO était propriétaire du site de Vaux le Penil, pour en avoir fait l'acquisition le l3 décembre 2005 moyennant le prix de 900 000 ¿, que les situations comptables tant de la société LEVASSEUR SYSTEMES que de son unique actionnaire, la société ISEO rendaient difficile le financement d'investissements coûteux sur les locaux de TORCY dont le choix, au surplus pouvait apparaître contestable étant observé qu'ils auraient nécessairement entraîné l'interruption de l'activité de l'entreprise sur le site pendant la durée des travaux qu'au regard de ces éléments, les nouveaux dirigeants de la société LEVASSEUR SYSTEMES, qui avaient en leur qualité d'employeur le choix de la mise en oeuvre d'une réorganisation destinée à maintenir la compétitivité de l'entreprise, étaient légitimes en leur décision de supprimer toute activité sur le site de Torcy pour la transférer sur le site de Vaux le Penil, déjà exploité par la société ISEO et de regrouper sur le même site l'ensemble des activités ; que s'agissant de l'obligation de reclassement, la société ISEO verse aux débats la copie des courriers adressés en mars et avril 2009 aux sociétés FIAM SERRATURE, ISEO SERRATURE, CERRADURAS ISEO IBERICA ISEO DEUTSCHLAND, IMS, ainsi que les réponses apportées à ces demandes, établissant qu'il n'existait aucun poste disponible correspondant aux fonctions de M. X...dans les différentes sociétés du groupe ISEO ; que le jugement déféré ayant dit que le licenciement pour motif économique de M. X...avait une cause réelle et sérieuse sera confirmé » ;
- ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « M. X...n'apporte pas la preuve de ce qu'il pouvait prétendre à un poste dans un pays étranger en raison de la langue pratiquée dans le pays, quant à l'obligation de reclassement en France elle a été satisfaite par ISEO sachant que Monsieur X...a refusé un poste dans le même bassin d'emploi »
- ALORS, D'UNE PART, QUE lorsque la société qui procède aux licenciements économiques appartient à un groupe, tant les difficultés économiques que la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, doivent s'apprécier au niveau du secteur d'activité dudit groupe ; qu'en l'espèce, en se bornant à examiner la situation de l'entreprise au niveau des sites de TORCY et de VAUX LE PENIL pour justifier le licenciement économique de M. X..., sans aucunement se prononcer comme elle y était invitée (conclusions de M. X..., p. 13, al. 6 et s.) sur la situation du groupe ISEO auquel appartenait la société ISEO France, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;

- ALORS, D'AUTRE PART, QUE la proposition d'une modification de son contrat de travail, que le salarié peut refuser, ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement, qui doit être étendue à l'ensemble des postes disponibles de l'entreprise y compris à celui refusé par le salarié dans le cadre de la modification envisagée de son contrat de travail ; qu'en l'espèce en s'abstenant de vérifier comme elle y était invité (conclusions d'appel de M. X..., p. 15, al. 2) si le salarié s'était vu proposé à titre de reclassement le poste situé à VAUX LE PENIL qu'il avait initialement refusé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1222-6, L. 1233-3 et L. 1233-4 du Code du travail ;
- ALORS, ENFIN, QUE la méconnaissance par l'employeur de dispositions conventionnelles qui étendent le périmètre de reclassement et prévoient une procédure destinée à favoriser un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, avant tout licenciement, constitue un manquement à l'obligation de reclassement et prive celui-ci de cause réelle et sérieuse ; que dès lors en s'abstenant de vérifier en l'espèce si la société ISEO France avait, conformément à l'article 28 de l'accord national sur l'emploi signé dans le secteur de la métallurgie le 12 juin 1987, recherché les possibilités de reclassement en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte et des articles L. 2221-2 et L. 2231-1 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-18529
Date de la décision : 28/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 oct. 2014, pourvoi n°13-18529


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18529
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